Le sous-marin nucléaire d’attaque Tourville met à l’épreuve sa capacité à naviguer « dans les glaces »

Le sous-marin nucléaire d’attaque Tourville met à l’épreuve sa capacité à naviguer « dans les glaces »

https://www.opex360.com/2025/03/13/le-sous-marin-nucleaire-dattaque-tourville-met-a-lepreuve-sa-capacite-a-naviguer-dans-les-glaces/


En novembre 1987, alors que le Canada envisageait de se procurer jusqu’à douze sous-marins nucléaires d’attaque [SNA] dans le cadre du programme CASAP [Canadian Submarine Acquisition Program], la Marine nationale envoya un SNA de type Rubis en « mission commerciale » à Halifax [Nouvelle-Écosse].

Comme l’a relaté l’ingénieur général de l’armement [IGA] Louis Le Pivain, alors impliqué dans cette affaire, la Marine royale canadienne avait exigé un modèle de SNA « capable de faire surface en perçant un mètre d’épaisseur de glace arctique de première année. Ce qui s’annonçait compliqué pour les sous-marins de la classe Rubis, leurs barres de plongée étant situées sur leur kiosque. Aussi, a révélé l’IGA Le Pivain, un « dispositif ingénieux de mât perceur de banquise », intégré au niveau du massif pour ne pas endommager les barres de plongées, avait été mis au point. Cependant, ces efforts se révélèrent vains… puisque Ottawa renonça à mener le programme CASAP jusqu’à son terme et décida, à la place, d’acquérir quatre sous-marins à propulsion diesel électrique d’occasion [classe Victoria] auprès du Royaume-Uni.

Trente-huit ans plus tard, le Canada a lancé une procédure en vue de se procurer jusqu’à douze nouveaux sous-marins « à propulsion classique » et « capables de naviguer sous la glace ». Et cela afin de renforcer ses capacités à « détecter et à dissuader les menaces maritimes, à contrôler ses approches maritimes et à projeter sa puissance et ses capacités de frappe plus loin de ses côtes ». Au regard des sommes en jeu, ce marché s’annonce très disputé.

Hasard du calendrier, dans le cadre de son déploiement de longue durée [DLD] visant vérifier ses capacités militaires avant son admission au service actif, le SNA Tourville, de type Barracuda [ou Suffren], fait actuellement une escale à Halifax qui n’est pas passée inaperçue.

Étant donné qu’un DLD est planifié relativement longtemps à l’avance, la présence du Tourville à Halifax n’est pas liée au projet d’Ottawa d’acquérir de nouveaux sous-marins, lancé en septembre dernier. D’ailleurs, après avoir longuement hésité, Naval Group n’a confirmé son intention de participer à l’appel d’offres canadien qu’en février dernier, avec une proposition reposant sur une version à propulsion classique du Barracuda.

Cela étant, il ne s’agit pas non plus de perdre une occasion de « faire l’article » au profit des savoir-faire français en la matière. Comme cela a pu être le cas lors des expérimentations menées avec l’avion de transport A400M « Atlas » dans le grand nord canadien. C’est d’ailleurs ce que n’a pas manquer de rappeler le colonel Bruno Heluin, l’attaché de défense près l’ambassade de France au Canada, via le réseau social LinkedIn.

« Après les expérimentations de posés terrains sommaires dans l’extrême nord canadien et la navigation dans les glaces, la coopération franco-canadienne se renforce avec l’escale du SNA Tourville, dernier né des sous-marins d’attaque », a en effet commenté le colonel Heluin.

Et d’ajouter : « Ce bâtiment de la Marine nationale vient d’effectuer sa première traversée transatlantique. C’est une excellente occasion pour partager une expertise opérationnelle, humaine et industrielle. À l’heure où le Canada annonce vouloir relancer sa capacité sous-marine, la France peut indéniablement apporter un savoir-faire unique ».

Reste à voir si le Tourville va « briser la glace », comme le font les SNA américains, russes et britanniques. Contrairement à ses prédécesseurs de la classe Rubis, dont, a priori, aucun n’a réalisé une telle manœuvre, ses barres de plongée sont situées au niveau inférieur de sa proue, ce qui réduit considérablement le risque d’une avarie au moment de faire surface dans un tel environnement.

Pour rappel, affichant un déplacement de 5 300 tonnes en plongée pour une longueur de 99 mètres et un diamètre de 8,8 mètres, les SNA de la classe Suffren possèdent des capteurs dix à quinze fois plus performants que ceux de la classe Rubis. Encore plus discrets, ils emportent des missiles antinavires Exocet SM39 modernisés, des torpilles lourdes filoguidées F-21, des mines et, surtout, des missiles de croisière navals [MdCN]. Le Tourville est le troisième d’une série qui doit compter six exemplaires.

Quoi qu’il en soit, l’intérêt de la Marine nationale pour les glaces de l’Arctique n’est pas nouveau, les sous-marins Espadon et Marsouin ayant effectué une patrouille polaire en mer de Norvège,  » jusqu’au parallèle 70°N en 1964. Celle-ci avait permis de préparer l’opération « Sauna », menée l’année suivante par le « Dauphin » et le « Narval », lesquels naviguèrent ponctuellement sous la banquise.

Photo : SNA Tourville / Marine nationale – archive

Devenir réserviste oui, mais pour quelles missions et quel salaire ?

Devenir réserviste oui, mais pour quelles missions et quel salaire ?

« La patrie a besoin de vous, de votre engagement« , a déclaré Emmanuel Macron aux Français lors de son allocution du 5 mars 2025. Une façon d’inciter davantage de citoyens à rejoindre la réserve opérationnelle militaire à l’heure où « la menace [russe] revient à l’est ». Le ministre des Armées évoque lui aussi, régulièrement, l’augmentation du nombre de réservistes dans les armées, la gendarmerie et la police avec un objectif : compter 160 000 réservistes d’ici à 2030, soit deux fois plus que les 84 000 réservistes actuellement engagés.

L’armée de Terre, l’armée de l’Air et la Marine nationale recrutent des réservistes qui, une fois engagés, doivent pouvoir être mobilisés sur des missions diverses listées par le ministère des Armées : des missions de combat opérationnelles sur le territoire national ou hors de France ; des missions de protection et de résilience du territoire national avec la défense de sites militaires et civils lors d’opérations Sentinelle ; des missions de compétence sur un domaine d’expertise ; et des missions de rayonnement pour renforcer le lien entre la nation et les armées.

Des grandes lignes communes aux trois armées, auxquelles s’ajoutent des missions plus spécifiques aux besoins de chaque corps militaire. « L’armée de Terre cherche vraiment des militaires à temps partiel, qui permettent soit d’augmenter des régiments à faible préavis ou remplacer des pertes, là aussi dans un temps très court. La Marine et l’armée de l’Air n’ont pas ces enjeux mais ont besoin de profils plus techniques, de spécialistes« , explique le réserviste Stéphane Audrand au Parisien.

Le recrutement de réservistes et l’attribution des missions se fait donc en fonction du profil de chaque candidat, notamment son niveau d’étude, ses compétences particulières, et un éventuel passé militaire sachant qu’avoir déjà eu une expérience dans les armées n’est pas obligatoire. Des étudiants peuvent enfin être recrutés pour des missions opérationnelles de terrain ou logistique dans les armées de Terre et de l’Air ou membre d’équipage dans la Marine. Les personnes plus qualifiées peuvent obtenir des grades (militaire du rang, sous-officier ou officier) et se voir attribuer des missions correspondantes. Enfin, les personnes présentant des diplômes d’université, de grandes école ou des compétences spécifiques et des expertises peuvent rejoindre des unités particulières comme le renseignement, la communication, l’ingénierie, les ressources humaines, la logistique ou encore le pilotage pour les besoins spécifiques de l’armé de l’Air ou encore la plongée dans la Marine. Chaque armé précise les offres ouvertes aux réservistes en précisant les compétences nécessaires et la durée de l’engagement.

