Tramontane, scénario de lancement d’ORION 26 sous un vent de guerre froide
Ressusciter un exercice de mobilisation datant de la guerre froide, c’est l’un des premiers éléments de scénario évoqués pour la prochaine édition de l’exercice d’hypothèse d’engagement majeur ORION programmée en 2026.
Tramontane, point de départ d’ORION 26 ?
Premier jalon d’une dynamique initiée l’an dernier, ORION « sera renouvelé en 2026 et nous travaillons d’ores et déjà à sa préparation, afin de calibrer au mieux nos ambitions », confirmait le chef d’état-major de l’armée de Terre, le général Pierre Schill, en octobre dernier. L’encre des premiers enseignements n’est pas encore sèche que, déjà, quelques hypothèse surgissent dans les rangs de l’armée de Terre pour la suite. Hormis une inscription dans le cadre des exercices de l’OTAN, ORION 26 pourrait débuter par un exercice Tramontane, annonce un récent rapport parlementaire citant des sources militaires.
L’objet de ces manoeuvres réalisées durant la guerre froide et nommées d’après ce vent soudain, sec et frais venant du nord-ouest ? « Vérifier l’aptitude des unités à s’engager rapidement en faisant le point de visu de leurs personnels, matériels, et stocks », indique le député François Cormier-Bouligeon (Renaissance) dans un rapport budgétaire consacré à la préparation et à l’emploi des forces terrestres. Une « mobilisation » autant qu’une revue des détails reprenant le modèle de préparation de l’unité désignée pour armer l’échelon national d’urgence (ENU) mais cette fois porté à l’ensemble de la force terrestre.
Quelques-uns de ces exercices ont été documentés, à l’instar de celui conduit en mars 1983 par un 1er régiment étranger de cavalerie (1er REC) doté d’AMX 10RC alors flambants neufs. Quarante ans plus tard, l’engin blindé s’efface au profit du Jaguar mais les analogies entre contextes stratégiques de l’époque et d’aujourd’hui supposent sans doute de retourner vers de vieilles méthodes pour s’assurer de mettre une unité – comme l’estimait le 1er REC – « à l’abri d’un coup de vent pour longtemps ».
L’enjeu de la montée en puissance
Ce scénario d’un retour de l’exercice Tramontane va de pair avec la question de la réactivité des forces en cas d’engagement majeur, elle-même liée au processus dit de « montée en puissance de l’armée de Terre » (MEPAT). Conduite une première fois en février 2022 pour déployer la mission Aigle en Roumanie, la MEPAT a ensuite été jouée lors de la troisième phase dite « civilo-militaire » d’ORION avec pour enjeu de généraliser les conclusions des RETEX issus de cette projection en urgence et d’y intégrer une réserve synonyme d’épaisseur.
« Plusieurs points d’attention ont été tirés de cet exercice, tant concernant la réactivité des forces terrestres, que s’agissant de leur capacité à tenir l’effort dans la durée », relève le député Renaissance, qui aura notamment auditionné le général de corps d’armée (2S) Thierry Corbet, responsable du RETEX ORION au sein de l’état-major de l’armée de Terre. Exercice de niveau divisionnaire, ORION 23 aura ainsi démontré la complexité de générer un volume de forces important en peu de temps en raison de la dissémination des équipements, munitions et autres ressources.
Ce défi n’est pas sans rappeler l’expérience vécue par le 27e bataillon de chasseurs alpins (27e BCA) à la veille de son envoi en territoire roumain. « N’étant pas d’alerte, le régiment a eu besoin du renfort de 80 organismes pour constituer un bataillon prêt à être projeté », rappelle le parlementaire. Un écueil qui, si il peut être surmonté à cet échelle, « pourrait constituer un véritable frein à la mobilisation rapide d’un volume plus important de forces », complète-t-il. La transformation SCORPION apporterait dans ce sens un début de réponse, de part une dotation régimentaire en véhicules de nouvelle génération plus importante qu’auparavant.
« De la même manière, les difficultés précitées relatives à la mobilisation des réservistes devront être surmontées », relève François Cormier-Bouligeon. Cet autre challenge intervient sur fond de transformation profonde du modèle pour parvenir à 48 000 réservistes à horizon 2030 pour la seule armée de Terre. D’ici au prochain exercice ORION, celle-ci projette d’avoir mis sur pied « 6+6 » bataillons de réserve de brigade et préfiguré une réserve territoriale. Un réservoir qui, s’il prend effectivement corps, permettrait de rehausser le niveau d’ambition et de mobiliser un volume supérieur à celui engagé, par exemple, lors de la phase 4 d’ORION. Soit environ 8% de la force ou près de 1000 combattants. Passée la question du recrutement, resteront cependant celles des conditions et du rythme de mobilisation des ressources humaines et matérielles, autant de chantiers dans lesquels avancer d’ici à 2026.