Marine nationale : La DGA donne son feu vert à la production des sept dernières vedettes de soutien à la plongée

Marine nationale : La DGA donne son feu vert à la production des sept dernières vedettes de soutien à la plongée

https://www.opex360.com/2023/03/23/marine-nationale-la-dga-donne-son-feu-vert-a-la-production-des-sept-dernieres-vedettes-de-soutien-a-la-plongee/


 

Mise à l’eau en avril 2022, la première unité de ce programme – appelée Ophrys – fit l’objet d’une campagne d’essais en mer, avant d’être remise à la DGA en novembre dernier. Et il ne restait plus à l’industriel d’attendre le feu vert pour lancer la construction des sept autres unités prévues.

Ce feu vert était en effet suspendu aux résultats de l’évaluation opérationnelle de l’Ophrys menée par la Marine nationale. Pour autant, bien qu’elle ne soit pas encore terminée, celle-ci a d’ores et déjà permis de confirmer les « bonnes qualités de manœuvre et de navigation de la VSP » et de vérifier son autonomie et son endurance ainsi que le bon fonctionnement de son caisson hyperbare de recompression.

« Elle a ainsi démontré aux groupes de plongeurs démineurs et à l’Ecole de plongée qu’ils pourront conduire leurs opérations subaquatiques en sécurité », a en effet souligné la DGA, qui a par conséquent lancé la production des sept autres VSP commandées.

La seconde vedettes devrait ainsi être livrée à la Marine nationale durant l’été 2024. « Les livraisons des VSP suivantes s’échelonneront tous les trois mois jusqu’au second trimestre 2026 », a précisé la DGA, ce 23 mars. « L’arrivée des VSP dans la Marine nationale complète le renouvellement des capacités navales de lutte contre les mines et les engins explosifs improvisés, tel que prévu par la loi de programmation militaire 2019-2025 », a-t-elle ajouté.

Pouvant être déployées dans les zones de faible profondeur [60 à 100 mètres], les VSP se verront confier plusieurs missions. Outre la lutte contre les mines [d’abord en complément des bâtiments bases pour plongeurs démineurs et des chasseurs de mines tripartites, puis du SLAM-F], elles seront utilisées pour la recherche par sonar remorqué, la formation, le soutien aux travaux sous-marins et l’intervention sur les coques de navires.

Construite en aluminium, une VSP affiche un déplacement de 87 tonnes, pour une longueur de 26,5. Dotée d’un moteur diesel et d’une propulsion électronique pour naviguer discrètement à vitesse réduite, son autonomie est de 450 km. Elle peut embarquer jusqu’à 30 plongeurs pour des « missions à la journée ». Enfin, elle est armée d’une mitrailleuse de 7,62 mm.

Marine nationale : Le premier Bâtiment ravitailleur de forces a mis le cap vers son futur port d’attache

Marine nationale : Le premier Bâtiment ravitailleur de forces a mis le cap vers son futur port d’attache

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En réalité, le départ du BRF « Jacques Chevallier » aurait dû avoir lieu plus tôt, c’est à dire après la première cérémonie des couleurs, au cours de laquelle le pavillon français a été hissé pour la première fois à son bord.

« C’est un jalon important dans la prise en main par la Marine d’un nouveau bâtiment. Elle suit la prise d’armement pour essais [PAE] à l’occasion de laquelle le capitaine de vaisseau Pierre Ginefri a été désigné commandant du premier équipage d’armement en janvier 2023 », avait expliqué la Marine nationale, le 3 mars dernier.

Seulement, le mouvement social contre la réforme des retraites a retardé d’une semaine le départ du navire pour son futur port d’attache.

Quoi qu’il en soit, souligne Naval Group, « le BRF ‘Jacques Chevallier’ a franchi une nouvelle étape en quittant son port constructeur avant sa réception par l’Organisation Conjointe de Coopération en matière d’Armement [OCCAr], pour le compte de la Direction générale de l’armement [DGA], et sa livraison à la Marine nationale à l’été 2023 ».

Le BRF doit arriver à Toulon d’ici la fin du mois de mars. Avant cela, les essais en mer auxquels il sera soumis se concentreront sur son système de ravitaillement à la mer [fourni par les Chantiers de l’Atlantique] ainsi que sur son système de combat et de communication [livré par Naval Group].

« Nous nous félicitons de l’excellent résultat obtenu grâce à la bonne coopération de nos équipes et de celles de nos différents partenaires. Nous allons maintenant poursuivre cette collaboration de qualité jusqu’à la livraison du navire au mois de juillet à Toulon », a commenté Laurent Castaing, le directeur Général des Chantiers de l’Atlantique.

« Le départ du navire pour son port d’attache est un jalon important pour la DGA, la Marine nationale, les Chantiers de l’Atlantique, Naval Group et tous nos partenaires industriels. Nous sommes fiers de faire partie de ce programme européen et restons pleinement engagés à offrir à la DGA et à la Marine nationale les meilleures expertises des secteurs civil et militaire dans la construction des navires de fort tonnage », a fait valoir Olivier de la Bourdonnaye, Directeur Bâtiments de surface de Naval Group.

Pour rappel, le programme FLOTLOG a fait l’objet d’un contrat de 1,7 milliard d’euros, notifié à Naval Group et aux Chantiers de l’Atlantique par le ministère des Armées, via l’OCCAr. Quatre BRF doivent être construits, selon le modèle du LSS [Logistic Support Ship] A5335 Vulcano, du constructeur italien Fincantieri. La construction du second, le « Jacques Stosskopf » doit commencer à Saint-Nazaire d’ici environ un an, alors que la coupe de sa première tôle a été réalisée en février 2022 au chantier naval de Castellammare di Stabia [Italie].

D’une longueur de 194 mètres pour une largeur de 24 mètres et un déplacement de 31’000 tonnes en charge [16’000 tonnes à vide], les BRF auront une capacité d’emport de 1’500 tonnes de fret et de 13’000 m3 de carburants. D’une autonome de 8000 nautiques, ils seront mis en oeuvre par un équipage de 130 marins. Dotés d’une double coque, ils disposent d’une passerelle de navigation à 360°, de quatre mâts de ravitaillement polyvalents permettant le soutien simultané de deux navires et d’une plateforme aéronautique pouvant accueillir un hélicoptère NH-90 ainsi qu’un drone aérien. Leur armement repise sur deux systèmes RAPIDFire de 40 mm, fournis par Thales et Nexter.

Photo : Marine nationale

Le prochain arrêt technique du porte-avions Charles de Gaulle va durer environ huit mois

Le prochain arrêt technique du porte-avions Charles de Gaulle va durer environ huit mois

 

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Cela étant, cette mission, qui vient de se terminer dans une relative discrétion, n’aura pas recelé d’énormes surprises, si ce n’est la projection inédite de trois Rafale Marine à Singapour, alors que le GAN naviguait dans le nord de l’océan Indien. Lors de cette mission, appelée « Rastaban », les chasseurs-bombardiers du groupe aérien embarqué ont parcouru 4000 km [avec le soutien d’un avion-ravitailleur A330 MRTT de l’armée de l’Air & de l’Espace] pour participer à des exercices avec la force aérienne singapourienne.