Outre les armées, la gendarmerie et la police recrutent des réservistes. Dans ces secteurs, les missions diffèrent et répondent à trois principales catégories : des missions de sécurisation, de lutte anti-terroriste et de police judiciaire pour appuyer lors des enquêtes.

Des missions rémunérées

Les membres de la réserve opérationnelle militaire sont rémunérés pour leur engagement. Les réservistes signent des contrats pouvant aller de 1 à 3 ans et jusqu’à 5 ans maximum, renouvelables. Ils sont mobilisables sur des activités miliaires pour une durée déterminée avec l’autorité militaire qui les emploie et pour un maximum de 60 jours par an. Un volume qui peut passer à 150 ou 210 jours dans des conditions particulières. En moyenne, les réservistes sont engagés sur des missions 37 jours par an.

Ces missions sont rémunérées selon des barèmes différents en fonction du corps militaire rejoint. L’armée de Terre paye les réservistes entre « 40€ et 200€ par jour en fonction de votre grade« . Une somme à laquelle s’ajoutent des « indemnités particulières en raison des fonctions exercées, des risques courus, du lieu d’exercice du service ou de la qualité des services rendus ». La Marine évoque une rémunération « à partir de 53€ par jour » qui « évolue pendant le contrat d’engagement au gré de votre avancement aux grades supérieurs ». En gendarmerie, la rémunération est d’au moins 60€ par jour selon le niveau du réserviste, en police elle débute à 74€ en région et à 80€ en Ile-de-France. Ces rémunérations sont nettes d’impôts.

A noter que ces rémunérations sont valables uniquement pour les réservistes opérationnels, les membres de la réserve citoyenne de défense et de sécurité étant bénévoles.

Qui peut devenir réserviste ?

Il faut répondre à plusieurs critères pour pouvoir devenir réserviste : être de nationalité française, être âgé d’au moins 17 ans, être en règle au regard des obligations du service national, ne jamais avoir été condamné pour un crime et jouir de ses droits civiques. Il faut présenter une bonne condition physique qui sera évaluée lors d’une visite médicale avec un médecin militaire. A noter que selon les corps militaires un âge maximum peut aussi être un critère moins de 72 ans dans l’armée de Terre, moins de 67 ans dans la police et moins de 45 ans dans la gendarmerie. Une formation militaire n’est pas nécessaire, cette dernière étant prévue lors du processus de recrutement.

Armées : Lecornu veut «une vraie réserve professionnalisée» jusqu’à 100.000 hommes

Armées : Lecornu veut «une vraie réserve professionnalisée» jusqu’à 100.000 hommes

Par John Timsit – Le Figaro  Publié le 13 mars 2025

https://www.lefigaro.fr/politique/armees-lecornu-veut-une-vraie-reserve-professionnalisee-jusqu-a-100-000-hommes-20250313


Invité jeudi soir de France 2, le ministre des Armées a rejeté l’hypothèse d’un retour du service militaire obligatoire : «Combattre est incontestablement un métier.»

Préparer l’armée de demain. Face à la «multiplication des crises en même temps» qui constitue une «fragilité potentielle» pour le paysSébastien Lecornu a appelé jeudi soir sur France 2 à «renforcer considérablement notre réserve». «On a 205.000 militaires avec un objectif à 210.000. L’avenir c’est une vraie réserve professionnalisée, c’est ce que le président de la République m’a demandé. L’idée est d’arriver à 100.000», a fait valoir le ministre des Armées. Qui se projette sur les décennies à venir, bien au-delà donc de 2027, année où prend fin le deuxième quinquennat d’Emmanuel Macron : «Il y a quelques années, on avait un réserviste pour six militaires d’active. L’objectif, c’est d’avoir un format d’armée où on a un réserviste pour deux militaires d’active. Ça a beaucoup de valeur.»

Alors qu’un retour du service militaire obligatoire, supprimé en 1996 par Jacques Chirac, est plébiscité par une majorité de Français, Sébastien Lecornu remarque que ce sont bien souvent des «arguments sociaux qui sont avancés – la mixité, la capacité à passer son permis de conduire -» par les partisans du dispositif, moins finalement son «utilité militaire». «Aujourd’hui, combattre ou avoir des missions militaires est incontestablement un métier, a martelé le Normand. Mais si on la projette beaucoup, on a besoin de forces de réservistes sur lesquelles il va falloir accélérer».

«Une forme de guerre des étoiles»

Outre l’élargissement de la menace russe dans le contexte de la guerre en Ukraine, Sébastien Lecornu a également mis en garde jeudi soir contre une «militarisation de l’espace». «Nous sommes la génération d’êtres humains qui allons connaître ce qui pourrait être une forme de guerre des étoiles», a alerté le ministre des Armées, citant de possibles «destruction de satellites» par «aveuglement» ou par «armes à énergies dirigées ou laser». «Si nous ne nous réveillons pas sur ces enjeux, nous pouvons décrocher.»

Synthèse de l’article du Figaro sur la réserve militaire

Le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, a affirmé sur France 2 sa volonté de renforcer la réserve militaire française en la professionnalisant, avec un objectif de 100.000 réservistes. Cette initiative vise à faire face à la multiplication des crises et à renforcer la capacité de réaction de l’armée, qui compte actuellement environ 205.000 militaires d’active. L’objectif est de parvenir à un ratio d’un réserviste pour deux militaires d’active, contre un pour six actuellement.

Rejetant l’idée d’un retour au service militaire obligatoire, Lecornu souligne que combattre est un métier nécessitant une formation et un engagement spécifique, contrairement aux arguments sociaux souvent avancés par les partisans de cette réintroduction.

Le ministre a également alerté sur la militarisation de l’espace, évoquant une possible « guerre des étoiles » impliquant la destruction de satellites par des armes à énergie dirigée ou laser, un enjeu stratégique majeur pour la défense nationale.

Toutefois, un commentaire critique souligne que les moyens alloués à la réserve sont insuffisants, avec des réductions budgétaires impactant la durée des missions et les frais de déplacement. Il remet en question la faisabilité d’une réserve professionnalisée si les réservistes ne sont mobilisés que quelques jours par an, mettant en doute la réelle application de cette ambition.

La marine chinoise étoffe sa présence dans le Pacifique Sud

La marine chinoise étoffe sa présence dans le Pacifique Sud

Credit:CHINE NOUVELLE/SIPA/2212201721

par Alex Wang – Revue Conflits – publié le 13 mars 2025

https://www.revueconflits.com/la-marine-chinoise-etoffe-sa-presence-dans-le-pacifique-sud/


La Chine déploie sa flotte dans le Pacifique Sud, ce qui inquiète l’Australie et la Nouvelle-Zélande. Cette rivalité maritime témoigne de la volonté de la Chine d’être de plus en plus présente sur les mers.

Face aux Quad et Aucus, la Chine renforce progressivement sa présence maritime dans le Pacifique Sud, une région clé pour le commerce mondial et la sécurité stratégique. La zone située entre l’Australie et la Nouvelle-Zélande ne fait pas exception, notamment en raison de son importance géopolitique et des liens historiques de ces deux pays avec les États-Unis et leurs alliés.

