Tribune : officiers en surchauffe, l’impasse des compagnies à deux officiers

Tribune : officiers en surchauffe, l’impasse des compagnies à deux officiers

http://Tribune : officiers en surchauffe, l’impasse des compagnies à deux

capitaine de Gendarmerie

Un officier d’active de Gendarmerie, Jean Ceynom (pseudonyme) nous a adressé cette tribune relative aux compagnies commandées par deux officiers, soumis selon lui à de très fortes sujétions. Il estime urgent de repenser le modèle et suggère une réforme.

Sur le même thème : Tribune d’un officier de Gendarmerie : pour un “agent” de l’État, agir en conscience est-il un affront à la cause républicaine ?

Les compagnies de Gendarmerie commandées par deux officiers posent un problème structurel, humain et opérationnel.

Au-delà du nombre de subordonnés à commander et de l’intensité de l’activité générale, le territoire d’une compagnie est un espace vivant, dynamique, spontané, imprévisible, complexe et diversifié… Il évolue, réagit, demande une attention constante. Il n’attend pas que l’on soit disponible : il exige qu’on le soit.

Or, avec toutes les contraintes inhérentes à la fonction, si un commandant de compagnie souhaitait exercer pleinement ses droits : repos, permissions, récupérations, il serait tout simplement impossible de tenir son territoire. Résultat : les officiers se sacrifient en silence, au détriment de leur équilibre, de leur santé, et de leur vie personnelle.

Le fonctionnement interne d’une compagnie est déjà, en soi, un défi permanent. À cela s’ajoutent ntoutes les interactions avec les acteurs extérieurs (collectivités, justice, sous-préfecture, partenaires institutionnels…), qui, eux, ne se soucient guère de la surcharge structurelle. Ils attendent une réponse rapide, une présence visible, une implication sans faille.

Si l’on compare un territoire à un organisme vivant nécessitant une attention quotidienne, alors en l’absence de contrôle et de suivi, cet organisme se dégrade inévitablement.

Les heures non récupérées, les permissions jamais prises, les repos sacrifiés deviennent la norme.

Personne ne semble s’en émouvoir. Certains officiers cumulent des semaines entières sans un seul jour de repos, sans que personne ne vienne leur dire : “Stop, prends soin de toi, préserve-toi”.

Aucune alerte, aucun accompagnement.

Les week-ends travaillés et non récupérés peuvent, en théorie, faire l’objet d’une indemnisation ( très faible ) mais tous les chefs, sans jamais l’écrire, précisent que cette pratique n’est pas tolérée.

Ils partent du principe que nous sommes “de permanence” et non “de service”… Pourtant, passer deux jours à répondre au téléphone, être sollicité en continu par tous les canaux possibles (téléphone, Tchap, mail…), être prêt à se déplacer sur un événement, à engager des moyens, à faire l’interface… Est-ce vraiment cela, une simple “permanence” ?

Et que dire de ces moments où nous profitons des week-ends pour faire le tour de nos unités, participer à des commémorations, réunions, événements, inaugurations, invitations… Être simplement disponible pour nos subordonnés ou les partenaires extérieurs, au service d’un territoire. Voilà ce qu’est un week-end…

Et lorsqu’un officier ose évoquer une compensation, on lui fait comprendre que cela ne se fait pas.

Officiellement, il est en “permanence”, pas en “service ». Une distinction sémantique commode pour ne pas activer les droits correspondants.

Un territoire est un organisme vivant, je le rappelle. Il se moque des normes réglementaires internes.

Il a des besoins, il sollicite.

Certains responsables se retranchent derrière l’argument du “à mon époque”. Mais leur époque n’était pas celle de l’hyperconnectivité. Aujourd’hui, l’officier est sollicité en continu. Il n’y a plus de frontière entre temps de service et temps personnel. Il n’y a plus de déconnexion. Tout est immédiat, urgent, pressant. Et pourtant, aucun allègement, aucun aménagement.

On nous demande de veiller scrupuleusement aux droits de nos subordonnés ce qui est légitime et normal , mais personne ne veille sur les nôtres. Qui contrôle que nos droits sont respectés ? Qui alerte lorsque l’officier dépasse les limites ? Personne, car ce serait soutenir que le système n’est plus soutenable.

Une compagnie à deux officiers, c’est une cadence infernale : une semaine “on”, une semaine “off”…en théorie.

En pratique, la coupure n’existe pas. À trois officiers, la rotation est plus tenable : une semaine de permanence toutes les trois semaines, un temps de repos plus réel, une gestion humaine plus équilibrée. Les chiffres le prouvent, plus de subordonnés ne signifie pas automatiquement plus d’activité opérationnelle. Mais une organisation mieux répartie permet à chacun de souffler et de tenir sur la durée.

C’est à ce moment de la tribune que, dans les compagnies à deux officiers, l’on peut se poser la question : quid du second ?

Il est là pour compenser, assurer l’alternance, permettre au commandant en titre de souffler… Oui, mais…Que se passe-t-il quand un chef (comprenez commandant de groupement) ne souhaite s’adresser qu’au commandant de compagnie en titre? Quand une situation l’exige, qu’un événement l’impose, qu’un cas RH le nécessite ? Et je précise même pas quand ce dernier veut jouir de ses droits à permission (normal et légitime une fois de plus) notamment sur plusieurs semaines consécutives.

Urgent de repenser le modèle

Et nos familles dans tout cela ? Elles vivent au rythme du service, souvent en décalage, parfois dans l’incompréhension. Pendant ce temps, dans le civil, un simple week-end d’astreinte pour un cadre est payé deux à trois fois plus qu’une IFR mensuelle d’officier. L’argent n’est pas notre moteur principal, mais il traduit malgré tout la reconnaissance d’un engagement. Or ici, l’engagement est total, mais la reconnaissance proche de zéro.

Ce système épuise, use, désespère. Il joue sur le sens du devoir des officiers, sur leur loyauté, sur leur silence. Mais à force d’être sollicités sans limite, sans soutien, sans compensation, que restera-t- il de cette motivation qui fait tenir les compagnies ?

En définitive, c’est bien à cause de l’ensemble de ces éléments que le commandement de compagnie attire de moins en moins.

La fonction, pourtant centrale dans la structure et les équilibres de la Gendarmerie, devient un passage redouté. Nombreux sont les camarades qui cherchent, par tous les moyens, à éviter la “case Cie”, conscients des sacrifices qu’elle implique et du manque de reconnaissance qui l’accompagne.

À cela s’ajoute une autre réalité préoccupante, le déficit de ressources pour tenir ces postes.

