Epargné par les coupes, même si des inconnues demeurent, le ministère des Armées va voir son budget augmenter de 3,3 milliards d’euros en 2025, conformément à la loi de programmation militaire. Futur porte-avions, drone de combat UCAV, Rafale… Gros plan sur les équipements livrés et commandés.
Vue d’artiste du porte-avions de nouvelle génération (PANG). Le lancement officiel de ce programme de plus de 10 milliards d’euros est prévu en 2025 – Naval Group / Chantiers de l’Atlantique / TechnicAtome
L’essentiel est sauf. C’est le sentiment largement partagé dans les armées à l’annonce des arbitrages du projet de loi de finances (PLF) 2025. Comme prévu par la loi de programmation militaire 2024-2030 (LPM), le budget de défense, si le PLF est adopté, va augmenter de 3,3 milliards d’euros l’année prochaine, à 50,5 milliards d’euros. Un effort conséquent, d’autant plus marquant qu’il tranche avec le régime sec imposé à d’autres ministères. Le ministre des Armées Sébastien Lecornu assume sans ciller. « Pourquoi la défense ne fait-elle pas l’objet de coups de rabot ? Les efforts ont déjà eu lieu, assurait le ministre le 14 octobre devant la commission de la défense de l’Assemblée nationale.Je rappelle les chiffres : 54.000 postes supprimés [de 2008 à 2013, NDLR], un régiment sur deux de l’armée de terre et 11 bases aériennes fermées. »
Comment vont se répartir ces milliards de la défense ? Les deux tiers de l’effort (31,3 milliards) portent sur les équipements. La masse salariale représente 27 % du budget (13,6 milliards). Le reste se répartit entre les coûts de fonctionnement (4,8 milliards) et la provision destinée à financer les opérations extérieures (OPEX) et missions intérieures (Missint). Cette dernière passe de 800 millions d’euros en 2024 à 750 millions en 2025.
Près de 6 milliards pour la dissuasion
Comme chaque année, la dissuasion reste un des postes majeurs de dépenses. L’investissement dans le nucléaire atteindra 5,8 milliards d’euros en 2025, soit une hausse de 500 millions d’euros. L’année 2025 verra notamment le lancement du programme de la nouvelle version du missile nucléaire stratégique M51 embarqué sur les sous-marins lanceurs d’engins (SNLE), dite M51.4, prévue pour le milieu des années 2030.
L’investissement dans la future génération de sous-marins lanceurs d’engin, dite SNLE 3G, monte également en puissance. La première tôle du premier exemplaire a été découpée en mars dernier sur le site Naval Group de Cherbourg. Le ministère des Armées a prévu d’investir 752 millions d’euros en 2025 sur ce programme, vers lequel sont fléchés 12.9 milliards d’euros en tout. Le premier SNLE 3G, qui pourrait atteindre 150m de long et un poids de 15.000 tonnes (trois fois le poids des sous-marins nucléaires d’attaque de classe Suffren), doit entrer en service en 2035. La livraison du dernier des quatre engins est prévue en 2050.
821 millions d’euros fléchés vers le drone de combat
2025 sera également l’année du lancement officiel du programme de porte-avions de nouvelle génération (PANG), un géant de 75.000 tonnes qui doit succéder au Charles de Gaulle (42.000 tonnes) à l’horizon 2038. Selon les annexes du PLF 2025, 10,9 milliards d’euros doivent être investis dans ce projet, dont 224 millions sur l’année 2025.
L’année 2025 va aussi la montée en puissance de l’investissement dans le Rafale F5, la future version connectée du chasseur français, et du drone de combat qui l’accompagnera à l’horizon 2030. Ce drone va faire l’objet, selon les annexes du projet de loi de finances, d’un investissement de 821 millions d’euros, qui s’étalera sur les prochaines années avec une montée en puissance progressive (55 millions en 2025, 190 en 2026).
500 millions pour le système sol-air SAMP/T NG
Les autres grands agrégats du budget de défense reflètent les priorités du ministère : 1,9 milliard d’euros dédié aux munitions, un chiffre en hausse de 400 millions ; 700 millions d’euros pour le spatial, avec notamment la mise en orbite, prévue en décembre, du satellite espion CSO-3 ; 450 millions d’euros pour les drones et robots ; 400 millions d’euros pour les forces spéciales ; 500 millions d’euros pour la défense sol-air (système SAMP/T NG), 500 millions pour le renseignement, 300 millions pour l’IA, 300 millions pour le cyber, et 265 millions pour la fidélisation des militaires et civils du ministère, un des chantiers majeurs de l’hôtel de Brienne.
Ces investissements importants se retrouvent dans les livraisons d’équipements attendues en 2025. Parmi les principales, le ministère attend la livraison de la frégate FDI Amiral Ronarc’h, 2 Atlantique 2 rénovés, de 14 Rafale et 12 Mirage 2000D rénovés, d’un ravitailleur A330 MRTT et un avion de transport A400M, de 6 hélicoptères Tigre HAD, mais aussi de 308 véhicules Scorpion (Serval, Griffon, Jaguar), 28 véhicules légers et 30 poids lourds dédiés aux forces spéciales, de 8.000 fusils d’assaut HK416, ainsi que de lots de torpilles lourdes F21, des missiles Exocet, Scalp et Akeron MP.
Côté commandes, outre le contrat pour le porte-avions de nouvelle génération, le PLF prévoit la commande d’une frégate FDI, de missiles Mistral, Scalp, Mica, Meteor, Akeron MP mais aussi de camions-citernes et de bâtiments hydrographiques de nouvelle génération.
700 créations de postes
L’entraînement et la maintenance bénéficient également largement de la hausse des crédits. 7,8 milliards d’euros seront consacrés à la préparation et l’emploi des forces (+ 364 millions), et 5,9 milliards d’euros au maintien en condition opérationnels des matériels.
Les RH montent également en puissance : le ministère prévoit de créer 700 postes sur l’année 2025, dont 194 dans l’IA et le numérique, 119 dans les fonctions de soutien, 170 pour la DGSE, et une soixantaine pour la dissuasion (Direction des applications militaires du CEA). Les effectifs devraient atteindre 271.100 agents, dont trois quarts de militaires et un quart de civils.
OPEX et gels de Bercy, les deux inconnues
Dans ce panorama plutôt réjouissant pour les armées subsistent quand même quelques incertitudes majeures. La première, c’est le sort des quelque 2,6 milliards d’euros de crédits gelés par Bercy sur l’exercice 2024. Sébastien Lecornu a souligné, devant le Sénat et l’Assemblée nationale, que les crédits mis en réserve avaient toujours été dégelés les années précédentes. Si ce n’était pas le cas cette année, l’hôtel de Brienne entamerait 2025 avec une sorte de déficit de 2,6 milliards d’euros, qui obérerait d’autant la hausse prévue du budget.
L’autre incertitude réside dans le financement du surcoût des opérations extérieures (OPEX) et intérieures de l’année 2024. La provision de 800 millions d’euros destinée à financer ces opérations sera, à l’évidence, insuffisante pour couvrir tous les coûts assumés par l’armée. Les déploiements en Roumanie (mission Aigle) et en Estonie (Lynx) coûtent cher : le coût de la mission Aigle avait été estimé à 700 millions d’euros en 2022 par le sénateur Dominique de Legge, rapporteur spécial des crédits de défense.
L’effort financier des armées pour la sécurisation des Jeux olympiques et paralympiques de Paris était quant à lui estimé entre 300 et 400 millions d’euros par le chef d’état-major des armées, le général Thierry Burkhard, lors d’une audition devant les députés de la commission de la Défense le 15 octobre.
300 millions d’avoirs russes récupérés
Selon la LPM, le surcoût OPEX, s’il dépasse la provision annuelle inscrite en loi de finances, est pris en charge par un effort interministériel, à due proportion des budgets respectifs des ministères. Si cet engagement n’était pas tenu, ce sont plusieurs centaines de millions d’euros de dépenses imprévues que devrait honorer le ministère.
Ce dernier bénéficie certes de la baisse de l’inflation, qui lui permettra d’économiser 400 à 600 millions d’euros sur l’année 2024, selon Sébastien Lecornu. Mais cette somme a été fléchée, de même que les 300 millions d’euros issus des intérêts des avoirs russes gelés, vers l’aide à l’Ukraine. En cas de mauvaise surprise, l’hôtel de Brienne devra trouver les fonds ailleurs.
Le ministère des Armées s’est très vite intéressé au potentiel de l’intelligence artificielle [IA] pour la conduite de ses opérations. D’où les programmes Artemis IA [ARchitecture de Traitement et d’Exploitation Massive de l’Information multi-Sources] et TORNADE [Traitement Optique et Radar par Neurones Artificiels via Détecteur] ou encore les études MMT [Man-Machine-Teaming] et HYPERION [pour le combat terrestre]. En outre, il a défini un cadre éthique pour l’usage de cette technologie
Mais il s’agit désormais d’aller plus loin, la Loi de programmation militaire [LPM] 2024-30 précisant que les armées devront être en mesure de « traiter de façon autonome le flux de données apporté par les capteurs dont elles disposent » et de consolider leur « capacité d’appréciation des situations stratégiques et tactiques ». D’autres applications sont envisagées, en particulier dans le domaine de la robotique et dans celui du Maintien en condition opérationnelle [MCO].
À cette fin, en mars dernier, le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, a annoncé la création de l’Agence ministérielle de l’intelligence artificielle de défense [AMIAD], censée être le pendant de la Direction des application militaires [DAM] du Commissariat à l’énergie atomique et des énergies renouvelables [CEA], laquelle est dédiée à la dissuasion nucléaire.
