Biographie duGénéral Valentin SEILER commandant la 6e brigade légère blindée
Marié et père de quatre filles, le général Valentin Seiler est né le 27 février 1972 à Strasbourg.
Il est admis à l’Ecole spéciale militaire de Saint-Cyr Coëtquidan en 1992 (promotion Capitaine Stéphane).
Après une année de formation à Saumur dans le domaine du combat blindé, il rejoint le 1er Régiment étranger de cavalerie à Orange en 1996.
Chef de peloton blindé, il est engagé en opérations au Tchad, au Congo-Brazzaville et en République Centrafricaine. En 1998, il est affecté à la 13e Demi-brigade de Légion étrangère à Djibouti pour deux ans. De retour au 1er REC, il prend le commandement du 3e escadron en 2001. Il effectue avec son unité une mission au Détachement de Légion étrangère de Mayotte, puis est engagé, en 2003, en opérations en Côte d’Ivoire.
Dans le cadre de l’enseignement militaire supérieur, il effectue un mastère à HEC (2005-2006). Il suit ensuite l’Advanced command and staff course au Joint services command and staff college à Shrivenham (UK), tout en effectuant un Master of arts in Defence studies au King’s college London, University of London (2006-2007).
A l’issue de sa formation en Grande-Bretagne, il rejoint l’Etat-major de l’armée de terre (EMAT) à Paris, où il sert comme officier traitant à la Division Performance-Synthèse.
De 2009 à 2011, il exerce la fonction de chef du bureau opérations-instruction du 1er REC ; au cours de son affectation, il est engagé en Côte d’Ivoire, comme chef opérations.
En 2011, il est affecté à l’Etat-major des armées (EMA) à Paris, où il contribue à l’élaboration de la loi de programmation militaire 2014-2019. Promu au grade de colonel en 2012, il achève son affectation à l’EMA au Centre de planification et de conduite des opérations (CPCO), où il suit les opérations menées en Afrique.
Il commande le 1er REC de 2015 à 2017 et est engagé en opérations en République Centrafricaine à la tête d’un groupement tactique interarmes.
En 2017, il rejoint le cabinet du chef d’état-major de l’armée de Terre pour prendre la fonction de chef adjoint de cabinet.
Après une année d’auditeur au Centre des hautes études militaires et à l’Institut des hautes études de la défense nationale (2019-2020), il rejoint l’EMA comme officier de cohérence opérationnelle (OCO) en charge de l’engagement au combat dans le milieu terrestre, puis comme secrétaire général des OCO.
Il est promu au grade de général de brigade le 1er juin 2022. A partir du 11 juillet 2022, il commande les dix centres d’entraînement spécialisés de l’armée de Terre, à Mourmelon-le-Grand.
Le 7 juillet 2023, il prend le commandement de la 6e brigade légère blindée à Nîmes, où il exerce également les fonctions de commandant de la base de défense Nîmes-Laudun-Larzac, de délégué militaire départemental du Gard et de commandant d’armes de la place de Nîmes.
Le général Valentin Seiler est officier de la Légion d’honneur, chevalier de l’ordre national du mérite et titulaire de la croix de la valeur militaire avec deux citations.
L’État Islamique du Grand Sahara (EIGS), des terroristes en puissance
Né en 2015, l’État Islamique du Grand Sahara (EIGS), groupe armé djihadiste, ne cesse de se déployer dans le Sahel central, une zone reculée entre le Mali, le Niger et le Burkina Faso.
En mai 2015, un djihadiste sahraoui prête allégeance à l’État Islamique. Adnane Abou Walid al-Sahraoui est le premier combattant du Sahel à se rapprocher de Daech. L’organisation terroriste dont le califat s’établit en Irak met un an à reconnaître officiellement cette entité éloignée qui au départ ne s’appuie que sur quelques hommes. L’État Islamique du Grand Sahara (EIGS) est lancé.
L’État Islamique du Grand Sahara, une naissance entourée de rivaux
Le premier bastion de l’EIGS se situe dans le nord-est du Mali. La région comme le reste du pays est en crise depuis 2012. Une guerre oppose l’état malien aux rebelles touaregs rejoints par les djihadistes d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (AQMI).