Il devient urgent de repenser ce modèle, de rééquilibrer les charges, de restaurer un minimum de perspectives, de reconnaissance et de soutien pour ceux qui assurent au quotidien le maillage territorial et la cohésion des unités.

Une réforme s’impose. Pas pour relâcher l’engagement, mais pour qu’il soit soutenable. Car servir en tout temps, en tout lieu et en toutes circonstances ne doit pas signifier se renier en tant qu’individu.

Jean Ceynom

Violences, menaces, bizutages : des militaires racontent l’enfer vécu au 8e RPIMa

Violences, menaces, bizutages : des militaires racontent l’enfer vécu au 8e RPIMa

Quatre anciens soldats du 8e RPIMa ont porté plainte, notamment pour violences volontaires et harcèlement moral, contre des cadres de ce régiment.

Par Clément Machecourt – Le point –

https://www.lepoint.fr/societe/violences-menaces-bizutages-des-militaires-racontent-l-enfer-vecu-au-8e-rpima-16-05-2025-2589736_23.php


Quatre anciens militaires du 8e RPIMa basé à Castres ont porté plainte contre 16 supérieurs, notamment pour violences et harcèlements. 
Quatre anciens militaires du 8e RPIMa basé à Castres ont porté plainte contre 16 supérieurs, notamment pour violences et harcèlements.  © FREDERIC SCHEIBER/SIPA / SIPA / FREDERIC SCHEIBER/SIPA

 

Des pratiques que le ministère des Armées condamne « fermement » et des comportements « totalement contraires à la mission et aux valeurs de l’Armée de terre ». France 2 et Le Parisien ont dévoilé jeudi 15 mai la plainte de quatre anciens militaires du 8e régiment parachutiste d’infanterie de marine (RPIMa) basé à Castres, déposée auprès du tribunal de Paris, qui comprend plusieurs faits graves : violences volontaires, harcèlement moral, menaces, mise en danger de la vie d’autrui et provocation au suicide. Engagées en 2021, les quatre jeunes recrues sont fières d’intégrer le 8e RPIMa, une unité prestigieuse de la 11e brigade parachutiste, régulièrement envoyée en opérations extérieures.

Mais rapidement, selon eux, les premières brimades arrivent. Âgé alors de 22 ans, l’un d’eux poste une photo de lui en uniforme sur les réseaux sociaux. Un comportement qui est interdit dans l’armée, mais qui va être sanctionné de la plus brutale des manières. « Mon chef nous a donné l’ordre de nous mettre en rang et, d’un coup, il est venu derrière, il m’a mis une balayette comme on dit. Il s’est mis sur moi, il a sorti un couteau et me l’a mis sous la gorge. À cause de tes photos, on peut retrouver ta p… de mère, ta p… de sœur », témoigne-t-il au micro de France 2.

Déployé en Roumanie en 2022 dans le cadre de la mission Aigle, il fait alors une tentative de suicide en ingurgitant des médicaments. L’un de ses camarades le trouve et prévient la hiérarchie. « L’adjudant est venu en courant. […] Il m’a mis une très grosse claque de toutes ses forces, je n’entendais plus rien », se remémore-t-il.

Seize supérieurs visés

Un soldat, qui assiste à la convocation d’un de ses camarades par trois de ses supérieurs, enregistre à leur insu la conversation : « Je vais t’éclater, tu te sentiras comme une merde et, ensuite, on va te dégager. Mais bien sûr qu’on en a après toi. Tu vas devenir la p… de la compagnie, et jusqu’à ce que j’en ai marre. » Il enchaîne en lui disant qu’il n’a qu’une option : déserter. Des échanges violents et dégradants, corroborés par d’autres témoignages anonymes. Sur les quatre militaires qui ont porté plainte, trois auraient effectivement déserté, le quatrième serait en arrêt maladie longue durée.

En tout, seize supérieurs (sous-officiers et/ou officiers) sont visés par les plaintes pour des faits compris entre 2021 et 2023. L’un d’eux, enregistré à son insu par France 2, nie toute forme de violence et explique : « C’est un problème de personnes. Il y a des gens qui ne sont pas faits pour être militaires, et d’autres qui sont faits pour l’être. C’est aussi simple que ça. ll faut comprendre quelque chose de simple : quand on se trompe dans notre métier, il y a des gens qui meurent, voire des copains, et du coup, on n’aime pas trop l’erreur. »

« Tolérance zéro »

De son côté, le ministère des Armées « prend très au sérieux ces accusations et rappelle sa politique de tolérance zéro vis-à-vis de ces pratiques qu’il condamne fermement ». « Dès connaissance des accusations, une enquête de commandement a été initiée pour établir les responsabilités. Si ces dernières sont avérées, des sanctions disciplinaires seront prononcées contre les responsables. »

À Découvrir Le Kangourou du jour Répondre Interrogée par Le Point, l’institution souligne que cette affaire ne concerne que quelques cadres dans une section, dont le comportement et l’attitude ne sont pas systématiques. Sur les 46 soldats engagés en 2021 dans cette section, seuls 16 sont encore présents. « Au-delà des faits, on peut aussi l’expliquer par des mutations, des fins de contrat ou des blessures, explique-t-on encore à Balard. Le taux de désertion au sein de la 11e brigade parachutiste n’est pas plus haut qu’ailleurs, c’est même plutôt la fourchette basse. »

« L’armée, ce n’est pas ça. Notre position est claire et constante : tolérance zéro », a réagi également le ministre des Armées, Sébastien Lecornu. Après un tardif #MeToo des Armées avec les témoignages de femmes victimes de violences sexistes et sexuelles, ces plaintes libéreront-elles la parole sur les bizutages dégradants et les violences gratuites qui font encore partie des « traditions » qui forgent « l’esprit de corps » des soldats ?

Réservistes de l’armée : voici désormais l’âge maximum pour s’engager dans la défense du pays

Réservistes de l’armée : voici désormais l’âge maximum pour s’engager dans la défense du pays

La France élargit les conditions d’accès à sa réserve militaire en 2025, offrant désormais la possibilité aux citoyens de s’engager jusqu’à 70 ans pour la majorité des fonctions. Cette évolution majeure s’inscrit dans une stratégie nationale de renforcement de la défense et répond aux défis sécuritaires contemporains. Examinons en détail cette transformation qui redéfinit la participation citoyenne à la défense du pays.

Nouvelle limite d’âge pour les réservistes: un bond significatif

Le système de réserve militaire français connaît une transformation historique depuis mars 2025. Auparavant limitée à 62-65 ans pour la plupart des positions, avec une extension de cinq ans pour les anciens militaires selon leur grade, la limite d’âge maximale passe désormais à 70 ans pour la majorité des fonctions au sein de la réserve.