La mission de l’AMIAD sera de « conceptualiser, voire fabriquer, l’intelligence artificielle dans les grands programmes militaires, actuels comme futurs ». Et, pour cela, à l’instar de la DAM/CEA, elle disposera de son propre supercalculateur « classifié » qui permettra de tester l’IA embarquée dans les systèmes d’armes. En outre, il pourra être utilisé par les industriels de la défense, sans « crainte d’espionnage ». En clair, il ne sera évidemment pas question de la « brancher » à un réseau.
Devant être le plus puissant d’Europe en matière d’IA de défense, ce supercalculateur doit être mis en service en 2025. Aussi, sans attendre, il a fait l’objet d’un appel d’offres, dont le montant est compris entre 200 et 300 millions d’euros. Deux industriels se sont manifestés : Hewlett Packard [associé à Orange] et Atos.
À noter que, pour une très grande part, ce contrat profitera à l’industriel qui fournira les processeurs de type NPU [Neural Processing Unit]. Et comme l’américain Nvidia occupe une position dominante sur le marché [88 %], il y a tout lieu de penser qu’il en sera le grand bénéficiaire.
Quoi qu’il en soit, ces derniers jours, plusieurs sources ont indiqué que l’offre du tandem Hewlett Packard / Orange avait les faveurs de la Direction interarmées des réseaux d’infrastructure et des systèmes d’information, chargée d’instruire ce dossier. Et cela alors que, bien que très affaibli, Atos semblait avoir les meilleures cartes en main pour s’imposer.
Mais les jeux sont loin d’être faits. C’est ce qu’a en effet expliqué M. Lecornu, lors d’une audition à l’Assemblée nationale, le 14 octobre. « Le marché est toujours en cours. Et comme tous les marchés publics toujours en cours, il faut faire preuve de prudence », a-t-il dit, avant de dénoncer certaines manœuvres autour de cette procédure.
« Pour être direct, j’invite les parlementaires à la plus grande des prudences, notamment sur toutes les approches de lobbies divers et variés puisque j’ai été frappé de voir une agitation parisienne importante sur ce sujet. Et en général, cette agitation n’est pas gratuite », a lancé le ministre.
« Les entreprises font bien ce qu’elles veulent avec leur argent pour toucher en influence les différents décideurs mais lorsqu’on parle de la mise en concurrence sur des sommes importantes, sur des marchés publics en cours, je pense que, collectivement, il nous faut faire attention. Pour être transparent, il y a des approches du ministère qui, pour moi, interrogent», a poursuivi M. Lecornu
Quoi qu’il en soit, si le marché de ce supercalculateur n’a pas été attribué, c’est que les deux offres reçues interrogent. Selon le ministre, l’une est « anormalement faible » [l’impératif de « souveraineté » n’est pas une excuse, a-t-il suggéré]. Quant à la seconde, elle « pose la question » de savoir si elle « n’est pas anormalement forte » par rapport à la première.
Et « quand je dis que les deux réponses sont très différentes, elles le sont sur les délais, le prix, la performance et le ‘staff’ qui est mis. Quiconque ayant fait une CAO [commission d’appel d’offres, ndlr] dans une mairie, un département voit bien ce que cela peut vouloir dire », a dit le ministre.
Aussi, pour tirer les choses au clair, M. Lecornu a dit avoir saisi le Contrôle général des armées [CGA] pour qu’il « reprenne l’ensemble de la procédure du marché », tant sur la forme que sur le fond. Il doit rendre ses conclusions dans dix ou quinze jours.
Chose promise, chose due : le gouvernement Barnier n’a pas touché à la trajectoire budgétaire des armées dans le projet de loi de finances pour 2025 dévoilé aujourd’hui. Sauf écueil parlementaire, les crédits alloués à la défense bondiront de 3,3 Md€ l’an prochain conformément à la loi de programmation militaire 2024-2030.
Les dépenses militaires ont survécu à la vague d’austérité actée dans le PLF 2025. Quand d’autres devront se serrer la ceinture pour participer au redressement des comptes publics, les armées verront leurs crédits grimper à 50,54 Md€. De quoi fournir aux armées « les moyens de se moderniser et de préparer l’avenir pour répondre à leurs missions dans un contexte international dégradé et incertain », pointe un document publié ce soir par Bercy.
De ce budget record, 10,6 Md€ viendront alimenter les grands programmes d’armement. Soit une hausse de 16% ou (1,5 Md€) par rapport à la loi de finances initiale 2024. Les ressources allouées au maintien en condition opérationnelle augmentent à nouveau sensiblement pour atteindre 5,9 Md€, contre 5,7 Md€ cette année.
« Enfin, une partie de ces crédits permettra au ministère des armées de faire face à ses nombreux engagements internationaux, dans un monde marqué par un regain de violence (guerre en Ukraine, situation au Proche et Moyen Orient…) ». Un dixième de la manne sera consacrée au fonctionnement et aux activités opérationnelles, quand 1% est fléché vers les OPEX et MISSINT. Il faudra attendre la semaine prochaine et le lancement d’un cycle d’auditions pour mieux chiffrer les efforts proposés pour chaque programme.
Le document prévoit par ailleurs de renforcer les effectifs à hauteur de 700 nouveaux postes « afin de répondre aux enjeux de transformation des armées », dont 70 au profit de la Direction des applications militaire du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA-DAM). Ici aussi, la cible inscrite dans la LPM est respectée à la lettre.
L’horizon est pour l’instant dégagé, mais d’âpres discussions parlementaires sont attendues au cours des prochaines semaines. De même, l’étendue des coupes budgétaires n’est pas totalement arrêtée, car le gouvernement compte bien proposer « au cours des débats, par amendements, des économies budgétaires supplémentaires à hauteur de 5 Md€ sur les budgets ministériels, permettant d’atteindre une cible de déficit public de -5,0 % sur laquelle il s’est engagé pour 2025, et une baisse de la dépense publique primaire en volume ».
Face à la menace russe, l’armée de terre française muscle sa logistique
L’armée de terre va participer à plusieurs exercices d’envergure sur le flanc est de l’Europe. La France veut montrer à ses alliés ses capacités de projection.
Rentrée studieuse pour l’armée de terre française. Son chef d’état-major (Cemat), le général Pierre Schill, a dressé, vendredi 4 octobre à Lille, les grandes lignes du programme qui attend les quelque 130 000 soldats français dans les mois et les années à venir. Le lieu n’a pas été choisi au hasard. C’est dans la ville du Nord que se trouve le Commandement Terre Europe (CTE) et le Commandement de la Force et des opérations terrestres (CFOT). Deux états-majors qui regardent désormais en grande partie vers l’est de l’Europe.
Un engagement important de nos forces est devenu une hypothèse crédible, a prévenu le général Schill, avec une « menace russe présente pour les années à venir à l’est de notre continent ». L’armée française doit être prête à la fois à intervenir « ce soir » tout en préparant les engagements du futur. La LPM de 2024-2030 et ses 413 milliards d’euros pour les armées, permet d’envoyer un premier message de volonté aux alliés et pays compétiteurs de la France.
Une brigade déployée en dix jours
Expérience du combat, force morale présente, polyvalence… Le Cemat a listé les différents points forts de l’armée de terre, qui doit maintenant gagner en réactivité et passer à une autre échelle d’engagement et de projection de force. Dans le cadre de l’exercice Dacian Spring, c’est une brigade interarmes (7 000 à 8 000 soldats) « bonne de guerre », c’est-à-dire tout de suite apte au combat et capable de tenir dans la durée, qui sera déployée en 10 jours sur le sol roumain en avril 2025.
Cela représente un effort logistique conséquent, avec 1 500 conteneurs qui, mis bout à bout, forme un convoi ferroviaire long de neuf kilomètres. « Un jour de combat, c’est une consommation de 80 conteneurs, dont 20 rien que pour les munitions », détaille le Général Guillot, adjoint au CTE.
En 2022, sept jours seulement après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, la France avait déployé le Sparhead Battalion de la force de réaction rapidede l’Otan en Roumanie, composée de 500 Français et 300 Belges. Une vingtaine de rotations d’Antonov 124, plus gros avion du monde, trois de KC130 et trois d’A330 MRTT avaient été nécessaires. Depuis, 2 500 militaires de la mission Aigle sont relevés tous les quatre mois, et 500 véhicules par an. Une année de logistique représente 36 vols pour transporter le personnel, 10 vols, 35 trains et 25 convois routiers pour le fret.
L’importance du fret ferroviaire
Un transport multimodal qui, malgré la menace russe, connaît encore quelques ratés. À l’image de contrôles douaniers tatillons de la part d’un pays voisin de la France, obligeant, pour une histoire de tampon mal placée, à faire descendre un char Leclerc de son wagon porte-char. L’Union européenne a investi 1,7 milliard d’euros dans la création d’un « Schengen militaire », pour permettre le déplacement rapide de troupes d’ouest en est sans les tracasseries administratives de chaque pays traversé.
En Roumanie, c’était un pont trop fragile qui imposait il y a peu encore les convois blindés français à faire un détour de plusieurs heures avant d’atteindre leur base. Signe de l’importance d’un bon réseau ferroviaire, la Finlande, arrivée dans l’Otan en 2023, songe à remplacer l’écartement russe de 1 520 mm d’une de ses voies de chemin de fer pour passer à un écartement standard de 1 453 mm.
Pikne, Diodore, Hedgehog, le cahier d’exercices chargé de l’armée française
Au-delà de l’échéance de Dacian Spring, d’autres exercices vont ponctuer le calendrier déjà chargé de l’armée française, afin de travailler l’interopérabilité avec ses alliés. Le nord de la mer Baltique sera, en décembre 2024, le théâtre de l’exercice Pikne mené au côté des forces britanniques et estoniennes. Des tirs interarmes, commandés depuis des PC en France, seront effectués sur terre, mais également depuis des frégates et des avions en appui air-sol.
