Lettre CEMAT Au contact N°41 – Juillet 2018

Lettre CEMAT ”Au contact” N°41 – Juillet 2018

EDITO

Du 11 au 15 juin s’est tenu le salon Eurosatory, un événement international très important et un rendez-vous majeur de l’armée de Terre. Cette année, le salon était particulier, à plusieurs titres. D’abord parce qu’il s’est tenu dans un paysage nouveau. Après des élections présidentielle et législative, une Revue stratégique de défense et de sécurité nationale, nous sommes à l’aube d’une nouvelle loi de programmation militaire (LPM). Ensuite en raison du thème central choisi pour ce salon, l’innovation. Enfin parce qu’avec le délégué général pour l’armement, Joël Barre, et le président du GICAT, Stéphane Mayer, nous avions souhaité nous exprimer lors d’une conférence commune pour marquer notre volonté de réussir ensemble la transformation capacitaire de l’armée de Terre.

La LPM 2019-2025 privilégie l’accélération de la modernisation des équipements pour répondre sans retard à l’évolution de la menace. C’est une LPM qui nous fait entrer dans un nouveau champ technologique, avec des systèmes d’armes et d’information de pointe. Elle permet à l’armée de Terre de s’engager simultanément dans quatre directions : à « hauteur d’homme » pour mieux répondre aux attentes des soldats et de leurs familles, la réparation pour combler certaines lacunes comme nos canons d’artillerie très utilisés en opérations, la modernisation avec notamment le remplacement du segment blindé médian, et l’innovation, afin de permettre le développement rapide de toutes les bonnes idées qui émergent à tous les échelons, en particulier dans les unités.

Pour atteindre ces objectifs ambitieux, trois principes doivent nous guider. L’efficacité d’abord, car il s’agit pour l’armée de Terre de satisfaire de façon incrémentale et concrète ses besoins opérationnels, en priorisant et en tenant compte des réalités industrielles. L’agilité ensuite, tant dans l’expression du besoin militaire que dans la conception et la réalisation industrielle. L’ouverture enfin, car aucun d’entre nous ne peut réussir seul. Soldats, ingénieurs et entrepreneurs, nous devons travailler ensemble, et avancer du même pas. C’est le sens de mon slogan à Eurosatory : on part ensemble, on travaille ensemble, et on arrive ensemble !

Général d’armée Jean-Pierre Bosser

 

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Lettre CEMAT N°40 mai 2018

Lettre CEMAT N°40 mai 2018

EDITO

La spécificité militaire est un enjeu crucial de notre efficacité opérationnelle. Pourtant, cette notion si importante n’est pas toujours bien comprise, peut-être parce qu’à la faveur d’une longue période de paix en Europe, l’idée de la guerre comme la figure du soldat se sont un peu estompées dans notre horizon mental. Fondée sur la finalité première de l’armée, c’est-à-dire la défense de la Nation par les armes, de façon méthodique et organisée, elle consiste en une grammaire propre au monde militaire, différente parfois de la logique commune, et qui s’exprime dans différents champs.

C’est d’abord un état militaire spécifique, décrit dans le Code de la défense, qui fait du soldat un serviteur de l’Etat à part, soumis à un régime juridique distinct fondé sur des obligations et des sujétions exceptionnelles. Il n’y a là que la simple traduction d’un impératif absolu pour la Nation : celui de conserver la libre disposition de la force armée, sans préavis ni limite de durée.

C’est ensuite un modèle d’organisation et de fonctionnement propre à l’armée. Pour agir de façon autonome dans un contexte de crise grave, voire de chaos total, elle ne peut se comporter comme une entreprise ou même un service public. La rationalité managériale doit parfois céder le pas au commandement et au culte de la mission, et l’optimisation comptable s’effacer devant des impératifs de résilience.

C’est enfin une morale de l’action singulière. Car l’emploi de la force armée, qui peut causer la destruction et la mort, impose une véritable réflexion éthique. C’est pour cette raison que s’est développée depuis des siècles une réflexion philosophique et religieuse autour de la notion de guerre juste, qui vise tout simplement à permettre aux soldats de préserver au combat leur honneur et leur humanité.

La spécificité militaire n’est donc ni un repli identitaire, ni une menace pour la société, bien au contraire. C’est une force pour la France, et la condition indispensable pour assurer dans la durée le socle de ses capacités de défense.

