C’est le come-back le plus fou de l’histoire de l’aviation pour ce modèle d’avion français iconique que tout le monde avait enterré un peu vite

C’est le come-back le plus fou de l’histoire de l’aviation pour ce modèle d’avion français iconique que tout le monde avait enterré un peu vite


C'est le come-back le plus fou de l'histoire de l'aviation pour ce modèle d'avion français iconique que tout le monde avait enterré un peu vite
C’est le come-back le plus fou de l’histoire de l’aviation pour ce modèle d’avion français iconique que tout le monde avait enterré un peu vite

 

Les Airbus A380 reprennent leur envol après quatre ans d’hibernation.

C’est un des modèles les plus iconiques de l’histoire de l’aviation et le 13 septembre 2024 a marqué un petit « chamboulement » dans l’aéronautique avec le retour inattendu de deux Airbus A380, qui avaient été mis en sommeil pendant quatre ans dans un cimetière d’avions en Espagne. Ces géants des cieux, laissés pour obsolètes, retrouvent le ciel et réaffirment leur place dans l’aviation commerciale.

A380 : Le réveil des géants à Teruel

L’aéroport de Teruel, connu pour sa maintenance et son recyclage d’avions, a été le théâtre d’un événement remarquable ce vendredi 13 septembre 2024. Deux Airbus A380, appartenant à Lufthansa et Etihad Airways, ont quitté simultanément ce site après une pause de quatre années. Le premier, immatriculé A6-APE et appartenant à Etihad, a pris son envol vers Abu Dhabi, tandis que son homologue de Lufthansa, immatriculé D-AIMA, a pris la direction de Francfort.

De la remise en service à la modernisation

Ces deux avions ne se contentent pas de reprendre les airs ; ils subissent également des opérations de maintenance ou de modernisation pour répondre aux exigences actuelles. Par exemple, l’A380 de Lufthansa s’est dirigé vers Manille deux jours après son départ d’Espagne pour des travaux spécifiques, signe que le retour n’est pas seulement opérationnel mais aussi stratégique.

L’A380 plébiscité des passagers et des équipages

« Les passagers et les équipages l’adorent », a souligné Carsten Spohr, PDG de la Lufthansa, sur CNBC, révélant l’affection profonde et continue pour ce modèle. L’A380 reste prisé pour son confort et sa capacité, des traits qui continuent de séduire malgré un contexte économique et écologique changeant.

L'A380 est encore aujourd'hui l'avion de tous les records : Longueur 73m, Envergure 79,8m, Hauteur 24,1m.
L’A380 est encore aujourd’hui l’avion de tous les records : Longueur 73m, Envergure 79,8m, Hauteur 24,1m.

Investissements et plans futurs

Emirates, par exemple, investit environ 2 milliards de dollars dans la rénovation de 120 appareils, dont 67 Airbus A380. Ce programme de remise à neuf illustre l’engagement des compagnies aériennes à maintenir en service ce modèle emblématique, malgré l’arrêt de sa production annoncé en 2019.

La persévérance du « paquebot des airs »

L’Airbus A380 était destiné à une retraite anticipée après la décision d’Airbus d’arrêter sa production. Cependant, la demande persistante et le besoin de capacité élevée sur des routes très fréquentées permettent à cet avion de continuer à voler. Aujourd’hui, dix compagnies aériennes utilisent l’A380 pour leurs routes les plus longues, montrant que l’appétit pour ce gros-porteur n’a pas diminué.

Une longévité surprenante

Avec une histoire qui pourrait se prolonger de deux décennies supplémentaires, selon un responsable d’Airbus, le A380 pourrait continuer à façonner l’avenir du transport aérien. Sa capacité à évoluer et à s’adapter aux nouvelles normes pourrait lui permettre de rester un acteur majeur dans les cieux du monde entier.

Cet article explore la reprise inattendue du service des Airbus A380, soulignant la fidélité des compagnies aériennes et des passagers pour ce modèle. Malgré des défis économiques et environnementaux, l’A380 continue de voler haut, promettant de rester un pilier de l’aviation commerciale pour les années à venir.

Source : Lufthansa

Pour la première fois, le “pôle Nord d’inaccessibilité” est atteint par un paquebot d’une compagnie de croisière française

Pour la première fois, le “pôle Nord d’inaccessibilité” est atteint par un paquebot d’une compagnie de croisière française

par Louise Guyonnet – Science et Vie – publié le 23 septembre 2024

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Ponant, une compagnie de croisière française, a annoncé le 18 septembre que son paquebot brise-glace baptisé “Commandant Charcot” avait atteint le pôle Nord d’inaccessibilité.

Il devient par conséquent le premier bateau à accéder à cet endroit de l’Arctique, connu comme étant le plus éloigné de toutes terres. 

20 scientifiques faisaient partie de l’expédition 

C’était dans le cadre d’une expédition arctique entre “Nome, en Alaska et Longyearbyen, au Spitzberg” (comme le relaie Mer et Marine), que des passagers et 20 scientifiques internationaux ont embarqué sur le paquebot. Le but des scientifiques était, lors de cette expédition, d’étudier cette zone de l’Arctique particulièrement méconnue. 

Atteindre le pôle Nord d’inaccessibilité est un moment d’une rare intensité. C’est avant tout une aventure collective, rendue possible grâce à la passion et au savoir-faire de PONANT”, s’est exprimé le commandant Étienne Garcia qui était à la barre lors de cette expédition. 

Le Commandant Charcot, conçu pour ce type de périple en Arctique   

Navire de haute exploration polaire, le Commandant Charcot est spécifiquement conçu pour ce genre d’aventures. D’abord, il est construit avec une coque spéciale, une coque polaire PC2 qui  “lui permet de naviguer dans les régions polaires tout en tout en minimisant son impact environnemental grâce à sa propulsion hybride électrique alimentée par du gaz naturel liquéfié (GNL)”, selon le communiqué. 

De plus, le Commandant Charcot mesure 149.9 mètres de long pour 28.3 mètres de large. Il est composé d’assez de cabines pour accueillir 245 passagers. En comptant les scientifiques et les autres membres de l’équipage, la capacité totale d’accueil est de 460 personnes. 

Les pôles d’inaccessibilité 

D’après l’encyclopédie de Techno Science, un pôle d’inaccessibilité est “un endroit éloigné au maximum d’un ensemble de caractéristiques géographiques”. Par conséquent, on peut citer trois pôles d’inaccessibilité : le pôle Sud, le pôle maritime (le célèbre point Némo) et le pôle Nord d’inaccessibilité, qui a été récemment atteint par le Commandant Charcot. 