Une présence inhabituelle

La flottille chinoise, comprenant le navire de ravitaillement Weishanhu, la frégate de type 054A Hengyang et, surtout, le croiseur de type 055 Zunyi, se trouvait dans les eaux internationales entre l’Australie et la Nouvelle-Zélande .
Le Zunyi, navire phare de cette formation, est équipé de 112 tubes de lancement vertical pouvant tirer une large gamme de missiles : surface-air HHQ-9 et HHQ-16, antinavires YJ-18A et de croisière CJ-10. Il dispose également de capteurs avancés, dont un radar AESA multifonction de type 346B et deux sonars de haute technologie. Cette puissance de feu dépasse de beaucoup celle de la marine australienne.

Une présence aux multiples significations

En déployant ses navires dans les eaux internationales entre l’Australie et la Nouvelle-Zélande, la Chine revendique le droit de naviguer en haute mer conformément au droit international. Face aux opérations de Freedom of Navigation menées depuis des années par les États-Unis, l’Australie et leurs alliés, cette initiative s’inscrit dans une logique de réciprocité.

Une marine hauturière en pleine ascension

Au-delà de cette réciprocité, dans un contexte de tensions croissantes entre la Chine, les États-Unis et l’Australie, Pékin envoie également un message stratégique : sa marine a désormais la capacité d’opérer dans ce qui fut longtemps considéré comme l’arrière-cour de l’Occident.
Avec 340 navires contre 290 pour la marine américaine, la Chine s’impose comme la première flotte mondiale en nombre d’unités . Sa capacité de construction navale, plus de 200 fois supérieure à celle des États-Unis, lui permet de mettre rapidement à l’eau de nouveaux bâtiments modernes tels que les destroyers Type 052D, les frégates Type 054A, les croiseurs Type 055, les navires amphibies Type 071, 075 et 076 sans oublier les sous-marins nucléaires d’attaque Type 093 et les sous-marins lanceur d’engins Type 094 .
Loin d’être limitée à ses eaux territoriales, la marine chinoise est désormais une force hauturière capable d’opérer à l’échelle mondiale, loin de ses bases et sur de longues durées, prête à remplir une large gamme de missions.

Pour l’Asie, c’est un monde qui change

L’apparition de navires de la marine chinoise dans des eaux où l’on a longtemps vu évoluer exclusivement les forces des États-Unis et de leurs alliés, dont la France, constitue un véritable choc pour le monde.

Ce déploiement n’est pas que militaire : c’est aussi un acte politique

Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, une telle présence chinoise à ces latitudes restait extrêmement rare. Il s’agit presque d’une première depuis la guerre de l’Opium de 1840. Autrefois sous contrôle des puissances anglo-saxonnes qui avaient colonisé l’Asie-Pacifique, cet espace maritime voit désormais la marine chinoise y faire son entrée, marquant un tournant historique.
Ce déploiement ne saurait être interprété comme un simple exercice militaire. Il symbolise un changement profond : le monde d’hier n’existe plus.
Si cette dimension historique et symbolique échappe peut-être à certains lecteurs occidentaux, elle résonne profondément en Asie. Les réactions passionnées observées en Chine continentale, à Taïwan, à Hong Kong et dans plusieurs pays d’Asie du Sud-Est témoignent d’une mémoire encore vive, d’une plaie coloniale qui reste ouverte. Les réactions sont mitigées. Dans de nombreux pays, cette présence de la marine chinoise est perçue comme une victoire contre les anciennes puissances coloniales. Pour d’autres, notamment Taïwan, cela est perçu comme une menace. Cet événement qui a été très peu commenté en Occident est à l’inverse perçu comme un événement majeur en Asie.

Peu commenté en Occident, cet événement est perçu comme un acte majeur en Asie

L’avenir des opérations de liberté de navigation

Les opérations de Freedom of Navigation vont-elles se poursuivre ? Il est fort probable que la Chine aille continuer ses démonstrations, non seulement dans le Pacifique Sud, mais aussi dans l’Atlantique Nord et d’autres régions , afin d’affirmer son droit à naviguer librement sur les mers. De leur côté, les puissances occidentales ne renonceront pas facilement à cette pratique. Une extrême prudence sera nécessaire pour éviter tout incident susceptible de dégénérer en conflit majeur.

Le positionnement de l’Australie dans le Pacifique Sud

Jusqu’à présent, l’Australie exerçait une influence prépondérante dans le Pacifique Sud. Cependant, l’entrée en scène de la Chine remet en question cet équilibre. Comment Canberra envisage-t-elle l’évolution de son rôle face à cette nouvelle donne géopolitique ?

Vers une base navale chinoise dans le Pacifique Sud ?
La présence croissante de la marine chinoise dans la région pourrait bientôt nécessiter l’établissement d’une base d’approvisionnement permanente. Il est probable que la Chine ait déjà inscrit ce projet à son agenda stratégique.

L’évolution des budgets militaires australien et néo-zélandais

Face à ces évolutions, l’Australie et la Nouvelle-Zélande pourraient accroître symboliquement leurs budgets militaires dans les années à venir. Une réévaluation des priorités stratégiques pourrait même relancer le projet de sous-marins classiques franco-australiens, perçus comme mieux adaptés aux besoins régionaux que les sous-marins nucléaires imposés, dans une certaine mesure, par les États-Unis.

Un acteur clé face à une influence grandissante

Grâce à ses territoires d’outre-mer (Nouvelle-Calédonie, Polynésie française, Wallis-et-Futuna), la France est un acteur majeur du Pacifique Sud. Ces possessions lui confèrent une zone économique exclusive (ZEE) de plusieurs millions de kilomètres carrés, où elle maintient une présence militaire et politique significative.
De son côté, la Chine a renforcé son influence dans la région par des investissements massifs, des accords de coopération et une présence diplomatique accrue. Elle a signé des partenariats avec plusieurs États insulaires (Îles Salomon, Vanuatu, Kiribati, etc.), suscitant des préoccupations en Australie, en Nouvelle-Zélande et parmi les puissances occidentales, y compris la France.

Entre dialogue et tensions géopolitiques

Lors de la visite d’Emmanuel Macron en Chine en avril 2023, la déclaration conjointe franco-chinoise a évoqué la possibilité d’une coopération dans le Pacifique Sud, notamment sur des enjeux tels que le changement climatique, le développement durable, les infrastructures et la sécurité maritime. Cependant, cette coopération demeure largement théorique et soumise aux tensions stratégiques régionales.
L’envoi du porte-avions Charles-de-Gaulle pour participer à des exercices dans la mer de Chine méridionale illustre cette complexité. Cela a été perçu en Chine comme un acte de défiance.

Loin de l’Ukraine, ce sont donc d’autres tensions qui se déroulent dans le monde et la mer est devenue le lieu de ces affrontements diplomatiques, militaires et symboliques.

Vous avez dit : International Security Force For Ukraine ?

Vous avez dit : International Security Force For Ukraine ?

par Blablachars – publié le 12 mars 2025

https://blablachars.blogspot.com/2025/03/vous-avez-dit-international-security.html#more


Au lendemain de la réunion à Paris des chefs d’état-major des armées (CEMA), les « garanties de sécurité » occidentales à l’Ukraine restent floues selon les termes employés par plusieurs médias. Parmi le « panel d’options » évoqué par le CEMA français figure la possible constitution d’une « International Security Force for Ukraine » selon les termes d’un « responsable militaire français. » Une telle force serait à dominante franco-britannique, stationnée dans un pays de l’Otan, à proximité de l’Ukraine, pour pouvoir s’y déployer rapidement si nécessaire. La création d’une telle force et son possible engagement en Ukraine ne manquent pas de soulever plusieurs interrogations relatives à sa composition, son stationnement et les moyens dont elle pourrait disposer. 