Général d’armée Jean-Pierre Bosser

Lettre CEMAT N° 39 Janvier 2018

Lettre CEMAT N° 39 Janvier 2018

EDITO

L’engagement opérationnel constitue la finalité des forces armées. C’est la perspective du combat qui fonde les singularités militaires : d’abord une spécificité organique, qui vise à faire de l’armée une organisation uniforme, hiérarchique et diversifiée afin de pouvoir opérer de façon autonome dans un contexte chaotique ; ensuite une spécificité morale, qui tient à l’exigence ressentie profondément par le soldat, détenteur de la responsabilité d’infliger la destruction et la mort, d’encadrer ses actes par une éthique exigeante ; enfin un état militaire spécifique, régi par le statut général des militaires, un régime clairement distinct et différent des autres travailleurs.

L’engagement opérationnel de l’armée de Terre est intense et difficile. Intense, car nous faisons face à une conflictualité qui se déploie dans tous les domaines et sur tout le spectre des menaces : menaces hybrides, menaces conventionnelles, pour lesquelles on enregistre une reprise de l’activité dans le cadre de l’OTAN, menaces terroristes que l’on combat à la racine, et enfin menaces irrégulières. Cet engagement opérationnel est difficile, car il nécessite une préparation sans concession, et exige d’être prêt, en tant qu’armée et en tant que Nation, à payer le prix du sang.

En 2018, notre engagement opérationnel ne faiblira pas, et nous continuerons à adapter nos dispositifs pour faire face à des menaces évolutives, à l’extérieur et sur le territoire national. Au- delà des opérations, nous entrons dans une période lourde d’enjeux, faite à la fois de continuité et de transition. Nous avons en effet la responsabilité historique de préparer l’entrée dans la Loi de programmation militaire 2019-2025, en faisant preuve d’agilité, d’exigence et d’innovation. Après des années de décroissance et de déconstruction, elle inscrira dans la durée la remontée en puissance de l’armée de Terre. Construite autour des soldats et de leur environnement, elle devra permettre de les armer et de les protéger plus efficacement à travers une modernisation accélérée.

C’est donc avec une ambition sincère pour notre armée de Terre et pour chacun d’entre vous que je vous présente tous mes vœux pour 2018.

Général d’armée Jean-Pierre Bosser

Lettre CEMAT Au contact N° 39 Janvier 2018

Lettre CEMAT au contact n°38 (12 2017)

EDITO

La Revue stratégique de défense et de sécurité nationale a été remise le 13 octobre au Président de la République. Les travaux d’élaboration de la prochaine loi de programmation militaire, qui doit maintenant relier les moyens aux fins, sont en cours. L’innovation est au cœur de ces réflexions et de ces travaux. Mais de quoi s’agit-il ?…

Une innovation est une découverte mise au service d’une intention finalisée. En l’occurrence, l’innovation doit produire une augmentation de notre efficacité militaire, avec un impact et une portée significatifs.

Bien sûr, l’innovation repose souvent sur la technologie. A maintes reprises dans le passé, des équipements plus évolués et plus performants ont permis de démultiplier la vitesse et la puissance des opérations. Demain, la révolution numérique, l’intelligence artificielle, la mise en réseaux des systèmes, l’accroissement de la précision, de la portée et de la puissance des armes, les progrès dans le domaine de l’énergie ou des nouveaux matériaux conféreront à ceux qui maitrisent ces capacités un avantage décisif. Mais le perfectionnement et la puissance des armes ne s’affranchissent pas de la force d’organisation, du courage, et de la discipline des combattants.

Car l’innovation est d’abord une question humaine avant d’être technologique. Si la technologie peut créer les conditions du changement, celui-ci est également déterminé par des facteurs humains et organisationnels. L’innovation n’est ainsi ni le résultat de trajectoires technologiques prédéfinies, ni la conséquence de déterminations sociales. C’est un jeu incertain où éléments sociaux et techniques se mélangent et se définissent progressivement. L’innovation créée de nouvelles capacités, et combine le développement de nouvelles technologies avec celui de nouvelles tactiques, stratégies et structures militaires.

L’histoire militaire nous enseigne que l’art de la guerre est scandé de mutations. Ouverture, agilité, réactivité, créativité sont les maitres-mots pour se mettre en situation de les anticiper et de les intégrer. C’est en étant à l’avant-garde de l’innovation, sans jamais renoncer aux vertus militaires antiques qui font sa force, que l’armée de Terre demeurera demain au premier rang en Europe et dans le monde.

Général d’armée Jean-Pierre Bosser

Lettre CEMAT au contact n°38 12 2017