Mars 2025, l’exercice Diodore devra démonter les capacités du Commandement des actions dans la profondeur et du renseignement (Capr). Créé en 2024, il vise à mener des actions dans la profondeur de l’ennemi au niveau corps d’armée ou division entre 30 et 500 km. En avril, l’exercice Hedgehog en Estonie enverra un autre bataillon français dans le cadre de la mission lynx. Enfin, en juin, Warfighter, entraînera la 1ʳᵉ division française au côté d’un corps d’armée américain. Mis bout à bout, ces exercices envoient des signaux stratégiques à la Russie, visant à la dissuader d’aller plus en avant contre l’est de l’Europe. Pour « gagner la guerre avant la guerre », l’armée française espère pouvoir déployer une division (environ 25 000 soldats) en 30 jours en Europe de l’Est dès 2027.
Le HCECM, Haut comité pour l’évaluation de la condition militaire, présidé par la conseillère d’état Catherine de Salins et dont l’un des membres est le général de corps d’armée (2S) de Gendarmerie Jean-Marc Descoux, consacre son 18ème rapport aux réserves. L’instance a remis dernièrement son rapport au président de la République. Le Haut comité qui passe en revue dans le détail le dispositif des réserves militaires formule quatorze recommandations.
En préambule de ce rapport très complet, le HCECM rappelle que la France a un objectif ambitieux : porter le nombre de réservistes du ministère des Armées à 80 000 d’ici à 2030 puis 105 000 en 2035, et atteindre un effectif total de 50 000 réservistes dans la gendarmerie nationale en 2027.
“Ce renforcement ne se limite pas à une simple augmentation quantitative, il répond à la volonté de mieux préparer et d’intégrer ces forces de réserve dans la défense active de la nation. Les réservistes jouent un rôle croissant dans la défense nationale” écrit le Haut comité dont le rapport “vise à guider les actions futures pour assurer que la réserve française puisse répondre pleinement aux exigences des conflits modernes, tout en restant un exemple des valeurs de notre République.”
Parmi celles-ci, l’amélioration de la connaissance des activités civiles des réservistes, la garantie des moyens alloués aux réserves par la Loi de programmation militaire, une meilleure représentativité des réservistes dans le cadre du dispositif de la concertation, la formalisation et la mise en œuvre de parcours de carrière des réservistes dans une politique de ressources humaines sur le long terme, une réflexion relative au régime de défraiement des réservistes, la confirmation de l’exonération fiscale qui est appliquée à la solde des réservistes, pour toutes les catégories hiérarchiques et pour tout type d’activités, la mise en œuvre de mesures visant à mieux valoriser l’engagement des cadres de la réserve, soit par une mesure nouvelle, soit par le biais de la prime de compétence et de responsabilité des militaires (PCRM) ; recommande d’encourager l’emploi de tous les leviers existants en termes de reconnaissance, notamment en invitant plus largement les réservistes à participer aux activités de tradition et de cohésion des unités, et en améliorant l’information relative à l’accès à l’honorariat du grade.
Revoir à la hausse le contingent d’ordres nationaux pour les réservistes
Par ailleurs, Le Haut comité préconise l’évolution des règles relatives au contingentement des ordres nationaux pour prendre en compte la montée en puissance des réserves et l’évolution du ratio réserve/active.
Recommandation 1
Le Haut Comité recommande d’améliorer la connaissance des caractéristiques des réservistes, en particulier leur activité professionnelle civile (secteur d’activité, employeur, etc.), notamment afin de garantir leur employabilité en cas de mobilisation. Par ailleurs, il préconise de systématiser les entretiens lors des départs pour identifier les principales causes d’insatisfaction qui les motivent, et de mettre en œuvre de manière plus régulière des sondages du moral des réservistes pour mesurer l’évolution de leur condition militaire et adapter en conséquence les politiques RH, avec une procédure adaptée à leurs spécificités, et notamment à leur présence intermittente dans les unités (sondage internet via ROC et Minot@ur). Les modalités de ces enquêtes doivent permettre de mieux identifier les disparités relatives aux différentes « familles » de réservistes (ab initio, anciens d’active).
Recommandation 2
Le Haut Comité recommande de garantir dans la durée, dans une logique pluri-annuelle, les moyens alloués à la réserve opérationnelle tels que prévus par la loi de programmation militaire pour les années 2024 à 2030 et la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur, aussi bien en ce qui concerne la masse salariale que pour les autres natures de crédits qui participent directement à la condition militaire des réservistes : formation, équipement individuel et collectif, hébergement, infrastructures, systèmes d’information, etc.
Recommandation 3
Le Haut Comité recommande de rechercher les pistes de fluidification du parcours de recrutement. En particulier, le passage des visites médicales d’aptitude en dehors du SSA pourrait être une piste à exploiter afin de permettre aux réservistes de réaliser ces visites à proximité de leur lieu de domicile, et de soulager les tensions qui pèsent sur le SSA. L’utilisation de médecins réservistes en dehors de leurs périodes d’activité ou d’anciens praticiens d’active appartenant à la RO2 pourrait être envisagée.
Recommandation 4
Le Haut Comité recommande l’édition d’un « memento du réserviste » pour améliorer l’information relative aux modalités du soutien, de la gestion « ressources humaines », des droits individuels (retraite, etc.), ou encore des prestations sociales auxquelles peuvent prétendre les réservistes opérationnels. De même, les obligations de disponibilité qui s’imposent à eux devraient être rappelées. Ce memento devra porter une attention particulière à l’accessibilité des informations et être diffusé à tous les réservistes à échéances régulières pour rester à jour des évolutions de ces modalités.
Recommandation 5
Le Haut Comité recommande, dans le cadre des travaux portant sur le système de concertation des réservistes, de garantir que celui-ci permette la bonne représentativité de tous les réservistes, et en particulier des réservistes directement issus de la société civile, et de prévoir une bonne articulation avec les CFM d’armée et le CSFM.
Recommandation 6
Le Haut Comité recommande de revoir les modalités de pilotage budgétaire de la masse salariale « réserves » en veillant à une plus grande responsabilisation des employeurs de réservistes, pour leur garantir les ressources annuelles à leur disposition, et ainsi donner plus de visibilité aux réservistes sur leur niveau d’emploi.
Recommandation 7
Le Haut Comité recommande de poursuivre la formalisation et la mise en œuvre de parcours de carrière des réservistes dans une politique RH sur le long terme, qui devrait prendre en compte les spécificités des réservistes (temps partiel, disponibilité fluctuante, conciliation avec l’activité professionnelle civile).
Ces parcours pourraient proposer plus de passerelles vers et depuis l’active, veiller à mieux valoriser les cadres de la réserve, et envisager des moyens de garder un lien entre l’institution et les anciens réservistes pour permettre une réintégration dans la réserve à des moments plus propices.
Par ailleurs, afin de responsabiliser les réservistes eux-mêmes dans l’élaboration de leur parcours de carrière, le Haut Comité recommande de redynamiser la « bourse aux emplois de la réserve » en s’appuyant sur les SI ROC et Minot@aur afin qu’ils puissent être mieux informés des opportunités de changer de poste au sein de la réserve. Ces propositions pourraient également être accessibles dès l’étape de la candidature à l’engagement dans la réserve, pour permettre aux candidats de mieux s’orienter.
Enfin, cette modularité accrue des parcours de réservistes devrait s’accompagner d’une plus grande exigence pour garantir un engagement minimal annuel, nécessaire pour que l’investissement des armées, notamment dans leur formation, soit rentabilisé.
Recommandation 8
Le Haut Comité recommande :
de garantir que les réservistes bénéficient effectivement des droits qui leur sont ouverts enmatière de droits financiers, notamment en matière d’avancement d’échelon ;
de lancer une réflexion relative au régime de défraiement des réservistes (frais de transport, repas, etc.) tenant compte des particularités de leur engagement afin de mettre en place unrégime spécifique plus adapté aux sujétions qu’ils subissent ;
de se saisir du problème des délais excessifs de versement de la solde des réservistes du ministère des armées en mettant en œuvre des mesures techniques et organisationnelles permettant de garantir à tout réserviste que sa solde lui sera versée dans un délai raisonnable.
Recommandation 9
Le Haut Comité recommande de confirmer l’exonération fiscale qui est appliquée à la solde des réservistes, pour toutes les catégories hiérarchiques et pour tout type d’activités, qui représente une juste compensation des sujétions auxquelles sont soumis les réservistes.
Recommandation 10
Le Haut Comité recommande de faire évoluer les droits à indemnités spécifiques pour les réservistes afin de mieux prendre en compte les particularités de leur engagement, en prévoyant :
la création d’une avance de solde avant déploiement en opération, sur le modèle de l’avance de solde avant affectation à l’étranger (versement d’un mois de solde 45 jours avant le départ, puis régularisation) ;
la mise en œuvre de mesures visant à mieux valoriser l’engagement des cadres de la réserve,soit par une mesure nouvelle, soit par le biais de la prime de compétence et de responsabilitédes militaires (PCRM) ;
la mise à jour des conditions d’attribution de la participation au financement du permis deconduire (PERMRES) ou sa suppression au profit d’une autre mesure d’attractivité plus pertinente.