Cette extension représente une augmentation considérable qui permet d’exploiter plus longtemps l’expertise et l’expérience des seniors. Pour certains postes spécialisés nécessitant des compétences particulières, cette limite atteint même 72 ans, reconnaissant ainsi la valeur unique que peuvent apporter ces profils expérimentés.

La réserve citoyenne, composante plus symbolique du dispositif, maintient sa politique d’accessibilité dès 17 ans sans imposer de limite supérieure stricte. Cette branche permet une contribution différente à l’effort de défense nationale, principalement à travers la promotion des valeurs militaires.

Type de réserve Ancienne limite d’âge Nouvelle limite d’âge
Réserve opérationnelle (fonctions standard) 62-65 ans 70 ans
Postes de spécialistes 65-67 ans 72 ans
Réserve citoyenne Sans limite stricte Sans limite stricte

Renforcement stratégique de la défense nationale

Cette révision des critères d’âge s’inscrit dans une vision globale de modernisation des forces armées françaises. Emmanuel Macron a clairement exprimé son ambition de doubler les effectifs de réservistes pour consolider ce qu’il désigne comme la « force morale » de la nation face à un environnement international de plus en plus instable.

L’intégration de citoyens plus âgés permet à l’armée d’accéder à:

  • Des compétences rares issues du monde civil
  • Une expertise approfondie dans des domaines spécialisés comme la cyberdéfense
  • Des savoir-faire précieux en logistique avancée
  • Des capacités étendues dans les fonctions médicales
  • Une diversité d’expériences professionnelles enrichissantes

Cette stratégie s’accompagne d’un investissement financier massif dans la défense nationale. La loi de programmation militaire prévoit un budget de 413 milliards d’euros pour 2024-2030, avec une progression annuelle du budget de 3 à 4 milliards, passant de 43,9 milliards en 2023 à 69 milliards en 2030.

Impacts sur la résilience et la capacité opérationnelle française

L’élargissement du vivier de réservistes potentiels répond à plusieurs objectifs stratégiques cruciaux. Il permet d’abord de renforcer rapidement les effectifs en cas de crise majeure, qu’elle soit d’ordre militaire ou civile comme lors de catastrophes naturelles. Cette flexibilité constitue un atout considérable dans la gestion des situations d’urgence.

En diversifiant les profils intégrés, l’armée française crée une synergie particulièrement efficace entre militaires de carrière et réservistes. Cette complémentarité enrichit les capacités opérationnelles globales des forces armées et répond mieux aux menaces contemporaines comme le terrorisme, les cyberattaques, ou les instabilités régionales.

Les étapes pour devenir réserviste sont désormais accessibles à un plus grand nombre:

  1. Vérification des conditions d’aptitude physique adaptées à l’âge
  2. Formation initiale ajustée selon le profil et l’expérience
  3. Intégration progressive dans les unités selon les compétences
  4. Participation aux activités selon disponibilité et capacités

Cette réforme renforce finalement le lien armée-nation en permettant à davantage de citoyens de contribuer à la défense du pays. Ce rapprochement entre les sphères militaire et civile constitue un pilier essentiel de la résilience nationale face aux défis sécuritaires du 21ème siècle et réaffirme l’engagement collectif dans la protection des valeurs républicaines.

Moins de 1 000 hommes: le Pentagone coupe par deux ses effectifs en Syrie

Moins de 1 000 hommes: le Pentagone coupe par deux ses effectifs en Syrie

Un convoi de l’U.S. Army Soldiers en Syrie, fin septembre 2020. (photo U.S. Army Sgt. 1st Class Curt Loter).

Les Etats-Unis ont annoncé, dans un communiqué de vendredi, qu’ils vont réduire de moitié leur présence militaire en Syrie.

Ils estiment avoir lutté avec « succès » contre le groupe Etat islamique (EI), même si des noyaux djihadistes demeurent actifs dans ce pays encore fragile.

Cette décision intervient près de trois mois après l’arrivée au pouvoir de Donald Trump, défavorable depuis longtemps à la présence américaine sur place.

Les Etats-Unis disposent d’une présence militaire en Syrie depuis des années, notamment dans le cadre de la coalition internationale contre l’EI. Longtemps officiellement établis à 900 hommes, les effectifs US ont été, fin 2024, annoncés à 2000 soldats. Comme annoncé la semaine dernière par des médias israéliens, ces forces vont être réduites « à moins d’un millier de soldats dans les mois prochains »,  a déclaré Sean Parnell, le porte-parole du Pentagone. Des sources US disent que les effectifs pourraient s’établir à 500 hommes au pire.

Outre ces militaires, il faut aussi compter sur des contractors employés dans l’AoR du Commandement Centre et dont le nombre est actuellement difficile à estimer. En effet, le CENTCOM dans ses relevés trimestriels donne, depuis 2018, un chiffre global pour l’Irak et la Syrie.

Dans le plus récent relevé (janvier 2025), ces effectifs s’élevaient à 6474 contractors de toutes nationalités confondues:

Le Pentagone n’a rien précisé sur une éventuelle réduction de ces effectifs civils qui sont stables depuis plus d’un an (voir mes différents posts sur ces contractors).

Des miliciens des FS avec un Américain (probablement un contractor) en mai 2021 en Syrie. (photo U.S. Army, Spc. Isaiah Scott)

Vétérans ?

Vétérans ?

https://www.asafrance.fr/veterans/


Un parti politique français  a récemment présenté une proposition de loi  pour faire reconnaître le statut de « Vétéran ».

Le texte vise à introduire dans le droit français une notion en vigueur dans le monde anglo-saxon, notamment aux États-Unis.

 

 

 

 

L’objectif affiché est de favoriser le renforcement des liens entre les anciens militaires et leur institution en accordant à ces derniers des droits supplémentaires.

La proposition reprend une motion qui avait été débattue sans vote au CSFM (Conseil supérieur de  la fonction militaire) en 2018.

L’annonce a suscité un intérêt indéniable dans le monde combattant.

Il n’est pas dans le rôle de l’ASAF de s’impliquer dans le soutien à une proposition politique. Mais il est de son rôle et de sa responsabilité d’examiner les idées pouvant concourir à la volonté de défense  et à l’organisation de défense.

Le texte va être mis à l’examen du comité stratégique de l’ASAF pour analyser la pertinence du mot « vétéran »  dans notre  vocabulaire et notre histoire et pour peser les conséquences juridiques et financières d’un tel projet.