 

crédit photo : Ponant Le pôle Nord d’inaccessibilité (84°03′N 174°51′W / 84.05, -174.85) est situé à 1 453 km de Barrow en Alaska et à 661 km du pôle Nord. Les terres émergées les plus proches sont distantes de 1094 km. Il s’agit de l’Île d’Ellesmere et de l’archipel François-Joseph.

 La première fois que ce point a été survolé par un avion c’était en 1927 par Hubert Wilkins. Certains navigateurs et explorateurs ont revendiqué l’avoir atteint, sans toutefois avoir pu le prouver. D’après le communiqué de Ponant, le commandant Charcot est par conséquent le premier paquebot à l’atteindre. “Ce moment historique a été célébré à bord avec l’ensemble de l’équipage, des scientifiques et des passagers”.

À propos de l’auteur

Diplômée d’une double licence Lettres-Histoire (Université d’Angers) et d’un master de journalisme (CY Université, Gennevilliers)

Comment les pompiers se préparent aux risques biologiques atypiques

Comment les pompiers se préparent aux risques biologiques atypiques

par Morgan Meyer, Mines Paris – PSLRevue Conflits – publié le 12 septembre 2024


Un colis contenant une poudre suspecte, une personne soupçonnée d’avoir la maladie d’Ebola, un attentat biologique… Les sapeurs-pompiers doivent être préparés à de tels risques biologiques atypiques.

Mais contrairement aux risques biologiques courants, comme la grippe saisonnière (qui peut être dangereuse, mais pour laquelle des vaccins et des traitements existent), les risques biologiques atypiques sont rares. Comment, alors, se préparer à de tels risques – qu’ils soient naturels, volontaires ou accidentels ?

Se former aux risques nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques

Se préparer et s’entraîner pour faire face à un acte de bioterrorisme ou à un cas d’Ebola ne va pas de soi. Au niveau gouvernemental, le plan Biotox, qui fait partie du plan Vigipirate, définit les actions à mener dans le cas d’une suspicion ou d’un acte de bioterrorisme (mesures sanitaires, prévention, surveillance, alerte, etc.).

Pour se préparer concrètement au risque biologique, les pompiers peuvent se former aux risques « NRBC » (les risques nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques). Toutefois, le risque biologique est actuellement défini comme une sous-catégorie du risque chimique dans ces formations. « Le risque biologique […] ne fait pas l’objet de formations dédiées » explique un groupe de pompiers dans un article récent.

Dans cette publication, les pompiers estiment que malgré leurs formations, il y a toujours un « manque de connaissances […] corrélé à la difficulté de perception du risque et à l’absence de doctrines ». Ceci rend difficile l’identification d’un risque biologique.

Un projet franco-allemand incluant scientifiques et pompiers

Comment peut-on détecter la présence d’un virus ou d’une bactérie ? Comment décontaminer des surfaces potentiellement contaminées par ces derniers ? Comment rendre opérationnels sur le terrain les gestes et procédures à suivre pour faire face au risque biologique ?

Ces questions sont au cœur d’un vaste projet franco-allemand intitulé Mesures de décontamination visant à restaurer les installations et l’environnement après une libération naturelle ou volontaire de microorganismes pathogènes. Le projet ne rassemble pas seulement des scientifiques de différentes disciplines, comme des biologistes et des sociologues, mais aussi, et surtout, il intègre les primo-intervenants : les sapeurs-pompiers.

Le scénario d’un cas d’Ebola en juillet 2024, durant les JO…

Pour se préparer aux risques biologiques, les pompiers peuvent mobiliser un allié utile : les scénarios. Dans le cadre du projet mentionné, j’ai pu suivre la genèse d’un tel scénario et pu l’observer en action. Le script du scénario est le suivant :

On est à l’été 2024, les Jeux olympiques ont lieu et il y a un pic d’Ebola dans certains pays. Comme le risque d’attentats est important et que les feux de forêts sont plus fréquents en été, les pompiers français sont épaulés par leurs collègues allemands.

Le 31 juillet 2024, l’aéroport de Marseille alerte les pompiers, car le passager d’un vol Paris-Marseille présente des symptômes sévères de fièvre hémorragique. On suppose qu’il a contracté la maladie d’Ebola. S’en suit toute une chaîne d’opérations faisant intervenir les sapeurs-pompiers français et allemands : prise en charge et évacuation de la victime dans un sarcophage, sécurisation de la zone d’intervention, détection de l’agent biologique, décontamination de différentes surfaces…

Un pompier recouvert d’une combinaison nettoie un camion en l’aspergeant d’une substance blanche.
La décontamination d’une ambulance.
Maria Viola Zinna

Un exercice sur le terrain, bien loin des imaginaires des films

Entre le scénario version papier et le scénario grandeur nature qui s’est déroulé sous mes yeux, l’écart fut important. Le scénario a dû être adapté aux réalités du Centre de formation des sapeurs-pompiers des Bouches-du-Rhône, situé à Velaux, où l’exercice final s’est déroulé le 1er mars 2024.

Pas d’aéroport, pas d’avions, pas d’hôpital en vue. Au lieu de cela, une version recomposée et réduite de cette réalité, avec une ambulance, une victime jouée par un sapeur-pompier, des tentes et différents équipements. Au lieu du virus d’Ebola, des chercheurs de l’Institut Pasteur ont déposé un virus inoffensif pour l’humain.

On est loin de la scénarisation du risque biologique dans la culture populaire (comme dans les films L’armée des 12 singes ou 28 Jours plus tard ou le jeu vidéo Resident Evil). Dans le scénario élaboré par les pompiers, il n’y a pas de héros, pas de société entière à sauver, pas de personnes malveillantes qui relâchent des microorganismes.


Exercice simulant un risque biologique (cas d’Ebola), 1ermars 2024, Centre de formation des sapeurs-pompiers des Bouches-du-Rhône.


Transformer l’urgence en une « caractéristique normale de la vie »

Mises à part ces adaptations, les pompiers ont toutefois « joué le jeu ». Ils et elles ont réalisé le zonage pour sécuriser un certain périmètre, ont enfilé leurs combinaisons de protection et ont fait des prélèvements (voir la vidéo ci-dessus). Pour décontaminer, ils ont testé une nouvelle mousse de décontamination développée par le CEA avec un partenaire industriel.

