La Marine française appelle les flottes européennes à remplir les espaces laissés par les Etats-Unis

La Marine française appelle les flottes européennes à remplir les espaces laissés par les Etats-Unis

 

Meta Défense – publié le


La Marine française appelle les flottes européennes à remplir les espaces laissés par les Etats-Unis

 

Meta Défense – publié le


On le sait, les chantiers navals chinois lancent, chaque année, prés d’une dizaine de destroyers et frégates, ainsi que de nombreux autres navires y compris les plus imposants et modernes, destinés à venir grossir la flotte de l’Armée Populaire de Libération.

Pour y faire face, l’US Navy peut encore s’appuyer sur la masse et l’efficacité que lui confère sa flotte, ainsi que sur les moyens renouvelés de ses alliés régionaux comme l’Australie, le Japon ou la Corée du Sud.

Toutefois, dans les années à venir, et en dépit de l’augmentation de la production navale US, Washington va devoir concentrer toujours plus de ses moyens dans le Pacifique pour faire face à la montée en puissance de l’APL, réduisant de fait sa présence sur d’autres théâtres, non moins exposés.

C’est précisément pour anticiper ce basculement irrémédiable américain face à la Chine, que l‘Amiral Pierre Vandier, Chef d’état-major de la Marine Nationale, a appelé les Marines européennes à s’organiser pour venir combler les espaces libérés par l’US Navy, à l’occasion de la First Sea Lord’s Seapower Conference 2023 qui s’est tenue à Lancaster House les 16 et 17 Mai dernier.

 

Les marines européennes collaborent fréquemment lors de déploiements

Pour l’amiral français, il est non seulement indispensable que les marines européennes accroissent leur présence en Méditerranée comme dans l’Atlantique nord, leurs théâtres d’opération traditionnels, mais également dans le Golfe Persique et dans le nord de l’Océan indien, précisément pour permettre un désengagement de l’US Navy tout en maintenant une présence importante et dissuasive sur ces théâtres critiques pour l’approvisionnement des européens, notamment en hydrocarbures.

Au delà des déploiements eux-mêmes, l’amiral Vandier a également appelé à accroitre et renforcer l’interopérabilité des flottes européennes, tant au niveau technologique qu’opérationnel, de sorte qu’une flotte multinationale européenne puisse agir comme une flotte unifiée.

En améliorant cette interopérabilité et cette expérience commune, les déploiements européens seront dès lors bien plus efficaces et dissuasifs, en agissant comme une force navale unifiée de sorte à priver un adversaire potentiel d’une quelconque opportunité pouvant le convaincre de passer à l’action.

Reste que, si une telle coopération est évidemment souhaitable, elle sera, dans les faits, complexe à mettre en œuvre, tout au moins pour effectivement remplacer l’US Navy.

En effet, les Marines européennes sont avant tout conçues comme des flottes nationales, répondant à des impératifs de protection qui, s’ils prennent également en compte les besoins de l’OTAN, ne sont pas structurées pour la plupart pour les déploiements distants soutenus.


Si les marines européennes disposent de nombreux sous-marins, seuls la Royal Navy et la Marine Nationale alignent des sous-marins nucléaires d’attaque

Ainsi, si les flottes européennes alignent presque une centaine de frégates et destroyers, autant que l’US Navy, elles ne disposent que de 5 porte-aéronefs, dont seulement 3 véritables porte-avions, et moins d’une dizaine de grands navires amphibies, moins de la moitié de la dotation de l’US Navy.

En matière de sous-marins, la situation est encore plus problématique, puisque sur la cinquantaine de sous-marins d’attaque en service, seuls 11 navires, 6 Astute britanniques, 4 Rubis (en comptant la Perle) et 1 Suffren français, sont à propulsion nucléaire donc adaptés à des déploiements distants et à l’escorte de Groupe aéronaval.

Surtout, les flottes européennes manquent cruellement de grands navires logistiques, capables de soutenir une flotte à la mer sur la durée, même si un effort évident est fait dans ce domaine depuis quelques années.

Qui plus est, chaque classe de navire ayant été construite sur des considérations nationales, leur interopérabilité au delà du partage de renseignement et d’engagement, est souvent faible, que ce soit dans le domaine des munitions, des pièces détachées, du parc aérien ou encore de la coopération électronique, par exemple pour mettre en oeuvre des procédures de détection multi-statiques conjointes.

Enfin, et c’est probablement le problème le plus difficile à résoudre, les marines européennes ne répondent pas à un commandement unifié ayant pour fonction d’en organiser les missions et l’allocation des moyens, chaque mission devenant un patchwork de moyens libérés sur des fenêtres de temps différentes par les Marines de chaque état, en fonction de leurs propres impératifs.

On peut ainsi se rappeler l’échec flagrant des marines européennes quant il fut question de déployer des éléments navals dans le Golfe persique en juillet 2019, après que l’Iran ait tenté d’arraisonner un pétrolier britannique, le British Heritage.

Les Marines européennes manquent cruellement de grands navires logistiques pour soutenir des déploiements distants de longue durée

De fait, et comme l’a indiqué l’Amiral Vandier, les Européens doivent désormais s’organiser non seulement du point de vue opérationnel, mais organique et programmatique, s’ils entendent effectivement remplir les espaces qui seront laissés vaquant par l’US Navy dans les années à venir, y compris en s’engageant dans des programmes structurant permettant de déployer efficacement des forces navales sous commandement européen, au delà de leur périmètre opérationnel traditionnel.

On peut, à ce titre, se demander si le rôle des « grandes marines européennes », notamment britanniques et françaises, ne serait pas de renforcer leurs moyens exclusifs, sous-marins nucléaires d’attaque, porte-avions, grands navires amphibies et navires logistiques, plutôt que d’étendre leurs flottes de frégates et corvettes, laissant ces missions à des marines ne disposant pas de telles capacités ?