GCA (2S) Robert MEILLE
Vice-président de l’ASAF
02/04/2025


Lire la proposition ici : 

Proposition de loi n°1075 visant à créer un statut de vétérans des armées

Ukraine. Le grand défi des soldats démobilisés

Ukraine. Le grand défi des soldats démobilisés

 

8875831 09.03.2025 A Russian serviceman poses for a photo on the American M1 Abrams main battle tank captured amid Russia’s military operation in Ukraine, in Kursk region, Russia. Stanislav Krasilnikov / Sputnik//SPUTNIK_8875831_67cef1d87b0cc/Credit:Stanislav Krasilnikov/SPU/SIPA/2503101536

par John P. Ruehl* –  Revue Conflits – publié le 8 avril 2025

https://www.revueconflits.com/ukraine-le-grand-defi-des-soldats-demobilises/


Que faire des vétérans de la guerre d’Ukraine ? Du côté russe comme du côté ukrainien, la démobilisation pose la question cruciale du retour à la vie civile de personnes qui sont traumatisées par la guerre.

Deux ans après avoir été condamné à une peine de prison pour un meurtre commis en 2020, Ivan Rossomakhin a été recruté par une société militaire privée (SMP) russe en échange de sa liberté. Il est rentré chez lui depuis l’Ukraine en 2023 et, quelques jours plus tard, a tué une femme de 85 ans dans une ville voisine. Une semaine après le début de sa nouvelle peine en août 2024, il a été redéployé et renvoyé au front.

Son crime est l’un des nombreux commis par des condamnés graciés pour servir dans l’armée et par des soldats russes de retour au pays. « Une étude des archives judiciaires russes menée par le média indépendant Verstka a révélé qu’au moins 190 affaires pénales ont été ouvertes contre des recrues de Wagner graciées en 2023 », a déclaré un article du New York Times en avril 2024.

Le problème de la réintégration

Beaucoup sont devenus toxicomanes et alcooliques, et se sont tournés vers le crime organisé, phénomène amplifié par l’effondrement de l’Union soviétique en 1991. En outre, les vétérans tchétchènes de la guerre d’Afghanistan ont utilisé leur expérience du combat pour résister farouchement à la Russie lors de la première guerre de Tchétchénie (1994-1996).

La guerre en Ukraine produit une génération de vétérans encore plus nombreuse et aguerrie. Les pertes russes ont dépassé les 15 000 pendant près de cinq mois de guerre, dépassant ainsi une décennie de pertes soviétiques en Afghanistan.

Un article du New York Times de janvier 2025 estime qu’environ 100 000 soldats ukrainiens ont été tués jusqu’en décembre 2024, tandis que 150 000 soldats russes ont perdu la vie jusqu’en novembre de la même année.

Pendant ce temps, des centaines de milliers de personnes ont été blessées et des millions ont été envoyées sur les lignes de front. La plupart des survivants souffriront d’une forme ou d’une autre de SSPT, encore aggravée par la glorification des images de combats brutaux et de torture sur les réseaux sociaux.

Les soldats ukrainiens « ont présenté des symptômes intenses de stress psychologique », selon un article du Washington Post en 2023. Parallèlement, en 2024, Deutsche Welle a rapporté que « selon le ministère russe de la Santé, 11 000 militaires russes ayant participé à la guerre contre l’Ukraine, ainsi que les membres de leur famille, ont demandé une aide psychologique au cours d’une période de six mois en 2023 ».

La réinsertion de ces hommes dans la société sera une bataille difficile pour les gouvernements russe et ukrainien, en raison de la méfiance persistante suscitée par les échecs passés. En décembre 2022, la présidente du Conseil de la Fédération de Russie, Valentina Matviyenko, s’est engagée à empêcher une répétition du syndrome afghan et à réintégrer les anciens combattants dans la vie civile.

Cependant, alors que la guerre se poursuit, ses conséquences se font déjà sentir. Moscou et Kiev gèrent les rotations de troupes en cours tout en se préparant au retour massif des soldats et en explorant les moyens de les utiliser à des fins politiques et militaires.

Crime et troubles

Pour les vétérans soviétiques d’Afghanistan, la rhétorique dédaigneuse à l’égard de la guerre et le soutien limité à leur retour ont suscité un profond ressentiment.

Avant d’accéder au pouvoir en 1985, le dirigeant soviétique Mikhaïl Gorbatchev a qualifié la guerre d’erreur, et il a fallu jusqu’en 1994 pour que les vétérans russes de la guerre d’Afghanistan reçoivent le même statut que les vétérans de la Seconde Guerre mondiale. Ce n’est qu’en 2010 que la Russie a désigné la fin du conflit comme jour férié.

Le Kremlin a adopté une approche différente avec les vétérans de la guerre en Ukraine, les vénérant comme la « nouvelle élite » de la nation dans une lutte à mort contre l’Occident. Outre les éloges des médias, les soldats ont été rapidement nommés à des postes importants au sein du gouvernement et des entreprises. Malgré des services sociaux sous tension, le gouvernement a fourni des prestations aux familles des militaires rentrés et décédés afin de prévenir les troubles.

La décision du Kremlin de recourir au travail pénitentiaire pour augmenter les effectifs militaires, une approche qu’il avait évitée pendant la guerre en Afghanistan, a déjà eu de graves conséquences. En 2023, plus de 100 000 prisonniers avaient été recrutés, dont beaucoup avaient rejoint Wagner, la société militaire privée la plus tristement célèbre de Russie.

Bien que Wagner ait été absorbée et réorganisée après sa rébellion armée contre l’armée russe plus tard dans l’année, ses soldats ex-détenus restent une source d’indignation publique, commettant certaines des plus graves infractions violentes à leur retour et contribuant à une augmentation générale de la criminalité.

« De nombreuses fusillades ont eu lieu à Moscou, et l’armée est de plus en plus liée au crime organisé », a déclaré un rapport de 2024 dans l’Eurasia Daily Monitor.

Alors que la question attire de plus en plus l’attention du public, les services de sécurité intérieure russes, y compris la Garde nationale (Rosgvardiya), sont déjà à bout de souffle, chargés de patrouiller dans les territoires ukrainiens occupés tout en renforçant les unités de première ligne.

Leur fardeau pourrait s’alourdir si les soldats tchétchènes de retour, que Moscou a largement déployés en Ukraine, choisissent de revenir à leurs ambitions indépendantistes. D’autres mouvements nationalistes et extrémistes, aidés par des soldats endurcis, risquent de refaire surface.

Le recours de la Russie aux réseaux criminels pour son soutien logistique et financier dans sa guerre n’a fait qu’encourager ces groupes. Une fusillade en 2024 à quelques pâtés de maisons du Kremlin, liée à la « violence des entreprises », a évoqué le chaos des années 1990.