Recommandation 11
Le Haut Comité recommande d’encourager l’emploi de tous les leviers existants en termes de reconnaissance, notamment en invitant plus largement les réservistes à participer aux activités de tradition et de cohésion des unités, et en améliorant l’information relative à l’accès à l’honorariat du grade.Par ailleurs, les règles relatives au contingentement des ordres nationaux pourraient évoluer pour prendre en compte la montée en puissance des réserves et l’évolution du ratio réserve/active.
Recommandation 12
Le Haut Comité recommande :
– de mieux identifier les compétences que les réservistes ont acquises dans leur carrière civile et la valeur ajoutée qu’elles peuvent apporter aux armées ;
– de mieux recenser et formaliser l’acquisition de compétences dans la réserve, afin de les mettre plus à profit au sein des armées et de les valoriser auprès des employeurs civils. La mise en œuvre de cette recommandation pourra utilement profiter des évolutions des systèmes d’information dédiés à la réserve.
Recommandation 13
Afin d’améliorer le soutien à l’engagement dans la réserve par les employeurs civils des réservistes, le Haut Comité recommande :
d’améliorer l’information générale qui leur est délivrée sur les obligations qui s’imposent à eux, mais aussi sur les droits, incitations et accompagnements dont ils peuvent bénéficier, et, enfin, sur les bénéfices apportés par les activités de réserve au sein d’une carrière civile (acquisition de compétences, savoir-être, etc.); pour les employeurs publics, cette information pourrait faire l’objet d’une mise à jour de la circulaire du Premier ministre de 2005 relative à l’emploi d’agents publics au sein de la réserve militaire ;- de systématiser, sauf demande expresse du réserviste à l’autorité militaire, l’envoi d’une lettre personnalisée vers les employeurs de nouveaux réservistes, à la signature de l’ESR ;- de développer la stratégie partenariale du secrétariat général de la garde nationale dans deux directions complémentaires : au niveau central via les conventions de branches professionnelles, et au niveau local via les officiers généraux de zones de défense et de sécurité.
Recommandation 14
Afin d’améliorer le niveau de protection sociale dont bénéficient les réservistes, le Haut Comité recommande :
– de prendre en compte la situation particulière des réservistes dans les travaux sur le volet « prévoyance » de la protection sociale complémentaire ;
– de garantir par tous les services instructeurs la bonne application du régime de réparation intégrale du préjudice subi à la suite d’une blessure ou maladie imputable au service ;
– de renforcer l’information diffusée auprès des réservistes, par exemple via le site internet de la Maison numérique des blessés et de leurs familles (MNBF) et les SI ROC et Minot@ur, afin de garantir qu’ils sont conscients des conséquences que peuvent entraîner une blessure ou une maladie survenue à l’occasion de leurs activités dans la réserve dans tous les aspects patrimoniaux et extrapatrimoniaux.
Chiffres clés
73 624 réservistes opérationnels de 1er niveau (RO1) dans les armées et la Gendarmerie nationale au 31 décembre 2023 dont 53,7 % issus directement de la société civile (ab initio), 34,1 % d’anciens militaires d’active et 12,1 % d’anciens appelés du contingent.
93 199 réservistes opérationnels de 2e niveau (RO2)
6 523
réservistes citoyens de défense et de sécurité
23,1 % taux de féminisation de la RO1 contre 18,5 % pour les militaires d’active
5 670 réservistes employés en moyenne chaque jour dont 3 648 au ministère des armées et 2 022 dans la Gendarmerie nationale
13 % : taux de réservistes opérationnels de 1er niveau non employés en 2023
Composition du HCECM
Présidente : Catherine de Salins, conseillère d’État, présidente adjointe de la section de l’administration du Conseil d’État
Vice-président : Terry Olson, conseiller d’État, président de la Cour administrative d’appel de Versailles
Membres :
Isabelle Delarbre, ancien cadre dirigeant chez Renault et TotalEnergies
Élisabeth Grosdhomme :dirigeante de Paradigmes et cætera, société d’étude et de conseil spécialisée en prospective et innovation
Yves d’Hérouville : Président de l’Institut des dirigeants d’associations et fondations
Cécile Wendling : dirigeante de Pan-or-amiques, société de conseil en prospective, et chercheuse associée au Centre de sociologie des organisations (CNRS-Sciences Po Paris).
Jean-Luc Tavernier: directeur général de l’Insee (membre de droit), représenté par Alain Bayet : directeur de la diffusion et de l’action régionale et coordinateur des directeurs régionaux, chef de l’inspection générale de l’Insee
Général d’armée aérienne Éric Autellet, ancien major général des armées
Général d’armée (2e section) Éric Bellot des Minières, ancien inspecteur général des armées – Terre
Général de corps d’armée (2e section) Jean-Marc Descoux, ancien commandant de la gendarmerie outre–mer
Secrétaire général : contrôleur des armées Vincent Berthelé
Des chars Leclerc rénovés sont arrivés au 12e régiment de cuirassiers d’Olivet (Loiret) et au 1er régiment de chasseurs d’Afrique de Canjuers (Var), annonçait ce matin le ministère des Armées.
« La semaine dernière, le centre d’entraînement Provence [géré par le 1er RCA] et le 12e régiment de cuirassiers ont réceptionné deux chars Leclerc », a indiqué le ministère des Armées lors de son point presse hebdomadaire. Cette perception permettra au 1er RCA d’entamer un nouveau chapitre dans sa mission de formation des pilotes et tireurs des régiments de cavalerie.
L’ampleur de cette rénovation à mi-vie est connue de longue date : protection renforcée contre les engins explosifs improvisés, mines et roquettes ; refonte de la conduite de tir ; intégration dans la bulle SCORPION par l’installation de la radio CONTACT et du système d’information du combat SCORPION ; traitement des obsolescences lourdes.
Certains kits arriveront plus tard, à l’instar d’un tourelleau téléopéré T2B conçu par l’armurier belge FN Herstal et intégré à compter de fin 2025. D’autres efforts relatifs à la fonction agression devraient se concrétiser l’an prochain. De nouveaux viseurs pour le chef de char et le tireur seront par ailleurs installés à partir de 2028 via un autre marché, rappelait le ministère.
« La rénovation du char Leclerc lui permettra de rester en service jusqu’à l’arrivée dans les forces du futur système [principal] de combat terrestre, le MGCS », a complété le ministère des Armées.
La loi de programmation militaire prévoit la rénovation de 160 chars Leclerc d’ici fin 2030, un étalement qui conduira à atteindre la cible initiale des 200 exemplaires rénovés en 2035. Selon le ministère des Armées, 15 des 21 chars attendus en 2024 ont été livrés aux régiments et formations concernés à ce jour. Ils s’ajoutent aux 13 chars perçus en 2022 et 2023.
Deux tranches de 50 chars rénovés ont jusqu’à présent été actées auprès de l’industriel en charge, KNDS France. Un troisième lot englobant les 100 derniers exemplaires devrait en théorie être notifié cette année.
L’effort envers les armées françaises est nécessaire et sera poursuivi, a défendu hier le nouveau Premier ministre Michel Barnier lors de sa déclaration de politique générale devant l’Assemblée nationale.
« Face à ces conflits, face à l’instabilité persistante et grave tout autour de nous, face à toutes les menaces hybrides, l’effort de défense est évidemment nécessaire et doit être poursuivi », déclarait Michel Barnier dans une sortie concise mais à première vue encourageante sur la trajectoire budgétaire des armées.
« Poursuivre cet effort de défense et de solidarité, c’est aussi exprimer la reconnaissance de la nation aux militaires en pensant aux 26 000 hommes et femmes déployés sur tous les théâtres d’opérations (…) C’est le sens de la loi de programmation militaire pour les années 2024-2030 que nous mettrons en œuvre », poursuivait-il sans davantage de détails. Adoptée l’an dernier, cette LPM dite « de transformation » établit à 400 Md€ le besoin en ressources budgétaires sur sept ans, un socle financier d’emblée considéré comme un minimum.
Finalement publiés le 19 septembre, les plafonds de dépenses proposés par le gouvernement précédent fixent à 50,5 Md€ les crédits alloués à la mission Défense pour l’an prochain. Soit une hausse de 3,3 Md€ conforme à la trajectoire inscrite dans la LPM. De quoi garantir la poursuite d’un réarmement et d’un développement de l’investissement militaire qui « s’inscrivent dans la situation internationale et les différentes menaces auxquelles le pays doit faire face ».
« À la suite de la loi de programmation militaire 2024-2030, le plafond prévisionnel des dépenses du ministère des Armées augmenterait en 2025. Cet investissement supplémentaire assurerait les dépenses d’investissement et les commandes de matériel nécessaires à la modernisation de nos armées», complète un texte désormais caduc.
Si les signaux positifs se succèdent, le couperet de la dette reste omniprésent. Le nouveau gouvernement s’y est engagé, il compte ramener le déficit à 5% en 2025 et sous la barre des 3% en 2029. Estimée à plus de 40 Md€, l’économie exigée proviendrait pour deux-tiers d’une réduction des dépenses. Le reste sera généré par de nouveaux impôts. « Ce sera très difficile », concède Michel Barnier. Le PLF devrait être adopté le 10 octobre en Conseil des ministres en vue d’une discussion engagée le 21 octobre pour la première partie du texte, le 5 novembre pour la seconde.
Sébastien Lecornu, ministre des Armées (photo Franck Dubray, O.-F.)
Nommé ministre des Armées le 20 mai 2022, Sébastien Lecornu est donc maintenu à son poste dans le (premier?) gouvernement Barnier. Ce qui n’est pas sans déplaire à de nombreux militaires qui reconnaissent la détermination de leur ministre.
Que ce « discret » (selon l’AFP), proche d’Emmanuel Macron, est né en 1986… Qu’il a occupé à partir de 2020 le poste de ministre des Outre-mer dans le gouvernement Jean Castex, puis celui de ministre des Armées d’abord dans le gouvernement Élisabeth Borne puis dans le gouvernement Gabriel Attal.