Prolonger le porte-avions Charles de Gaulle au-delà de 2038 coûterait au moins 1 milliard d’euros

Prolonger le porte-avions Charles de Gaulle au-delà de 2038 coûterait au moins 1 milliard d’euros

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Le dimanche 21 février 2021, le porte-avions Charles de Gaulle appareille de Toulon pour une mission opérationnelle nommée CLEMENCEAU 21. Cette mission doit durer jusqu’en juin prochain et doit conduire le groupe aéronaval en Méditerranée et dans l’océan Indien.

 

En tout cas, les parlementaires s’interrogent… Et deux solutions peuvent être envisagées : construire un second porte-avions de nouvelle génération [PANG] en profitant d’économies d’échelle ou prolonger le Charles de Gaulle au-delà de 2038.

Lors de l’examen du projet de Loi de programmation militaire [LPM] 2024-30 à l’Assemblée nationale, les députés ont adopté un amendement visant à demander une étude sur les coûts d’un éventuel second PANG.

Mais, s’il ne s’y est pas opposé, le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, estime que cette option n’est pas abordable financièrement. « Je me suis […] engagé, pour des effets d’opportunité, à ce que l’on fasse la transparence, par un rapport au Parlement, sur la faisabilité et le coût d’un deuxième porte-avions. […] Cela ne veut pas dire que l’on en veut un deuxième – je pense qu’on n’est pas capable de le payer pour être très clair – mais pour des raisons de transparence », a-t-il expliqué lors d’une audition au Sénat, où le projet de LPM 2024-30 sera discuté en séance publique à partir du 27 juin.

Quant à la seconde solution, elle a fait l’objet d’un amendement, adopté par la commission sénatoriale des Affaires étrangères et de la Défense. Celui-ci vise à demander au ministère des Armées de remettre au Parlement une étude sur la prolongation éventuelle du Charles de Gaulle dans les six mois après la promulgation de la LPM 2024-30. Or, un tel délai sera impossible à tenir, comme l’a rappelé Vincenzo Salvetti, le directeur des applications militaires [DAM] du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives [CEA].

« La vie d’un bâtiment à propulsion nucléaire est rythmée par ce que l’on appelle les arrêts techniques majeurs [ATM]. [Or], le prochain ATM du Charles de Gaulle débutera en avril 2027 et devrait durer entre 18 et 24 mois », a dit M. Salvetti. Et ce n’est qu’à cette occasion qu’il sera possible d’examiner le vieillissement de l’acier des cuves des deux réacteurs K-15 du porte-avions.

« On ne peut pas simuler, avec les connaissances que l’on a, le vieillissement de l’acier des cuves. Et donc, le juge de paix sera l’examen réalisé lors de cet arrêt technique majeur. Là, on pourra dire si on peut prolonger la durée de vie du porte-avions ou pas », a affirmé le directeur des applications militaires du CEA.

Cela étant, il a été possible, par le passé, de prolonger la durée de vie d’un navire à propulsion nucléaire. Le cas du sous-marin nucléaire d’attaque [SNA] Rubis en est un exemple. Devant être retiré du service en 2018, il fut décidé de le maintenir opérationnel pendant quatre années supplémentaires, en raison du retard pris par le programme Barracuda.

Cependant, ce qui a été possible pour un sous-marin ne l’est pas forcément pour un porte-avions étant donné que ses chaufferies nucléaires sont davantage sollicitées de par son emploi opérationnel. C’est d’ailleurs un point sur lequel M. Salvetti a insisté.

Reste que si l’état des cuves des deux réacteurs K-15 permet d’envisager une prolongation du porte-avions Charles de Gaulle, alors d’autres considérations devront entrer en ligne de compte. À commencer par la nécessité de changer leur cœur.

« Il faudra que l’on regarde comment on pourra fabriquer deux coeurs [de réacteur nucléaire] supplémentaires dans notre planning de production. On a un outil […], en particulier sur la propulsion nucléaire, qui est calé au juste besoin. C’est à dire qu’il nous faut, en gros, fabriquer un coeur par an. Donc, s’il faut en ajouter deux à un moment donné, il va falloir pousser autre chose. Mais, sinon, rien n’est impossible sur ce sujet », a expliqué M. Salvetti aux sénateurs.

La prolongation éventuelle du porte-avions Charles de Gaulle a visiblement été évoquée lors de l’audition, par la même commission, de l’amiral Pierre Vandier, le chef d’état-major de la Marine nationale [CEMM]. Le compte-rendu n’ayant pas encore été publié, on ne peut que s’en remettre à ce qu’en a rapporté Christian Cambon, son président.

« La question a été posée à l’amiral Vandier, qui a évoqué le coût de plus d’un milliard pour cette opération », a en effet dit M. Cambon. « Faudra peut-être réfléchir », a-t-il conclu.

Le Sénat demande une étude sur le maintien en service du porte-avions Charles de Gaulle au-delà de 2038

Le Sénat demande une étude sur le maintien en service du porte-avions Charles de Gaulle au-delà de 2038

 

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« Plusieurs des membres de la commission de la défense sont convaincus de l’utilité de cet outil de projection de puissance qu’est le porte-avions […]. Je suis pour ma part persuadé que, vers 2040, […] nous aurons besoin d’assurer la permanence à la mer. Il est important dès maintenant d’envisager les moyens et les études qu’il faudrait y consacrer afin de nous donner le choix avant 2028 », avait ainsi plaidé le député Jean-Charles Larsonneur.

Cependant, devant les sénateurs, M. Lecornu a laissé entendre qu’il avait donné satisfaction aux députés… parce qu’une telle étude ne mangeait pas de pain. « Je me suis […] engagé, pour des effets d’opportunité, à ce que l’on fasse la transparence, par un rapport au Parlement, sur la faisabilité et le coût d’un deuxième porte-avions. Je m’explique : cela ne veut pas dire que l’on en veut un deuxième – je pense qu’on n’est pas capable de le payer pour être très clair – mais pour des raisons de transparence », a-t-il dit.