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L’exercice a permis de normaliser et d’anticiper le risque biologique car, de façon générale, ce type d’exercices transforme l’urgence comme intervalle et « champ d’action distinct » en une « caractéristique normale de la vie […] qu’il faut anticiper et à laquelle il faut se préparer ».

Ce faisant, l’exercice présente l’avantage de combiner deux types de savoirs : les savoirs théoriques, transmis lors de formations et via des textes comme le Guide national de référence risques chimiques et biologiques, et les savoirs tacites qu’il faut apprendre « sur le tas », comme la maîtrise d’équipements techniques ainsi que le fait de savoir mettre et enlever une combinaison.

Du réel et du fictif

Trois choses m’ont surpris pendant mes observations. Premièrement, l’exercice était à la fois réel et fictif. Réel, car il s’agissait de vrais pompiers manipulant et testant de vrais équipements, tout en prenant l’exercice très au sérieux.

Mais l’exercice était aussi fictif, car le virus présent était inoffensif et l’aéroport de Marseille réduit à un élément discursif. L’exercice présentait une version réduite et simplifiée du scénario – une « version de l’urgence », pour reprendre les termes de deux géographes.

Tous les éléments étaient préconfigurés et disciplinés, sauf un : le vent. Ce dernier a partiellement détruit une tente et a rendu le zonage difficile. « S’il y a du vent, comme aujourd’hui, il peut être difficile d’installer le zonage. Mais le vent c’est le chef, il faut donc s’adapter », expliquait la capitaine Diane Borselli au public. Même lors d’un exercice dans un centre de formation, l’imprévisible et la nature peuvent faire irruption.

Trois pompiers sont en combinaison de protection. L’un des trois est en train d’aider un autre à enlever sa combinaison.
Le déshabillage en « peau de lapin ».
Maria Viola Zinna

Quand la rapidité des gestes d’intervention côtoie la lenteur du déshabillage

Deuxièmement, les gestes des pompiers étaient maîtrisés et rapides. L’organisation était quasiment militaire. Tous les gestes étaient rapides, sauf les gestes pour enlever les combinaisons de protection.

Comparé aux autres gestes, on avait l’impression d’assister à une scène au ralenti. La raison de cette « lenteur » ? Afin d’enlever une combinaison potentiellement contaminée, il faut l’enlever en « peau de lapin », c’est-à-dire en déroulant délicatement la combinaison de l’intérieur vers l’extérieur.

Dernière surprise, dans mes observations, très peu d’éléments se rapportent à la culture du risque, l’identité sociale et la psychologie des pompiers.

En effet, les préoccupations traditionnellement mises en avant dans les travaux en sciences humaines et sociales sur les pompiers n’étaient que peu perceptibles durant l’exercice. Car pour se préparer aux risques biologiques atypiques, les pompiers se posent une question, elle aussi, atypique : Comment construire une fiction réaliste et comment s’équiper et s’entraîner pour y faire face ?


Le programme « Mesures de décontamination visant à restaurer les installations et l’environnement après une libération naturelle ou volontaire de microorganismes pathogènes – DEFERM » est soutenu par l’Agence nationale de la recherche (ANR), qui finance en France la recherche sur projets. L’ANR a pour mission de soutenir et de promouvoir le développement de recherches fondamentales et finalisées dans toutes les disciplines, et de renforcer le dialogue entre science et société. Pour en savoir plus, consultez le site de l’ANR.

Morgan Meyer, Directeur de recherche CNRS, sociologue, Mines Paris – PSL

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

Que pèse la France en Indo-Pacifique ?

Que pèse la France en Indo-Pacifique ?

La stratégie indo-pacifique française est souvent incomprise et parfois méconnue. Dans cette immense région à l’importance cruciale, la France est fréquemment perçue comme une ancienne puissance coloniale amenée à jouer, au mieux, un rôle secondaire.

par Benjamin Blandin, Institut catholique de Paris (ICP) – Revue Conflits – publié le 11 septembre 2024

https://www.revueconflits.com/que-pese-la-france-en-indo-pacifique/


Il est vrai que la France a connu une longue présence coloniale dans la région, pendant environ trois siècles, de 1674 à 1954, notamment à Madagascar, à Djibouti, à Mayotte, en Inde, en Indochine et dans le Pacifique Sud. En outre, elle a également eu recours de manière immodérée à la politique de la canonnière au Siam face au Vietnam, ainsi que face à la Chine et à la Corée. Aujourd’hui, du fait de cette histoire, elle se trouve en conflit avec Maurice pour l’île de Tromelin, avec les Comores pour Mayotte et les îles Glorieuses, et avec Madagascar pour les îles Éparses. Dans l’océan Pacifique, la France est également confrontée à un mouvement indépendantiste en Nouvelle-Calédonie et sa possession de Clipperton a été ouvertement remise en question par le Mexique.

Outre les questions historiques, plusieurs événements survenus plus récemment ont également contribué à cette perception : les essais nucléaires effectués par la France jusqu’en 1995, les scandales liés aux contrats de défense signés avec Taïwan, ainsi qu’avec l’Arabie saoudite et le Pakistan dans les années 1990 et au début des années 2000, et plus près de nous l’annulation par Canberra du contrat de sous-marins au profit de l’accord AUKUS et l’abandon par l’Australie de contrats de défense avec la France (hélicoptères d’attaque Tigre, hélicoptères de transport NH90).

Par ailleurs, l’appareil de sécurité régionale français a été considérablement réduit, passant de 8 500 à 7 000 hommes au cours des dix dernières années. Sans parler des coupes budgétaires post-crise des subprimes (les redoutables LOLF et RGPP) dans la diplomatie française qui ont entraîné une réduction d’effectifs dans un certain nombre d’ambassades. Tous ces facteurs ont clairement eu un impact sur l’image de la France dans la région et ont contribué à une opinion négative auprès du public, des experts et des autorités.

En outre, la stratégie indo-pacifique de la France, publiée en 2019, reste floue pour nombre de nos voisins, partenaires et alliés. La France gagnerait certainement à améliorer sa communication autour de ses initiatives et de ses résultats concrets, pour les faire mieux connaître et apprécier. Une meilleure coopération serait également nécessaire entre ses (trop) nombreuses agences, régulièrement en concurrence les unes avec les autres.