Qu’il a été le principal artisan de l’élaboration et du vote de la loi de programmation militaire (LPM) d’avril 2023, qui doit s’appliquer de 2024 à 2030. Cette LPM prévoit 413 milliards d’euros de dépenses militaires sur les sept années d’exercice. Le budget annuel passera ainsi de 32 milliards en 2017 à 69 milliards en 2030, soit un doublement du financement des armées.
Qu’est-ce qui l’attend?
Du roulis politique! Ce gouvernement naît dans la douleur et la mauvaise humeur. Et sa durée de vie est évidemment jugée éphémère.
Des pressions et menaces sur la LPM et le budget des Armées, puisqu’il va falloir réduire le train de vie de l’Etat. Toutefois, les plafonds de dépenses prévisionnels pour le PLF 2025, considérés comme une « base technique » pour préparer le prochain budget, montrent que pour l’instant, les Armés s’en sortent bien (+ 7 % par rapport à la loi de finances initiale de 2024, à 50,5 milliards d’euros).
Des remises en question dans le dossier « Ukraine », sur la nature et le montant des aides françaises à Kiev face à Moscou. C’est possible; on se souviendra qu’en mars dernier, lors du débat sur l’Ukraine au Parlement, LFI avait exprimé son rejet de la stratégie française d’aide à Kiev.
Frégate FLF Courbet, 3ᵉ unité de la classe Lafayette
Avec la livraison des 5 frégates FDI de 2025 à 2032, la LPM 2024-2030 permettra de respecter le format de 15 frégates de 1ᵉʳ rang exigé, pour la Marine nationale, par la Revue Stratégique 2022. Toutefois, les 5 frégates légères furtives de la classe Lafayette, elles, n’ont toujours pas de remplaçantes désignées, alors que les navires doivent quitter le service, autour de 2030.
Pire encore, le remplacement même de ces 5 frégates, au statut fluctuant selon les besoins, et pour autant très utiles à la planification de la Marine française, n’est pas même abordé par cette LPM, laissant un vide capacitaire de 25 % dans la flotte française d’escorteurs de haute mer, à partir de la prochaine décennie.
Toute la question, aujourd’hui, est de comprendre l’origine de ce format de 15 escorteurs établi par la RS 2022, pour déterminer si, oui ou non, la Marine nationale a besoin de remplacer des cinq navires, ou si ces frégates de second rang, sont dorénavant inutiles, entre les performances accrues des frégates modernes, et les évolutions des menaces au-dessus, et en dessous de la surface.
Sommaire
Le format de 15 frégates de 1ᵉʳ Rang de la Marine nationale, un héritage des années 80
Contrairement à la flotte des avions de chasse ou de chars français, divisées par 3 après la guerre froide et l’arrivée des bénéfices de la paix, les escorteurs de la Marine nationale, eux, n’ont pas évolué, en nombre, depuis les années 80.
Les porte-avions USS John Stennis, USS John F.Kennedy, et Charles de Gaulle, et le porte-hélicoptères HMS Ocean, escortés par la frégate FLF Surcouf , le destroyer De la Penne et le croiseur Ticonderoga Port Royal lors de l’opération Enduring Freedom. Les frégates Maestrale, De grasse (T67 classe Tourville) ainsi que HNLMS Van Alstel, participaient aussi à ce cliché.
Ainsi, en 1989, la Marine nationale alignait déjà 15 escorteurs dits de premier rang, avec deux destroyers antiaériens classe Suffren, deux frégates antiaériennes classe Cassard, trois frégates anti-sous-marines T-67 classe Tourville, sept frégates anti-sous-marines T-70 classe Georges Leygues, et une corvette anti-sous-marins C-69, classe Aconit.
À ces 15 escorteurs, s’ajoutaient 17 avisos escorteurs A-69 classe d’Estienne d’Orves, des navires équipés pour la lutte anti-navire et la lutte-anti-sous-marine côtière, ainsi que pour les missions de moindre intensité.
Les frégates et destroyers français avaient pour mission d’escorter les deux porte-avions de la classe Clemenceau, les deux navires d’assaut amphibie classe Ouragan, et le porte-hélicoptère Jeanne d’Arc. Ces navires pouvaient également servir d’escorte au croiseur Colbert, ayant, lui aussi, la fonction de Capital Ship, ou navire amiral.
Typiquement, un porte-avions français était escorté d’un escorteur anti-aérien, de deux frégates de lutte anti-sous-marine, et de deux avisos, et était accompagné par un pétrolier ravitailleur, un SNA classe Rubis, et un ou deux avions Breguet Atlantique de patrouille maritime. Les TCD et la Jeanne d’arc, en revanche, n’étaient escortés au combat que par un escorteur anti-aérien, un escorteur ASM et un aviso, le dispositif sous-marin et Patmar étant variable selon les missions.
Les frégates T-67 et T-70, des classes Tourville (ici en photo) et Georges Leygues, ont constitué la colonne vertebrale des capacités de lutte anti-sous-marines françaises des années 70 à 2010, avant d’être remplacées par les FREMM de la classe Aquitaine, et les futures FDI.
Ce faisant, la Marine nationale avait la possibilité de protéger simultanément un groupe aérien et un groupe amphibie, tout en conservant quatre frégates anti-sous-marine et une frégate anti-aérienne par façade maritime, dont une à la mer, une en alerte, deux à l’entrainement, et une en maintenance. Ces navires, ainsi que les A69 restant, pouvaient servir à renforcer les besoins d’escorte, ou à constituer un ou deux groupes d’action navale à part entière.
De fait, bien que sensiblement inférieure, en nombre de navires, à la Royal Navy, la Marine nationale disposait, alors, d’une flotte d’escorteurs parfaitement en cohérence avec ses besoins.
Les FLF classe Lafayette remplacent une partie des avisos A-69 à partir de 1996
À partir de 1996, la Marine nationale commença à réceptionner les nouvelles frégates légères furtives de la classe Lafayette. Initialement, la classe devait être formée par 7 navires polyvalents, avec 12 missiles Aster 15 en cellules de lancement vertical, 8 missiles antinavires MM40 Exocet, ainsi que d’un sonar de coque pour la lutte anti-sous-marine, d’un canon de DCN 100 et d’un hélicoptère Panther.
L’arrivée de ces navires devait permettre de retirer du service la corvette C-69 Aconit, ainsi que 8 avisos escorteurs A-69, tout en portant la flotte d’escorteurs à 21 navires. On retrouvera ce même format, dix ans plus tard, lorsque la Marine prévoyait d’acquérir 4 frégates Horizon, et 17 frégates FREMM. Toutefois, la classe Lafayette est arrivée alors que la menace soviétique avait disparu, que les budgets des armées étaient revus à la baisse, et que la conscription était suspendue.
La frégate FLF Surcouf, dans sa configuration initiale, avec le système Naval Crotal sur le roof arriere. Si la portée du Crotale était effectivement limitée, le missile s’averait cependant assez précis, même si, dans ce domaine, le Mistral 3 du système SADRAL fait, aujourd’hui, encore mieux, tout en étant beaucoup moins onéreux à mettre en oeuvre et à entretenir. La fregate Surcouf fait partie, avec le Courbet et le Guepratte, des 3 FLF rénovées assurant l’interim des FDI au sein de la flotte de frégates de 1er rang de la Marine nationale.
Dès lors, non seulement le nombre de navires fut ramené à cinq navires, mais l’armement et l’équipement des frégates fut revu à la baisse. Le système Aster fut ainsi remplacé par le même système Naval Crotale que les Tourville et Georges Leygues, bien moins performant, mais aussi moins onéreux, alors que le sonar des navires ne fut jamais installé.
Ne pouvant plus qualifier les Lafayette d’escorteur, car n’ayant ni les capacités anti-aériennes, ni anti-sous-marines pour cela, la Marine nationale inventa le concept de frégates de second rang, des navires mieux armés que les avisos et patrouilleurs, mais inadaptés pour évoluer, seul, en zone de tension.
Trois des cinq Lafayette ont été modernisées à partir de 2019, en recevant, pour l’occasion, un sonar de coque BlueWatcher de Thales, et le système Sadral à 6 missiles Mistral, prélevé sur 3 T-70 retirées du service de 2015 à 1018, en lieu et place du Naval Crotale.
Cette modernisation doit permettre à la Marine nationale de conserver un format proche des 15 frégates de premier rang, exigé depuis le LBDSN 2013 et par les deux revues stratégiques depuis, après que la décision de remplacer des cinq dernières FREMM ASM, par les cinq FDI de la classe Amiral Ronarc’h, ait entrainé un étalement des livraisons des nouvelles frégates.
Frégate FDI classe Amiral Ronarc’h de la Marine Nationale sur le site Naval Group de Lorient
Pour autant, les trois Lafayette ainsi équipées, remplissent à peine les critères de frégate d’escorte de 1ᵉʳ rang, n’ayant ni sonar tracté à profondeur variable, pour la lutte ASM océanique, ni les missiles Aster 30 de défense aérienne.
Le remplacement des 5 frégates légères furtives classe Lafayette n’est pas planifiée dans la LPM 2024-2030
En dépit de cet artifice grossier, plus administratif et politique, qu’opérationnel, la Marine nationale devrait bel et bien retrouver le format de frégates de 1ᵉʳ rang, imposé par la Revue Stratégique 2022, aujourd’hui faisant foi, avec la livraison de la dernière FDI à la Marine nationale, la frégate Amiral Cabanier, prévue pour 2032.