Sur le plan politique, l’ossature franco-britannique de cette force est quasiment imposée par le  refus de la Pologne, de l’Italie et de l’Allemagne de participer à une telle force, la privant de moyens conséquents dont un certain nombre de blindés qui pourraient se révéler fort utiles dans cet environnement. La position allemande illustrée par les propos d’Eva Högl, commissaire parlementaire aux forces armées, pour laquelle il est « prématuré » d’évoquer l’envoi de troupes en Ukraine pour la surveillance d’un futur cessez le feu est probablement motivée par des considérations de politique intérieure. Elle écarte aussi la perspective d’un engagement de la Bundeswehr, actuellement incapable d’envisager une telle opération au vu de situation actuelle. En effet, selon le Financial Times, une recrue sur quatre quitte l’armée six mois après son engagement, plaçant la Bundeswehr à un point de rupture et l’éloignant de son objectif de compter 203 000 soldats en 2031. 

 

Motivées par l’attitude attentiste ou opposée de plusieurs pays, c’est donc avec le Royaume-Uni que la France pourrait constituer cette force, hypothèse séduisante sur le plan politique, la coopération militaire entre les deux pays n’ayant cessé de croitre depuis la signature du Traité de Lancaster House en 2010. Cependant, l’aspect éminemment politique d’une telle éventualité ne doit pas masquer la réalité des faits et la situation dans laquelle se trouve l’armée britannique aujourd’hui. Les récentes annonces de Keir Stramer qui souhaite porter à partir de 2027, les dépenses de défense à 2,5% du PIB, pour leur permettre d’atteindre 3% dans un avenir plus lointain, ne suffisent pas à faire oublier les années de disette budgétaire et de réduction drastique des effectifs. L’augmentation annuelle du budget de la Défense de 16,1 milliards d’euros prévue par le Premier Ministre Britannique a d’ailleurs été rapidement revue à la baisse par le Secrétaire d’Etat à la Défense, John Healey qui a précisé dans un entretien à la BBC que la véritable somme serait voisine de 7 milliards d’euros en tenant compte de l’inflation. Quelle que soit la décision finale, l’armée britannique doit également composer avec son atrophie actuelle, résultat de plusieurs années de réduction d’effectifs pour arriver aujourd’hui  à un effectif voisin de 74 000 soldats, légérement supérieur à l’objectif de 72.500 hommes fixé par la revue intégrée de 2021, alors que la Revue Nationale de Stratégie de Sécurité de 2015 avait fixé à 82.000 soldats le format minimum de l’armée de terre. Sur le plan des équipements la situation de l’armée britannique n’est guère plus brillante comme l’illustrent les difficultés du  programme Ajax dont les premiers exemplaires commencent seulement à équiper les unités, quinze ans après le lancement du programme. Les revers rencontrés dans le développement de l’engin blindé ont d’ailleurs motivé Londres à prolonger la vie opérationnelle du Warrior jusqu’à 2030, alors que sa modernisation avait été abandonnée en 2021. Selon le chiffre officiel, l’armée britannique dispose encore de 213 chars Challenger 2 dont 148 doivent être portés au standard Challenger 3 par Rheinmetall BAE Systems Land (RBSL) pour équiper la 3ème Division. Cette  unité qui est la principale force déployable de l’armée britannique comprend deux régiments de chars d’active (Royal Tank Regiment et Queen’s Royal Hussars) équipés chacun de 56 Challenger 2. Ces chiffres pourraient cependant cacher une réalité légérement différente, puisque selon plusieurs médias britanniques, seuls 20 à 25 chars seraient aujourd’hui opérationnels, confrontant les tankistes locaux à une des pires crises de leur histoire. Ce chiffre tout comme celui de la vingtaine d’obusiers de 155mm AS-90 opérationnels (sur 89) rendent le déploiement d’une force britannique en Ukraine totalement irréaliste, symbole d’une capacité de réaction dont la restauration nécessitera de longues années et des investissements importants. 

 

 

Du côté français, la situation est certes meilleure mais l’absence d’une véritable composante blindée mécanisée pourrait constituer un obstacle sérieux à la réalisation de ce projet. Outre les difficultés inhérentes au terrain et l’existence de nombreux obstacles favorisant l’utilisation d’engins chenillés, ceux-ci conférerait en outre un caractère plus dissuasif à cette force, engagée dans la résolution d’un conflit qui a vu la mise en œuvre de nombreux engins blindés chenillés. Pouvant être déployée pour garantir l’observation d’un cessez le feu temporaire, cette force pourrait être confrontée à des actions de provocation, menées par l’une des deux parties en vue de discréditer l’adversaire mais aussi l’action internationale. Une telle hypothèse placerait les équipages dans des situations qui nécessiteraient une protection accrue face à des menaces de nature et d’intensité aléatoires. Dans ce domaine, les enseignements du conflit ukrainien montrent qu’en dépit des destructions subies, les blindés occidentaux fournis à Kiev ont préservé leurs équipages des effets des attaque subies, grâce à leur conception et leur fabrication. En dehors de cette mission d’interposition la « International Security Force for Ukraine » pourrait être déployée en réponse à une nouvelle agression russe, scénario qui impliquerait donc un engagement face à des moyens blindés, contre lesquels les seuls engins du segment médian pourraient ne pas faire le poids en dépit de leurs qualités et des compétences de nos soldats. Ces dernières ne seraient sans doute pas suffisantes pour compenser l’inaptitude au combat de haute intensité de ces engins, liée à leur conception placée sous le signe de la projection et de la mobilité stratégique. L’acheminement de cette force stationnée à proximité de l’Ukraine serait également source de problème, au regard des difficultés de déplacement des convois militaires en Europe, comme Blablachars l’a évoqué lundi soir sur France 2. Au-delà, des possibles difficultés que rencontrerait la mise en action de cette hypothétique force, il est fort probable que la participation française se traduirait par l’engagement d’un volume aussi significatif que possible de chars Leclerc, à l’instar de  ce qui avait été fait au Kosovo et au Sud-Liban, dans un environnement très différent. 

 

 

En évoquant ce possible déploiement, Blablachars ne peut s’empêcher d’avoir une pensée émue pour les partisans d’un « geste fort »qui en septembre 2022 prônaient le transfert de 50 Leclerc à l’Ukraine. Cette initiative (quasi suicidaire pour notre Cavalerie blindée) qui ne fut heureusement pas suivie d’effet aurait eu le mérite de nous priver aujourd’hui d’un quart de nos chars en parc et de pratiquement la moitié de nos chars disponibles. Avec les 25 Challenger 2 britanniques à nos côtés, cette force serait plus symbolique qu’efficace et surtout quasiment incapable de réagir efficacement à une dégradation significative de la situation. Il est donc heureux que les initiateurs de ce geste fort n’aient pas trouvé l’écho espéré, restant depuis cette date, comme ces dernières années, étonnamment silencieux sur la faiblesse de notre segment de décision. 

Les jours qui viennent seront déterminants pour la résolution du conflit en cours, qui pourrait mettre fin à un affrontement dont le côté technologique fait parfois oublier qu’il se déroule à hauteur d’homme avec tout ce que cela comporte. La constitution d’une force adéquate destinée à garantir le respect des dispositions adoptées pourrait nous placer en face des conséquences des choix effectués depuis plusieurs années, qui ont fait de l’armée de terre un roi nu, ne possédant que peu de moyens adaptés à une intervention en haute intensité sur un terrain difficile et truffé d’obstacles de toute nature. Il reste à espérer que l’évocation de création de cette force et son hypothétique déploiement puissent initier un véritable changement dans des mentalités encore tournées vers des opérations lointaines, désormais remplacées par des préoccupations plus continentales, nécessitant des moyens adaptés.