Au total, durant Antarès, le GAN a parcouru 28’000 nautiques et assuré plus de 2000 catapultages d’aéronefs, ce qui lui a permis, souligne la Marine nationale, d’affirmer « partout l’attachement de la France au respect du droit international et à la liberté de navigation en mer », de compléter « l’appréciation autonome de situation des armées dans l’ensemble des zones traversées » et de réaliser de « nombreuses coopérations opérationnelles avec les forces armées de 23 nations ».

La mission Antarès s’est donc terminée après 110 jours de mer… et une participation du GAN à l’exercice interarmées Orion. Dans les semaines à venir, le porte-avions Charles de Gaulle devrait de nouveau être sollicité pour une campagne de qualification à l’appontage de jeunes pilotes. Puis il sera ensuite immobilisé pour un arrêt technique qui s’annonce long… puisqu’il doit durer jusqu’en décembre prochain.

En effet, outre les travaux de routine et le contrôle des chaufferies nucléaires, cet arrêt technique se concentrera sur la coque du navire ainsi que sur ses lignes d’arbres. C’est en effet ce qu’a confié son commandant en second au quotidien Var Matin.

Ces travaux sur les lignes d’arbres seront d’autant plus importants que le porte-avions britanniques HMS Prince of Wales est immobilisé depuis maintenant plusieurs mois en raison justement d’une avarie à ce niveau [une rupture d’un accouplement SKF, ndlr]. Or, par le passé, le Charles de Gaulle a connu une mésaventure du même ordre. En 2009, il était en effet apparu que deux pièces d’accouplement reliant deux des quatre turbines à leurs lignes d’arbres s’étaient révélées anormalement usées.

Par ailleurs, toujours d’après la même source, l’hôpital du porte-avions va être rénové de « A à Z », de même que de nombreux locaux de vie. Enfin, le navire recevra de nouvelles capacités, avec l’installation d’une station navale Syracuse 4 qui, plus puissante et mieux sécurisée, permettra de profiter du débit offert par les satellites de la constellation Syracuse 4 [de l’ordre de 3 à 4 Gb/s, en bande X et en bande Ka, ndlr].

Cette immobilisation du Charles de Gaulle, qui s’annonce longue, malgré le contexte sécuritaire actuel, plaide pour un format à deux porte-avions. Rapporteur pour avis sur les crédits de la Marine nationale, le député Yannick Chenevard l’avait souligné dans son dernier rapport, alors que les études sur le PA NG [porte-avions de nouvelle génération] sont en cours.

« Disposer d’un seul porte-avions signifie, en pratique, ne pouvoir l’utiliser qu’entre 65 et 70 % du temps compte tenu de ses opérations régulières de maintenance [arrêt technique majeur de deux ans, arrêts intermédiaires de six mois…]. […] Un seul porte-avions n’est pas suffisant et notre pays, comme l’Italie ou le Royaume-Uni, se doit de retrouver la capacité qui était la sienne jusqu’au début des années 2000, c’est-à-dire deux porte-avions », fit valoir M. Chenevard.

Et d’ajouter : « La décision de se doter d’un deuxième porte-avions, […] n’est pas urgente, les études du PA-NG commençant à peine. Toutefois, elle ne doit pas non plus être repoussée au-delà de 2027 pour des raisons financières et industrielles. Plus la commande du deuxième PA-NG sera proche de celle du premier, plus il sera possible de faire des économies d’échelle et, par conséquent, de réduire son prix mais également le coût du MCO [maintien en condition opérationnelle] »

Photo : Marine nationale

L’amiral Vandier tord le cou à l’idée de convertir des SNLE en sous-marins lanceurs de missiles de croisière

L’amiral Vandier tord le cou à l’idée de convertir des SNLE en sous-marins lanceurs de missiles de croisière

 

par Laurent Lagneau – Zone militaire – publié le 12 février 2023

https://www.opex360.com/2023/02/12/lamiral-vandier-tord-le-cou-a-lidee-de-convertir-des-snle-en-sous-marins-lanceurs-de-missiles-de-croisiere/


 

Alors que le programme de sous-marin nucléaire lanceur d’engins de 3e génération [SNLE 3G] a été lancé en vue de l’admission en service du premier exemplaire à l’horizon 2035, l’idée de transformer au moins un des quatre SNLE de la classe Triomphant en sous-marin lanceur de missiles de croisière [SSGN] a été avancée durant la campagne de la dernière élection présidentielle, en particulier par l’ex-député Fabien Gouttefarde, alors soutien d’Emmanuel Macron.

Appelant à prendre des « décisions courageuses », celui-ci avait en effet plaidé en faveur de la conversion de « deux sous-marins nucléaires lanceurs d’engins en lanceurs de missiles de croisière naval, tout en conservant le format de la dissuasion sous-marine », afin d’offrir au président de la République un « outil de dialogue politique de haute intensité, pour un coût relativement maitrisé ». Et il avait également estimé « incontournable » la commande d’un septième sous-marin nucléaire d’attaque [SNA] de type Suffren pour mener régulièrement des missions dans la région Indo-Pacifique.

Plus tard, revenant sur les réactions négatives suscitées par cette idée chez quelques uns, M. Gouttefarde était revenu à la charge dans une tribune publiée par le site Atlantico.

La « conversion de deux sous-marins lanceurs d’engins en lanceurs de missiles de croisières navals, en accélérant le SNLE de troisième génération » nécessite une « décision rapide », avait-il estimé. Et d’ajouter : « Cette proposition, que j’ai déjà émise, a pu sembler trop disruptive à certains. Pourtant, le déploiement par le président russe d’un véritable rideau de feu constitué de pas moins de 35 régiments anti-aériens illustre, par une singulière ironie de l’Histoire, sa pertinence ».

Cela étant, si « certains » l’estimèrent trop « disruptives », d’autres, au contraire, trouvèrent cette proposition séduisante. Aussi, lors d’une récente audition parlementaire dédiée à la dissuasion nucléaire, le chef d’état-major de la Marine nationale [CEMM], l’amiral Pierre Vandier, n’a pas coupé à une question à son sujet.

« Il avait […] été suggéré durant la campagne présidentielle de restaurer d’anciens SNLE pour en faire des SNA. Que pensez-vous de cette idée pour permettre à nos sous-marins de déployer des missiles de croisière? », lui a en effet demandé le député [RN] José Gonzales.

L’amiral Vandier n’a pas dit s’il trouvait un intérêt à convertir un SNLE en SSGN. En revanche, il a expliqué en quoi cette proposition n’est pas réalisable.

« Compte tenu de la force sous-marine dont disposaient les États-Unis dans les années 1990, lors de la signature des accords sur la réduction des armes stratégiques, cette puissance a fait le choix de reconvertir certains SNLE qui en étaient à la moitié de leur durée de vie. Quatre sous-marins de classe Ohio ont ainsi été convertis », a d’abord rappelé le CEMM. « Leur lance-missiles balistique a été transformé en lance-missiles de croisière avec une capacité de mise en œuvre de forces spéciales », a-t-il ajouté.