Un pays singulier parmi les nations européennes en Indo-Pacifique

La France n’est certes pas le pays le plus puissant opérant dans la zone indo-pacifique, mais elle n’est ni une petite puissance ni une puissance lointaine dans la région, où sa présence a été continuellement maintenue depuis la première moitié du XVIe siècle.

Il est également important de noter que même si la France a été une puissance coloniale, elle a établi son influence par divers moyens, notamment l’échange d’envoyés diplomatiques et l’établissement d’alliances avec les dirigeants locaux, l’implication directe dans divers conflits, la présence des érudits jésuites à la cour de l’empereur Qianlong en Chine, la construction de forteresses de style Vauban au Siam et au Vietnam ou encore la création d’un arsenal naval moderne à Yokosuka, au Japon. Un grand nombre de Français de tous métiers ont également apporté leurs connaissances et leurs compétences aux dirigeants locaux.

Aujourd’hui encore, la présence de la France dans la zone constitue une singularité majeure puisqu’elle est le seul pays de l’UE à être membre du Conseil de Sécurité de l’ONU et à être une puissance résidente à la fois dans l’océan Pacifique et dans l’océan Indien, sur un ensemble de territoires qui représente 25 810 kilomètres carrés pour une population de près de 2 millions de Français, et 93 % de la zone économique exclusive (ZEE) française, la deuxième au monde, juste après celle des États-Unis. Ses principales entreprises y sont très présentes, notamment dans le secteur de la défense, où la France se classe au troisième rang des fournisseurs, avec des coopérations fructueuses en cours avec l’Inde, Singapour, la Malaisie et l’Indonésie (peut-être prochainement aux Philippines) et des succès plus anciens en Australie et à Taïwan.

En termes d’influence et de diplomatie, Paris bénéficie d’une position unique avec un ensemble à la fois très dense et diversifié d’outils de soft power et de coopération. Cela comprend d’abord, son réseau d’ambassades et de consulats, l’un des plus importants au monde ; deuxièmement, les écoles et centres culturels français (réseau Alliance française) implantés dans toutes les grandes villes ; troisièmement, ses chambres de commerce et d’industrie reliant les entreprises françaises et locales ; quatrièmement, les institutions françaises de coopération internationale telles que l’Agence française de développement (AFD) et Expertise France ; cinquièmement, un réseau de 18 attachés militaires en plus des officiers de liaison dans les centres régionaux de fusion d’informations à Madagascar, New Delhi et Singapour, coordonnant la coopération en matière de défense et maritime et menant la diplomatie militaire. Cet outil diplomatique unique, envié par de nombreux pays européens, permet à la France d’être un membre actif des plus importants forums et mécanismes de coopération régionale.

Des moyens limités mais une approche innovante

Pour autant, les observateurs jugent souvent que la France « manque de muscles » en Indo-Pacifique.

Une telle affirmation n’est pas dénuée de fondement. Il est vrai que le nombre de troupes dans la zone a été réduit de 20 % au cours des 10 dernières années et que la présence navale a fortement diminué depuis les années 1990, mais en tout état de cause la France n’a ni l’ambition ni les moyens d’être une puissance militaire majeure dans l’Indo-Pacifique. Ses partenaires et alliés dans la région n’attendent ni ne demandent qu’elle prenne parti dans la rivalité États-Unis/Chine ou s’interpose entre eux. Forte de son héritage historique d’autonomie stratégique et d’indépendance politique, la France souhaite ouvrir une troisième voie, ni pro-États-Unis ni anti-Chine, qui résonne avec la posture stratégique de non-alignement des « Perspectives sur l’Indo-Pacifique » de l’Asean. À ce titre, Paris privilégie une posture de facilitateur, de bon voisin et de partenaire de confiance qui promeut l’état de droit et démontre son engagement en faveur de la sécurité régionale et de la liberté des mers.

L’architecture de défense française dans la zone comprend deux commandements sous-régionaux – ALINDIEN pour l’océan Indien et ALPACI pour l’océan Pacifique, en complément des forces de souveraineté positionnées à La Réunion, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie – et suit un axe en forme de « S ». Cet axe relie le cœur métropolitain à ses territoires d’outre-mer à travers un réseau d’alliés et de partenaires stratégiques dont les Émirats arabes unis, l’Inde, Singapour, l’Indonésie et l’Australie (mais aussi le Vietnam, la Corée du Sud et le Japon). Avec certains d’entre eux, la France a établi un dialogue stratégique de défense innovant, comme les dialogues stratégiques trilatéraux « France-EAU-Inde » et « France-Inde-Australie ».

Cet axe comprend également cinq bases militaires situées à Abu Dhabi, Djibouti, La Réunion, Nouméa et Papeete. Dans ces bases, 7 000 militaires et divers équipements sont positionnés en permanence pour protéger les intérêts de la France. Il convient également de noter que depuis la publication de sa stratégie Indo-Pacifique, la France a considérablement renforcé sa présence dans la région. Cela comprend des déploiements réguliers de moyens navals majeurs tels que son groupement tactique aéronaval, ses sous-marins nucléaires d’attaque et ses porte-hélicoptères. Paris a aussi mené des « raids aériens », déployant chaque année des avions de combat Rafale, des A330 MRTT et des A400M depuis la France, Djibouti et le porte-avions Charles de Gaulle jusqu’en Inde, en Asie du Sud-Est, en Australie et en Nouvelle-Calédonie – et cela, en des temps records, permettant de démontrer les capacités de nos derniers équipements et de s’entraîner avec nos alliés.

À la lumière d’une architecture de sécurité américaine qui ne cesse de se renforcer et d’une présence européenne globalement absente, il a fallu du temps pour que le positionnement singulier français gagne en visibilité et soit pleinement compris. Certains pays de la région se sont même demandé si la France ne faisait pas, par nature, partie d’un « Occident global » et donc un partenaire de facto du Dialogue quadrilatéral pour la sécurité (QUAD), mais la perte de l’accord sur les sous-marins avec l’Australie au profit de l’AUKUS a grandement contribué à repositionner la France « sur le radar » de nombreux pays, notamment de l’Asean. Les entreprises françaises occupent désormais la position de troisième exportateur d’armes dans la région.

Une puissance stabilisatrice ?