 

Pourquoi un sous-marin Barracuda français a-t-il fait surface au Canada ?

Pourquoi un sous-marin Barracuda français a-t-il fait surface au Canada ?

La présence du sous-marin français FS Tourville au Canada intrigue. Test stratégique ou démonstration de force ? Décryptage des enjeux derrière cette apparition.

par Jean-Baptiste Leroux – armees.com -publié le

Un sous-marin Barracuda a effectué sa première traversée transatlantique. Defense.gouv
Un sous-marin Barracuda a effectué sa première traversée transatlantique. Defense.gouv | Armees.com

L’apparition d’un sous-marin d’attaque français Barracuda dans un port canadien a suscité de nombreuses interrogations. Alors que les tensions géopolitiques s’intensifient, certains y voient un signal politique fort. Mais la vérité se trouve ailleurs : cette opération s’inscrit dans une démarche purement technique et industrielle.

Un test grandeur nature pour le FS Tourville

La présence du FS Tourville à Halifax, en Nouvelle-Écosse a suscité de vives réactions dans le contexte international actuel. Pourtant, elle répond à un objectif clair : démontrer les capacités des sous-marins français. Ce navire de la classe Barracuda, conçu par le groupe français Naval Group, a effectué sa première traversée de l’Atlantique pour tester ses performances en conditions réelles.

Le Canada prévoit en effet de moderniser sa flotte sous-marine avec l’acquisition de six à douze nouveaux sous-marins d’ici 2035. En février dernier, Ottawa a sollicité plusieurs constructeurs, dont Naval Group, pour obtenir des informations sur leurs modèles. Face à cette opportunité commerciale majeure, estimée à 40 milliards d’euros, la France a donc décidé de mettre en avant son expertise.

Le Barracuda, Un atout technologique pour le Canada

Les exigences canadiennes sont particulièrement élevées. Le pays, qui possède le plus long littoral du monde, recherche des sous-marins capables de naviguer sous la banquise arctique et d’opérer dans des conditions extrêmes.

Le Barracuda présente plusieurs atouts qui pourraient convaincre la Marine royale canadienne. Doté d’un système de propulsion avancé et d’une autonomie prolongée, il est conçu pour des missions de longue durée. De plus, sa furtivité et ses capacités en matière de renseignement en font un outil stratégique de premier plan.

Une compétition internationale acharnée

La France n’est pas seule dans cette course. D’autres acteurs européens et asiatiques sont en lice pour répondre à l’appel d’offres canadien. En octobre dernier, le ministre de la Défense canadien, Bill Blair, a confirmé que plusieurs pays étaient sollicités pour ce projet.

Naval Group peut cependant s’appuyer sur un succès récent : la vente de quatre sous-marins Barracuda aux Pays-Bas pour près de 5 milliards d’euros. Un précédent qui pourrait jouer en faveur de la France et renforcer ses chances d’emporter le contrat canadien.

Une opération sous haute surveillance

L’épreuve de test du FS Tourville ne s’arrête pas à Halifax. Le sous-marin doit encore effectuer des exercices en conditions réelles dans les eaux froides du Grand Nord. Des essais d’endurance et de navigation sous la glace sont prévus pour prouver la capacité du Barracuda à répondre aux exigences canadiennes.

Quelle stratégie nucléaire européenne ?

Quelle stratégie nucléaire européenne ?

Par François Gere* -Diploweb – publié le12 mars 2025

https://www.diploweb.com/Quelle-strategie-nucleaire-europeenne.html

*Agrégé et docteur habilité en histoire (Paris 3 Sorbonne nouvelle). Président du Cercle des amis du général Lucien Poirier (2019 – ). F. Géré a présenté l’ouvrage posthume du Général Lucien Poirier, « Éléments de stratégique ». , éd. Economica, Ministère des Armées, 2023. François Géré a consigné avec Lars Wedin, L’Homme, la Politique et la Guerre, éd. Nuvis, 2018. François Géré a publié, « La pensée stratégique française contemporaine », Paris, Economica, 2017.


Française ou européenne, la stratégie de dissuasion nucléaire n’échappe pas à une règle absolue : elle n’est pas une fin en soi mais un moyen de la politique en sorte que l’on ne saurait mettre la charrue atomique avant les bœufs politiques.

POUR éviter un unième enlisement en de vaines palabres sur une dissuasion nucléaire européenne, rappelons les principes fondamentaux de cette stratégie.

La dissuasion est un mode d’action à but négatif aussi ancien que la guerre. Visant à interdire les velléités offensives d’un adversaire, il a été pratiqué avec plus ou moins de succès en raison de son caractère aléatoire. Il repose sur le calcul des probabilités. Ordinairement si un agresseur prenait le risque de transgresser la dissuasion fondée sur des forces conventionnelles et que son entreprise tournait mal, il avait joué et perdu subissant au pire l’humiliation d’une défaite. Avec les armes nucléaires, la dissuasion revêt désormais une toute autre dimension car la probabilité d’occurrence de la riposte nucléaire comporte le risque d’une perte exorbitante, dite insupportable, dépassant la valeur de l’enjeu.

La stratégie de dissuasion nucléaire n’est pas la paix. Elle ne saurait éviter ni les conflits régionaux limités ni supprimer l’action terroriste. Elle ne peut en effet s’exercer que dans le cas d’une attaque massive, quelle qu’en soit la nature, contre les intérêts vitaux du pays attaqué.

La stratégie de dissuasion nucléaire repose sur cinq principes identifiés.

Ce « périmètre du vital » ne doit pas être défini précisément, restant à l’appréciation du chef de l’État de manière à placer le candidat agresseur dans l’incertitude. La stratégie de dissuasion nucléaire repose sur cinq principes identifiés, théorisés en France par les généraux Gallois [1] et Poirier. [2]

. Principe de crédibilité : la dissuasion nucléaire exige la création et la démonstration de capacités techniques. C’était le rôle des essais suspendus pour une durée indéterminée en 1994 et interdits par un traité (TICE).

. Principe de permanence : la SDN est assurée par le chef de l’État, seul décideur, disposant 24h/24 des codes électroniques et des moyens de transmission aux forces stratégiques aériennes en veille et aux sous-marins en patrouille.

. Principe d’incertitude : « l’effet dissuasif résulte de la combinaison d’une certitude et d’incertitudes dans le champ mental d’un candidat agresseur : certitude quant à l’existence d’un risque inacceptable… incertitudes sur les conditions exactes d’application du modèle en cas d’ouverture des hostilités. »

. Principe de suffisance : pour une puissance moyenne comme la France en quantité et en qualité ni trop, ni trop sophistiqué.

C’est ce que l’on nommait durant la Guerre froide « dissuasion du faible au fort » (le Fort était l’Union Soviétique que les dirigeants français eurent la sagesse de ne jamais nommer explicitement). Pour éviter de se lancer dans une ruineuse course aux armements, il faut et il suffit de satisfaire à deux conditions

. a. Détenir une force nucléaire invulnérable capable de riposter en cas d’agression (les sous-marin nucléaires lanceurs d’engins – SNLE – sont durablement indétectables). Il est indispensable de prévoir une redondance en cas de défaillance humaine ou technique.

. b. Avoir la capacité à traverser les défenses adverses.