L’EIGS s’ajoute à ces acteurs déjà nombreux et s’engouffre donc dans cette spirale infernale en visant l’armée malienne, garante de l’état. Pendant un temps, ses actions sont limitées car l’armée française quadrille la zone. Paris a envoyé 5000 soldats, la force Berkhane.
L’ONU, quant à elle, mobilise aussi des milliers de Casques bleus avec la Minusma (Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali). Mais l’EIGS compte bien imposer son idéologie salafiste sur les populations et devenir le maître de la région. Les terroristes pratiquent l’extorsion de fonds auprès des populations civiles à travers la zakat, l’impôt religieux, dans les territoires qu’ils contrôlent. Avec leurs mines d’or artisanales, mais aussi l’argent qu’ils gagnent grâce à la contrebande de la drogue et des armes, l’EIGS devient autonome financièrement, ce qui n’est pas l’apanage de toutes les organisations djihadistes.
EIGS : une zone d’influence et de contrôle de plus en plus vaste
L’EIGS étend alors ses racines dans la zone dite « des trois frontières » aux confins du Niger, du Burkina Faso et du Mali. Terres éloignées des capitales des trois pays, peuplées de Peuls, traditionnellement des éleveurs, mais aussi d’agriculteurs, et surtout gigantesques par leur superficie, la stabilité n’y est pas une tradition.
Là, dans le delta intérieur du fleuve Niger, des milices se créent donc pour répondre aux conflits communautaires. Et l’EIGS de s’appuyer sur ces tensions pour asseoir progressivement son joug. Après deux ans d’activité, le groupe terroriste amplifie ses offensives en visant désormais les armées des trois pays du Sahel central, avec toujours la même optique : déstabiliser les pouvoirs en place.
Le scénario est identique. Des dizaines d’assaillants à moto ou en pick-up attaquent, mitraillettes en main, les postes militaires. Après avoir tué les soldats, ils repartent avec les stocks d’armes, puis disparaissent. À cette période et jusqu’en 2020, l’EIGS coexiste d’ailleurs avec l’autre courant djihadiste très présent sur place, le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM), affilié à Al-Qaïda. Les deux frères ennemis font cause commune, en tout cas, au départ.
Mais le 9 août 2020, un événement va faire connaitre l’EIGS au-delà du Sahel central. Six humanitaires français de l’ONG Acted, âgés de 25 à 31 ans, et leurs accompagnants, sont tués froidement lors d’une balade au milieu des girafes, dans la réserve naturelle de Kouré, au Niger. L’EIGS a commandité l’attentat et montre qu’elle vise aussi les Occidentaux.
2022, l’ascension de l’État Islamique du Grand Sahara (EIGS)
Le 16 septembre 2021, le président de la République française Emmanuel Macron et la ministre des Armées, Florence Parly, annoncent la mort d’Adnane Abou Walid al-Sahraoui, le chef de l’État islamique dans le Grand Sahara. Celui-ci a été abattu par drone quelques semaines auparavant avec une dizaine de ses hommes à l’est du Mali. Mais ces représailles ne vont pas affaiblir pour autant l’EIGS qui se dote d’un nouveau chef, Abou al-Bara al-Sahraoui.