Sur le plan diplomatique, la France a su établir des relations apaisées avec ses anciennes colonies. Elle a trouvé un accord avec le Mexique sur Clipperton en 2007 et a signé un accord-cadre sur l’île Tromelin avec Maurice en 2010. Elle a également renforcé sa présence au sein de l’Asean et se montre davantage présente au Shangri-La Dialogue. D’autres options ont été envisagées pour renforcer son statut, comme l’extension de ses bases, le positionnement d’une flotte permanente et d’un escadron de Rafale, ou encore une européanisation de son architecture de sécurité (même si elle représente 90 % de la présence de l’UE), mais toutes sont économiquement ou politiquement sensibles et Paris semble pour le moment privilégier une modernisation de ses atouts existants.

De manière plus pratique, la France met à profit sa vaste expertise maritime pour approfondir ses liens avec toutes les parties intéressées, à travers le concept d’« action de l’État en mer », la conception et la construction de systèmes navals complexes, la création et la préservation de zones marines protégées, la conduite d’opérations de recherche et de sauvetage en mer, la lutte contre la pollution marine, la lutte contre la criminalité maritime et les activités illégales et l’application du droit maritime.

La France est aussi l’un des pays les plus impliqués en matière de lutte contre le changement climatique. Elle a notamment apporté une contribution significative au récent traité international améliorant la protection de la haute mer. La taille de la ZEE française, les connaissances apportées par ses territoires d’outre-mer à travers le monde et la diversité de son domaine maritime placent la France à l’avant-garde des pays qui peuvent agir comme une nation-cadre dans des domaines variés et de plus en plus cruciaux pour la région : protection des biens communs mondiaux ; résilience face au changement climatique ; protection de l’environnement et de la biodiversité ; préservation du patrimoine culturel ; aide humanitaire et réponse aux catastrophes ; économie bleue ; sécurité maritime, la gouvernance des océans et la protection des ressources marines ; et renforcement de la connectivité.

On le voit, la France ne manque ni d’atouts ni d’initiatives et a véritablement transformé sa politique et sa stratégie dans la région ces dernières années. De nombreux projets ont été lancés et des résultats encourageants ont été observés. Reste désormais à mieux valoriser les fruits de cette démarche unique.

Benjamin Blandin, Doctorant en relations internationales, Institut catholique de Paris (ICP)

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

Mer Rouge : entre défi sécuritaire et catastrophe environnementale

Mer Rouge : entre défi sécuritaire et catastrophe environnementale

par Alain Charret – CF2R – NOTE D’ACTUALITÉ N°649 / septembre 2024

https://cf2r.org/actualite/mer-rouge-entre-defi-securitaire-et-catastrophe-environnementale/


 

Si le sujet est peu évoqué dans la presse occidentale, la situation en mer Rouge est loin d’être réglée. Ainsi cette semaine plusieurs incidents notables ont été relevés et en particulier le 31 août 2024. Les Houthis ont annoncé avoir frappé le porte-conteneur Groton dans le golfe d’Aden. Il faut savoir que ce même navire avait déjà été la cible des rebelles yéménites le 3 août dernier et avait dû se dérouter sur Djibouti pour réparer les dommages causés. Le 30 août, après avoir pris soin de couper son transpondeur AIS[1], le Groton quittait Djibouti pour les Émirats arabes unis. Visiblement cette mesure n’a pas suffi à dissimuler son départ, car quelques heures plus tard, il était de nouveau victime d’une frappe en provenance du Yémen.

Visiblement les Houthis ne se contentent pas de localiser leurs cibles à l’aide de l’AIS. De plus, ils ont mis en garde tous les navires naviguant en mer Rouge ou dans le golfe d’Aden qui coupent leur transpondeur ou encore « trichent » en diffusant de fausses informations. Au regard des derniers évènements, on peut que constater qu’ils bénéficient d’autres sources de renseignements que la simple exploitation des données AIS.

Comme on peut le voir ci-dessus certains navires n’hésitent pas à annoncer clairement  leur absence de liens avec Israël espérant ainsi échapper aux attaques des rebelle (© www.marinetraffic.com)


De plus ces rebelles semblent pouvoir agir relativement librement et continuer à frapper leurs cibles malgré les opérations aériennes anglo-américaines annoncées régulièrement qui, en définitive, semblent avoir bien peu d’effet. Il en est de même pour les opérations EUNAVFOR Apsides, menée par l’Union européenne et Gardien de la prospérité, coalition dirigée par l’US Navy regroupant une coalition d’une vingtaine de pays. À part la destruction de quelques drones, elles ne sont vraiment utiles que pour porter secours aux équipages en détresse.

Selon le Joint Maritime Information Center ce sont au moins 94 incidents visant des navires de commerce dans la zone concernée qui ont été recensés depuis le 19 novembre 2023. Et les Houtis ne se limitent pas aux navires de commerce. Ils ont déjà tenté d’atteindre, souvent sans succès, des bâtiments de guerre. Il semble même qu’ils aient pris pour cible le porte-avions américain USS Dwight D. Eisenhower le 31 mai 2024. C’est en tout cas ce qu’ont revendiqué les rebelles yéménites. Si le Pentagone n’a fait aucun commentaire l’observation du trafic maritime et aéronautique en mer Rouge interroge. En effet, à partir de cette date le navire américain a rapidement quitté la zone pour s’éloigner du Yémen et regagner la Méditerranée via le canal de Suez. Il faut savoir que les navires militaires diffusent très rarement leur position via l’AIS. C’est bien sûr le cas des porte-avions. Cependant, il existe un autre moyen permettant de localiser ces derniers. Il suffit pour cela de suivre les mouvements de certains aéronefs embarqués. Il s’agit notamment des C2 Grumman qui effectuent au moins une rotation quotidienne. Dès que l’aéronef en question est en vol, il peut être suivi via les sites spécialisés tel que Flightradar24 grâce au transpondeur ADS-B[2]. On peut donc ainsi avoir une idée assez précise de la zone où opère le porte-avions.

Dans le cas présent les vols ont été interrompus pendant plus de cinq jours. Puis, après son transit par le canal de Suez et son entrée en Méditerranée l’US Navy a annoncé que dans le cadre d’une relève programmée le navire regagnait les États-Unis et serait remplacé par l’USS Theodore Roosevelt. À noter que ce dernier se trouvait à ce moment-là en escale en Corée du Sud. De plus on ne manquera pas de noter que si ce second porte-avions s’est bien ensuite dirigé vers le Moyen-Orient, il n’a pas rejoint la mer Rouge comme son prédécesseur, mais le golfe d’Oman. L’ensemble de ces éléments ont conduit certains analystes à penser que le pont de l’USS Eisenhower avait bien été touché et sans doute endommagé en partie ce qui avait interrompu momentanément les vols.