Si un second PANG est hors de portée financièrement, peut-être qu’il serait possible de prolonger, certes pour un temps limité, le porte-avions Charles de Gaulle. Cette hypothèse avait d’ailleurs été avancée dans un rapport publié par le Sénat en juillet 2020… Et c’est donc tout naturellement que la commission sénatoriale des Affaires étrangères et de la Défense l’a remise sur la table au moment de se prononcer sur le projet de LPM 2024-30.

En effet, celle-ci a adopté l’amendement COM-225 qui, proposé par le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, demande au gouvernement « de remettre au Parlement, dans les six mois à compter de l’adoption de la loi, une étude sur le coût et la viabilité du maintien en service après 2040 du porte-avions Charles de Gaulle dans le bassin méditerranéen ».

Pourquoi seulement en Méditerranée? Parce que « le nombre de bâtiments de guerre russes et turcs [y] a considérablement crû en particulier à cause de la guerre en Ukraine et l’instabilité en Libye », alors que la France doit également défendre ses intérêts dans la région Indo-Pacifique.

Aussi, comme l’a expliqué le sénateur Gilbert Roger, lors de la séance du 14 juin, il serait souhaitable qu’un « rapport établisse si, vraiment, nous sommes ou non en capacité de garder le Charles de Gaulle » car « si nous abandonnons la Méditerranée pour nous positionner en Indo-Pacifique, les Turcs, les Russes ou les Chinois prendront la place ». En outre, mais le parlementaire ne l’a pas relevé, ce serait remettre la sécurité de la France aux mains des États-Unis… puisque ceux-ci déploient régulièrement un groupe aéronaval dans l’espace méditerranéen, comme actuellement avec l’USS Gerald Ford.

Cependant, cet amendement, qui n’engage à rien, devra sans doute être réécrit… Car le rapport qu’il demande ne pourra pas fournir les informations permettant de se faire une idée sur le maintien du Charles de Gaulle au-delà de 2038. En effet, on ne saura si une telle option est possible qu’après son troisième arrêt technique majeur [ATM], prévu en 2027-28. Et elle dépendra de l’état des réacteurs nucléaires du navire, dont la fin de vie est estimée vers « 2040, sans certitude à quelques années près », avait expliqué l’amiral Pierre Vandier, le chef d’état-major de la Marine nationale [CEMM] en juillet 2022. « Nous saurons en 2030/2031 la date définitive de la fin d’exploitation du Charles de Gaulle », avait-il ajouté.

La possible participation de la Belgique au Système de combat aérien du futur divise les industriels français

La possible participation de la Belgique au Système de combat aérien du futur divise les industriels français

 

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Ce projet, qui vise à développer un « système de systèmes » reposant sur un avion de combat de 6e génération, « doit nous permettre de renforcer le développement de l’industrie européenne, afin que nos trois pays restent dans le cercle restreint des concepteurs de systèmes aériens innovants », avait alors souligné le ministère français des Armées.

Mais un quatrième frappe déjà à la porte : la Belgique. En effet, dans un entretien accordé au quotidien « La Libre Belgique », la semaine passée, la ministre belge de la Défense, Ludivine Dedonder, a laissé entendre qu’une décision allait être bientôt prise lors d’un Conseil des ministres au sujet de l’aviation de combat du futur.

« L’avion de 6e génération est plus qu’un avion. C’est un ensemble de systèmes de combat interopérables, tels que des drones. On a une industrie en Belgique avec un savoir-faire qui peut être valorisé à ce niveau. Et le SCAF offre cette possibilité », a en effet déclaré Mme Dedonder. En tout cas, il laisse a priori espérer davantage d’opportunités pour Bruxelles que le Global Combat Air Programme [GCAP, ex-Tempest], le projet concurrent porté par le Royaume-Uni, en coopération avec l’Italie et le Japon.

Quoi qu’il en soit, selon la Libre Belgique, un consensus a été trouvé au sein du gouvernement belge pour rejoindre le SCAF. Et de souligner que la volonté de Bruxelles est de s’assurer un « maximum de retombées économiques, d’où cette montée précoce dans un des programmes phares » en matière d’aviation de combat du futur.

Et, déjà, l’industrie aéronautique belge se voit déjà à bord du SCAF. « La Belgique peut contribuer à cet avion du futur en alliant humilité, détermination et compétence », a ainsi fait valoir Stéphane Burton, le PDG du groupe Orizio, qui compte la Sabca et Sabena Engineering parmi ses filiales. Et il établit un parallèle avec l’achat de chasseurs-bombardiers F-16 dans les années 1970. Achat qui avait été qualifié, en son temps, de « contrat du siècle ».

« Le contrat d’achats des avions F-16 a eu un impact énorme sur le secteur pendant plusieurs dizaines d’années » et, avec le SCAF, « je pense qu’on peut arriver aux mêmes retombées économiques. […] En tout cas, c’est l’ambition que l’on doit avoir » pour la Belgique, a dit M. Burton, le 13 juin. En outre, celui-ci estime qu’une participation belge à ce programme ne doit pas tarder. « Si on devait y entrer plus tard, ce serait problématique » car « on arrive dans une phase importante, celle du démonstrateur », a-t-il soutenu.

Seulement, en 2018, alors ambassadrice de France en Belgique, Claude-France Arnould avait prévenu : si Bruxelles devait choisir le F-35 américain pour remplacer ses F-16 aux dépens d’un avion européen [Rafale ou Eurofighter], alors son éventuelle participation au programme SCAF serait compromise. Ce que le Premier ministre belge, qui était alors Charles Michel [désormais président du Conseil européen] n’avait pas apprécié…

Mais les réticences à une implication de la Belgique dans le SCAF viennent principalement de Dassault Aviation, maître d’oeuvre de l’avion de combat de nouvelle génération [NGF – New Generation Fighter], c’est à dire du pilier n°1 du programme.