« L’économie russe, mise à rude épreuve par les sanctions et la guerre en cours, crée une atmosphère dans laquelle les élites économiques sont de plus en plus disposées à recourir à des mesures drastiques pour survivre. Dans les années 1990, les oligarques, les gangs criminels et les fonctionnaires corrompus prospéraient dans un environnement où le système juridique était impuissant », a déclaré le Moscow Times.

Avec peu de perspectives d’emploi bien rémunéré, les soldats de retour au pays pourraient être tentés de rejoindre des groupes existants ou d’en créer de nouveaux, déstabilisant ainsi les réseaux criminels russes qui sont profondément intégrés à la structure du pouvoir de Poutine.

L’Ukraine est confrontée à des défis similaires. Bien que Kiev ait été plus lente et plus prudente dans le déploiement des bataillons de prisonniers, leur réintégration dans la société ne sera pas facile. Les autorités du pays s’efforcent d’empêcher les puissantes organisations criminelles nationales d’absorber les soldats de retour au pays tout en luttant contre la menace de la résistance armée dans les régions pro-russes.

Le gouvernement ukrainien a veillé à honorer ses soldats, mais a été témoin d’une recrudescence des attaques contre les bureaux de recrutement, dont quatre en cinq jours en février 2025. Bien que les efforts de recrutement de la Russie aient également rencontré une certaine résistance, la Russie a évité la conscription à grande échelle (malgré une certaine coercition).

En revanche, l’Ukraine a largement misé sur l’enrôlement obligatoire, ce qui a suscité un antagonisme croissant à l’égard des mesures de recrutement, des tensions qui continueront à s’accroître et pourraient s’étendre après la guerre.

Les sociétés militaires privées

La guerre donne déjà un coup de fouet massif à une industrie militaire privée mondiale en plein essor, qui devrait se développer après la fin du conflit.

Les recrues des sociétés militaires privées participent depuis longtemps à un marché multinational. Certains vétérans russes d’Afghanistan affirment avoir été engagés pour servir avec les forces américaines en Afghanistan après 2001.

Cependant, le nombre même de vétérans russes et ukrainiens ayant une expérience du combat pourrait révolutionner le secteur, à l’instar de l’effondrement de l’Union soviétique et du surplus de personnel militaire qui en a résulté.

Avant 2015, les SMP russes étaient limitées à l’Ukraine, au Sénégal et à la République démocratique du Congo, mais elles se sont depuis étendues à une trentaine de pays. Contrairement au conflit ukrainien, qui est de grande ampleur et axé sur la technologie, les SMP de plus petite taille peuvent opérer efficacement dans d’autres régions, et leur déploiement a déjà contribué au retrait de l’armée française d’Afrique ces dernières années.

Le secteur militaire privé ukrainien connaît une croissance similaire et pourrait, à l’avenir, trouver grâce auprès des pays européens qui ont soutenu Kiev pendant la guerre. Compte tenu des difficultés persistantes de l’Europe à répondre aux besoins de recrutement militaire, il est probable que les vétérans ukrainiens soient utilisés pour résoudre ce problème.

En Ukraine et en Russie, les hommes démobilisés ont souvent été employés par des oligarques à leurs propres fins, une tendance qui est apparue dans les années 1990. Cette question a refait surface en 2015 lorsque le milliardaire ukrainien Igor Kolomoisky a utilisé des PMC pour combattre les séparatistes soutenus par la Russie, ainsi que pour protéger ses propres intérêts financiers, ce qui a abouti à une confrontation armée dans une compagnie pétrolière d’État.

L’incident a montré comment le pouvoir militaire privatisé peut facilement échapper au contrôle du gouvernement, ce que la Russie a connu plus tard avec la rébellion de Wagner en 2023.

Réintégration

Après l’instabilité causée par les vétérans soviétiques d’Afghanistan tout au long des années 1990, les autorités russes ont commencé à prendre des mesures plus concrètes pour les intégrer, réhabiliter leur image et exploiter leur potentiel.

En 1999, l’Alliance russe des vétérans d’Afghanistan a contribué à la création de ce qui allait devenir le parti Russie unie, soutenu par Poutine (bien qu’il soit désormais indépendant). Les vétérans de la guerre d’Afghanistan et de la guerre de Tchétchénie ont également rejoint l’OMON, la force de police spéciale russe utilisée pour réprimer les manifestations, tandis que d’autres groupes de vétérans paramilitaires ont contribué à l’annexion de la Crimée par la Russie en 2014, lorsque la force militaire était limitée.

Plus récemment, les organisations de vétérans afghans ont joué un rôle essentiel dans le soutien à la guerre du Kremlin en Ukraine en fournissant des volontaires (l’Ukraine mettant en commun ses vétérans afghans) et en mobilisant des soutiens.

L’évolution du mouvement, qui est passé de vétérans anti-guerre désabusés à l’un des plus fervents partisans de la guerre en Ukraine, montre l’efficacité de sa remise à neuf et la reconnaissance de leur valeur par le Kremlin.

Il n’est donc pas surprenant que le Kremlin ait activement empêché la formation d’organisations indépendantes de vétérans de la guerre actuelle en Ukraine. Cette action de centralisation des vétérans dans des initiatives formelles garantit qu’aucun groupe ne puisse défier l’autorité gouvernementale, et qu’ils puissent être organisés et utilisés lors de futurs conflits.

L’attitude des militaires de retour des deux côtés sera également influencée par l’issue de la guerre. Les conflits considérés comme futiles et de moins en moins approuvés par l’opinion publique, tels que les conflits américains en Irak et en Afghanistan ou la guerre soviétique en Afghanistan, laissent des séquelles psychologiques durables chez les vétérans, augmentant le risque de suicide et de troubles sociaux.

Au-delà du nombre impressionnant de victimes civiles et combattantes, ces guerres ont engendré du ressentiment chez les soldats de retour au pays, dont beaucoup ont eu le sentiment que leur service faisait partie de guerres d’agression ratées.

Il est donc essentiel que les dirigeants politiques, les médias et la société définissent la victoire. Les soldats qui croient avoir combattu dans une guerre juste et victorieuse sont plus susceptibles de se réinsérer avec un sentiment d’utilité, par rapport à un camp perdant qui se sent abandonné et aigri.

Les vaincus nourriront probablement une plus grande animosité envers leur gouvernement, auront des griefs concernant un soutien inadéquat et seront confrontés à un risque accru d’instabilité sociale, ce qui incitera les deux parties à revendiquer la victoire.