Surtout, la France est en passe de quitter le Mali. La fin de l’opération Berkhane est annoncée le 17 février 2022. Le dernier soldat français quitte la zone le 15 août 2022. Parallèlement, le gouvernement de Bamako a souhaité limiter l’action de Minusma. L’EIGS a donc le champs libre sur ses zones d’influence et va même se renforcer et s’étendre encore plus. En décembre, une vidéo de propagande montre plusieurs centaines de combattants dans le désert. L’EIGS ne se cache plus et va amplifier son emprise…
Des milliers de victimes, dont des civils
Commerces et maisons brûlés, amputations en place publique, l’EIGS appliquent au grand jour des châtiments liés à la charia. Les massacres et tueries se multiplient dans les villages ce qui poussent de nombreux Maliens notamment à l’exil. D’après la ministre française des Armées Florence Parly, l’EIGS serait responsable de la mort de 2 000 à 3 000 civils au Mali, au Niger et au Burkina Faso, de 2015 à 2021. Fort d’un millier d’hommes, l’Etat Islamique du Grand Sahara a maintenant une quasi-hégémonie dans la zone des « trois frontières ». En 2023, ses attaques djihadistes n’ont fait qu’augmenter…
Voici le sommaire du numéro 450 de Raids (7,89€, 100 pages): EN DIRECT DES ARMÉES ARMÉE DE TERRE . Le RHP sur tous les fronts . La CCTP continue sa révolution technologique ARMÉE FRANÇAISE . La France rebat ses cartes en Afrique POINTS CHAUDS DÉFENSE . US Army. Budget 2024 FORCES ARMÉES . Pologne : montée en puissance de l’armée de terre (3e partie) ARMEMENT ÉQUIPEMENTS . Milipol 2023 et salon armement IDEF (2e partie) CONTRATS
On lira avec intérêt le sujet consacré au 1er régiment de hussards parachutistes de Tarbes dont une unité se prépare à rejoindre la Liban et la Finul. Le sujet aborde en particulier la question du recrutement désormais possible en « toquant » à la porte du régiment. A ce sujet s’ajoute un article sur la 11e compagnie de commandement et de transmissions parachutiste (170 hommes).
Autre sujet: la recomposition du dispositif français en Afrique. L’absence d’annonces officielles (il y a bien eu quelques informations sur le devenir du contingent tricolore au Gabon, par exemple), le sujet porte davantage sur le démontage du dispositif au Sahel.
A noter enfin le 3e volet de l’enquête sur l’armée de Terre polonaise et sa montée en puissance. C’est un sujet à suivre car le nouveau pouvoir polonais pourrait remettre en questions certaines commandes; il a toutefois annoncé une hausse des soldes de 20%.
Des officiers et un sous-traitant de l’armée française seront jugés en septembre 2024 à Paris pour des soupçons de corruption et favoritisme.
Plusieurs haut gradés de l’armée française et un de ses principaux sous-traitants pour la logistique des opérations extérieures (Opex) seront jugés en septembre 2024 à Paris pour des soupçons de corruption et favoritisme, a indiqué mardi une source judiciaire, sollicitée par l’AFP.
Au terme d’une enquête du Parquet national financier (PNF) démarrée début 2017 après un signalement de la Cour des comptes, un procès se tiendra à Paris du 9 au 25 septembre pour diverses infractions dont favoritisme, prise illégale d’intérêts, corruption, violation du secret professionnel et abus de biens sociaux. Il concernera plusieurs marchés relatifs à l’affrètement d’avions-cargo ou de navires dédiés au transport militaire.
« Il ne nous appartient pas de commenter une procédure en cours », a répondu le ministère des Armées, sollicité par l’AFP.
Parmi les prévenus figurent huit militaires, dont l’ancien chef d’état-major du Centre du soutien des opérations et des acheminements (CSOA), le colonel Philippe Rives, qui sera jugé pour favoritisme, corruption passive, violation du secret professionnel et prise illégale d’intérêts. Son avocat Matthieu Hy n’a pas souhaité commenter.
Coût élevé des opérations de fret militaire
Un ancien commandant du CSOA, le général Philippe Boussard, mais aussi un lieutenant-colonel du Commandement des opérations spéciales (COS), Christophe Marie, seront également jugés pour favoritisme.
Tous sont soupçonnés, à des degrés divers, d’avoir participé dans les années 2010 à une opération ayant permis de favoriser la société privée International Chartering Systems (ICS) dans l’attribution de marchés de logistique, notamment concernant le transport aérien, pour les opérations extérieures de l’armée française. Sur le banc des prévenus figureront également la société ICS, en tant que personne morale, son président Philippe de Jonquières et sa directrice administrative.