« J’entends également parler d’une éventuelle participation de la Belgique. Dans ces conditions, je suggère de créer un club F-35 au sein du projet SCAF… », a ainsi ironisé Éric Trappier, le PDG de Dassault Aviation, lors d’une récente audition au Sénat.

« Je pense qu’il faut nous en tenir à ce sur quoi nous nous sommes engagés, ce qui n’est déjà pas facile. Nous devons réaliser la phase 1B à trois. J’espère que nous poursuivrons avec la phase 2, qui permettra de faire voler le futur avion, toujours à trois. Si on veut élargir la coopération, les discussions seront plus longues. Je rappelle que nous, Français, nous ne représentons plus qu’un tiers de ce projet. Je crains qu’aller plus loin ne se traduise par une perte de compétences utiles », a ensuite expliqué M. Trappier. Et d’ajouter : « Si on rouvrait trop vite la possibilité de nouvelles coopérations, pour donner du travail aux sociétés belges, je me battrais pour faire valoir mon point de vue, même si bien sûr l’État peut toujours imposer le sien ».

Cela étant, la perspective d’une implication belge dans le SCAF divise apparemment les industriels français… Car, ce 15 juin, le PDG de Safran, Olivier Andriès, a pris le contre-pied de M. Trappier en s’y disant favorable. « Sur le fond, il est totalement logique que la Belgique souhaite se joindre à un des grands programmes européens d’avions de combat du futur. Et évidemment, mon souhait, c’est que la Belgique se joigne plutôt au Scaf qu’au Tempest », a-t-il confié au quotidien « L’Écho ».

« Mais tout cela est avant tout une décision qui relève des États, pas des industriels. Il faut respecter cela. Et donc, s’il y a un choix souverain et totalement respectable de la Belgique de rejoindre le SCAF plutôt que le Tempest, je l’accueillerais très favorablement en tant qu’industriel français. Il appartiendra aux gouvernements français, allemand et espagnol de prendre acte de cette candidature. Et de prendre la décision d’accueillir – ou pas – la Belgique dans ce programme », a conclu M. Andriès.

La Marine nationale « recale sa navigation » avec une nouvelle mise à jour du plan stratégique « Mercator »

La Marine nationale « recale sa navigation » avec une nouvelle mise à jour du plan stratégique « Mercator »

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Ainsi, la cible de 15 navires de surface dit de premier rang restera inchangée, alors que trois de plus [au moins] n’auraient pas été de trop au regard de ses contrats opérationnels. En prime, la livraison de deux frégates de défense et d’intervention [FDI], sur les cinq attendues, sera décalée. Le système de lutte anti-mines futur [SLAM-F] sera quant à lui finalisé en 2035, et non plus en 2030. Comme d’ailleurs le programme des patrouilleurs océaniques [PO]. Et le quatrième Bâtiment ravitailleur de force [BRF] ne sera pas livré durant la période couverte par la LPM.

Quant à l’aéronautique navale, elle ne recevra pas de nouveaux Rafale Marine pour remplacer les plus anciens. « Un renouvellement partiel n’aurait pas été superflu. Le vieillissement du parc pourrait avoir un impact sur le format de la capacité dans la mesure où une partie des appareils seront immobilisés pour des rétrofits », ont ainsi prévenu les sénateurs Cédric Perrin et Hélène Conway-Mouret, rapporteurs sur le programme 146 « Équipements des forces ».

Aussi, la « transformation » de la Marine nationale ne se traduira donc pas par un format revu à la hausse… mais par des évolutions capacitaires, induites par les nouveaux équipements qui lui seront remis [SNA de la classe Suffren, patrouilleurs outre-Mer, etc.] et les champs de conflictualité qu’elle devra investir [fonds marins, cyber, etc.]. D’où la nouvelle mise à jour de son plan stratégique « MERCATOR » [la deuxième depuis 2018, ndlr].

« Notre quotidien est semé d’embûches et nos moyens sont comptés, c’est indéniable. Cela ne doit pas entamer notre détermination à adapter la Marine compte tenu des évolutions rapides, ni contraindre les initiatives qui cherchent à desserrer les freins du système », est-il expliqué dans ce document.

« Dans un contexte international marqué par l’incertitude et le retour de la guerre en Europe, la Marine lance en 2023 une nouvelle impulsion pour dynamiser ses chantiers de transformation », explique en effet le ministère des Armées. Et d’ajouter que « ce recalage de navigation doit lui permettre de gagner les combats d’aujourd’hui et de demain ». En clair, il s’agit d’éviter de faire fausse route et de faire éventuellement une correction de cap.

Or, en matière de ressources humaines, les décisions prises entre 2008 et 2014 ont mené la Marine nationale vers des récifs qu’elle tente désormais d’éviter.

« Les fortes réductions de recrutement entre 2008 et 2014 sont un héritage qui pèse lourd dans l’équation humaine de la Marine d’aujourd’hui. […] L’ensemble de [sa] chaîne RH déploie des trésors d’imagination et d’inventivité pour trouver des solutions et permettre aux unités d’être au rendez-vous de leurs missions. Les effets de ces réductions de recrutement passées se font ressentir, alors même que plusieurs défis nous attendent », est-il avancé dans Mercator 2023. À ce propos, il est rare que des politiques passées soient critiquées ainsi dans un document émanant des forces armées en général et de la Marine nationale en particulier.

Quoi qu’il en soit, celle-ci doit désormais recruter davantage pour augmenter ses effectifs et développer de nouvelles compétences pour agir dans les nouveaux champs de conflictualité, ce qui suppose des efforts en matière de formation et de revoir le profil de carrière de ses marins. Ce qui fera l’objet du plan « KaiRHos », qui doit « transformer la Marine en institution apprenante, capable de s’adapter en boucle courte, de prendre en compte plus rapidement les nouveaux besoins ».