Quelle stratégie nucléaire européenne ?
La force océanique stratégique, l’une des deux composantes de la force de frappe nucléaire française
Avec l’autorisation de l’auteur, Ewan Lebourdais, photographe maritime. Crédit photo Ewan Lebourdais www.ewan-photo.fr
Ewan-Lebourdais
 

L’interception à 100% n’existe pas. Le dommage reste tolérable si les charges explosives sont classiques mais si elles sont nucléaires le problème change complètement. Une salve de SNLE envoie 96 charges pouvant « vitrifier » potentiellement autant de cibles. Aucune défense ne parviendrait à les intercepter quels que soient les progrès réalisés. D’autant plus que ces têtes sont environnées de leurres, manoeuvrantes (changement de trajectoire) et furtives (faible signature radar). Cette supériorité durable de l’agression sur la protection fait donc de la SDN l’unique parade.

.Principe de proportionnalité  : le volume des destructions dites « insupportables » est rapporté à la valeur de l’enjeu ; en l’occurrence l’invasion et la conquête de la France valent-elles l’anéantissement d’un ou plusieurs centres vitaux de l’agresseur ?

Dès lors que cibler ? Anticités (les hommes) ou antiforces (les armes) ? Les progrès de la précision permettent un ciblage plus fin sur des surfaces réduites. Le discours officiel affiche que la France ne vise plus les villes mais les centres de commandement des forces nucléaires et les centres politiques décisionnels. Toutefois, on relèvera que de telles cibles se situent rarement au cœur des déserts mais ont le mauvais goût de se trouver profondément enfouies au beau milieu de zones densément peuplées.
La création d’une dissuasion stratégique nucléaire européenne devra donc souscrire à l’ensemble de ces principes. Comment et avec quels aménagements ?
La valeur de l’enjeu pour l’agresseur changerait de dimension. Des intérêts vitaux de la France seule, on passerait à ceux de l’ensemble des États membres de l’Union européenne ou, à tout le moins, de ceux qui consentiraient à se joindre.

Le calcul de la proportionnalité s’en trouverait affecté se répercutant ipso facto sur le principe de suffisance. En raison de sa souplesse et de sa visibilité La composante aérienne doit-elle être développée ? En conséquence, la quantité d’armes nucléaires devra-t-elle augmenter ? Le positionnement territorial doit-il s’étendre, où et jusqu’où ?
La France pourrait-elle étendre une dissuasion nucléaire élargie aux intérêts de ses partenaires européens ? Le « parapluie » nucléaire déclaré par les dirigeants des États-Unis depuis Mc Namara, ministre de la défense de Kennedy a fait souvent l’objet d’un scepticisme sur sa crédibilité, à commencer par celui du général de Gaulle. Donald Trump expose ouvertement le caractère éminemment égoïste de l’arme nucléaire. Qui peut encore croire aujourd’hui que ce Président et ses successeurs sacrifieraient New York pour Varsovie, Berlin ou Paris ? A fortiori les citoyens des pays de l’Europe sont-ils prêts à faire dépendre leur existence de la décision du seul président français ? Qui pourrait croire qu’il sacrifierait Paris pour Tallin ? En vérité si les alliés (européens et asiatiques) ont pensé pouvoir se fier à l’engagement des États-Unis c’est en raison de la puissance grandissante des forces conventionnelles américaines capables de s’opposer efficacement à des agressions non-nucléaires.

Toute comparaison avec les États-Unis relève donc de l’absurde. Ensemble, les États de l’UE disposent-ils de 11 porte-avions ? De 14 sous-marins-nucléaires stratégiques ? Leurs marines verrouillent-elles les voies du commerce mondial ? Contrôlent-ils l’Espace ? La petite grenouille européenne n’atteindra pas l’énormité du bœuf américain. Mais serait-ce bien nécessaire dès lors que leurs gouvernements procèderaient à une évaluation objective de la menace réelle, exempte de préjugés idéologiques et d’intérêts corporatistes ?

Venons-en au nerf de la dissuasion à savoir le coût : ce « partage du fardeau », tracas permanent de l’OTAN. Des États comme l’Allemagne, l’Italie, l’Espagne, la Pologne sont-ils disposés à payer pour l’édification d’une dissuasion nucléaire dite européenne sans pour autant disposer de l’accès à l’ultime décision ?

L’argent c’est aussi du temps.

Une stratégie nucléaire unique multi-étatique ne s’improvise pas du jour au lendemain. Oublie-t-on que certains membres de l’UE ne perçoivent pas la Russie comme une menace ; que d’autres, comme l’Autriche, sont leaders en faveur de l’interdiction des armes nucléaires ? Enfin, et ce n’est pas peu, où viendrait se loger le Royaume-Uni post-Brexit dans ce dispositif ?

Quand bien même la volonté serait forte et largement partagée, de mettre sur pied politiquement, financièrement et techniquement une dissuasion nucléaire rassemblant certains États européens cette entreprise prendra du temps, de l’ordre de plusieurs années. A quoi ressemblera la Fédération de Russie, comment aura évolué la compétition américano-chinoise d’ici cinq à dix ans ?

C’est au pied de la guerre que l’on voit le véritable allié, quand le réalisme égoïste reprend ses droits glacés.

Les déclarations (franco-allemandes, franco-britanniques) du temps de paix n’expriment souvent que de grandes illusions ou des vœux pieux qui ne coûtent rien. C’est au pied de la guerre que l’on voit le véritable allié, quand le réalisme égoïste reprend ses droits glacés. Or depuis vingt ans, à chaque crise (financière, migratoire, sanitaire – Covid- et militaire – Ukraine-) l’UE a exhibé son impréparation, sa lenteur de réaction et surtout ses divisions. La création d’une DNE crédible entre en donc en flagrante contradiction avec l’existence même de l’UE sous sa forme et son fonctionnement actuels.

Il faut donc revenir aux fondements du projet communautaire.
Ceux des pays de l’Europe qui partageraient une conception rigoureusement identique de leur situation mondiale au point de fusionner leurs intérêts vitaux auront à s’accorder sur un cadre politique durable définissant des buts communs, dans une sorte de Charte ; à se doter en conséquence d’une alliance militaire telle qu’une Société européenne de Défense aussi longtemps que jugé nécessaire ; à se garantir par une Communauté européenne de Renseignement.

Française ou européenne, la stratégie de dissuasion nucléaire n’échappe pas à une règle absolue : elle n’est pas une fin en soi mais un moyen de la politique en sorte que l’on ne saurait mettre la charrue atomique avant les bœufs politiques.

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Dossier géopolitique et stratégique : Le nucléaire

La bascule stratégique en cours depuis février 2025 replace la dissuasion nucléaire au coeur de la garantie de sécurité française, voire européenne.

Le nucléaire, civil et plus encore militaire, est un sujet stratégique par excellence. Raison pour laquelle il s’agit d’un tabou ? Ce dossier aide à saisir toute la mesure de la rupture stratégique amorcée en 1945. Conçu par Pierre Verluise, ce dossier du Diploweb.com vous présente plus de 30 documents de référence : études, articles, vidéos, cartes et même une émission de radio pour vous permettre de croiser des opinions d’experts.


[1] NDLR : Voir aussi Vidéo. Un stratège français d’envergure : P.-M. Gallois et le nucléaire, Diploweb.com, 2017 https://www.diploweb.com/Un-stratege-francais-d-envergure-P-M-Gallois-et-le-nucleaire.html

[2] NDLR : Voir aussi Vidéo. Lucien Poirier, stratège français de la dissuasion nucléaire, Diploweb.com, 2017 https://www.diploweb.com/Video-Lucien-Poirier-stratege-francais-de-la-dissuasion-nucleaire.html

Défense : la dépendance des Européens aux armes américaines, « un très gros problème collectif »

Défense : la dépendance des Européens aux armes américaines, « un très gros problème collectif »

Mandatory Credit: Photo by Claire Hartley/Bav Media/Shutterstock (14480501d)

« Les Européens ont volontairement créé cette dépendance en achetant américain, car ils voulaient s’assurer de la protection américaine », explique la sénatrice PS Hélène Conway-Mouret. Une situation symbolisée par l’avion F35, acheté par de nombreux pays d’Europe. « S’il n’est pas régulièrement mis à jour », explique Léo Péria Peigné de l’Ifri, « alors il peut perdre rapidement en performance, voire même perdre en capacité ».