Si, techniquement, elle est à la portée de l’industrie navale française, une telle opération n’est cependant pas possible pour la Marine nationale. « Le nombre de sous-marins dont nous disposons ne nous le permet pas dans la pratique », a dit l’amiral Vandier. Aussi, « nos sous-marins seront utilisés jusqu’à la fin de leur cycle de vie », a-t-il ajouté.

D’autant plus qu’une telle opération supposerait de prolonger la durée de vie des deux SNLE à convertir, avec une attention particulière sur leur coque et leur chaufferie nucléaire. En outre, ne pouvant être mis en service qu’à partir de 2035, ils risqueraient d’être technologiquement dépassés. Une autre objection tient aux capacités de production de l’industrie naval en général et de Naval Group en particulier.

Enfin, augmenter le format de la flotte de sous-marins nucléaires pose la question du personnel… au moment où la Marine nationale peine à retenir ses atomiciens.

« S’agissant du recrutement des atomiciens, de nombreux jeunes sont intéressés par ce domaine. La filière est donc vivante, même s’il est vrai que le contexte industriel et économique fait peser une pression importante. Cela demande beaucoup d’engagement et d’efforts, mais à ce stade nous parvenons à recruter les effectifs dont nous avons besoin », a d’abord confié l’amiral Vandier.

Cependant, a-t-il admis, la « problématique porte plutôt sur la fidélisation, qui ne concerne pas seulement les atomiciens » car « en raison du dynamisme du marché du travail, notamment s’agissant des profils dotés de compétences très pointues », la Marine nationale est confrontée à « des taux de départs importants s’expliquant par l’attrait de salaires plus élevés, associés à de moindres contraintes ». Aussi, a fait valoir le CEMM, la « fidélisation du personnel est donc l’un des enjeux majeurs de la nouvelle Loi de programmation militaire ».

LPM 2024-30 : La Marine nationale ne devrait pas obtenir davantage de frégates dites de « premier rang »

LPM 2024-30 : La Marine nationale ne devrait pas obtenir davantage de frégates dites de « premier rang »

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                      Tir ASTER 30 le 27 janvier 2021, à bord de la FREMM Normandie.

 

Plus récemment, le Centre d’études stratégiques de la Marine [CESM] a publié un rapport détaillant ce « réarmement », qui ne concerne pas seulement le nombre de navires de premier rang qu’une force navale est capable d’aligner… mais aussi les évolutions technologiques et l’investissement dans de nouveaux espaces de conflits [cyber, fonds marins, espace].

« En devenant un lieu de contestation et de compétition, la mer redevient une zone de confrontation et potentiellement d’affrontement. La mise en place de stratégies assumées de remise en cause du droit, de politique du fait accompli ou de provocations calculées augmente le risque d’incidents et de confrontations aux conséquences imprévisibles. Le combat naval de haute intensité redevient une hypothèse possible, voire probable », est-il expliqué dans ce document.

Et d’ajouter : « L’acquisition de moyens d’action navale nombreux, puissants et coûteux contient en elle-même la volonté sous-jacente des États de s’en servir le jour où ils jugeront, selon leurs critères propres, que leurs intérêts sont en cause. Cependant, l’affrontement, s’il devient possible, n’est pas inéluctable, détenir des moyens navals puissants est aussi un moyen de faire prévaloir ses intérêts sans atteindre le combat direct ».

Évidemment, cette tendance n’est pas sans conséquence sur le contrat opérationnel de la Marine nationale… qui ne dispose [théoriquement] que de quinze frégates dites de premier rang… Et encore, en « trichant » un peu puisque les frégates de type La Fayette modernisées sont comptées. Les précédents CEMM ne manquèrent pas de dénoncer [à mots couverts] cette situation… Situation dont les effets se font sentir aujourd’hui, avec la guerre en Ukraine et les tensions avec la Russie. « Avec la pression croissante exercée par les Russes en Atlantique, le besoin de frégates augmente, ce qui diminue notre capacité à réaliser d’autres missions ailleurs », a ainsi récemment confié l’amiral Vandier.

Cela étant, les parlementaires sont conscients de l’insuffisance du format de la Marine, laquelle est dénoncée à longueur de rapports. Comme encore en octobre dernier, avec celui du député Yannick Chenevard [Renaissance, majorité].

« Il n’est clairement pas adapté à la menace actuelle et encore moins future, tout en exposant la Marine, dans l’accomplissement de ses missions, à une suractivité qui épuise marins et matériels. […] Dans ces conditions, le retour au format d’avant le livre blanc de 2013 – dix-huit frégates de premier rang – apparaît comme le strict minimum » et « au-delà des frégates, l’une des questions majeures à trancher dans les prochaines années sera celle d’un deuxième porte-avions identique au PA-NG », a plaidé ce dernier.

La Loi de programmation militaire 2024-30, qui sera dotée de 413 milliards d’euros, remédiera-t-elle à cette situation? Rien n’est moins sûr… Lors de ses vœux aux Armées, le 20 janvier, le président Macron a seulement parlé d’augmenter « la puissance et la protection » des frégates et confirmé le développement du porte-avions de nouvelle génération [PANG].

A priori, et alors que les derniers arbitrages de cette future LPM sont encore en cours, la messe est dite. En tout cas, c’est ce que suggère la réponse faite par Sébastien Lecornu, le ministre des Armées, alors qu’il était interrogé sur le nombre de frégates dont disposera la Marine dans un entretien accordé à l’hebdomadaire Valeurs Actuelles.

« On ne peut plus en 2023 ne regarder que la seule gamme des frégates. Il faut repartir des nouvelles technologies comme des missions et elles sont très différents pour notre Marine nationale, passant de la mise en œuvre de la dissuasion nucléaire à la lutte contre les trafics en tout genre, sans oublier les différentes capacités de projection », a dit M. Lecornu.

À titre de comparaison, selon les projections du CESM, la Marina Militare disposera de 17 navires de premier rang à l’horizon 2030, soit deux de moins que la Royal Navy. A contrario, la Marine nationale comptera plus de navires dits de second rang – comme par exemple les dix patrouilleurs océaniques, qui remplaceront les avisos de la classe « ‘Estienne d’Orves » – par rapport à son homologue italienne [24 contre 14]

« Le président de la République aura l’occasion bientôt de développer en détail la feuille de route pour notre outre-Mer, ce qui est une particularité française là aussi », a par ailleurs ajouté. Sur ce point, il est question de remplacer les actuelles frégates de surveillance, faiblement armées, par des navires issus du programme « European Patrol Corvette » [EPC].

Enfin, M. Lecornu a de nouveau assuré que la « France aura un groupe aéronaval à propulsion nucléaire à l’horizon 2040 » car « c’est l’un des outils de notre capacité militaire mais aussi de notre diplomatie ».