« Bâtir la Marine de demain, impose de gagner la bataille des effectifs. Il s’agit à la fois de consentir un effort collectif dans le recrutement, chaque marin étant recruteur, mais également d’offrir des parcours professionnels repensés permettant de tirer le bénéfice des talents de chacun », est-il expliqué dans cette nouvelle édition du plan Mercator.

Outre « KaiRHos », qui sera le « moteur d’une Marine de talents », deux autres projets seront mis en oeuvre. Ainsi, Polaris vise à rendre plus réaliste et exigeante la préparation au combat naval de haute intensité, en prenant en compte les retours d’expérience [RETEX] des exercices majeurs, tels que Polaris 21 et Orion 23. L’accent sera mis sur « l’innovation tactique », via la démarche REGAIN [Renforcement du GAN par l’Innovation] et la réflexion doctrinale.

Parce qu’elle est un « facteur de supériorité opérationnelle », l’innovation technologique sera au cœur du projet « PERSEUS », qui visera à « intégrer plus vite les idées prometteuses qui deviendront les capacités déterminantes pour les combats futurs », en favorisant le rapprochement entre les industriels, la Direction générale de l’armement [DGA] et les unités de la Marine. Tel devrait être l’enjeu d’un « Dronathlon », qui, à l’image du défi CoHoMa de l’armée de Terre, invitera les spécialistes de la robotique et des drones à montrer leurs savoir-faire selon des scénarios représentatifs des missions de la « Royale ».

Plusieurs projets ont été évoqués dans Mercator 2023. Comme SEVRINE [Système d’évaluation de de valorisation du renseignement d’intérêt naval étendu], qui reposera sur une l’intelligence artificielle de type « Chat GPT » afin d’optimiser les capacités en opérations [prédiction de trajectoire, analyse de
tir ASTER, détection d’anomalies dans une situation tactique]. Ou encore comme ARES, qui permettra de poser les premiers jalons d’une capacité anti-satellite [éblouissement et/ou endommagement par laser] depuis des navires de surface.

Le ministère des Armées est en quête d’un « avion de transport école du futur » pour remplacer l’EMB-121 Xingu

Le ministère des Armées est en quête d’un « avion de transport école du futur » pour remplacer l’EMB-121 Xingu

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Pour le moment, la formation des pilotes de transport de l’AAE [ainsi que celle des pilotes d’avion de patrouille et de surveillance maritime de la Marine nationale] n’a pas encore connu de réforme de la même ampleur.

Pour les « aviateurs », celle-ci débute par une phase théorique et pratique dispensée par l’Escadron d’instruction au sol du personnel navigant [EISPN] et l’Escadron d’instruction en vol [EIV] 3/5 Comtat Venaissin du Centre de formation aéronautique militaire initiale [CFAMI] de la base aérienne 701 de Salon-de-Provence.

L’étape suivante se déroule à Cognac, sur avion école Grob 120, pendant un peu plus de quatre mois. C’est à l’issue de cette phase que, en fonction de ses aptitudes, l’élève pilote sera orienté vers la « chasse » ou le « transport ». Dans le premier cas, il poursuivra sa formation à Cognac. Dans le second, il rejoindra la base aérienne 702 de Bourges-Avord, où est implantée l’École de l’aviation de transport [EAT].

D’une durée d’environ quatorze mois, la formation à l’EAT prépare les futurs pilotes de transport à des examens communs avec l’aviation civile, dont la Licence pilote commercial [CPL – Commercial Pilot License] et la qualification de vol aux instruments [IR – Instruments Rating]. En fonction de leurs résultats et de leurs désidératas, ils connaîtront alors le type d’aéronef qu’ils auront entre les mains pour la suite de leur carrière [avion ravitailleur, E-3F Awacs, avion léger de surveillance et de renseignement, A400M, C-130, etc.] et entameront une phase dite de « différenciation ».

L’instruction des futurs pilotes de transport de l’AAE [et de l’Aéronautique navale] repose sur l’avion EMB-121 Xingu, en service depuis maintenant plus de 40 ans. Ces appareils avaient été acquis à l’époque à la suite d’une commande de Mirage IIIE passée par le Brésil.

Pouvant emporter jusqu’à six passagers et disposant d’une endurance d’environ cinq heures, l’Embraer EMB-121 Xingu, et au-delà de son ancienneté, n’est désormais pas le mieux adapté pour former de jeunes pilotes aux avions de transport modernes, comme l’A400M et le C-130J Hercules. Aussi, la question du remplacement, à l’horizon 2027, des 32 exemplaires encore en service [22 au sein de l’AAE et 10 sont utilisés par la Marine nationale] se pose, même si elle n’est pas évoquée par le projet de Loi de programmation militaire [LPM] 2024-30.

« Si, aujourd’hui, le Xingu est le visage même de la formation à l’aviation de transport, les réflexions quant à son remplacement sont déjà lancées. En effet, dans la continuité des programmes FOMEDEC et MENTOR relatifs à l’emploi du Pilatus PC-21 au sein de l’École de l’aviation de chasse, un projet d’avion de transport école du futur [ATEF] se dessine progressivement pour les années à venir », explique le dernier numéro d’Air Actualités.

Et d’ajouter : « L’opération ATEF visera notamment à améliorer la qualité de la formation des pilotes de transport, en répondant aux exigences inhérentes aux avions modernes. Cette nouvelle flotte devra représenter les aéronefs actuels, à l’image de l’A400M Atlas ou encore de l’A330 MRTT Phénix. Aussi, dans une logique de prospective, elle préparera les stagiaires au remplacement du C-130H pour l’AAE et de l’Atlantique 2 pour la Marine nationale ».