Le changement de ligne, pour ne pas dire le renversement de stratégie des Etats-Unis, avec un Donald Trump qui se rapproche de la Russie de Poutine sur la guerre en Ukraine, change complètement la donne d’un point de vue militaire en Europe. Outre les implications sur la question du parapluie nucléaire américain, il y aussi de lourdes conséquences sur l’emploi des armes, du matériel. Car depuis des décennies, les Européens ont globalement fait, à l’exception notable de la France pour l’essentiel, le choix d’acheter « made in USA ». Une dépendance aux armes américaines voulue, qui risque aujourd’hui de se retourner contre les acteurs européens.

François Bayrou a résumé la situation, le 5 mars dernier, répondant à une question de la présidente du groupe RDSE, Maryse Carrère, lors des questions d’actualité au gouvernement à la Haute assemblée. « Autonomie stratégique, ça veut dire que nous pouvons décider de nous défendre par nos propres forces, sur notre propre décision », souligne le premier ministre Or François Bayrou rappelle que « l’autonomie stratégique n’est pas acquise car il existe une disposition du droit américain, qui fait que des équipements, des armes, acquis auprès des Etats-Unis, ne peuvent pas être déclenchées s’il y a un veto des Etats-Unis. Or les deux tiers des armements au sein de l’Union européenne sont acquis auprès des Etats-Unis. On voit, avec le recul, la justesse des positions françaises, qui depuis de Gaulle, ont défendu sans cesse l’idée que l’armement des Européens devait être européen. Ce à quoi beaucoup de nos partenaires européens ont renoncé ».

« Mettre toutes ses billes dans les mains des Américains a des conséquences »

Aujourd’hui, le réveil est difficile. « Il y a un certain nombre de pays qui ont construit leur défense sur du matériel américain, lié au fait que les Américains leur ont assuré une sécurité du quotidien, en contrepartie de l’achat de matériels américains », explique Cédric Perrin, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat. La nouvelle donne « démontre aux Européens que mettre toutes ses billes dans les mains des Américains a des conséquences, car ils maîtrisent l’usage de ces matériels », ajoute le sénateur LR.

« C’est un très gros problème collectif », confirme la sénatrice PS Hélène Conway-Mouret, « car les Européens ont volontairement créé cette dépendance en achetant américain, car l’offre européenne n’était pas forcément celle qu’ils souhaitent, mais surtout car ils voulaient s’assurer de la protection américaine ».

« Quand ces pays ont acheté américain, c’était sûrement pour acheter des armes. Mais c’était aussi acheter une présence, une implication dans un système de défense plus large, dans l’Otan, et montrer sa loyauté entre alliés. Mais ça allait avec une certaine certitude qu’on aurait l’aide des États-Unis, si besoin », explique Léo Péria Peigné, chercheur à l’Ifri (Institut français des relations internationales) sur l’armement et l’industrie de défense. Mais aujourd’hui, « quel est l’intérêt d’acheter américain, si c’est juste avoir des armes très chères, certes très performantes, quoique pas toutes, mais sans garanties d’avoir le soutien voulu le moment voulu ? » demande le chercheur, auteur de « Géopolitique de l’armement » (Ed. Cavalier Bleu).

« La défense antiaérienne, les missiles Patriots, l’avion de combat avancé F35, certains blindés lourds sont concernés »

Les matériels concernés sont nombreux : « Défense antiaérienne, les missiles Patriots, l’avion de combat avancé F35, certains blindés lourds », explique le chercheur. Mais le matériel qui symbolise peut-être le plus cette dépendance, c’est le F35, conçu par Lockheed Martin. Il a notamment été acheté par l’Allemagne, la Belgique, le Danemark, les Pays-Bas, l’Italie, la Suisse, le Royaume-Uni, la Norvège, la Finlande ou encore la Pologne, pour des milliards d’euros de commandes.

On évoque la possibilité, pour les Américains, de clouer au sol l’avion furtif, à distance. En réalité, c’est un peu plus compliqué que cela. Mais ils ont bien la capacité d’agir. « Il y a certains systèmes très avancés, notamment sur le F35. S’il n’est pas régulièrement mis à jour, s’il perd l’accès à certains services de données, alors il peut perdre rapidement en performance, voir ses performances dégradées, voire même perdre en capacité », explique Léo Péria Peigné. « C’est le cas aussi sur des avions plus anciens, avec le F16. Les Etats-Unis ont ainsi coupé l’accès à certains services aux Ukrainiens. Les systèmes de brouillage antiradar sont beaucoup moins performants et plus faciles à contourner pour les Russes », ajoute le chercheur de l’Ifri.

Le F35 bloqué à distance ?

Concrètement, « le F35 ne peut peut-être pas être empêché de décoller à distance, mais si vous n’avez pas accès à une mise à jour hebdomadaire, au bout de quelques mois, il perdra son intérêt. Il ne fera pas tout ce qu’il peut faire. Pour un avion aussi cher, ça rend l’investissement beaucoup moins intéressant », précise Léo Péria Peigné, qui ajoute qu’« il y a aussi les enjeux de quelles armes il peut emporter. Est-ce que les armes européennes peuvent être intégrées dessus, si on veut remplacer les armes américaines ? »

Hélène Conway-Mouret ajoute de son côté que Lockheed Martin a la capacité de « bloquer le plan de vol, qui est entré avant le décollage », et « si une panne, qui est normalement envoyée au constructeur, ne peut être identifiée, l’appareil peut être cloué au sol. Il y a un vrai levier de blocage », soutient la sénatrice socialiste, vice-presidente de la commission des affaires étrangères et de la défense.

« La France a le même problème avec le drone Reaper »

La France a développé de son côté le Rafale, avec Dassault, et échappe ainsi à ce problème pour ses avions de combat. Mais le pays est aussi, dans une bien moindre mesure, concerné par ses liens avec l’armement américain. « La France a le même problème avec le drone Reaper. Ils sont utilisés par la France mais mis en œuvre par les Américains, pour les faire décoller, atterrir, pour leur entretien. Et la propriété des images est américaine », pointe Cédric Perrin, « et les endroits où on fait voler le drone est soumis à autorisation du Congrès ».

L’armée française compte aujourd’hui « une douzaine de drones Reaper », selon le président de la commission. La solution serait de développer un drone européen équivalent. « Cela aurait un prix plus important, mais nous donnerait une autonomie stratégique. Mais je ne sais même pas s’il verra le jour », craint le sénateur LR du Territoire de Belfort.

Conséquences de cette dépendance sur le théâtre des opérations

Pour les Européens, les conséquences de cette dépendance au F35 ou aux F16 pourraient être très concrètes sur le théâtre des opérations, comme l’explique Léo Péria Peigné : « Si on décide de faire une no fly zone au-dessus de l’Ukraine pour empêcher que les Russes tirent avec des missiles, et qu’on déploie des avions autour, si les États-Unis ne sont pas d’accord et qu’ils décident de mettre un handicap sur les avions dépendant de leur propre système, au bout de quelque temps, est-ce qu’ils pourront tirer aussi bien, communiquer aussi bien ? »

Hélène Conway-Mouret pense qu’« il est fort probable, sans qu’il y ait un traité de non-agression, que les États-Unis décident que la Russie est leur allié, et donc, s’il devait y avoir une agression russe envers un pays européen, je ne suis pas convaincue que les États-Unis voudront protéger les Européens. Nous avons énormément de problèmes à accepter ce que dit Trump, que l’engagement américain n’est plus automatique. Mais si l’Estonie est attaquée par exemple, il peut décider que ça ne mérite pas l’engagement américain contre les Russes », pense Hélène Conway-Mouret.