Cette flotte d’escorteurs sera alors composée par deux frégates de défense aérienne classe Horizon, deux frégates antiaériennes classe Alsace, six frégates multirôles classe Aquitaine, et cinq FDI classe Amiral Ronarc’h.
Les LHD classe Mistral ne peuvent évoluer sans la présence d’escorteurs à ces cotés, les capacités d’autodéfense du navire étant preque inexistantes.
En outre, les 9 A-69, requalifiés depuis Patrouilleurs océaniques après le retrait de leurs missiles Exocet, seront remplacés, d’ici à la même échéance, par 7 nouveaux patrouilleurs Hauturiers, des navires qui reprendront certaines des capacités et missions des avisos, notamment en matière de lutte anti-sous-marine sur le plateau continental.
En revanche, rien n’indique, à ce jour, ni dans la Revue Stratégique 2022, ni dans la LPM 2024-2030, que la Marine nationale prévoirait de remplacer les 5 FLF classe Lafayette, une fois retirées du service.
À ce titre, il convient de mettre fin à cette croyance, largement répandue, et relayée jusque sur Wikipedia, selon laquelle les FDI de la classe Amiral Ronarc’h remplaceront les 5 FLF, puisqu’au contraire, les FDI ne feront que remplacer les 5 FREMM annulées en 2015, elles-mêmes devant remplacer les 5 dernières frégates T-70 en service, dans le respect du format de 15 frégates de 1er rang.
Pourquoi le remplacement des 5 FLF de la Marine nationale est indispensable à la cohérence de la flotte d’escorteurs français ?
Fondamentalement, le format d’escorte de la Marine nationale sera, alors, identique à celui qui était le sien à la fin des années 80, avec une frégate antiaérienne et deux frégates ASM pour escorter le porte-avions nucléaire Charles de Gaulle, puis son successeur, le PANG ; une frégate antiaérienne et une frégate ASM pour l’escorte du Groupe Amphibie ; ainsi qu’une frégate antiaérienne et quatre frégates ASM, par façade maritime.
Ces dernières années, il était fréquent que le dispositif d’escorte du PAN Charles de Gaulle se limite à une frégate antiaérienne et une frégate ASM de la Marine nationale. Dans ce cas, cependant, la Task Force était le plus souvent complétée par une ou deux frégates ou destroyers alliés.
Toutefois, les évolutions technologiques en cours, comme dans le domaine des missiles de croisière et balistiques antinavires, des drones d’attaque ainsi que des drones de surface et sous-marins, tendent à rapidement saturer les capacités de défense des frégates françaises.
En effet, en dehors des deux frégates horizons, avec 48 missiles Aster 15 et 30, et les deux frégates Alsace, avec 32 missiles Aster, les onze escorteurs ASM français, ne mettent, ou ne mettront en œuvre, que 16 de ces missiles anti-aériens.
Ainsi, la capacité d’escorte du Groupe amphibie, ne reposera que sur 48 à 64 missiles antiaériens, et pourra largement être saturée par les moyens modernes, ce d’autant que, contrairement au porte-avions, les LHD de classe Mistral, n’emportent pas de systèmes PAAMS, mais uniquement des systèmes Simbad armés de deux missiles Mistral d’autodéfense.
Surtout, la multiplication des points chauds, dans le périmètre d’intervention de la Marine nationale, qu’il s’agisse de la Méditerranée orientale comme occidentale, de l’Atlantique Nord, de la mer du Nord, de la mer Rouge, du golfe Persique et du bassin indo-Pacifique, nécessite dorénavant que le nombre de frégates déployables soit revu à la hausse.
Lancement de trois missiles Aster contre des missiles balistiques Houthis par la frégate Alsace
À ce sujet, le remplacement des 5 FLF, permettrait d’ajouter une frégate ASM au dispositif d’escorte du groupe amphibie, et deux frégates par façade maritime. Ainsi, avec sept frégates par façade, la Marine nationale disposerait, outre l’escorte des Capital-Ships, de la possibilité de maintenir à la mer deux frégates par façade, avec une frégate supplémentaire en alerte, deux frégates à l’entraînement, et une frégate en maintenance.
Dès lors, même un déploiement exceptionnel en mer Rouge ou dans le Pacifique d’une frégate, ne viendrait pas compromettre la capacité de réponse rapide de la Marine nationale, en cas de crise.
Quel navire pour succéder aux FLF de la Marine Nationale
Pour remplacer les cinq FLF, plusieurs navires peuvent être envisagés, en fonction des besoins, des moyens disponibles, ainsi que de l’évolution du marché internationale et de la demande mondiale, sachant que, comme toujours, l’exportation représente le balancier vital de la soutenabilité des investissements industriels de défense français.
La corvette Gowind 2500 de lutte anti-sous-marine, la plus économique
Ainsi, la corvette Gowind 2500 de Naval group, dispose de sérieuses capacités de lutte anti-sous-marine, avec un sonar de coque, un sonar tracté à profondeur variable, deux tubes lance-torpilles triples, et un hélicoptère de lutte ASM. C’est aussi le cas en matière de lutte anti-navire, avec 8 missiles MM40 Exocet, et de son potentiel d’autodéfense antiaérien, avec 16 missiles VL MICA en cellules de lancement vertical.
La Gowind 2500 propose des capacités d’escorte océanique pour un ticket d’entrée particulièrement accessible. Toutefois, ces navires ne sont guères conçus pour encaisser les chocs.
Déjà en service dans 3 marines internationales (Égypte, Malaisie et EAU), la Gowind 2500 est, par ailleurs, peu onéreuse, moins de 400 m€ par navire. En outre, une commande française de cinq navires, pourrait entrainer une commande similaire de la part de la Marine Hellénique, avec qui Naval Group est en négociation, sur un modèle de coopération proche de celui mis en œuvre pour les 3 FDI grecques.
La frégate multirôle FREMM, classe Aquitaine ou classe Alsace, la plus polyvalente
À l’autre bout de l’échiquier, se trouve la frégate FREMM, qu’il s’agisse de la classe Aquitaine, optimisée pour la lutte anti-navire et la frappe vers la terre, avec ses 16 missiles de croisière MdCN, ou de la classe Alsace, de défense antiaérienne avec 32 missiles Aster contre 16 pour l’Aquitaine, mais disposant des mêmes performances de lutte ASM que celle-ci.
Les FREMM de la classe Aquitaine sont certianement les navires occidentaux les plus capables, aujourd’hui, en matière de lutte anti-sous-marine.
En revanche, la frégate est onéreuse, deux fois plus que la Gowind 2500. En outre, commander cinq FREMM, aujourd’hui, après les avoir annulées en 2015, entrainant une révision du processus industriel et des prix de l’époque, ne manquerait pas d’être vivement critiqué çà et là. Enfin, le potentiel export des FREMM françaises est aujourd’hui limité, car concurrencé directement par les FREMM italiennes et, surtout, par l’arrivée prochaine de sa version américaine, la classe Constellation.
La FDI classe Amiral Ronarc’h, la plus performante
La logique capacitaire et industrielle font de la nouvelle FDI classe Amiral Ronarc’h, le modèle existant le mieux à même de remplacer efficacement les FLF aujourd’hui. En effet, le navire est à la fois très performant, moderne et très bien armé, avec deux VLS Sylver 50 emportant 16 missiles Aster, pouvant être portés à 4 Sylver et 32 Aster comme sur la version grecque.
La FDI emporte, par ailleurs, 8 missiles antinavires MM-40 Block 3C Exocet d’une portée de 160 km, un canon de 76 mm, deux canons de 20 mm, deux tubes lance-torpilles triples, ainsi qu’un hélicoptère de lutte ASM NH90.
Outre son armement conséquent, la frégate emporte le nouveau radar AESA à faces planes SeaFire 500 Thales, un sonar de coque et un sonar tracté, en faisant un escorteur antiaérien et anti-sous-marin au moins aussi performant que les frégates FREMM de la classe Alsace.
La FDI est aujourd’hui le choix le plus pertinent, du point de vue de l’efficacité de l’investissement, pour remplacer les FLF.
Le navire est, par ailleurs, doté de capacités de guerre électronique et cyber, tout en s’avérant plus économique que la FREMM, avec un prix unitaire de l’ordre de 650 m€. La production étant en cours, une augmentation du volume des commandes, suffisamment en amont, pourrait même permettre d’en réduire les couts de construction. Enfin, la FDI est commercialement active, Naval Group l’ayant récemment proposé à l’Indonésie et à la Norvège, alors qu’une nouvelle commande permettrait d’en renforcer l’attractivité.
La conception d’une Frégate Légère Furtive de Nouvelle Génération
La dernière possibilité, pour remplacer les FLF, reposerait sur la conception d’une nouvelle classe de frégate légère furtive, un navire de 3.500 tonnes reprenant les missions initiales de son ainée, avant d’être transformée en frégate de second rang.
Le navire pourrait ainsi disposer de 16 missiles Aster 15 EC ou Mica VL NG, pour une enveloppe de défense plus étendue, des 8 MM40 et des 2 tubes lance-torpilles, ainsi que d’une version allégée du SeaFire 500, et les sonars Kingklip et CAPTAS 4 de la FDI. Elle ne disposerait, en revanche, que d’un hangar pour un hélicoptère moyen H160M Guépard, et des capacités plus réduites en matière de guerre cyber.
Radar AESA SeaFire 500 de Thales
La conception de cette frégate induirait des couts supplémentaires, venant très certainement neutraliser les économies attendues sur le prix unitaire, que l’on peut estimer de 500 à 550 m€, par rapport à la FDI. En revanche, elle permettrait à Naval Group d’enrichir son catalogue, et de proposer, comme pour les sous-marins conventionnels, d’une solution dédiée par tranche de 1000 tonnes.