La Direction générale de l’armement [DGA] a déjà diffusé une demande d’informations dans le cadre du programme ATEF. Et au premier besoin évoqué par Air Actualités [adapter la formation aux avions de transport moderne, ndlr], deux autres sont exprimés dans ce document : réduire les temps de formations sur avions d’armes et augmenter la capacité des écoles de l’AAE afin de « satisfaire le flux de formation à la hausse ».

Parmi les spécifications techniques de l’ATEF, la DGA indique qu’il devra être bimoteur… sans plus de précision. Ce qui exlut d’emblée les Daher TBM-900 et Pilatus PC-12. Peut-être que le choix de ce futur appareil s’inspirera de celui fait par la Royal Air Force [RAF], laquelle forme ses pilotes de transport sur Embraer Phenom 100. Cependant, la demande d’informations n’exclut pas l’acquisition d’aéronefs « à énergie renouvelable [propulsion électrique, hybride, carburants synthétiques, biocarburants, etc.] » à la condition, évidemment, qu’ils répondent aux besoins exprimés.

Photo : Groumfy69 — Travail personnel, CC BY-SA 3.0

M. Lecornu doute de la possibilité de financer un second porte-avions de nouvelle génération

M. Lecornu doute de la possibilité de financer un second porte-avions de nouvelle génération

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« La majorité a été plus forte qu’en 2018 pour la précédente LPM », s’est félicité Thomas Gassilloud, le président la commission Défense. Ce résultat s’explique par le soutien des députés du Rassemblement national [pourtant critiques sur certains points du texte] et de ceux du groupe « Les Républicains ». Les élus socialistes se sont abstenus tandis que ceux de la France insoumise et du Parti communiste ont exprimé leur opposition.

Désormais, il appartient aux sénateurs de se saisir de ce texte tel qu’il a été modifié par les députés. Et, désormais, celui-ci prévoit des « études de coûts » devant permettre au gouvernement de « présenter au Parlement, en 2028, une estimation des crédits nécessaires à la réalisation d’un second porte-avions de nouvelle génération » [PANG], la construction du premier ayant été confirmée… non seulement pour des raisons opérationnelles et capacitaires.. mais aussi pour des impératifs industriels étant donné que ce programme doit « garantir la pérennité des compétences ‘propulsion nucléaire’, avec une attention particulière portée à la conception et à la fabrication des nouvelles chaufferies K22 ».

Si ces études peuvent être perçues comme ouvrant la voie à un second porte-avions, le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, n’a pas voulu donner de faux espoirs, lors d’une audition au Sénat, le 7 juin.

« Je me suis […] engagé, pour des effets d’opportunité, à ce que l’on fasse la transparence, par un rapport au Parlement, sur la faisabilité et le coût d’un deuxième porte-avions. Je m’explique : cela ne veut pas dire que l’on en veut un deuxième – je pense qu’on n’est pas capable de le payer pour être très clair – mais pour des raisons de transparence », a affirmé le ministre. « Plus on va avancer, plus on va être capable de définir les coûts du PANG » et donc d’évaluer « ce que coûterait un second » [porte-avions]. Ce n’est pas parce qu’on demande le prix qu’on sait se le payer. C’est le principe du devis », a-t-il poursuivi.

Pour le moment, le coût du PANG, aux dires de M. Lecornu, est estimé à environ 10 milliards d’euros. Mais « ce sont les travaux qui vont être menés dans les dix-huit mois qui viennent qui permettront d’affiner les sommes, qui, je l’espère, ne seront pas en hausse », a-t-il précisé.

Un mois plus tôt, devant la même commission, Emmanuel Chiva, le Délégué général pour l’armement [DGA], avait évoqué des discussions « avec les industriels afin de garantir la notification de l’avant-projet détaillé fin avril ainsi que la synchronisation des prochains jalons à la lumière du prochain arrêt technique majeur du porte-avions Charles-de-Gaulle, et de son calendrier de retrait de service ».

Cette notification aurait dû se faire en présence de M. Lecornu, à l’occasion d’une visite sur le site de Naval Group à Indret [Loire-Atlantique], le 26 avril dernier. Visite qui a finalement été annulée à la dernière minute…

Quoi qu’il en soit, M. Chiva avait aussi indiqué que la phase de réalisation du PANG allait être lancée « fin 2025-début 2026 » afin de « ne pas décaler » son « admission au service actif à l’horizon 2028 », car un « décalage aurait des effets capacitaires sur la formation des équipages et l’acquisition des savoir-faire ». Aussi, avait-il ajouté, « nous avons donc responsabilisé les industriels sur ce résultat et nous allons réaliser les paiements à réception des prestations, demandant un effort de trésorerie aux industriels, conforme aux règles des marchés publics ».

En attendant, les études relatives aux catapultes électromagnétiques [EMALS] et au dispositif d’arrêt qui leur est associé [AAG – Advanced Arresting Gear], confiées à General Atomics, se poursuivent.

En effet, dans un avis publié le 7 juin, le Pentagone a indiqué avoir notifié, au nom du gouvernement français, un nouveau contrat à General Atomic pour mener à bien une « étude de cas » ainsi que des travaux de « recherche et de développement » à l’appui de l’achat « potentiel » de systèmes EMALS et AAG par la France, évalué à 1,321 milliard de dollars en 2021.

Pour rappel, et à cette fin, un premier contrat, d’une valeur de 8 millions de dollars, avait été attribué à General Atomics en septembre dernier. « Le contrat se terminera en 2023 par une revue des systèmes et une évaluation des fournisseurs français pour la fabrication potentielle de composants en France », avait alors précisé l’industriel américain.

Le ministère des Armées a lancé des études sur un drone sous-marin océanique armé

Le ministère des Armées a lancé des études sur un drone sous-marin océanique armé

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Le projet de Loi de programmation militaire [LPM] 2024-30 prévoit d’investir 10 milliards d’euros [sur un montant global de 413 milliards, ndlr] au titre de l’innovation, l’enjeu étant de réussir des « sauts technologiques » tout en donnant aux armées les moyens devant leur permettre de maîtriser les nouveaux champs de conflictualité [espace, fonds marins, cyber, etc].