Il peut être dans l’intérêt de Moscou et de Kiev d’éviter de déclarer la fin de la guerre et de poursuivre la démobilisation, de peur d’être perçus comme ayant admis leur défaite et d’entraîner le retour de soldats agités et sans emploi. Les économies russe et ukrainienne étant désormais fortement orientées vers la guerre, une fin rapide provoquerait des chocs économiques.

Cependant, une guerre non concluante qui s’essouffle progressivement pourrait permettre aux vétérans de se réinsérer lentement dans la société, les gouvernements louant leur service pour générer de la bonne volonté. D’autres seront encouragés par Moscou et Kiev à chercher des débouchés dans d’autres conflits, exportant des hommes prêts au combat plutôt que de les ramener chez eux.


*John P. Ruehl est un journaliste australo-américain vivant à Washington, D.C., et correspondant aux affaires mondiales pour l’Independent Media Institute. Il contribue à plusieurs publications sur les affaires étrangères et son livre, « Budget Superpower: How Russia Challenges the West With an Economy Smaller Than Texas », a été publié en décembre 2022.

Cet article a été produit par Economy for All, un projet de l’Independent Media Institute, et est republié avec autorisation.

«Immaturité» des engagés, sanctions trop faibles : un rapport pointe les causes des désertions en hausse dans l’Armée de terre

«Immaturité» des engagés, sanctions trop faibles : un rapport pointe les causes des désertions en hausse dans l’Armée de terre

Publié le 19 mars dernier, ce rapport parlementaire énumère les multiples raisons de cette augmentation et dresse des pistes pour endiguer le phénomène.

Les chiffres sont là, implacables. Il ne reste qu’à les comprendre. Les désertions au sein des personnels militaires de l’armée de terre sont en forte hausse depuis 2022, d’après un rapport parlementaire publié le 19 mars dernier par l’Assemblée nationale, rédigé par les députés Loïc Kervran (Horizons) et Caroline Colombier (RN), et intitulé «recrutement et fidélisation : gagner la bataille des ressources humaines du ministère des Armées» .

D’après les chiffres transmis par l’État-major des armées, il y a eu 1485 désertions en 2022, soit une hausse de 56% par rapport à l’année précédente. Ils étaient 1253 en 2023, soit un chiffre en légère baisse qui correspond toutefois à une augmentation de 31% par rapport à 2021. Avant 2022, les chiffres étaient globalement stables, avoisinant les 900 départs par an, avec une baisse notable en 2020, du fait de la crise du Covid.

Des raisons multiples

Selon l’article L321-2 du Code de justice militaire, un militaire est déclaré déserteur s’il «s’évade, s’absente sans autorisation, refuse de rejoindre sa formation de rattachement ou ne s’y présente pas», sur le sol français ou à l’étranger, ou s’il ne se présente pas au départ d’une mission se déroulant à l’extérieur du territoire national. La désertion est constatée 7 jours après l’absence, et punie de 5 à 10 ans d’emprisonnement, en vertu de l’article 698 du Code de procédure pénale. Le statut de déserteur concerne seulement les personnels militaires du ministère des Armées.

Le rapport pointe trois facteurs principaux : le premier fut la guerre en Ukraine, qui a eu pour conséquence le départ de 85 légionnaires d’origine ukrainienne pour leur pays. Traditionnellement, et officieusement, ces départs sont tolérés par l’encadrement lorsque les légionnaires ressortissants d’un pays en guerre repartent chez eux pour se battre. Ça s’était produit dans les Balkans, et presque à chaque conflit. Même si elles sont comptabilisées comme telles, ce ne sont pas des désertions comme les autres.

Les deux autres facteurs principaux sont la sortie de la crise du Covid, avec un «effet de rattrapage des départs», et la «période de plein-emploi» qui a entraîné une hausse des départs alimentée par les réformes et les radiations disciplinaires.

Le texte relève d’autres facteurs de désertion, comme les «incertitudes et versatilités professionnelles  des jeunes actifs» et, plus largement, «un problème d’adaptation à la vie militaire et d’acceptation des singularités et contraintes de cet engagement». Il y aurait une part «d’immaturité toujours difficile à modéliser», liée à la difficulté pour certains engagés de respecter leur contrat jusqu’au bout.

À cela s’ajoute une justice trop peu répressive. «Les peines prononcées sont des peines assorties d’un sursis simple allant de 15 jours à 6 mois, voire par un classement sans suite» affirme le texte. Les sanctions ne seraient donc pas assez dissuasives pour endiguer les défections. «La section AC3 du Parquet de Paris – affaires militaires et atteintes aux intérêts fondamentaux de la Nation – classe systématiquement sans suite», déplore-t-il.

Lutter contre la désertion, fidéliser les personnels

Les armées ont récemment développé des mesures pour lutter contre le phénomène, notamment «la création d’alternatives au recours à la désertion ou à l’absentéisme sous couvert médical», une individualisation du parcours à travers la prise en compte des ambitions personnelles, ainsi que la valorisation des parcours des militaires du rang. 

Dans une perspective plus large, le texte rappelle que l’objectif est d’améliorer le bien-être des personnels, militaires et civils. Le programme «Fidélisation 360», annoncé en mars 2024 par le ministre des Armées Sébastien Lecornu, a pour objectif, comme l’indique son nom, de «fidéliser les effectifs, militaires et civils», à travers cinq mesures principales. Entre autres, l’aide à la mobilité familiale et la mutation, l’accès à des prêts immobiliers à des taux avantageux, ou encore l’intégration de primes dans le calcul des droits à pension à partir de 2026. En conclusion, le rapport énumère douze recommandations pour accroître la fidélisation. Il conseille par exemple de doter chaque département d’un CIRFA commun aux trois armées (centres de recrutement, ndlr), de veiller à l’exécution des mesures de revalorisation des rémunérations, ou encore de permettre aux régiments de recruter directement les candidats qui souhaitent les rejoindre.

Ces mesures sont à comprendre en lien avec les aspirations affichées par la Loi de programmation militaire 2024-2030, qui souhaite porter le budget consacré à la Défense à 67 milliards d’euros en 2030, soit 16,5 milliards de plus que ce que prévoit le budget de 2025. Le ministère des Armées ambitionne d’augmenter ses effectifs de 6.000 hommes en six ans, en plus de son objectif d’atteindre le seuil de 80.000 réservistes.

200 militaires charentais vont s’entraîner jour et nuit pendant une semaine en Dordogne

200 militaires charentais vont s’entraîner jour et nuit pendant une semaine en Dordogne

Les exercices vont concerner 90 communes de Dordogne. – @Ministère des Armées – 515e RT

C’est un exercice d’ampleur qui va débuter ce lundi 31 mars en Dordogne à 13 heures, 200 militaires charentais du 515e régiment du Train à Angoulême vont venir dans le nord du département avec 50 véhicules. L’armée propose une rencontre entre la population et les soldats ce mercredi 2 avril.