Les forces françaises auront-elles bientôt la capacité d’aveugler les satellites adverses avec des lasers?

Les forces françaises auront-elles bientôt la capacité d’aveugler les satellites adverses avec des lasers?

 

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« Les lasers peuvent également être une arme de guerre spatiale opérée depuis les bateaux : ils peuvent ainsi aveugler des satellites d’observation pour assurer la dissimulation de forces navales en situation de conflit », avait-il en effet développé lors d’une audition parlementaire.

Une telle capacité pourrait effectivement avoir un intérêt pour une opération aéronavale ou amphibie, ce qui éviterait, par exemple, de calculer l’heure des raids ou d’un débarquement en fonction des fauchées des satellites, ce qui complique évidemment la tâche.

Visiblement, la Direction générale de l’armement [DGA] y travaille, comme l’a indiqué Emmanuel Chiva, son patron, à l’occasion d’une audition au Sénat [le compte-rendu vient d’être rendu public].

« Nous avons […] prévu ce que nous pouvons appeler de grands démonstrateurs signaux, consistant en des capacités au sol d’illumination laser de satellites adverses. », a en effet confié le Délégué général pour l’armement [DGA]. « Je pense que nous n’en sommes pas très loin », a-t-il précisé.

Cela étant, la DGA ne part pas d’une feuille blanche en la matière, notamment grâce aux travaux de l’Office national d’études et de recherches aérospatiales [ONERA] qui, dans les années 1990, mena des « essais grandeur nature de neutralisation de satellites en fin contractuelle de vie opérationnelle », ce qui lui permit de recueillir des données, en particulier sur les niveaux d’énergie nécessaires.

« Nous travaillons sur une technologie dite d’optique adaptative. L’effet recherché n’est pas de détruire l’objet, mais de l’empêcher d’effectuer sa mission. En concentrant l’énergie sur la cible, on pourrait endommager les panneaux solaires d’un satellite ennemi, ou pénétrer par ses fenêtres optiques et l’éblouir », avait par ailleurs expliqué un responsable de l’ONERA dans les pages de l’hebdomadaire Challenges, en 2019.

Par ailleurs, et compte-tenu du risque d’interception des communications par satellite, la DGA conduit également le projet Keraunos, dont l’objectif est d’expérimenter une liaison de communication optique, à base de laser haut débit, entre un nano-satellite en orbite basse et une station sol sur Terre.

« Les liaisons laser sont, par définition, difficiles à intercepter et parce qu’avec ce type de technologie, la station au sol pourra être mobile et embarquée dans un véhicule. Cela nous donne des capacités considérables, résilientes à un certain nombre d’actions que pourraient tenter nos compétiteurs », a expliqué M. Chiva, en évoquant ce projet sans le nommer.

Reste à voir l’effort qui sera consenti en faveur des capacités spatiales dans le cadre de la prochaine Loi de programmation militaire. Celle qui est encore en cours avait prévu un investissement de 4 milliards d’euros, afin de renouveler une partie des capacités des forces françaises.

« L’enjeu de la prochaine LPM sera de confirmer cet effort dans la durée et de garantir une cohérence dans les différents programmes, puisque beaucoup ont un lien avec le domaine du spatial », a seulement dit M. Chiva… Mais au moment de son audition par les sénateurs, tous les grands arbitrages n’avaient pas encore été rendus.

Le sous-marin nucléaire d’attaque (SNA) Suffren achève son premier déploiement opérationnel au sein du groupe aéronaval 

Le sous-marin nucléaire d’attaque (SNA) Suffren achève son premier déploiement opérationnel au sein du groupe aéronaval 

Admis au service actif le 1er juin 2022, le SNA Suffren (équipage bleu) a achevé le 4 janvier 2023 son premier déploiement opérationnel au sein du groupe aéronaval. Déployé en mer Méditerranée, le SNA Suffren a participé à la mission ANTARÈS pour la défense des intérêts français et européens.

Au cours de ce déploiement, il a contribué à la connaissance et à l’anticipation des crises dans les zones d’intérêts stratégiques, concourant ainsi à la capacité autonome de décision de la France. Par ces missions et sa contribution avec les autres unités déployées, le Suffren a participé à la préparation des futures opérations de la Marine dans la région.

Sous l’autorité de l’état-major de la Task force 473, le SNA Suffren a également validé sa capacité à conduire une frappe contre terre au missile de croisière naval (MdCN), coordonnée avec les autres unités du groupe, particulièrement les frégates multimissions et Rafale Marine.

Lors de ce déploiement opérationnel, l’équipage a effectué une escale à La Sude (Grèce) avant de repartir à la mer lors des fêtes de fin d’année. Achevant une mission débutée le 22 novembre dernier, les membres de l’équipage du SNA Suffren ont retrouvé leurs familles à leur arrivée à quai. Le bâtiment va entamer sa période d’entretien annuel.

Ce déploiement opérationnel ponctue trois cycles réalisés par les deux équipages du bâtiment depuis sa sortie de bassin (pour entretien) en avril 2022. Depuis, le sous-marin aura été disponible près de 240 jours dont 190 jours navigués. Il a durant ce temps achevé la validation de ses capacités opérationnelles avant d’être admis au service actif.

Les SNA de type Suffren effectuent les mêmes missions que les SNA de type Rubis (protection d’unités précieuses, connaissance & anticipation, intervention) avec des capacités différenciantes supérieures (rapidité, endurance, mise en œuvre de forces spéciales, capacité de frappe contre terre au MdCN).

                                                                     Crédit : Marine nationale.

Le porte-avions, assurance-vie des outremers

Le porte-avions, assurance-vie des outremers

Alors que la nouvelle loi de programmation militaire est en discussion et que se pose la question des modalités de remplacement du porte-avions nucléaire « Charles de Gaulle », les débats reviennent sur la pertinence du groupe aéronaval dans son format actuel, face à des menaces censément nouvelles et au regard de technologies « de rupture » qui permettraient, à moindre coût et à moindre risque, de disposer de capacités équivalentes. Si les arguments pour ou contre le porte-avions sont souvent assez convenus, il en est un qui est assez peu mis en avant par ses promoteurs, alors qu’il devrait être au cœur de notre stratégie de défense : le groupe aéronaval constitue aujourd’hui la principale assurance vie des outremers, la traduction concrète de l’effort de défense nationale pour des millions de Françaises et de Français qui partagent notre communauté de destin, loin de la métropole.