Y a-t-il une prise de conscience chez nos partenaires européens ? En Suisse, certains responsables posent des questions. En Allemagne, Wolfgang Ischinger, président de la conférence de sécurité de Munich, a mis les pieds dans le plat. « Si nous craignons que les États-Unis fassent aux avions de combat allemands F-35 la même chose qu’ils ont fait à l’Ukraine, nous devrions envisager d’annuler le contrat », a-t-il lancé dans Bild.

« Annuler les commandes serait un très gros pas »

« Annuler les commandes serait un très gros pas. Cela aurait des implications très importantes », note Léo Péria Peigné de l’Ifri. Mais on n’y est pas. « Il faudrait une vraie volonté politique dans tous ces pays, qui repose aussi sur un changement culturel. Mais ça, c’est compliqué », prévient Hélène Conway-Mouret. Et pour se passer des Etats-Unis, il faudra des alternatives européennes. « On a des solutions en Europe, sauf peut-être pour le F35, mais est-ce qu’on a besoin d’appareils aussi contraignants pour battre les Russes ? Ce n’est plus sûr », avance le spécialiste de l’Ifri. Reste que la dépendance des Européens aux Américains a encore quelques beaux jours devant elle.

Guerre en Ukraine : Emmanuel Macron réunit les chefs d’état-major de l’UE et de l’Otan, sans les USA

Guerre en Ukraine : Emmanuel Macron réunit les chefs d’état-major de l’UE et de l’Otan, sans les USA

Emmanuel Macron réunit ce mardi 11 mars à Paris les chefs d’état-major des armées de l’Union européenne et de l’OTAN. Une rencontre qui a pour but de définir les garanties de sécurité à fournir à l’Ukraine en cas de cessez-le-feu et renforcer la défense de l’Europe.

Le président français Emmanuel Macron s’est exprimé lors d’une cérémonie marquant la 21e Journée européenne du souvenir des victimes du terrorisme, à Strasbourg (Bas-Rhin), mardi 11 mars 2025.
Le président français Emmanuel Macron s’est exprimé lors d’une cérémonie marquant la 21e Journée européenne du souvenir des victimes du terrorisme, à Strasbourg (Bas-Rhin), mardi 11 mars 2025. | TERESA SUAREZ / AFP

Une réunion de la plus haute importance. Le président de la République, Emmanuel Macron va s’exprimer, ce mardi 11 mars 2025, devant « les chefs d’état-major des pays qui souhaitent prendre leurs responsabilités » et qu’il a conviés à Paris.

Cette réunion comprendra des responsables militaires de 30 pays appartenant à l’UE et/ou à l’Otan. Elle se fera « en étroite coordination » avec « le commandement militaire de l’Otan qui sera aussi associé à cette démarche », selon le chef de l’État français.

Une réunion avec le Canada et l’Australie mais sans les États-Unis

La réunion aura lieu en marge du Paris Defence and Strategy Forum organisé sur trois jours dans la capitale française par l’Académie de défense de l’École militaire. Les chefs d’état-major sont des militaires chargés de diriger les armées de leur pays. En France, depuis 2021, le chef d’état-major est Thierry Burkhard.

Le plus haut gradé de l’armée française participera à la réunion en compagnie des chefs d’état-major allemand, Carsten Breuer, italien, Luciano Portolano, britannique, Tony Radakin ou canadienne, Jennie Carignan. L’Australie a également annoncé qu’elle enverrait un haut représentant à la réunion. Mais le grand absent de cette rencontre est les États-Unis.

Accompagner l’armée ukrainienne

Cette réunion intervient alors qu’une délégation ukrainienne retrouve une équipe américaine en Arabie saoudite pour discuter des moyens de mettre fin à la guerre entre l’Ukraine et la Russie, trois ans après l’invasion russe de sa voisine. Le but de la rencontre est de discuter d’un possible envoi de troupes en Ukraine, d’évaluer la menace russe en Europe et de continuer d’établir les contours d’une défense européenne commune, après la signature d’un plan de 800 milliards d’euros la semaine dernière.

Le ministre des Armées s’est exprimé sur l’entretien des chefs d’état-major à l’Assemblée nationale ce mardi. « Nous refuserons toute démilitarisation de l’Ukraine qui serait un scandale absolu et ouvrirait la voie à une insécurité pour l’ensemble du continent européen ». Une des priorité de cette réunion est « le format de cette armée, la formation, l’équipement et comment nous pouvons l’accompagner », a souligné Sébastien Lecornu.

Un possible envoi de troupes ?

Paris et Londres sont étroitement impliqués dans les discussions sur la mise en œuvre d’un possible envoi de troupes, « pour observer un accord de paix », a précisé le ministre des Armées lors de son intervention à l’Assemblée nationale. Le Premier ministre britannique Keir Starmer organise à son tour samedi une réunion virtuelle avec les dirigeants des pays prêts à aider à empêcher une reprise des hostilités en Ukraine en cas de cessez-le-feu.

Avant d’envisager de déployer des troupes, il faut définir les contours de ce que serait la mission de cette coalition de volontaires, a affirmé le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, dans le journal La Tribune Dimanche : « Troupes de paix à des fins d’observation, de réassurance ou de déconfliction… La réunion des chefs d’état-major mardi va permettre de nourrir cette réflexion », selon lui.

Le ministre français réunira ensuite mercredi ses homologues du groupe E5 (France, Allemagne, Royaume-Uni, Italie, Pologne), ainsi que des représentants de l’Union européenne et de l’Otan et, en visioconférence, le ministre ukrainien de la Défense.

Réarmement européen : une industrie de défense sur une ligne de crête

Réarmement européen : une industrie de défense sur une ligne de crête

par Hélène Masson – Fondation pour la recherche stratégique – publié le 7 mars 2025

https://www.frstrategie.org/publications/recherches-et-documents/rearmement-europeen-une-industrie-defense-sur-une-ligne-crete-2025


Introduction 

L’Europe se réarme. Engagé par les pays de l’Est dès 2014, ce réarmement s’accélère et s’étend à l’ensemble du Vieux Continent depuis l’invasion russe de l’Ukraine. Véritable choc, cette guerre a sonné comme un sévère rappel à l’ordre pour les États européens les plus inconséquents en matière de défense. 

Resserrement du lien transatlantique, multiplication des coopérations intergouvernementales, montée en puissance de la Commission européenne dans le domaine de l’armement, la scène européenne est entrée en mouvement sur la période 2022-2024. Mais l’année 2025 s’ouvre sur une Europe déstabilisée par les nouvelles orientations de politique extérieure décrétées par le président américain nouvellement élu, Donald Trump, entre guerre commerciale et désengagement militaire.

Dans cet environnement instable, les États européens sont contraints de repenser certains fondamentaux, à commencer par la relation transatlantique, et de réévaluer les moyens consacrés à leur défense. Les stratégies d’acquisition et de coopération engagées au niveau national et européen seront également déterminantes eu égard aux défis technologiques et industriels à relever. L’objectif de ce travail est ainsi de mieux appréhender les contours de cette « Europe de l’armement » en pleine transformation, sous l’angle des politiques publiques et des stratégies industrielles.

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