Transport militaire : mise en cause, l’armée répond pour la première fois

Transport militaire : mise en cause, l’armée répond pour la première fois

Par Nathalie Guibert Le Monde | 13.03.2018

lemonde.fr/politique/article/2018/03/13/transport-militaire-l-armee-repond-pour-la-premiere-fois_5270339_823448.html

Depuis plus d’un an, l’état-major fait l’objet d’accusations d’irrégularité sur ses marchés d’affrètement aérien pour les opérations extérieures.

Aéroport de Bamako, le 26/04/2013. Désengagement de quatre Puma du Groupe aéro mobile de Gao, par Antonov 124.

L’état-major des armées a répondu pour la première fois, samedi 10 mars, aux accusations d’irrégularités dont il fait l’objet depuis plus d’un an sur ses marchés d’affrètement aérien des opérations extérieures. Sa réponse s’adresse à un article de l’émission « Secrets d’info » de France Inter, publié samedi, qui a utilisé des documents anonymes mettant en cause nommément plusieurs officiers du centre des soutiens des opérations.

Avant cette publication, la ministre des armées, Florence Parly, avait brièvement répondu lors de son passage à l’antenne, le 9 février, que la société prestataire mise en cause depuis plusieurs mois, ICS, n’était plus titulaire du marché des avions gros-porteurs concernés. Faute de posséder des appareils, l’armée française loue à prix d’or des avions-cargos Antonov ou Illiouchine, ukrainiens et russes pour l’essentiel.

Sollicité par Le Monde à plusieurs reprises sur ce dossier, pour lequel nous avions révélé en octobre 2017 l’ouverture d’une enquête du Parquet national financier, suivie de perquisitions, le ministère avait jusque-là gardé le silence. Les investigations portent notamment sur des faits de favoritisme. Depuis 2016, la Cour des comptes, la commission des finances de l’Assemblée nationale, puis le contrôle général des armées, ont produit des rapports sur le sujet.

 « La société ICS n’est plus en contrat avec les armées à titre exclusif, le marché d’affrètement d’avions-cargos n’ayant pas été reconduit [en novembre 2017] », écrit le porte-parole de l’état-major, le colonel Patrick Steiger. Mais, précise-t-il, elle est toujours dans la liste des prestataires de la défense pour l’affrètement aérien et maritime en urgence. Le colonel indique : « Il appartient à la justice d’enquêter et de juger, c’est pourquoi la ministre a décidé d’enclencher une procédure au titre de l’article 40 du code de procédure pénale. »

« Critiques non consolidées »

L’ancien ministre de la défense, Jean-Yves Le Drian, a lui aussi répondu, par mail, à France Inter. « Le sujet a été instruit par mon cabinet et mes services bien avant la publication des rapports », affirme-t-il en évoquant des « alertes » émanant de « prestataires divers ». Selon lui, « vingt-trois marchés de transport stratégique ont été passés et exécutés sans difficultés ni irrégularités. Un seul marché, pointé du doigt par [le député] François Cornut-Gentille fait l’objet de critiques non consolidées ».

L’élu Les Républicains a réagi par une lettre adressée mardi 13 mars à M. Le Drian, en s’étonnant que le ministre ne l’ait pas informé des travaux ainsi menés en interne au moment où il réalisait son contrôle parlementaire. « Je note que le contrôle général des armées n’a été saisi qu’à l’automne 2017 par votre successeur », ajoute-t-il.