© Joint Maritime Information Center (combinedmaritimeforces.com)


Cette semaine une autre opération des Houthis auraient dû retenir l’attention. Il s’agit de l’explosion de plusieurs charges déposées par les rebelles yéménites sur le pont du pétrolier grec Sounion. Ce navire avait été la cible d’une première attaque le 21 août 2024 au large d’Hodeida et avait dû y jeter l’ancre avant d’évacuer son équipage. Ce sont maintenant 150 000 tonnes de brut qui risquent de se déverser en mer Rouge, ce qui serait une catastrophe environnementale d’une ampleur sans précédent.


[1] Le système automatique d’identification (AIS) des navires est un outil destiné à accroitre la sécurité de la navigation et l’efficacité de la gestion du trafic maritime.

[2]L’Automatic Dependent Surveillance-Broadcast est un système de surveillance coopératif pour le contrôle du trafic aérien et d’autres applications connexes.

L’Occident doit « se préparer à des temps très durs » : l’alerte du chef d’état-major des armées françaises

L’Occident doit « se préparer à des temps très durs » : l’alerte du chef d’état-major des armées françaises

Thierry Burkhard, le 26 juin 2024, à Paris ( AFP / BERTRAND GUAY )
 
information fournie par Boursorama avec Media Services 28/08/2024

Le général Thierry Burkhard a mis en garde les dirigeants de grands groupes français face à la « récusation du modèle occidental » qui gagne le monde.

« On va devoir vivre avec ». Devant un parterre de dirigeants d’entreprises, le chef d’état-major des armées françaises a prévenu face à la remise en cause inexorable du « modèle occidental » à travers le monde, appelant à « se préparer à des temps assez durs, sinon très durs, pour l’Occident ».

« On entre résolument dans une nouvelle ère, un Occident qui est contesté (…) et une fragmentation de l’ordre international extrêmement forte« , a averti le général Thierry Burkhard devant les responsables du Medef et de dix grands groupes français, mardi 27 août.

Cet ordre international « a été fondé sur le droit, construit par le monde occidental et on nous reproche de l’avoir construit pour le monde occidental », a-t-il ajouté, décrivant « en parallèle la montée d’un ordre alternatif (…) qui veut nous pousser dehors ».

Garnir les effectifs

Le général intervenait à Paris lors d’une cérémonie de lancement du partenariat ProMilès entre ces groupes et l’armée, visant notamment la reconversion des soldats blessés dans le secteur privé, le renforcement de la réserve et l’emploi des conjoints de militaires. En avril, le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, avait indiqué vouloir moderniser le recensement pour identifier « en continu » les compétences de volontaires susceptibles de renforcer la réserve militaire. Le président de la République, Emmanuel Macron, veut doubler le nombre de réservistes, actuellement de 40.000, qui viennent en appui des plus de 200.000 militaires de l’armée française.

« Le recours à la force est désinhibé et apparaît comme la manière la plus forte d’imposer sa volonté et de résoudre les différends », a poursuivi le général Burkhard.  » Ne croyons pas qu’on va revenir au monde d’avant. Ce qui se met en place, on va devoir vivre avec ».

Les entreprises concernées, du domaine militaire (KNDS, Thalès, Dassault Aviation…) ou non (Société Générale, Michelin, Schneider Electric…) s’engagent via ce partenariat à « conforter ou initier » leurs relations avec la formation militaire pour une durée renouvelable de cinq ans. Parmi les facteurs stratégiques essentiels des années à venir, le militaire a aussi cité la guerre informationnelle, dans laquelle « nos compétiteurs agissent de manière extrêmement forte ».

Il a également cité le changement climatique comme « catalyseur de chaos, en termes de guerre d’accès aux ressources, de déplacement de population ou de famine ».

La température de l’océan Atlantique baisse à une vitesse record

La température de l’océan Atlantique baisse à une vitesse record

Le phénomène de la Niña atlantique surprend les météorologues. Elle présage d’un hiver plus froid, mais vient avec ses propres phénomènes extrêmes.

La Niña atlantique pourrait atténuer les ouragans que créera La Niña pacifique. | Pixabay <a href="https://www.pexels.com/fr-fr/photo/planete-terre-76969/" rel="nofollow">via Pexels</a>
La Niña atlantique pourrait atténuer les ouragans que créera La Niña pacifique. | Pixabay via Pexels

 Repéré sur New Scientist

Une bonne nouvelle après treize mois de records de chaleur? De juin 2023 à juin 2024, les températures de l’air et à la surface des océans ont battu d’un quart de degré les marques établies à peine quelques années auparavant. Et non seulement cette série noire a pris fin en juillet 2024 (0,04°C plus frais que juillet 2023), mais l’océan Atlantique entame en plus un phénomène de rafraîchissement inattendu: La Niña atlantique. Au cours des trois derniers mois, la baisse de la température des eaux de l’Atlantique a atteint une vitesse record.

Le phénomène La Niña se produit normalement dans l’océan Pacifique et répond à El Niño. La version 2023 de ce dernier a fortement augmenté les températures du globe –bien aidée par la hausse des émissions de gaz à effet de serre. La Niña découle en partie du renforcement des alizés, qui permettent à l’eau plus froide d’émerger des profondeurs de l’océan.

Les météorologues l’attendaient pour septembre dans le Pacifique, mais c’est bien l’océan Atlantique qui a surpris son monde. «On commence à voir une légère baisse des températures moyennes des océans», indique Pedro DiNezio, professeur à l’université de Colorado Boulter. De quoi mettre fin à une série de quinze mois de températures moyennes records dans les océans.

La Niña atlantique n’est pas une surprise totale. S’il a une influence bien moindre sur le climat mondial, l’océan Atlantique équatorial alterne également entre Niños chauds et Niñas froides. Et comme dans le Pacifique, El Niño atlantique était plus chaud en 2023 qu’il ne l’avait été pendant des décennies. «Il s’agit juste un épisode de plus dans la série d’événements relatifs à un système climatique qui a déraillé depuis de nombreuses années», déplore Michael McPhaden, de l’Agence américaine d’observation océanique et atmosphérique.