Les magistrats de la rue Cambon s’étaient étonnés, dans un rapport publié fin 2016, du coût élevé des opérations de fret militaire via des avions-cargos attribués à ICS, faute de solution militaire française.
L’enquête a révélé, selon la cellule investigation de Radio France en 2018, des échanges soutenus entre plusieurs hauts gradés et les responsables d’ICS aux moments clés de passation de marchés. Les investigations de la section de recherches de la gendarmerie de Paris ont également mis au jour plusieurs manipulations potentielles qui auraient permis que la société soit mieux notée dans les processus d’attribution.
Le retrait du Niger et le désengagement français en Afrique, sonne comme le tocsin pour une Armée de Terre jusque-là entièrement tournée vers la projection de puissance et les opérations extérieures. Quelles sont les conséquences prévisibles ou nécessaires sur son organisation, ainsi que sur ses grands programmes d’équipement en cours, alors les perspectives opérationnelles ont radicalement changé en seulement quelques années ?
C’est donc par la petite porte que les forces françaises vont devoir quitter le Niger, et avec lui, réduire considérablement leur présence en Afrique, rompant avec plus d’un siècle de présence ininterrompue l’ayant en grande partie formatée.
Après la Centrafrique en 2015, le Mali en 2022, et le Burkina Faso en 2023, les forces armées françaises quitteront donc le Niger en 2024, comme vient de l’annoncer le Président Macron, a l’issue d’une décennie de lutte intensive contre la menace djihadiste dans la zone sahélo-saharienne.
Au-delà du contexte politique et opérationnel spécifique à ces retraits successifs, ceux-ci marquent également la fin d’une époque durant laquelle les armées françaises avaient développé de grandes compétences pour intervenir sur ce théâtre, tant du point de vue tactique que logistique, leur conférant une aura de forces professionnelles aguerries et efficaces dans le monde, et plus particulièrement en Europe.
L’influence des campagnes africaines sur l’Armée de terre d’aujourd’hui
Toutefois, ces succès militaires, fautes d’avoir été politiques, ne se sont pas faits sans certains renoncements. Ainsi, l’Armée de terre française aujourd’hui dispose d’une force de quatre brigades moyennes ou légères entrainées et spécialement équipées pour ce type de mission, et de seulement deux brigades lourdes, plus adaptées pour des engagements symétriques.
Cette surreprésentation des forces légères, comme l’infanterie de Marine, la Légion, les chasseurs alpins ou les parachutistes, se retrouvent d’ailleurs au sommet de sa hiérarchie.
80 % des chefs de l’Armée de terre depuis 2010 sont issus des forces légères
En effet, sur les neufs Chefs d’état-major et Majors généraux de l’Armée de terre nommés depuis 2010, seuls deux, le général Ract-Madoux (CEMAT 2011-2014) et lé général Margueron (MGAT 2010-2014) n’en étaient pas issus, appartenant respectivement à l’arme blindée cavalerie et à l’artillerie.
Cette spécialisation de fait de l’Armée de terre, très utile lorsqu’il fallut intervenir en Afghanistan, au Levant et en zone sub-saharienne, s’avère désormais un handicap face aux besoins en centre Europe de l’OTAN.
80 % des blindés français en 2030 feront moins de 24 tonnes
Ainsi, si l’Armée de Terre est, et demeurera au-delà de 2030, celle qui disposera du plus grand nombre de véhicules blindés de combat en Europe, avec 200 chars Leclerc, plus de 600 VBCI, et surtout presque 1900 VBMR Griffon, 300 EBRC Jaguar et plus de 2000 Serval, elle sera aussi l’une des plus légères, avec seulement 200 blindés chenillés de plus de 32 tonnes, le Leclerc, alors que l’essentiel de son parc évoluera entre 16 et 24 tonnes.
Or, comme l’ont montré sans surprise les AMX-10RC envoyés en Ukraine, les blindés légers, tout mobiles qu’ils puissent être, s’avèrent aussi sensiblement plus vulnérables que les véhicules plus lourds et mieux protégés dans un engagement de haute intensité.