Via un amendement déposé le 17 mai, le gouvernement a précisé les axes d’effort prioritaires. Et, s’agissant de la Marine nationale, il est question, sans plus de détails, de mettre au point un démonstrateur de « drone sous-marin océanique »… Ce qui n’est pas surprenant puisqu’un tel projet avait été annoncé dans le Document de référence de l’orientation de l’innovation de défense [DROID] que l’Agence de l’Innovation de Défense [AID] avait publié en 2022.

Cela étant, et alors que le projet de LPM 2024-30 est toujours en cours d’examen au Parlement [le texte arrivera au Sénat dans les jours à venir], la Direction générale de l’armement [DGA] a déjà pris les devants.

En effet, lors du dernier point presse du ministère des Armées, Olivia Pénichou, la Déléguée à l’information et à la communication de la Défense [DICoD], a indiqué qu’un marché avait été notifié à Naval Group, le 4 mai, afin de préparer un programme appelé, pour le moment, UCUV [Unmanned Combat Underwater Vehicles].

« La DGA a notifié à la société Naval Group un marché destiné à étudier les cas d’usage principaux et l’architecture système d’un drone sous-marin de grande taille. Dénommé UCUV, ce drone armé aura pour principales caractéristiques une grande autonomie et une grande allonge », a en effet déclaré Mme Pénichou.

« Muni de capacités multimissions, notamment en matière de renseignement, de surveillance et de frappe, il interviendra dans la lutte sous la mer », a-t-elle ajouté.

Cette étude relative à cet UCUV doit permettre à la DGA et à la Marine nationale d’élaborer une feuille de route afin de préparer un futur programme d’armement.

S’agissant des capacités attendues, l’Agence de l’Innovation de Défense avait donné un indice dans l’édition 2022 du DROID puisqu’elle y avait évoqué un « démonstrateur de drone sous-marin océanique longue endurance pouvant être mis en œuvre et récupéré à partir d’un bâtiment de surface ».

Par ailleurs, Naval Group a déjà entamé des travaux dans ce domaine avec le DSMO [drone sous-marin océanique], dévoilé en octobre 2021. Développé sur fonds propres, avec l’appui de Thales pour les capteurs et celui de Delfox, spécialiste de l’intelligence artificielle, ce drone de dix mètres de long pour un déplacement d’une dizaine de tonnes est capable de naviguer à la vitesse de 15 noeuds, à 150 mètres de profondeur. Le tout avec une autonomie de « plusieurs semaines » grâce à une pile à combustible fonctionnant avec de l’hydrogène.

Selon l’industriel, grâce à ses capteurs, le DSMO pourrait agir comme « éclaireur » d’un groupe aéronaval ou être utilisé pour sécuriser la sortie des sous-marins nucléaires lanceurs d’engins [SNLE] de l’Île-Longue, son rayon d’action étant d’une centaine de nautiques depuis un navire-mère ou une base navale.

« On l’a conçu comme un système de renseignement », avait alors expliqué Cyril Lévy, le directeur des programmes de drones chez Naval Group, avant de préciser qu’il pourrait aussi emporter des munitions.

Photo : Naval Group / Minsitère des Armées

Avec SIGNAL, la Marine nationale se dote d’une stratégie de supériorité informationnelle pour la guerre navale

Avec SIGNAL, la Marine nationale se dote d’une stratégie de supériorité informationnelle pour la guerre navale

 

https://www.opex360.com/2023/06/02/avec-signal-la-marine-nationale-se-dote-dune-strategie-de-superiorite-informationnelle-pour-la-guerre-navale/


 

« Il y a trois ou quatre ans, avec l’arrivée des premiers bateaux numériques, nous avons eu l’intuition que la donnée en mer deviendrait un sujet majeur. Le Centre de services de la donnée Marine [CSD-M] s’est développé à la manière d’une start-up : nous travaillons avec des industriels, nous collectons les données des systèmes de combat, nous avons nos premiers data lakes et nous produisons des cas d’usage », a par ailleurs expliqué l’amiral Vandier aux députés.

Dans le même temps, la généralisation des technologies liées au numérique fait de l’espace informationnel un champ de conflictualité et de manœuvre à part entière. « Ce bouleversement technologique s’est traduit par un accroissement de la place des systèmes numériques pour l’appréciation de l’espace maritime, comme pour la conduite des opérations », résume la Marine nationale. En outre, si la supériorité technologie est une condition nécessaire pour espérer faire la différence au combat, elle peut ne pas être suffisante.

« La relation entre tactique navale et technologie est aussi cruciale qu’elle est précaire et instable : la technologie ne peut pas se départir de la tactique sans laquelle elle erre sans but, tandis que la tactique doit s’alimenter en permanence aux sources de la technique, au risque de devenir sclérosée. Il en résulte une relation d’interdépendance mutuelle, que le tacticien a tout intérêt d’équilibrer », expliquent le capitaine de vaisseau Thibault Lavernhe et le capitaine de frégate François-Olivier Corman, dans leur livre « Vaincre en mer au XXIe siècle« .

D’où la stratégie de Supériorité Informationnelle pour la Guerre Navale [SIGNAL] que vient de dévoiler la Marine nationale, à Toulon.

« Dans le combat naval, l’avance technologique ne se traduit pas mécaniquement par un avantage tactique décisif. La profusion d’informations induit également des risques spécifiques pour les unités opérationnelles ou les structures de commandement. Ainsi pour intégrer efficacement les disruptions du numérique […], il convient de les équilibrer avec les besoins de résilience, d’autonomie et d’évolutivité propres aux plateformes navales », fait valoir la Marine nationale.