Il en va du porte-avions comme du char d’assaut : depuis sa création à la fin de la Première Guerre mondiale, ses opposants n’ont eu de cesse de proclamer sa mort ou son inutilité à chaque conflit, à chaque apparition d’un système nouveau pouvant soit le remplacer soit le condamner. Critiques d’autant plus audibles que son coût va croissant et devient en apparence exorbitant. Pourtant, il demeure. Non pas comme un éléphant blanc inactif dans un port, mais comme l’outil privilégié des opérations de projection des grandes marines océaniques, cœur de groupes aéronavals qui ont pris depuis un siècle des formes très variées pour des missions dont le spectre a concerné tous les milieux, toutes les politiques et toutes les situations possibles, de la lutte antinavire à la frappe des littoraux ou dans la profondeur, en passant par le blocus maritime, la lutte anti sous-marine, l’escorte de convois ou encore la mise en œuvre de la dissuasion nucléaire. Il n’est pas un État, ancien ou émergent, qui tente d’en faire l’économie une fois que sa marine a atteint un certain développement. Chine, Corée du sud, Espagne, États-Unis, Inde, Italie, Japon, Royaume-Uni, Russie et Turquie sont dans ce constat qu’il leur faut disposer d’au moins un groupe aéronaval mettant en œuvre des avions embarqués, même si les questions de la forme du navire et de la composition de son groupe aérien demeurent ouvertes, entre ambitions, moyens, doctrines, limitations politiques et compétences nationales, innovations et obsolescences.

Bien entendu, le fait que de nombreuses marines restent convaincues de son utilité n’est pas suffisant en soi pour affirmer que la France a besoin d’un groupe aéronaval. D’autres formats de marine existent, qui renvoient à d’autres missions et d’autres ambitions. À un moment où la guerre revient à grande échelle sur le sol européen et où la montée de crises climatiques, énergétiques, économiques et sociales menace le continent, la tentation pourrait être grande de « faire l’économie » du groupe aéronaval, pour redéployer des crédits vers l’aviation basée au sol, la défense territoriale, les stocks de munitions… Les arguments « traditionnels » de défense du porte-avions trouvent ici leurs limites : focalisés autour de la question de la projection de puissance en coalition, le plus souvent avec l’apriori tacite du contexte d’interventions internationales en situation de crise dans les pays émergents, ils limitent souvent le porte-avions à un instrument de prestige basé sur la visibilité et la liberté de navigation, qui permet à la France de « tenir son rang », sans qu’il soit toujours très évident de mesurer, par ce prisme d’analyse, l’apport concret du groupe aéronaval par rapport au déploiement de forces aériennes projetées depuis une base amie ou à la présence de moyens de frappe navals dans la profondeur (frégates et sous-marins porteurs de missiles de croisière). Alors que la France ne se pense plus comme un Etat devant être appelé à agir seul en dehors du cadre de la mise en œuvre de sa dissuasion nucléaire, on pourrait même considérer que, l’alliance américaine étant maintenant une question de survie en Europe, il y aurait une forme de logique d’économie de coûts par rapport aux effets obtenus de la part d’un pays qui s’ambitionne comme un « allié exemplaire », à devenir de simples supplétifs au sein d’un des groupes aéronavals de l’U.S. Navy.

Si on veut saisir le rôle crucial du groupe aéronaval dans la politique de défense nationale, il faut sans doute revenir aux fondements de celle-ci, telle que décrite par l’article 1 du Code de la défense : « assurer l’intégrité du territoire et la protection de la population contre les agressions armées ». Cette quête, basique mais cruciale, de la sanctuarisation du territoire et de ses populations, a pris des formes très diverses au fil des siècles. La situation née du tournant de la guerre froide est à ce titre une forme d’aboutissement historique du dilemme entre les menaces et les moyens de parade : jamais jusqu’alors la France n’avait pu être menacée d’un anéantissement total en quelques minutes. Et jamais elle n’avait disposé, en même temps, des moyens de dissuader une telle menace de manière aussi fiable et autonome. La dissuasion nucléaire nous a fait sortir d’un cycle de menaces sur le sanctuaire national qui avait duré « de Bouvines à la ligne Maginot ».

Actuellement, la France métropolitaine n’est en aucune façon menacée dans ses frontières nationales. Sa situation est très différente de celle de l’Ukraine et infiniment plus confortable. Non seulement en raison de la dissuasion nucléaire qui nous permet d’éviter toute menace ou tout chantage de la part d’une puissance nucléaire tout en élevant le coût stratégique d’une attaque sur nos frontières ; mais surtout sans doute en raison de la paix historique dont nous bénéficions. La profondeur des liens économiques, politiques, culturels et — malgré toutes les crises — amicaux entre la France et ses voisins européens constitue une des meilleures garanties de sécurité territoriale de son histoire alors que, il y a moins d’un siècle, deux de ceux-ci, l’Allemagne et l’Italie, nous envahissaient. Ces liens sont sans commune mesure avec l’interdépendance que l’Allemagne a recherché — en vain — avec la Russie, ils sont constitutifs d’une véritable communauté de valeurs et de destin, qui rend d’ailleurs toute idée de « neutralité » aussi dangereuse qu’irréaliste. Cette sécurité à nos frontières est une des raisons pour lesquelles il ne faut pas s’empresser de copier l’exemple ukrainien d’une défense territoriale massive, en métropole. En revanche, il faut admettre la vulnérabilité inédite d’une grande part des territoires et des populations françaises, outre mer, face à l’émergence de nombreuses puissances qui pourraient vouloir les menacer et en ont maintenant les moyens navals, aériens et amphibies.

La France est, il faut le souligner, dans une situation unique dans le monde. Pas tellement d’ailleurs pour des raisons uniquement territoriales. C’est un biais d’analyse récurrent, des rapports parlementaires aux publications de think-tanks : le lieu commun du « deuxième domaine maritime mondial ». Mais, au fond, cela ne fait pas de notre pays un cas unique et cela fonde une analyse « coûts-bénéfices » pour défendre ce que nous avons, comme si l’outre-mer était une « possession » de la France.

Or ce qui fonde l’exception française, ce sont les populations ultramarines. Aucun autre pays dans le monde ne compte des populations se chiffrant en millions d’individus, sur l’ensemble du globe, vivant au sein de territoires de pleine souveraineté. Il n’est pas inutile d’en rappeler le détail :

Les outremers français – une emprise territoriale et humaine unique au monde

Pris ensemble, les DROM-COM représentent une population qui les situerait au neuvième rang des régions françaises, entre Midi-Pyrénées et les Pays de la Loire. Bien entendu, ils ne constituent pas un bloc homogène, ni sur le plan social ni sur le plan géographique. Mais il faut admettre l’importance de ces populations dans la cohésion nationale, tout en soulignant encore leur spécificité mondiale. En effet, si d’autres pays européens ont parfois des territoires insulaires dont la population peut être significative — les îles Canaries espagnoles comptent ainsi plus de 2,27 millions d’habitants — aucun ne dispose de territoires aussi peuplés, variés et surtout éloignés de l’espace européen. L’ensemble des British Overseas Territories ne regroupe ainsi que 273 000 habitants, dix fois moins. Les autres territoires européens situés « loin de la métropole » sont les territoires néerlandais aux Antilles (un peu plus de 292 000 habitants) et les archipels portugais (Açores 237 000 habitants, Madère 270 000 habitants).