Qui plus est, outre le manque de protection, les blindés français souffrent aussi parfois d’un manque de puissance de feu. C’est notamment le cas du VBCI, le véhicule de combat d’infanterie de l’Armée de Terre, dont l’armement principal repose sur un canon de 25 mm que l’on sait léger face à des véhicules blindés moyens comme des VCI ou des chars légers, et inadapté face à des chars de combat, même anciens.
Même l’artillerie française a évolué vers cette exigence de légèreté et de mobilité. C’est ainsi que le CAESAR, il est vrai une réussite incontestable, s’est révélé beaucoup plus vulnérable que le Pzh2000 allemand en Ukraine, même si par son allonge et sa mobilité, il est aussi bien plus efficace que les M109 et autres AS91, mieux protéger, mais handicapés par un canon court, et donc une portée réduite.
De fait, aujourd’hui, toute l’Armée de terre est organisée, de ses programmes d’équipement à sa structure organique, en passant par son haut-commandement, afin de privilégier les forces légères, mobiles et aisément projetables.
Cette structure était, bien évidemment, pleinement tournée vers l’Afrique, son théâtre de prédilection et d’excellence ces 30 dernières années. De fait, tout porte à croire que le retrait du Niger, et plus généralement l’abandon des dernières cendres de la France-Afrique, représente un cataclysme majeur pour les armées françaises, et plus spécialement pour l’Armée de terre, toute entière tournée vers elle.
Les limites du pivot indo-pacifique annoncé par le président français
Le président français, et son ministre des Armées Sébastien Lecornu, semblent désormais privilégier le théâtre indo-Pacifique, ses nombreux territoires ultramarins (Réunion, Mayotte, Polynésie, Nouvelle-Calédonie) et ses partenariats stratégiques (Djibouti, Émirats arabes unis), comme nouveau pivot stratégique français.
Toutefois, le potentiel que représentent ces territoires est très loin de s’approcher de celui des pays africains quittés récemment, et ne justifient pas l’organisation actuelle de la Force Opérationnelle Tactique, le bras armé de l’Armée de Terre fort aujourd’hui de deux divisions de trois brigades chacune.
Inquiétudes dans les Armées sur fond de réorganisation profonde en perspective
Face à une telle inversion de perspectives, il n’est en rien étonnant que des inquiétudes se fassent jour au sein des Armées, et plus spécifiquement du corps des officiers de l’Armée de terre, probablement le plus concerné par les profonds changements à venir.
Et ce d’autant que la réorganisation, qui ne pourra être évitée, va nécessairement poser des questions quant à la pertinence des programmes actuels, et notamment du dimensionnement du programme SCORPION et des forces légères et d’infanterie françaises, face aux forces lourdes de cavalerie, d’artillerie, ainsi que les armes spécialisées sous-représentées dans la FOT comme dans le commandement.
La question se pose, en effet, de l’intérêt de disposer de plus de 4.000 VBMR, et 300 EBRC, lorsque la force de contact se limite à 200 chars lourds soutenus par à peine plus d’une centaine de tubes, et une dizaine de systèmes d’artillerie à longue portée, et sans défense antiaérienne de zone.
Une armée en 2030 conçue pour les conflits de 2015
Cette architecture des forces est de fait considérée par beaucoup de spécialistes comme répondant aux guerres de 2010, alors qu’elle sera pleinement déployée en 2030. Par ailleurs, dans ce domaine, ce n’est pas tant la responsabilité politique que les exigences exprimées par l’Armée de terre elle-même qui sont en cause.
Dans tous les cas, le retrait des forces armées françaises du Niger, et plus généralement, le désengagement français d’Afrique, appelle à une révision profonde de l’organisation même de l’Armée de Terre et de la FOT, amis aussi des programmes industriels en cours.
Cette évolution est nécessaire afin que l’Armée de Terre retrouve le rôle qui était le sien au sein du dispositif de dissuasion conventionnel français, et ne pourra se faire sans revoir, par ailleurs, son format ainsi que ses moyens budgétaires pour assurer sa transformation, notamment en actant la montée en puissance de la garde nationale pour assurer sa masse critique.