Plus de 200 militaires, 50 véhicules de l’armée vont circuler dans près de 90 communes de Dordogne à partir de 13 heures, ce lundi 31 mars. Le régiment du 515ᵉ régiment du Train, basé à Angoulême (Charente), va venir passer cinq jours dans le nord du département pour s’entraîner dans une phase de “haute intensité” pour l’armée française. L’exercice a été nommé “Aquafondata” et vise à mettre en situation les militaires pour des missions de reconnaissance, de surveillance, de protection de sites sensibles. Il va durer jusqu’au vendredi 4 avril.

Des tirs jour et nuit

Les habitants des 90 communes, dont Brantôme, Négrondes, Sarlande, Tourtoirac ou encore Mensignac, vont voir passer des militaires et ils vont entendre des bruits de tirs, de jour comme de nuit. Les militaires vont tirer avec des balles d’exercice qui reproduisent les bruits, mais qui n’ont aucun effet. L’armée précise que les “déchets” des munitions seront ramassés.

 L'exercice va concerner 89 communes du nord-est du département
L’exercice va concerner 89 communes du nord-est du département – Google Maps

Une rencontre avec la population le mercredi 2 avril

Pour permettre aux militaires de s’entraîner, l’armée demande aux habitants de ne pas aller à leur rencontre pendant les missions. Cependant, une rencontre avec la population, est organisée ce mercredi 2 avril après-midi (de 13h à 17h) à Thiviers, sur la Place de la République.

Les habitants pourront rencontrer les soldats, mais aussi découvrir les véhicules militaires et faire des baptêmes. Les motards de la gendarmerie nationale seront également présents. Il y aura une séance de tir avec des pistolets avec des billes ou des mousses.

Emmanuel Macron veut relancer son «Service national universel»


Emmanuel Macron prononce un discours devant un Mirage 2000 et un Rafale à la base aérienne de Luxeuil-Saint-Sauveur, France, le 18 mars 2025.

Rarement un discours d’Emmanuel Macron aura suscité autant de réactions immédiates que le dernier en date. C’était le 5 mars dernier, en direct à 20 heures sur France 2. «La patrie a besoin de vous et de votre engagement», a déclaré le président français, en costume et cravate noirs.

En invitant ses concitoyens à ne pas sous-estimer le danger que représente la Russie pour l’Europe et la France dans un monde de plus en plus incertain, le président français a peut-être même déclenché davantage de réactions qu’il ne l’aurait souhaité.

Le peuple semble en tout cas avoir pris l’appel présidentiel au pied de la lettre: 86% des Français, selon un sondage Ipsos, se sont déclarés favorables au rétablissement du service militaire obligatoire. Près de trente ans, donc, après son abolition.

Pas une «option réaliste»

À peine le sondage était-il paru que celui qui est également chef des armées – le plus haut gradé militaire de France est, lui, chef d’état-major des armées (CEMA) – a tenté de freiner la dynamique qu’il avait déclenchée. Le service militaire obligatoire n’est pas une «option réaliste», a-t-il souligné lors d’un entretien accordé en fin de semaine dernière à des titres régionaux.

La France «n’a plus la base, plus la logistique» pour remettre en place une conscription. «À partir du moment où on est allé vers la professionnalisation de nos armées, focalisées sur l’opérationnel, les réemployer pour encadrer 800’000 jeunes […] n’est absolument pas un schéma opérant», a-t-il indiqué.

Mais, a-t-il précisé, il présentera dans les semaines à venir un «grand nouveau projet» de réforme du Service national universel (SNU), «afin de correspondre aux besoins de la nation et aux priorités identifiées». Le SNU est l’un des thèmes favoris d’Emmanuel Macron depuis qu’il est au pouvoir.

Dissuasion nucléaire

Revenons d’abord sur l’option «irréaliste». Jacques Chirac avait mis au rebut le service militaire obligatoire dans les années 90. La loi est entrée en vigueur en 1997. Aujourd’hui âgé de 47 ans, Emmanuel Macron est le premier président de l’Hexagone à ne pas avoir fait son service militaire.

L’abolition de la conscription avait en fait déjà été envisagée sous la présidence de Charles de Gaulle. La puissance de la dissuasion nucléaire acquise à l’époque avait réduit l’importance d’une défense conventionnelle. Jacques Chirac a acté cet état de fait avec la fermeture de bases et la vente de nombreuses casernes.

Le sous-marin nucléaire d’attaque Suffren de classe Barracuda de la marine française, amarré dans le port de Toulon, avec un drapeau français visible à l’arrière-plan.

Quand Emmanuel Macron dit aujourd’hui que la France n’a «pas de base et pas de logistique» pour un retour à la conscription, il dit vrai. Tout manque: infrastructures, instructeurs, matériel… Sans parler de l’argent nécessaire à la reconstruction d’une armée d’un million de membres permanents.

L’armée professionnelle française compte environ 200’000 soldats. Il est prévu d’augmenter quelque peu l’armée de réserve, avec un réserviste pour deux soldats professionnels d’ici à 2035. Le nombre total de réservistes atteindrait alors les 300’000 membres.

Des clivages qui bougent

À la télévision française, on débat désormais pour savoir s’il ne serait pas plus intelligent que chaque jeune Français – et chaque jeune Française qui le souhaite – fasse son service. Les clivages politiques traditionnellement liés à la question sont en train de bouger.

Jusqu’à présent, c’est presque exclusivement la droite bourgeoise et l’extrême droite qui plaidaient en faveur du service militaire obligatoire. Le camp de droite voit dans l’armée une école de la République et – une vision très controversée – le moyen éprouvé d’enseigner les valeurs de la nation aux personnes issues de l’immigration: en position de respect devant le drapeau tricolore, en entonnant la Marseillaise. L’extrême droite parle d’assimilation.

La gauche, elle, a toujours pensé que c’était à l’école et à elle seule de faire des jeunes de toutes origines des citoyens responsables, au fait de leurs droits et devoirs. Mais les frontières idéologiques ne sont plus aussi nettes, comme le prouvent les 86% du sondage. C’est sans aucun doute dû à l’actualité géopolitique brûlante et à ce que le locataire de l’Élysée a qualifié de «menace» le 5 mars dernier.