Cette frégate correspondrait, à ce titre, assez finement aux besoins de renouvellement en matière de frégates ou corvettes lourdes, exprimés par plusieurs marines ces derniers mois, notamment celles n’ayant pas les ressources pour acquérir des navires plus onéreux, comme les FDI, les Arrowhead 140, les PPA ou les Meko 200A.
Enfin, avec un tel armement, pour un tel prix, sur un navire de ce tonnage, Naval Group pourrait même venir s’inviter sur les platebandes russes comme chinoises, également visées par la Corée du Sud et la Turquie, avec l’antériorité, la fiabilité et la garantie de qualité que le groupe français peut aujourd’hui proposer.
Conclusion
On le voit, le besoin, dans les années à venir, pour la Marine nationale de remplacer ses cinq frégates légères furtives, est difficile à ignorer, considérant le contexte sécuritaire mondial et sa dynamique aujourd’hui.
L’arrivée des drones d’attaque à long rayon d’action augmente sensiblement le risque de saturation des défenses des frégates et destroyers. En effet, si le format à 15 frégates de 1ᵉʳ rang, hérité des années 80, sera bien préservé par la LPM 2024-2030, la nature des engagements, et leur répartition, obligent à présent la Marine nationale, à devoir disposer de davantage de frégates, tant pour escorter ses Capital Ships, que pour protéger ses côtes, et intervenir efficacement et rapidement, là où cela sera nécessaire, en coalition ou pas.
Plusieurs options se présentent, pour cela, allant de la corvette Gowind 2500 à la frégate FREMM. Toutefois, c’est sans conteste la frégate FDI qui présenterait, ici, le meilleur rapport performances investissements. Toutefois, la conception d’une FLF NG n’est pas, elle non plus, dépourvue d’attraits, en particulier concernant le volet des exportations, en enrichissant le catalogue de Naval Group, d’un navire en forte demande, aujourd’hui.
Reste que les 2,5 à 4 Md€ d’investissements nécessaires à ce remplacement, n’apparaissent, pas même partiellement, dans la LPM en cours. Il est donc probable que la Marine nationale s’apprête à faire face à la période la plus complexe et tendue de son histoire depuis les années 80, avec une flotte de 15 escorteurs océaniques seulement, à peine suffisante pour protéger ses Capital Ships à minima, et pour conserver un navire à la mer, et un en alerte, par façade maritime.
Article du 9 aout en version intégrale jusqu’au 29 septembre 2024
Depuis la fin de la guerre froide, la flotte de chasse de l’Armée de l’air et de l’Espace, a été divisé par trois, passant de plus de 600 Mirage F1, Mirage 2000 et Jaguar, à moins de 200 Rafale et Mirage 2000D et -5F. La flotte de l’Aéronautique navale a, elle aussi, subi une sévère cure d’amaigrissement, passant de 80 Super-Étendard, F-8 Crusader et Étendard IVP, a seulement 40 Rafale M.
Cette réduction de format a souvent été critiquée, par les spécialistes du sujet, ainsi que par certains parlementaires, et même, plus récemment et de manière plus feutrée, par les états-majors eux-mêmes. Ainsi, l’Armée de l’Air et de l’Espace estime, publiquement, qu’il lui faudrait « au moins », 225 avions de combat, pour répondre à son contrat opérationnel.
Toutefois, le format optimal de la chasse française semble, aujourd’hui, davantage une question de négociations politiques et budgétaires, que le résultat d’un raisonnement objectif, face aux besoins auxquels l’Armée de l’Air et l’Aéronavale doivent être en mesure de répondre.
Dans cet article, nous tenterons de mener ce raisonnement, et de déterminer quel serait ce format, nécessaire et suffisant, pour permettre à la chasse française, de remplir pleinement et efficacement ses missions présentes et à venir. Comme nous le verrons, le format actuel apparait très sous-estimé.
Sommaire
Le format de la flotte de chasse française aujourd’hui, son origine et son contrat opérationnel
Ce format, justement, quel est-il, et d’où vient-il ? Aujourd’hui, le LPM 2024-2030 vise à amener la flotte de chasse française à 225 avions de combat, avec 185 chasseurs pour l’Armée de l’Air et de l’Espace, et 40 pour l’Aéronautique navale.
Il manque 95 avions de chasse à l’Armée de l’Air et de l’Espace, et 12 à l’Aéronautique Navale française.
Ce format a été fixé par la Revue Stratégique 2022, elle-même reprenant ce format de la Revue Stratégique 2018, qui servit de support à la création de la LPM 2029-2025 précédente. Là encore, ce n’est pas la Revue Stratégique 2018 qui fixa ce format, puisqu’elle avait pour consigne de reprendre l’ensemble des formats des forces, définis par le Livre Blanc de 2013.
C’est, en effet, ce Livre Blanc qui établit, pour la première fois, ce format à 225 avions de combat, avec la répartition 185/40 entre l’AAE et la Marine nationale. Pour arriver à ce résultat, les concepteurs de ce Livre Blanc, qui avaient pour ligne directrice de réduire autant que possible le format des forces armées françaises, fixèrent un contrat opérationnel relativement simple aux deux forces aériennes.
Pour l’AAE, il fallait être en mesure de garantir la projection de 15 avions de combat, y compris sur des bases distantes, comme ce fut le cas au Niger et en Jordanie, pour soutenir les forces françaises et alliées, déployées dans le Sahel ou en Irak et en Syrie. En outre, l’AEE devait assurer la disponibilité de la composante aérienne de la dissuasion française, avec deux escadrons équipés de Rafale. La Marine nationale, elle, devait permettre d’armer de 18 chasseurs le porte-avions Charles de Gaulle, pour deux déploiements de deux mois par an.
Cette réduction des formats permettait, par ailleurs, de réduire sensiblement les besoins de formation et d’entrainement des équipages, ainsi que les stocks de munitions, d’autant que la principale menace conventionnelle alors envisagée, concernait des conflits dissymétriques, en Afrique ou au Moyen-Orient, avec une menace très réduite sur les appareils eux-mêmes, et une pression opérationnelle relativement réduite pour les forces déployées.
La pression opérationnelle sur la chasse française depuis 2014, sensiblement supérieure à celle estimée par le Livre Blanc 2013
Bien évidemment, cette pression opérationnelle, depuis 2013, n’a absolument pas respecté la planification du Livre Blanc. L’Armée de l’Air et de l’Espace a ainsi dû, à plusieurs reprises, déployer vingt à trente appareils de combat en missions extérieures, y compris en Europe. Le porte-avions, quant à lui, a souvent largement dépassé les quatre mois de mer par an prévus, avec un record de 8 mois à la mer pour l’année 2019, avant son IPER.
Il manque 95 avions de chasse à l’Armée de l’Air et de l’Espace, et 12 à l’Aéronautique Navale française
Si les armées françaises ont largement allégé leur dispositif en Afrique ces dernières années, le dispositif au Levant, lui, reste inchangé, alors que l’évolution des tensions, et des guerres, en Europe et dans le Pacifique, ont amené à de nouveaux déploiements particulièrement gourmands en potentiel de vol des appareils comme des équipages.
À ce sujet, justement, il est apparu que les appareils déployés, tendaient à consommer beaucoup plus rapidement leur potentiel de vol, par rapport aux appareils employés en France pour les missions d’entraînement et de Police du Ciel, d’un facteur allant de 2 à 3.
Comme tous les avions, civils ou militaires, les avions de chasse doivent respecter une procédure de maintenance très stricte, ponctuée de grandes visites, au bout d’un certain nombre d’heures de vol, durant lesquelles les appareils sont presque entièrement démontés et rassemblés, pour en garantir le bon fonctionnement à venir.
De fait, ces grandes visites rendent indisponibles chaque appareil pour plusieurs mois, et sont d’autant plus rapprochées, que les appareils volent beaucoup, en particulier en déploiement extérieur, et lors des missions opérationnelles.
40 avions de chasse promis par la France à l’OTAN, en cas de tensions ou de conflit
Si la pression opérationnelle a considérablement évolué ces dernières années, la guerre en Ukraine, et les fortes tensions entre l’OTAN et la Russie, ont amené à réviser le paramètre clé, au cœur de la construction même du format nécessaire et suffisante, de la flotte de chasse française.
Il manque 95 avions de chasse à l’Armée de l’Air et de l’Espace, et 12 à l’Aéronautique Navale française
En effet, la France s’est engagée, depuis son retour dans le Commandement intégré de l’OTAN, à fournir à l’Alliance, en cas de conflit, 40 avions de chasse prêts au combat. Cet engagement n’est pas nouveau, mais les évolutions géopolitiques récentes, en ont fait évoluer le statut.
Celui-ci est passé d’un engagement important, mais très peu probable, à un engagement tout aussi important, mais dont la probabilité nécessite, désormais, de l’intégrer dans la planification opérationnelle française, comme valeur de référence au cœur de ce format, en lieu et place de la projection de 15 appareils du Livre Blanc 2013, et des Revues stratégiques de 2018 et 2022.
En d’autres termes, là où l’Armée de l’Air devait garantir la disponibilité de deux escadrons stratégiques, soit vingt avions de combat, et de 15 avions de combat en projection, avec un potentiel de vol, c’est-à-dire le nombre d’heures de vol restant jusqu’à la prochaine grande visite, suffisant pour soutenir l’activité, elle doit dorénavant faire de même pour deux escadrons stratégiques, et 40 avions de combat tactiques, passant donc de 35 à 60 avions de chasse prêts au combat à tout instant.