Cependant, rien ne semble indiquer, aujourd’hui, que cette dynamique a été engagée à Ballard comme à l’Hôtel de Brienne. C’est probablement cette incertitude qui aujourd’hui mine le plus les militaires français, qui redoutent de se retrouver, dans quelques années, avec le mauvais outil pour s’engager dans la prochaine guerre.
Les premiers soldats français qui ont quitté leurs bases au Niger par la route en direction du Tchad sont arrivés « sans encombre » à N’Djamena, prélude d’un processus complexe qui doit s’achever d’ici fin décembre, a annoncé Paris jeudi.
Parti de Niamey, le convoi est sorti du Niger « en sécurité et en coordination avec les forces nigériennes », a indiqué à l’AFP le colonel Pierre Gaudillière, porte-parole de l’état-major français.
Il est « bien arrivé sans encombre particulière » à N’Djamena, capitale du Tchad voisin, après dix jours de trajet.
Les rotations aériennes du Tchad vers la France seront organisées « dans les prochains jours », a ajouté le porte-parole.
Chassée du Niger, l’armée française doit évacuer hommes et matériels en majeure partie par voie terrestre vers le Tchad puis probablement le Cameroun, avant leur rapatriement en France. Un parcours de plus de 3.000 km dont une partie qui traverse des zones hostiles où des groupes jihadistes sont actifs par endroits.
N’Djamena abrite le commandement des opérations françaises au Sahel avec environ un millier de militaires français.
Selon le colonel Gaudillière, la moitié des sites des bases avancées à Ouallam et Ayorou (nord-ouest du Niger), dans la zone dite des « trois frontières » avec le Burkina Faso et le Mali, ont été vidés.
Après avoir rejoint Niamey, le convoi est parti en direction de la frontière tchadienne.
N’Djamena a indiqué dans un communiqué « accepter d’offrir un corridor de son territoire pour le retour des troupes françaises en France ».
« Les forces tchadiennes assureront l’escorte de ces convois depuis la frontière nigérienne jusqu’à N’Djamena pour l’aéroport (…) et à la frontière camerounaise pour le port de Douala« , a précisé dans ce texte le chef d’état-major général de l’armée tchadienne, le général Abakar Abdelkerim Daoud.
Les groupes jihadistes sont très présents dans la zone des trois frontières, mais « le niveau de menace sécuritaire est faible sur la route » de Niamey à N’Djamena, a indiqué à l’AFP une source militaire française.
Entretien Macron-Déby
La présence française au Sahel ne cesse de fondre depuis 2020. Des coups d’Etat successifs au Mali, au Burkina Faso et enfin au Niger ont mis fin à la force antijihadiste Barkhane déployée depuis 2014 au Mali, qui a compté jusqu’à 5.500 militaires déployés dans la zone.
Barkhane a cristallisé le sentiment anti-français d’une partie des opinions publiques africaines, faisant peser le risque de manifestations le long des convois. Mais les relations entre la France et le Tchad restent détendues.
Mercredi, le chef de l’Etat français Emmanuel Macron s’est entretenu à l’Elysée avec le président de la transition au Tchad, Mahamat Idriss Déby. Ils ont échangé « sur l’ensemble des dossiers régionaux (…) ainsi que sur le retour en France de nos moyens militaires« , a précisé la présidence française.
Interrogé par l’AFP sur l’arrivée des troupes françaises depuis le Niger, le ministre de la Communication et porte-parole du gouvernement de transition tchadien n’avait pas répondu en fin de matinée.
Des journalistes l’AFP n’ont pas pu s’approcher de la base française de N’Djamena, tenus à distance par des barrages de l’armée tchadienne installés de longue date.
Les semaines à venir seront consacrées à la clôture de ce retrait de l’ensemble des forces françaises du Niger, avec nécessairement l’acheminement par voie terrestre puis maritime d’un certain nombre de matériels lourds via un pays tiers.
Chaque option entraîne son lot de discussions avec les autorités concernées. « Quand on parle d’un retrait en bon ordre, en sécurité et en coopération, tous ces mots sont importants », a souligné le porte-parole des armées françaises.