Cependant, celle-ci n’est pas entrée dans les détails de cette « stratégie de supériorité informationnelle », si ce n’est qu’elle se décline selon six axes.

Ainsi, le premier vise à « diversifier les sources de captation de données », en s’appuyant sur les possibilités offertes par le New Space [le secteur spatial privé, ndlr]. Ensuite, il s’agira d’augmenter les « capacités de connectivité, sans renoncer à leur résilience » tout en optimisant la fusion des « informations tactiques en temps réel » [ce qui fait penser à la « liaison des armes sur mer » de l’amiral Raoul Castex].

Et cela va de pair avec la valorisation des données embarquées afin de « renforcer la compréhension des situations et l’aide à la décision » ainsi qu’avec une circulation de l’information à la fois plus rapide et plus fluide en matière de commandement et de contrôle [C2]. Enfin, il est question d’ouvrir de « nouvelles capacités tactiques dans les domaines de lutte ».

Ce dernier point est crucial car, comme le soulignent le capitaine de vaisseau Thibault Lavernhe et le capitaine de frégate François-Olivier Corman, le « rôle du tacticien ne s’arrête pas à connaître ses armes et à chercher à les améliorer sans cesse, mais consiste aussi et surtout à rechercher la cohérence entre les tactiques qu’il compte mettre en œuvre et les équipements dont il dispose ou ceux dont il s’apprête à disposer ».

LPM 2024-30 : La Marine nationale devrait disposer de quatre nouveaux navires légers de projection de forces

LPM 2024-30 : La Marine nationale devrait disposer de quatre nouveaux navires légers de projection de forces

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Certes, ces navires ont depuis été remplacés par quatre Bâtiments de soutien et d’assistance outre-mer [BSAOM], dotés de nouvelles fonctionnalités [remorquage, grue de levage, etc]. Mais ceux-ci permettent pas d’effectuer les mêmes missions que les BATRAL, lesquels avaient la capacité de transporter jusqu’à 12 véhicules et 130 hommes, ce qui était fort utile en cas, par exemple, de catastrophe naturelle pour acheminer de l’aide humanitaire.

Un rapport du Sénat, publié en 2022, s’en était justement inquiété. Le retrait des BATRAL « constitue une rupture de capacité qui ne dit pas son nom, la disparition d’une capacité amphibie basique et immédiatement disponible intra-théâtre outre-mer posant de nombreux problèmes logistiques. Le rétablissement de ces capacités amphibies est aujourd’hui primordial », avaient soutenu ses auteurs.

Seulement, le projet de Loi de programmation militaire [LPM] 2024-30 n’évoque pas ce sujet… Du moins était-ce encore le cas jusqu’au 26 mai. En effet, lors de son examen en séance par les députés, quatre amendements [n°1516, n°1704, n°1705 et n°1706] visant à lancer un programme de navire amphibie léger ont été soutenus respectivement par Jean-Louis Thiériot [LR], Yannick Chenevard [Renaissance], Jean-Charles Larsonneur [Horizon] et Fabien Lainé [Modem].

Il s’agit de « doter notre marine, dans ses fonctions outre-mer, de bâtiments de transport léger susceptibles […] d’intervenir en débarquement sur des plages dépourvues d’infrastructures portuaires importantes. Cette capacité n’existe plus. Nous proposons le lancement d’un programme qui nous permettrait de disposer à terme d’un Batral par aire d’outre-mer : un aux Antilles, un dans l’océan Indien – qui pourra intervenir à Mayotte […] – et deux dans le Pacifique, en Polynésie et en Nouvelle-Calédonie », a expliqué M. Thiériot.

Et de souligner que de tels navires auront une « fonction militaire dissuasive » en permettant le débarquement d’une compagnie de combat, ce qui pourrait être utile si un « problème survenait demain aux îles Éparses, sur les îlots Matthew et Hunter ou dans d’autres territoires qui pourraient être contestés », et ils seront aussi « en mesure de remplir des missions civilo-militaires, puisqu’ils [seront]parfaitement adaptés à des crises naturelles ou climatiques ».

Cela étant, lors d’une audition à l’Assemblée nationale dans le cadre du projet de LPM 2024-30, le chef d’état-major de la Marine nationale [CEMM], l’amiral Pierre Vandier, avait évoqué une réflexion « assez approfondie » avec le général Thierry Burkhard, le chef d’état-major des armées [CEMA] au sujet d’un successeur au BATRAL.

« Les bâtiments susceptibles de faire de l’amphibie léger, c’est-à-dire d’apporter sur une île des capacités légères, du soutien et de l’assistance, ont un coût de l’ordre de 15 à 20 millions. La notion de signalement stratégique par prépositionnement dans les outre-mer est importante et elle passe par le fait de montrer régulièrement des unités militaires dans ces zones parfois très isolées », avait en effet expliqué l’amiral Vandier, précisant que la question restait encore « ouverte ».

Quoi qu’il en soit, lors des débats, le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, s’est dit favorable à l’adoption de ces amendements. Et la réflexion sur ce sujet est déjà assez avancée, à en juger par son propos.

« Ce programme est intéressant. Les BATRAL de demain ne seront pas les BATRAL d’hier, tant du point de vue du format que de celui du prix, puisqu’ils seront plus lourds », a en effet répondu M. Lecornu. Cependant, il a précisé qu’il s’agirait de mener des « études de faisabilité » car la « la décision de mise en production ou d’acquisition, le cas échéant, se prendra ultérieurement ».

Cependant, des solutions existent déjà… Comme le « navire de projection autonome » LCAT [photo], dévoilé en 2016 par le groupe CNIM, celui-ci l’ayant développé jsutement pour les opérations amphibies et humanitaires, ainsi que pour les missions relevant de l’action de l’État en mer. Le rapport du Sénat avait suggéré de s’inspirer de la force maritime d’autodéfense japonaise, laquelle utilise des hydroglisseurs de type LCAC.

Photo : CNIM