Une sorte de creuset de la République

Emmanuel Macron veut maintenant redessiner le SNU. Un projet qui avait failli être mis au placard pour des raisons d’économies: alors premier ministre, Michel Barnier avait voulu le sacrifier afin de récupérer quelques milliards d’euros pour son budget d’austérité, faisant dire qu’il démantelait un pilier du macronisme. Mais Michel Barnier est tombé après seulement trois mois de mandat – et le SNU a survécu.

L’idée avait été lancée par Emmanuel Macron avant sa victoire de 2017. C’était même une de ses promesses de campagne: celle d’un lieu où les Français pourraient à nouveau se rencontrer au-delà des classes sociales, une sorte de creuset de la République, et ce pour une durée minimale d’un mois.

Le SNU, qui aurait été effectué dans des établissements militaires ou civils éloignés du lieu d’origine, était prévu pour des jeunes de 15 à 17 ans. Au programme, obligatoire: vie commune, lever matinal, lever du drapeau, hymne national, port de l’uniforme et cours d’instruction civique.


Mais la mise en œuvre s’est vite avérée compliquée et coûteuse, et l’ «obligatoire» s’est rapidement transformé en «facultatif». Même avec des ambitions réduites, la concrétisation n’a cessé d’être repoussée. Comme souvent, une grande annonce n’a pas résisté à la réalité.

Le président français veut donc redéfinir le SNU pour qu’il soit en phase avec son époque. Comment exactement? Ce n’est pas encore clair. La tranche d’âge sera-t-elle élargie? Le SNU sera-t-il à nouveau rendu obligatoire?

Il semble en tout cas que les Français soient désormais prêts à accepter des obligations qu’ils auraient refusées il y a peu.

Devenir réserviste oui, mais pour quelles missions et quel salaire ?

Devenir réserviste oui, mais pour quelles missions et quel salaire ?

La patrie a besoin de vous, de votre engagement“, a déclaré Emmanuel Macron aux Français lors de son allocution du 5 mars 2025. Une façon d’inciter davantage de citoyens à rejoindre la réserve opérationnelle militaire à l’heure où “la menace [russe] revient à l’est”. Le ministre des Armées évoque lui aussi, régulièrement, l’augmentation du nombre de réservistes dans les armées, la gendarmerie et la police avec un objectif : compter 160 000 réservistes d’ici à 2030, soit deux fois plus que les 84 000 réservistes actuellement engagés.

L’armée de Terre, l’armée de l’Air et la Marine nationale recrutent des réservistes qui, une fois engagés, doivent pouvoir être mobilisés sur des missions diverses listées par le ministère des Armées : des missions de combat opérationnelles sur le territoire national ou hors de France ; des missions de protection et de résilience du territoire national avec la défense de sites militaires et civils lors d’opérations Sentinelle ; des missions de compétence sur un domaine d’expertise ; et des missions de rayonnement pour renforcer le lien entre la nation et les armées.

Des grandes lignes communes aux trois armées, auxquelles s’ajoutent des missions plus spécifiques aux besoins de chaque corps militaire. “L’armée de Terre cherche vraiment des militaires à temps partiel, qui permettent soit d’augmenter des régiments à faible préavis ou remplacer des pertes, là aussi dans un temps très court. La Marine et l’armée de l’Air n’ont pas ces enjeux mais ont besoin de profils plus techniques, de spécialistes, explique le réserviste Stéphane Audrand au Parisien.

Le recrutement de réservistes et l’attribution des missions se fait donc en fonction du profil de chaque candidat, notamment son niveau d’étude, ses compétences particulières, et un éventuel passé militaire sachant qu’avoir déjà eu une expérience dans les armées n’est pas obligatoire. Des étudiants peuvent enfin être recrutés pour des missions opérationnelles de terrain ou logistique dans les armées de Terre et de l’Air ou membre d’équipage dans la Marine. Les personnes plus qualifiées peuvent obtenir des grades (militaire du rang, sous-officier ou officier) et se voir attribuer des missions correspondantes. Enfin, les personnes présentant des diplômes d’université, de grandes école ou des compétences spécifiques et des expertises peuvent rejoindre des unités particulières comme le renseignement, la communication, l’ingénierie, les ressources humaines, la logistique ou encore le pilotage pour les besoins spécifiques de l’armé de l’Air ou encore la plongée dans la Marine. Chaque armé précise les offres ouvertes aux réservistes en précisant les compétences nécessaires et la durée de l’engagement.

Outre les armées, la gendarmerie et la police recrutent des réservistes. Dans ces secteurs, les missions diffèrent et répondent à trois principales catégories : des missions de sécurisation, de lutte anti-terroriste et de police judiciaire pour appuyer lors des enquêtes.

Des missions rémunérées

Les membres de la réserve opérationnelle militaire sont rémunérés pour leur engagement. Les réservistes signent des contrats pouvant aller de 1 à 3 ans et jusqu’à 5 ans maximum, renouvelables. Ils sont mobilisables sur des activités miliaires pour une durée déterminée avec l’autorité militaire qui les emploie et pour un maximum de 60 jours par an. Un volume qui peut passer à 150 ou 210 jours dans des conditions particulières. En moyenne, les réservistes sont engagés sur des missions 37 jours par an.

Ces missions sont rémunérées selon des barèmes différents en fonction du corps militaire rejoint. L’armée de Terre paye les réservistes entre “40€ et 200€ par jour en fonction de votre grade“. Une somme à laquelle s’ajoutent des “indemnités particulières en raison des fonctions exercées, des risques courus, du lieu d’exercice du service ou de la qualité des services rendus”. La Marine évoque une rémunération “à partir de 53€ par jour” qui “évolue pendant le contrat d’engagement au gré de votre avancement aux grades supérieurs”. En gendarmerie, la rémunération est d’au moins 60€ par jour selon le niveau du réserviste, en police elle débute à 74€ en région et à 80€ en Ile-de-France. Ces rémunérations sont nettes d’impôts.

A noter que ces rémunérations sont valables uniquement pour les réservistes opérationnels, les membres de la réserve citoyenne de défense et de sécurité étant bénévoles.

Qui peut devenir réserviste ?

Il faut répondre à plusieurs critères pour pouvoir devenir réserviste : être de nationalité française, être âgé d’au moins 17 ans, être en règle au regard des obligations du service national, ne jamais avoir été condamné pour un crime et jouir de ses droits civiques. Il faut présenter une bonne condition physique qui sera évaluée lors d’une visite médicale avec un médecin militaire. A noter que selon les corps militaires un âge maximum peut aussi être un critère moins de 72 ans dans l’armée de Terre, moins de 67 ans dans la police et moins de 45 ans dans la gendarmerie. Une formation militaire n’est pas nécessaire, cette dernière étant prévue lors du processus de recrutement.