Il manque 95 avions de chasse à l’Armée de l’Air et de l’Espace
De fait, la disponibilité d’une flotte de 60 chasseurs, disposants de plus de 50 % de leur potentiel de vol, à tout instant, cela entraine une flotte de deux fois plus d’appareils, soit 120 chasseurs, ayant un potentiel de vol de 50 % ou moins, sachant que les appareils déployés et/ou en situation opérationnelle, consomment leur potentiel de vol, deux fois plus vite, qu’en France, pour les missions d’entrainement et de Police du Ciel.
Il manque 95 avions de chasse à l’Armée de l’Air et de l’Espace, et 12 à l’Aéronautique Navale française.
En outre, pour garantir la disponibilité permanente de 60 avions de combat à potentiel de vol suffisant, il est aussi nécessaire d’avoir, en permanence, 60 appareils en maintenance, notamment en grande visite, pour assurer le flux et la rotation des appareils.
Au total, donc, il est nécessaire que la flotte de chasse de l’Armée de l’Air et de l’Espace, atteignent les 240 appareils. Remarquez qu’en appliquant ce même raisonnement aux 35 appareils du Livre Blanc, on arrive à 180 avions de combat, très proche des 185 visés aujourd’hui.
Toutefois, deux facteurs doivent désormais être pris en compte, pour garantir l’efficacité et la disponibilité optimale de la flotte de chasse française. Le premier est le prélèvement sur la flotte de chasse lié à la modernisation des appareils. En moyenne, un avion de combat passe par une phase de modernisation majeure tous les huit ans, alors que chaque modernisation l’immobilise pendant six mois.
Il est donc nécessaire d’ajouter, aux 240 avions de combat précédent, une flotte équivalente à un seizième de son format, pour absorber ce prélèvement, soit 15 avions, pour un total de 255 chasseurs.
Il manque 95 avions de chasse à l’Armée de l’Air et de l’Espace, et 12 à l’Aéronautique Navale française
Enfin, le risque de guerre ne pouvant être ignoré, il convient de donner, aux forces aériennes, une capacité d’absorption minimale de l’attrition, par accident ou au combat, d’autant que les appareils sont susceptibles de voler dans des conditions plus difficiles, les exposant notamment au risque aviaire de manière bien plus significative.
Dans la mesure où il s’agit, là, de la seule valeur « subjective » de cette démonstration, nous prendrons un coefficient de réserve le plus réduit possible, eu égard au risque, ainsi qu’aux délais de remplacement des appareils, soit 10 %, amenant le format nécessaire et suffisant de la flotte de chasse de l’Armée de l’Air et de l’Espace à 280,5 appareils, que nous arrondirons à 280.
Dès lors, il manque bien, de manière objective, 280-185 = 95 avions de combat à la flotte de chasse de l’Armée de l’Air, pour satisfaire à ses engagements vis-à-vis de l’OTAN, tout en assurant le reste de son contrat opérationnel.
Notons au passage que dans cette hypothèse, le déploiement des avions de combat en Afrique et au Moyen-Orient, n’est pas intégré, de manière simultanée, ce qui suppose qu’en cas de déploiement pour l’OTAN, l’AAE devra retirer l’ensemble de ses moyens de tous ces théâtres.
Par extension, il manque aussi 12 Rafale M à l’aéronautique navale française
Il serait tentant d’employer le même raisonnement pour conclure que le format de la flotte de chasse embarquée française devrait être amenée à 89 avions de chasse.Toutefois, avec un unique porte-avions, la Marine nationale ne peut pas garantir la permanence du dispositif aéronaval français, ce qui suppose de reprendre le raisonnement.
. 1Il manque 95 avions de chasse à l’Armée de l’Air et de l’Espace, et 12 à l’Aéronautique Navale française
Ainsi, en admettant que la Marine nationale doive garantir le déploiement de 18 Rafale M à bord du Charles de Gaulle, pour des missions de deux mois, avec une période de régénération de deux mois, la surconsommation du potentiel de vol en mission opérationnelle, est compensée, dans le format, par le retrait de la zone de mission de deux mois du porte-avions.
Dès lors, là où un appareil déployé à potentiel supérieur à 50 % pour l’AAE, entrainait la présence de deux appareils au potentiel inférieur à 50 % en métropole, il n’y aura qu’un appareil inférieur à 50 % par appareil supérieur à 50 % déployé, dans le cas de la Marine nationale. À cela, s’ajoute aussi, un demi-appareil en maintenance, puisque l’autre moitié du temps, le porte-avions ne sera pas déployé.
De fait, pour garantir le déploiement de 18 chasseurs Rafale M à bord du Charles de Gaulle par rotation du porte-avions en zone opérationnelle de 2 mois, il faut 2×18 + 9 = 45 avions Rafale M dans l’inventaire de la Marine nationale. En ajoutant le prélèvement pour modernisation, soit 1/16ᵉ, puis la gestion de l’attrition de 10 %, cette flotte atteint 52 appareils, soit 12 chasseurs supplémentaires, vis-à-vis de la flotte de 40 appareils actuellement en parc.
Notons que lorsque le PANG entrera en service, ce nombre montera à 70 appareils, pour garantir la présence de 24 appareils de combat, de la même manière, à bord du porte-avions.
En revanche, si la flotte de porte-avions devait passer à deux, pour garantir en permanence une flotte embarquée de 24 chasseurs, une flotte de 112 chasseurs serait nécessaire et suffisante, en appliquant, cette fois, strictement le même raisonnement que pour l’AAE.
15 ans et 20 Md€ pour redonner à la Chasse française, son format optimal
Sur la base de ce raisonnement, il manquerait donc 95 avions de combat pour l’Armée de l’Air, soit trois escadrons de 20 appareils, le reste étant en maintenance et réserve, ainsi que 12 chasseurs et une flottille de neuf appareils, pour l’Aéronautique navale. Or, une telle progression, même étalée sur 15 ans, représenterait un investissement et une transformation des armées considérables, sur cette période.
Il manque 95 avions de chasse à l’Armée de l’Air et de l’Espace, et 12 à l’Aéronautique Navale française
Cela suppose la commande 112 chasseurs supplémentaires, soit 1 Md€ par an pendant quinze ans, pour 7,5 appareils supplémentaires par an, y compris les équipements et munitions nécessaires à leur mise en œuvre. Cela nécessiterait, également, très probablement une nouvelle augmentation des cadences de production de Rafale de Dassault Aviation, pour passer de trois à quatre appareils produits chaque mois, afin de répondre à ce besoin supplémentaire.
Surtout, cela suppose de recruter et de former les effectifs nécessaires pour former ces escadrons et flottille, pour les équipages comme pour assurer la maintenance des appareils, et pour soutenir l’activité de l’ensemble de ces effectifs supplémentaires, le tout représentant de 5 à 6000 militaires supplémentaires.
Il faudra, enfin, positionner ces effectifs et ces appareils, ce qui pourrait nécessiter l’activation d’une nouvelle base aérienne de chasse, et peut-être d’une base aéronavale, ou, tout du moins, de relocaliser une ou deux flottilles, sur une autre base que Landivisiau.
On peut estimer l’investissement initial nécessaire à la mise en place de ces nouvelles infrastructures, l’adaptation des infrastructures existantes, et le recrutement et la formation initiale du personnel supplémentaire nécessaire, autour de 5 Md€, et le surinvestissement annuel nécessaire, entre 1 et 2 Md€.
Conclusion
On le voit, le format actuel de la flotte de chasse française, qu’il s’agisse de l’Armée de l’Air et de l’Espace, comme de l’Aéronautique navale, est très inférieur au format nécessaire pour répondre aux engagements de la France, vis-à-vis de l’OTAN, ou, tout simplement, pour assurer la sécurité aérienne du pays et de ses intérêts, considérant qu’une flotte de 40 avions de chasse opérationnels, et 18 chasseurs à bord du Charles de Gaulle, sont les stricts minimums pour être en mesure de le faire.
Il manque 95 avions de chasse à l’Armée de l’Air et de l’Espace, et 12 à l’Aéronautique Navale française
Le format actuel, visé par la LPM 2024-2030, a été défini en 2013, lors de la rédaction du Livre Blanc sur la Défense et la Sécurité Nationale, avant même la capture de l’Ukraine et l’attaque du Donbass par la Russie, avant le déclenchement de l’opération Serval au Mali, avant la seconde guerre du haut Karabagh, avant les menaces appuyées de Pékin sur Taïwan, et avant la guerre en Ukraine, et l’ensemble de ses conséquences directes et induites, en Europe, au Moyen-Orient et dans le Pacifique.
En dépit de ces nombreux événements qui se sont déroulés ces dix dernières années, jamais ce format n’a été re-évalué, comme c’est aussi le cas du format de la flotte de char de l’Armée de terre, ou de celui des frégates et des sous-marins d’attaque de la Marine nationale.
Certes, amener la flotte de chasse française, au format requis de 332 appareils, nécessiterait des crédits importants, qui seront difficiles à mobiliser (tout en moins en appliquant le modèle actuel), et des effectifs au moins aussi ardus à recruter. Toutefois, il semble évident, dorénavant, que le format hérité de 2013, n’est plus en accord ni avec la menace, ni avec le contrat opérationnel des forces aériennes françaises.
Il est certainement nécessaire, dès lors, de mener une réflexion objective sur l’ensemble des formats des armées françaises, hérités de ce livre blanc sans plus aucun rapport avec la réalité des menaces, pour construire la programmation militaire nationale, et non plus construire la programmation militaire sur des contraintes budgétaires, pour en déduire les menaces pouvant être contenues. Question de méthode, probablement…
Article du 7 aout en version intégrale jusqu’au 21 septembre 2024