La cause de cette Niña atlantique, en revanche, reste un mystère. Ces trois derniers mois, les températures dans cette partie de l’Atlantique ne se sont jamais refroidies aussi rapidement depuis le début des relevés en 1982. Un phénomène qui rend les météorologues perplexes, puisque les alizés ne sont pas plus fortes que d’habitude: «On a parcouru la liste des causes potentielles, et on ne trouve rien pour l’instant», témoigne Franz Philip Tuchen, chercheur à l’université de Miami. Si les températures restent au moins 0.5°C sous la moyenne historique pendant un mois supplémentaire, le phénomène La Niña sera officiellement proclamé dans l’Atlantique.

Les effets de deux Niñas simultanées encore méconnus

Si le monde se retrouve effectivement sous l’influence de deux Niñas cet automne, leurs effets sur la température et l’humidité se feront sentir sur le climat. En général, La Niña pacifique apporte une météo plus fraîche et humide, bien que ce soit inégal (l’ouest des États-Unis s’assèche quand les pluies s’abattent sur l’est de l’Afrique). Elle génère aussi son lot de phénomènes extrêmes, à commencer par des ouragans sur la façade atlantique de l’Amérique du Nord. De son côté, La Niña atlantique a tendance à réduire les précipitations au Sahel et à engendrer des pluies diluviennes au Brésil.

Ces deux Niñas promettent d’avoir, sur le papier, des effets contradictoires sur l’actuelle saison des ouragans dans l’Atlantique. Celle du Pacifique devrait favoriser la formation d’ouragans cet automne, mais La Niña atlantique pourrait atténuer cette probabilité. Cette dernière affaiblit l’activité des perturbations atmosphériques, nécessaires aux ouragans.

Ces deux phénomènes pourraient même avoir des conséquences directes l’un sur l’autre. S’il est difficile de prédire à quel degré, certains météorologues, comme Michael McPhaden, pensent que La Niña atlantique ralentira le développement de La Niña pacifique, et donc son rafraîchissement du climat mondial. «Il pourrait y avoir un bras de fer entre le Pacifique, qui tente de se refroidir, et l’Atlantique, qui tente de se réchauffer», conclut-il.

La chaîne de valeur de l’aluminium : un élément clé de l’autonomie stratégique et de la neutralité carbone de l’Europe Note de l’Ifri, juillet 2024

La chaîne de valeur de l’aluminium : un élément clé de l’autonomie stratégique et de la neutralité carbone de l’Europe Note de l’Ifri, juillet 2024

Fours de fusion dans une usine d’aluminium © Jose Luis Stephen/Shutterstock.com

 

par Thibault Michel – IFRI – publié le 29 juillet 2024

https://www.ifri.org/fr/publications/notes-de-lifri/chaine-de-de-laluminium-un-element-cle-de-lautonomie-strategique-de


Les États-Unis, le Canada et l’Union européenne (UE) considèrent désormais tous l’aluminium comme un élément stratégique. Ce métal est en effet de plus en plus utilisé, en particulier dans le cadre de la transition énergétique, pour les véhicules électriques, les réseaux, les éoliennes ou les panneaux solaires.

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L’Europe aura ainsi besoin d’approvisionnements grandissants en aluminium dans les années à venir. Cependant, l’industrie européenne de l’aluminium a été affaiblie au cours des dernières décennies et ne représente désormais qu’une faible part de la production mondiale. En conséquence, elle n’est plus en mesure de subvenir aux besoins européens.

L’aluminium possède une empreinte environnementale conséquente et sa production, de la bauxite à l’aluminium primaire, entraîne d’importantes émissions de gaz à effet de serre (GES). Ces émissions sont particulièrement liées aux quantités extrêmes d’énergie (gaz et électricité) consommées au cours du processus industriel, notamment pour l’électrolyse. La forte consommation d’électricité nécessaire confère à la structure des mix électriques nationaux une influence majeure sur les émissions de CO2 issues de l’aluminium. Mais certaines émissions sont aussi spécifiques à la production d’aluminium, par exemple celles produites par la réaction chimique opérée dans le cadre de l’électrolyse, qui transforme l’alumine en aluminium primaire.

Avec une croissance de la demande dans les années à venir, l’Europe devra produire plus d’aluminium afin de remplir les besoins de sa transition énergétique, tout en réduisant l’empreinte carbone de son industrie de l’aluminium.

Pour relever ce défi, différentes technologies de décarbonation sont actuellement considérées. Comme pour d’autres industries, l’efficacité énergétique ou l’électrification des processus industriels peuvent aider à réduire cette empreinte carbone. Cependant, ces deux solutions ont généralement d’ores et déjà été mises en œuvre par les industriels, afin de réduire les coûts énergétiques. La mise en place partielle de ces solutions a permis à l’industrie européenne de l’aluminium d’avoir une empreinte carbone de 6,8 tonnes de CO2 par tonne d’aluminium primaire, quand la moyenne mondiale est de 16,1 tonnes de CO2.

Le recyclage doit aussi pouvoir jouer un rôle clé, en particulier car un aluminium recyclé consomme 96 % d’électricité de moins qu’un aluminium primaire, avec des émissions de GES environ quatre fois moindres (pour ce qui est des émissions directes). Toutefois, si le développement du recyclage en Europe constituera une étape cruciale, des approvisionnements supplémentaires en aluminium primaire restent essentiels et le recyclage ne pourra être un remède miracle. L’ensemble des solutions évoquées constitue des outils pertinents pour réduire l’empreinte carbone de l’industrie européenne de l’aluminium mais ne sera pas suffisant pour atteindre la neutralité carbone.

Pour ce faire, le secteur de l’aluminium aura besoin de technologies disruptives. Deux d’entre elles sont aujourd’hui à l’étude. En premier lieu, le captage et séquestration du carbone ainsi que son utilisation (CCUS), pour lequel plusieurs projets sont actuellement développés en Europe, en particulier en Norvège, en Islande et en France. Néanmoins, cette technologie requiert des investissements massifs tandis que les fumées émises lors du processus d’électrolyse sont peu concentrées en CO2. La seconde technologie est celle de l’anode inerte, pour laquelle trois projets sont développés dans le monde à l’heure actuelle, au Canada, en Russie et en Allemagne. Cependant, le déploiement de ces technologies à une échelle industrielle n’est pas prévu avant 2030 et pourrait se produire plus tard encore.