Or ces populations françaises, qui partagent notre communauté de vie et de destin, sont exposées à des vulnérabilités spécifiques. La défense des outremers est un sujet complexe, longtemps négligé et trop souvent réduit de facto à l’action de l’État en mer. De manière simplifiée et un peu provocante, on peut dire que la France, puissance nucléaire et membre permanent du Conseil de sécurité des Nations-Unies, s’accommode bien de l’idée que l’arme principale des navires positionnés outre-mer est le drapeau français. Cette approche, au début du XXIe siècle, est caduque. L’offensive russe contre l’Ukraine menée depuis 2014, d’abord de manière limitée et non assumée puis de manière ouverte et massive, a montré la réalité des risques d’une utilisation de l’arme nucléaire par une puissance qui en est dotée et qui est prête à s’approcher du seuil d’emploi pour sanctuariser ses actions de manière agressive. À l’opposé du spectre de la puissance, les menaces hybrides, constituées de groupes armés, de « milices navales » et autres trafiquants, l’arrivée promise des drones dans les espaces maritimes, la fragilité croissante des chaines d’approvisionnement, le déploiement de vastes champs éoliens en mer et la volonté affichée par de nombreux Etats d’exploiter les fonds marins sont autant de défis qui pèsent sur la défense des outremers français et (surtout) de leurs populations.

Ces territoires, lointains et aux voies de communication fragiles, admettons-le, ne bénéficient que bien incomplètement de la dissuasion nucléaire. Face à une puissance nucléaire qui déciderait de s’emparer par la force d’un territoire français en Océan Indien ou Pacifique, l’idée serait-elle envisageable de recourir au feu nucléaire ? Serait-il crédible, sur la scène mondiale ou dans l’opinion, de prétendre « mettre en danger Paris pour sauver Nouméa » ? Un agresseur disposant de l’arme nucléaire pourrait tout à fait baser sa stratégie sur la conviction que ce n’est pas le cas. La conséquence est qu’il faut disposer d’autres options, pour préserver notre liberté d’action. La dissuasion nucléaire est utile à l’outre-mer dans la mesure où elle nous permet de contrer tout chantage ou intimidation du même ordre. C’est patent dans la crise ukrainienne et cela pourrait l’être demain dans une « crise calédonienne » : si nous pouvons ignorer les rodomontades nucléaires périodiques du pouvoir russe, c’est précisément parce que ce « chantage à l’emploi » ne fonctionne pas entre puissances nucléaires, il ne peut intimider que les États qui en sont dépourvus.

De même, l’appartenance de la France à l’OTAN n’est qu’une garantie imparfaite. On se souviendra que, en 1982, les États-Unis avaient signalé à Londres que, en vertu du Traité de l’Atlantique Nord, les îles Falklands n’étaient pas considérées comme « couvertes » par l’Alliance atlantique. Le texte du traité de 1949 fixe une limite géographique claire, dans l’article 6. Sont concernés « les territoires situés en Europe ou Amérique du Nord » et « les îles placées sous la juridiction de l’une des parties dans la région de l’Atlantique Nord au nord du Tropique du Cancer ».

Publication de l’OTAN de 1952 montrant la zone défendue par l’Alliance. L’extension à l’Est n’a que peu changé l’aspect maritime (en dehors de la mer Baltique et des rivages de la Mer Noire) — les outremers français sont largement exclus de la protection de l’Alliance.

Il en résulte que seule Saint-Pierre et Miquelon est « protégée » par l’Alliance atlantique qui, en l’occurrence, s’avère plus protectrice pour l’Alaska que pour la Martinique. Dans ces conditions, et vu le peu d’empressement historique des autres nations européennes à participer aux missions françaises au Sahel, est-il raisonnable de compter sur nos alliés pour défendre l’outre-mer ? Sans doute pas, en dehors de l’espoir de bénéficier de leur soutien logistique, comme cela avait été fait en 1982, lorsque la France avait permis au Royaume-Uni d’utiliser la base de Dakar, par laquelle environ 40% du flux logistique de l’opération britannique avait transité. Pour le reste, il faudrait sans doute se « débrouiller seuls ». C’est d’autant plus vrai que l’invasion russe de l’Ukraine a aussi montré les limites du Conseil de sécurité des Nations unies, facilement paralysé par la Chine ou la Russie, ainsi que l’apathie d’un nombre important de nations de l’Assemblée générale, qui refusent par principe de se positionner dans un conflit qui en apparence ne les concerne pas, même s’il s’agit d’une agression violant de nombreux principes de la Charte.

Face aux risques d’invasion ou d’isolation des territoires ultramarins et de mise en danger des populations, et compte tenu du déséquilibre entre les capacités conventionnelles de la France et celles de certains agresseurs potentiels, il faut bien admettre que toute défense « en avant » est vouée à l’échec. Il faut certes sans doute renforcer les forces de souveraineté, qui sont actuellement fort diminuées. Déployer des moyens de « déni d’accès » dans les DROM-COM les plus exposés (en Indopacifique) serait utile pour élever le seuil d’engagement d’un éventuel agresseur, pour un coût limité pour la France : batteries de missiles antiaériens ou antinavires, patrouilleurs armés complétés de drones navals et aériens, voire capacité à déployer des champs de mines navales protecteurs, permettraient de nous assurer que nos populations ne peuvent être menacées par des incursions de simples forces auxiliaires ou par des « coups de main » aéroportés opportunistes. Ces collectivités devraient en outre être les terrains privilégiés d’expérimentation de réserves militaires territoriales. Pouvoir armer « 1% de la population » en cas de crise permettrait, pour compléter les forces d’active pré-positionnées, de disposer de 2 700 hommes en Nouvelle Calédonie et de près de 9 000 à la Réunion. Munis d’armes légères, de missiles portables, mortiers et véhicules légers, ces forces seraient à même de contrer toute opération aéroportée ou raid amphibie, feraient planer la menace d’une guérilla permanente en cas d’invasion et donneraient à la métropole le temps nécessaire pour réagir.