Face à l’augmentation des coûts de l’énergie alors que les prix mondiaux de l’aluminium sont maintenus à des niveaux relativement bas en raison de l’importance de l’offre chinoise, qui n’est pas exposée aux mêmes coûts de production, l’industrie européenne de l’aluminium est aussi confrontée à des problématiques en matière de compétitivité. Avec la réforme de la législation européenne sur les crédits carbone et la mise en place du Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF), les industriels de l’aluminium primaire et les producteurs de produits manufacturés en aluminium sont inquiets de la concurrence internationale et redoutent une potentielle perte de compétitivité. Si ce mécanisme apparaît comme une politique nécessaire pour protéger la compétitivité des industriels européens tout en permettant la décarbonation des industries les plus polluantes, il contient des failles, avec des risques de contournements.

L’UE doit relever le défi de développer une industrie de l’aluminium décarbonée, compétitive et résiliente. À cette fin, plusieurs éléments pourraient être étudiés :

  1. Renforcer la production d’aluminium primaire en Europe ;
  2. Fournir un soutien plus large au développement de technologies de décarbonation ;
  3. Améliorer le recyclage à travers l’Europe et limiter les exportations de déchets ;
  4. Étendre le périmètre du MACF à davantage de produits transformés et intensifier la diplomatie climatique de l’UE à l’étranger ;

Développer la résilience de l’industrie européenne, en particulier concernant les approvisionnements en alumine.


> Cette publication est uniquement disponible en anglais: The Aluminum Value Chain: A Key Component of Europe’s Strategic Autonomy and Carbon Neutrality

Économie de guerre : Le règlement européen REACH risque d’entraver la montée en puissance des stocks de munitions

Économie de guerre : Le règlement européen REACH risque d’entraver la montée en puissance des stocks de munitions

https://www.opex360.com/2023/02/18/economie-de-guerre-le-reglement-europeen-reach-risque-dentraver-la-montee-en-puissance-des-stocks-de-munitions/


 

D’une part en raison des critères ESG [Environnement, Social, Gouvernance] qui, mis en avant par la commission européenne, excluent l’industrie de l’armement. Et d’autre part à cause de ce certains règlements, comme REACH [Registration, Evaluation, Authorization and Restriction of Chemicals] dont l’objectif est d’assurer un « niveau élevé de protection de la santé humaine et de l’environnement, ainsi qu’à renforcer la compétitivité du secteur des substances chimiques et l’innovation ».

Entré en vigueur en 2007, REACH exige des industriels d’enregistrer toutes les substances chimiques qu’ils produisent ou utilisent. Et cela afin de les classer selon leur nature. Celles considérées dangereuse pour l’environnement et la santé sont alors soumises à une autorisation quand celles présentant un risque jugé « inacceptable » sont prohibées. Et cela a un coût que les entreprises concernées sont bien obligées de supporter.

Le règlement REACH s’applique évidemment aux industriels de l’armement. Ce qui, à l’heure où on leur demande de produire davantage dans des délais contraints, est un frein.

« Sujet de préoccupation majeure soulevé par l’intégralité des acteurs de la filière munitionnaire, la réglementation européenne REACH constitue un défi considérable pour la filière munitionnaire », alertent les députés Julien Rancoule [RN] et Vincent Bru [MoDem] dans leur rapport sur les stocks de munitions, remis cette semaine.

Cette réglementation « génère les obsolescences de certains produits – lorsqu’aucune solution alternative n’a été trouvée pour remplacer les substances exclues – et impose des redéveloppements réguliers » et certains de ses processus « ont donc de lourdes conséquences financières ou calendaires entravant la montée en puissance des stocks de munitions », constatent-ils.

Ainsi, le « processus d’enregistrement des substances fabriquées ou importées, obligatoire pour toutes les entreprises – munitionnaires comme sous-traitants et fournisseurs –, conduit inévitablement à un allongement des délais conjugué à un renchérissement des coûts », font-ils valoir.

Et d’après une étude du Groupement des industries françaises de défense et de sécurité terrestres et aéroterrestres [GICAT], citée dans ce rapport, la « fabrication d’une tonne d’explosif, permettant la fabrication de 100 obus de 155 mm, nécessiterait entre 12 et 18 mois de procédure préalable pour obtenir l’enregistrement, avec un coût de l’ordre de 25 millions d’euros par enregistrement et par substance ».

Ce processus d’autorisation/restriction prévu par le règlement REACH mettrait ainsi en « péril » le plomb et les sels de plombs, au risque, toujours selon le GICAT, d’impacter « l’activité de fabrication des initiateurs qui sont à la base de toutes les chaînes pyrotechniques permettant le fonctionnement de la munition ». Et comme « la majorité des munitions » sont « concernées par ce risque d’obsolescence, cela pourrait se traduire par des qualifications lourdes [de 3 à 10 ans] et des coûts conséquents, voire des disparitions de produits du catalogue ». Et d’autres susbstances, également cruciale pour la production de munitions, pourraient connaître un sort identique.

Pour éviter à l’industrie française de l’armement de se trouver dans une position inconfortable face à ses concurrents [et notamment américains], il n’y a pas trente-six solutions.

« Tous les acteurs auditionnés ont suggéré le recours à des exemptions ‘Défense’ qui, soumises à autorisation du ministère de la Transition écologique, [permettraient] d’alléger certaines contraintes », expliquent MM. Bru et Rancoule. Et ceux-ci d’estimer en effet « que ces exemptions constituent l’une des rares solutions envisageables pour permettre la remontée en puissance de la production et des stocks de munitions ».

Cependant, préviennent-ils, « il reste que ces exemptions Défense ne s’appliqueraient à d’autres réglementations européennes relatives aux produits chimiques, pouvant entraver d’autres productions munitionnaires ».

Quoi qu’il en soit, cela fait maintenant plusieurs années que l’on sait que le règlement REACH coûte cher non seulement aux industriels mais aussi aux Armées [celles-ci ayant à régler la facture en dernier ressort]. Ainsi, la remotorisation des missiles [surface-air] Aster et [anti-navires] Exocet, selon les normes édictées par cette réglementation européenne, a coûté 480 millions d’euros à la Marine nationale…

« Pourtant, une exemption est prévue par le droit environnemental européen pour les activités de défense », avait avancé le député Jacques Marilossian, alors rapporteur pour avis des crédits de la Marine, en 2019. « Mais les obligations réglementaires pesant sur les fournisseurs de MBDA, la chaîne industrielle n’a pas réussi à conserver une filière d’approvisionnement dérogatoire pour la défense », avait-il ensuite expliqué.