Cette réaction ne serait possible qu’avec un groupe aéronaval, complété d’un groupe amphibie en cas de besoin de renforcement au sol ou de libération par reprise de vive force. C’est le grand enseignement de la campagne britannique de 1982 : si la défense des Îles lointaines est impossible « en avant », leur libération demeure possible à condition de disposer d’un outil aéronaval complet et à même de garantir avec une réactivité suffisante, dans la durée et en permanence la maîtrise d’une bulle d’espace aéromaritime autour du territoire contesté, afin de pouvoir soumettre les forces ennemies qui y seraient déployées à un blocus, à des frappes, puis à l’attaque soutenue d’une force terrestre. Or, aujourd’hui, il n’y a aucune alternative au porte-avions pour être le cœur de ce groupe aéronaval. Aucun autre bâtiment ne peut assurer la « synthèse » de l’ensemble des moyens tout en assurant disponibilité, récurrence et puissance des moyens de frappe, à la main du contrôleur opérationnel, au plus près des objectifs. Si les raids lointains de l’Armée de l’air et de l’espace seraient possibles, tout comme la Royal Air Force frappait Port Stanley depuis l’île de l’Ascension au prix de 15 000 kilomètres de vol, ces opérations ne peuvent avoir qu’une utilité limitée, soit en démoralisant l’adversaire soit en le privant, provisoirement, de capacités cruciales (radars, centres de commandement), mais sans en aucun cas pouvoir défendre dans la durée le territoire ni le reprendre en cas d’invasion. Il en va de même pour les sous-marins ou pour tout groupe de surface. Seul le porte-avions peut s’adapter à tout type de menace sur les territoires ultramarins. Il peut forcer un éventuel blocus, porter des moyens de patrouille anti-sous-marine (à condition de disposer de tels aéronefs), frapper une force hostile ayant envahi le territoire, participer à son ravitaillement naval et aérien, soutenir l’évacuation de blessés et de civils exposés, interdire l’approche des forces hostiles dans les trois dimensions et même, par la force aéronavale nucléaire (FaNU) mettre en œuvre une composante de la dissuasion qui donnerait, sur le théâtre, une souplesse d’engagement du feu nucléaire qui serait appréciable car à la fois plus réactive qu’un raid aérien depuis la métropole et moins définitive que l’usage d’un SNLE. La vulnérabilité du porte-avions, à telle ou telle composante, n’est que la fonction de l’adéquation de la mobilité qui lui est conservée et des moyens défensifs qui lui sont donnés, sous la forme de ses escortes aériennes, navales et sous-marine. Plus que jamais, en 2022, le porte-avions en lui-même n’est qu’un grand navire vulnérable, mais le groupe aéronaval est un outil sans rival.

Renforcer en moyens navals lourds positionnés en permanence outre-mer est en revanche une fausse bonne idée pour de nombreuses raisons. Militairement, cela éparpillerait nos forces, violant le principe de concentration nécessaire à l’obtention de résultats décisifs. Sur le plan du soutien, cela supposerait l’expansion d’infrastructures locales à un coût très élevé. Sur le plan humain, cela obligerait la Marine nationale à trouver des équipages disponibles, ce qui est déjà compliqué pour les formats actuels qui suscitent peu de volontaires, notamment pour les postes « un an sans famille ». Enfin, cela perturberait le cycle opérationnel, atomiserait la force d’action navale en trop de sous-groupes pour qu’il soit possible de maintenir un niveau d’entrainement homogène et, au final, ne ferait qu’exposer à l’attaque surprise d’un éventuel adversaire des forces qui seraient plus utiles regroupées pour une contre-attaque. Au bout du compte, la communauté nationale aurait sans doute dépensé plus d’argent et d’efforts que n’en coute le maintien d’un groupe aéronaval, pour un rendement moindre.

Esquisse du futur porte-avions de nouvelle génération (PANG). illustration : ministère des Armées – Naval Group.

Bien entendu, le format du porte-avions, de son groupe embarqué et de son escorte doivent évoluer. Drones navals, aériens et sous-marins doivent compléter les aéronefs classiques. Le Rafale devra être remplacé, et une capacité embarquée de lutte anti-sous-marine à voilure fixe restaurée. La question de la permanence de l’alerte par la construction de deux navires se pose (pour un seul groupe embarqué). Mais, au final, ce ne sont que des aménagements de la seule plateforme qui peut constituer l’assurance vie de près de trois millions de nos compatriotes et qui concrétise l’engagement de la nation qu’ils seront défendus au même titre que Bastia, Dunkerque ou Paris.

On le voit, cette question de la défense des outremers français est à la fois cruciale pour la communauté nationale et impossible sans groupe aéronaval. Elle impose sans doute deux changements de paradigme : l’un à propos du porte-avions, et l’autre à propos des outremers. Le porte-avions doit être (re)découvert comme un outil participant, d’abord et avant tout, à la politique de défense de la France, de ses populations et territoires. Son rôle de projection de puissance en coalition dans des crises n’impliquant pas nos intérêts vitaux n’est qu’accessoire et son maintien, couteux, ne doit pas reposer sur cet usage ancillaire. Concernant l’outremer enfin, il faut sortir de l’idée qu’il faut défendre ce que nous avons, mais admettre que défendre l’outremer, c’est d’abord défendre ce que nous sommes.

*Stéphane AUDRAND est consultant indépendant spécialiste de la maîtrise des risques en secteurs sensibles. Titulaire de masters d’Histoire et de Sécurité Internationale des universités de Lyon II et Grenoble, il est officier de réserve dans la Marine depuis 2002. Il a rejoint l’équipe rédactionnelle de THEATRUM BELLI en décembre 2019.

La Marine nationale a toujours des soucis de disponibilité avec ses hélicoptères NH-90 Caïman

La Marine nationale a toujours des soucis de disponibilité avec ses hélicoptères NH-90 Caïman

 

http://www.opex360.com/2022/12/08/la-marine-nationale-a-toujours-des-soucis-de-disponibilite-avec-ses-helicopteres-nh-90-caiman/


 

Étant donné que le ministère des Armées ne communique plus que la disponibilité technique opérationnelle [DTO], laquelle correspond au nombre d’aéronefs disponibles par rapport à celui nécessaire pour honorer le scénario le plus dimensionnant des contrats opérationnels, il est désormais compliqué d’avoir une idée précise de la situation des NH-90 de la Marine nationale.

Cela étant, le 6 janvier dernier, et alors qu’un 27e NH-90 Caïman venait d’être livré à l’aéronautique navale, la Direction de la maintenance aéronautique [DMAé] avait indiqué que sept hélicoptères étaient désormais disponibles à cette date. Ce qui était encore nettement insuffisant. Et d’expliquer cette situation par des « rénovations en cours » et « mises à niveau » [vers le standard MR1] nécessitant des « immobilisations importantes » ainsi que par une corrosion « très importante » apparaissant « au bout de quelques années ». Un problème qui avait déjà été souligné maintes fois par l’état-major de la Marine.

Puis, à la même époque, Florence Parly, alors minsitre des Armées, tança Airbus Helicopters [membre du consortium NHIndustries, ndlr] pour la faible disponibilité des NH-90 NFH. « Il ne suffit pas de concevoir, de construire et d’assembler des hélicoptères, car une fois sortis de l’usine encore faut-il les entretenir pour pouvoir les faire voler », avait-il dit, après avoir officialisé la commande de 169 hélicoptères interarmées légers [HIL] « Guépard » auprès de l’industriel.

D’autres pays clients du NH-90 NFH ont montré moins de patience… Comme l’Australie et la Norvège… Ou encore comme la Suède, qui a récemment fait part de son intention de remplacer les exemplaires en service au sein de ses forces armées.

Quoi qu’il en soit, en juin, via la NATO Helicopter Management Agency [NAHEMA], un contrat a été attribué à NHIndustries pour le compte de la France et de l’Allemagne, afin d’obtenir « immédiatement de rechanges pour la maintenance et les réparations », avec l’objectif d’atteindre « 50% de disponibilité » dès 2023. Visiblement, les résultats ne sont pas immédiats, à en juger par ce qu’a dit l’amiral Vandier, lors d’une nouvelle audition au Sénat [le compte-rendu vient d’être publié, ndlr].

« S’agissant du MCO aéronautique et naval, je note que les progrès sont énormes sur la verticalisation des contrats. Partout où cette verticalisation a été appliquée, elle a donné de bons résultats », s’est d’abord félicité le CEMM… avant d’aborder le sujet qui fâche.

« La flotte des hélicoptères reste celle pour laquelle les difficultés sont les plus importantes, en particulier pour le NH90 », a dit l’amiral Vandier. « J’ai rencontré le dirigeant d’Airbus Hélicopters, qui m’a assuré de son investissement total sur ce sujet. Une assistance technique renforcée va être mise en place sur les bases aéronavales de Lanvéoc et Hyères. Ces hélicoptères ont plus de 8 ans de service, avec un univers logistique qui manque de performance et qu’il faut faire évoluer », a-t-il expliqué.

Quoi qu’il en soit, et selon le projet annuel de performance pour le programme 178 « Préparation et emploi des forces », publié par le ministère de l’Économie et du Budget dans le cadre du projet de lou de finances 2023, il ne faudra pas s’attendre à un miracle à brève échéance, la « disponibilité des matériels par rapport aux exigences des contrats opérationnels » étant attendue en baisse l’an prochain pour les hélicoptères de la la Marine.

« La cible 2023 est revue à la baisse, principalement en raison d’un fort taux d’immobilisation au Soutien Industriel [retards persistants des chantiers capacitaires], auquel s’ajoutent les retards de livraison de la flotte intérimaire [H160, ndlr] et, pour la flotte Caïman, la lourdeur du plan de maintenance et des difficultés technico-logistiques notamment liées à la corrosion », lit-on dans ce document. Cependant, poursuit-il, « au regard de cette situation et en dépit de la baisse évoquée, l’objectif de disponibilité envisagé correspond cependant aux attentes fortes d’une amélioration des résultats ».

Un député a déposé une proposition de loi visant à lutter contre le recrutement d’ex-militaires par des entités étrangères

Un député a déposé une proposition de loi visant à lutter contre le recrutement d’ex-militaires par des entités étrangères

http://www.opex360.com/2022/11/27/un-depute-a-depose-une-proposition-de-loi-visant-a-lutter-contre-le-recrutement-dex-militaires-par-des-entites-etrangeres/


 

Cet ancien pilote est « responsable d’avoir vendu la technologie et la propriété intellectuelle américaines à la Chine. Ce crime a été commis par un ancien membre de l’armée américaine qui a préféré l’argent liquide à son entreprise et à son pays », a justifié l’avocat général durant le procès.

Cette affaire est assez classique… En revanche, le recrutement d’anciens pilotes militaires occidentaux par l’Armée populaire de libération [APL] l’est moins. Alors que Shapour Moinian était jugé à San Diego, un ancien aviateur de l’US Marine Corps [USMC] Daniel Edmund Duggan attendait d’être fixé sur son sort, la justice australienne devant se prononcer sur son éventuelle extradition vers les États-Unis. En effet, il lui est reproché d’avoir mis ses compétences et son expérience au service de la Chine.

Selon l’agence Reuters, pendant un temps, cet ancien pilote d’AV-8 Harrier II aurait été en lien avec la Test Flying Academy of South Africa [TFASA], laquelle a travaillé pour la société Lode Technologies, alors dirigée par l’homme d’affaires chinois Su Bin. Or, celui-ci a été arrêté au Canada en 2014, avant d’être condamné aux États-Unis pour une affaire d’espionnage informatique s’étant intéressée à la conception d’avions militaires américains.

Cela étant, fin octobre, Londres a fait part de son intention de mettre un terme au recrutement d’anciens pilotes des forces armées britanniques par… la Chine. D’après la presse d’outre-Manche, Pékin aurait ainsi recruté une trentaine d’ex-pilotes militaires en qualité d’instructeur, en leur proposant des salaires très alléchants d’environ 240’000 livres sterling par an. Et, apparemment, la TFASA aurait servi d’intermédiaire dans cette entreprise.

L’APL cherche « des pilotes occidentaux ayant une grande expérience pour l’aider à développer des tactiques et les capacités de ses forces aériennes. Et ceux qui ont accepté un tel emploi contribuent à améliorer les connaissances et les capacités militaires de la Chine », avait alors expliqué un responsable britannique. Également concernés par ce phénomène, l’Australie et le Canada ont ouvert des enquêtes.

Quant à la France, où d’anciens pilotes militaires, notamment de la Marine nationale, ont été approchés par la Chine, comme l’ont révélé le site spécialisé Intelligence On Line et le quotidien « Le Figaro » [mais aussi un vidéo ayant circulé sur les réseaux sociaux, ndlr], la discrétion semble de mise… D’où la question écrite adressée au ministère des Armées par le député Jean-Louis Thiériot [LR], le 1er novembre dernier.

« La presse a révélé que la République populaire de Chine attirait, par le biais d’une entreprise sud-africaine [Test Flying Academy of South Africa], d’anciens pilotes occidentaux notamment britanniques, australiens mais aussi français avec des contrats à plus de 20’000 euros/mois aux fins d’instruire les futurs pilotes de son armée », a d’abord rappelé le député.

Et de demander au ministre des Armées, Sébastien Lecornu, si la Direction générale de la sécurité extérieure [DGSE] était « informée de cette offensive chinoise » et s’il existait des « dispositions interdisant aux anciens militaires de proposer leurs services auprès de puissances étrangères et de délivrer des secrets sur les techniques opérationnelles des forces armées ».

Les réponses aux questions écrites adressées par les parlementaires au gouvernement tardant toujours à venir, M. Thiériot a, sans attendre, pris l’initiative de déposer une proposition de loi visant à « lutter contre le recrutement par des entités étrangères d’anciens militaires de l’armée française ».

« Alors que la France offre un précieux vivier d’anciens officiers maîtrisant la délicate technique de décollage par catapulte et d’appontage, qu’elle sera bientôt la seconde puissance militaire [occidentale, ndlr] après les États‑Unis à utiliser la technologie des catapultes électro‑magnétiques dont est équipé le Fujian – troisième porte‑avions chinois – et que des pilotes de l’aéronavale témoignent être approchés par la Chine […], il est urgent de mettre en place un plan de lutte contre le recrutement d’anciens militaires de nos forces armées par des entités étrangères et le transfert de compétences sensibles qui en résulte », est-il expliqué dans l’exposé des motifs de cette proposition de loi.

Celle-ci propose de compléter l’article R4139-17 du code de la Défense par une disposition instituant une « commission au sein de la DGSE » chargée de « contrôler les engagements au service d’une entité étrangère ou d’un État étranger des anciens militaires de l’armée française avec la mise en place d’une procédure spécifique d’autorisation préalable ».

Normalement, une telle prérogative devrait théoriquement revenir à la Direction du renseignement et de la sécurité de la Défense [DRSD], dont l’une des missions est de contrer les ingérences étrangères. Sans doute que ce point sera évoqué lors de l’examen de cette proposition de loi par la commission de la Défense.