Le port de Cotonou aurait été idéal, mais la frontière entre le Niger et le Bénin, opposé aux putschistes nigériens, est toujours fermée. Douala, au Cameroun, « fait partie des options qui peuvent être envisagées » mais n’est pas la seule, a-t-il précisé.
« Il y a très probablement du matériel lourd qui partira par bateaux. L’itinéraire pour rejoindre les ports n’a pas été arrêté« .
Sans avion de transport « hors gabarit » [ou « gros porteur »], il est compliqué de « projeter » des forces sur un théâtre extérieur, comme cela a été le cas lors de l’opération Serval, au Mali, en janvier 2013. Jusqu’alors, le ministère des Armées a pu compter sur le contrat SALIS [Solution intérimaire pour le transport aérien stratégique], attribué par l’Otan à la compagnie privée ukrainienne Antonov Logistics Salis ou passer par une procédure dite à « bons de commande » afin d’affréter des Antonov AN-124-100, capables d’emporter un chargement de 120 tonnes, ou encore des AN-22, AN-225 et Il-76 [de conception russe, ndlr].
Seulement, la guerre en Ukraine a changé la donne : il est désormais exclu d’avoir recours à des Il-76 et la disponibilité des appareils loués dans le cadre du contrat SALIS a été réduite. Qui plus est, ces avions « hors gabarit » approchent de leur fin de vie…
Dans un rapport publié en 2017, l’ex-député François Cornut-Gentille avait alerté sur la dépendance des forces françaises en matière de transport aérien stratégique. « Le ministère de la Défense et le ministère des Affaires étrangères sont ici des adeptes de la méthode Coué : les armées se satisfont du bon acheminement du fret et les diplomates de la solidité du couple franco-allemand au sein de l’Otan! Tous feignent de ne pas voir que, dans les faits, ce sont les Russes et les Ukrainiens qui ont la maîtrise de la projection de nos forces sur les théâtres extérieurs », avait-il dénoncé.
Quoi qu’il en soit, et même si le projet SATOC [Strategic Air Transport For Outsized Cargo] a été lancé grâce à des fonds européens et confié à l’Allemagne [avec la participation de la France, de la République tchèque et des Pays-Bas], le chef d’état-major de l’armée de l’Air et de l’Espace [CEMAAE], le général Stéphane Mille, est inquiet pour l’avenir, faute de pouvoir disposer d’une solution à court terme.
« On a un vrai problème. Le contrat SALIS, ce sont de vieux appareils qui commencent à arriver en fin de vie. Et, pour autant, le marché, tout important qu’il soit, n’est pas suffisant pour justifier le lancement d’un programme nouveau », a en effet affirmé le général Mille, lors d’un audition à l’Assemblée nationale, le 5 octobre.
Faut-il en déduire que le projet SATOC a déjà du plomb dans l’aile? « On a un vrai sujet qui est de sensibiliser un certain nombre de pays de manière à pouvoir créer une masse suffisante. Si on n’y arrive pas, on ne pourra pas avancer dans ce domaine », a-t-il dit. En clair, le développement d’une capacité européenne de transport aérien hors gabarit n’est pas une priorité pour la plupart…
« Il faut donc qu’on cherche tous azimuts quels pourraient être les vecteurs utilisables pour ça [le transport hors-gabarit, ndlr]. Et il n’y en a pas beaucoup », a conclu le général Mille.
Si son développement n’avait pas été annulé en 2007, l’A380-800F cargo aurait pu être une solution, avec sa capacité de transporter jusqu’à 150 tonnes de fret. Mais pour le moment, il faut se contenter de A300-600ST « Beluga », qu’Airbus Defense & Space met en avant depuis quelques mois. Seulement, si cet appareil peut emporter des pièces volumineuses, sa capacité de chargement est limitée à « seulement » 47 tonnes.
CARTE – Suite au coup d’État du 26 juillet, Emmanuel Macron avait annoncé que le retrait des 1400 militaires français aurait lieu «d’ici la fin de l’année».
Les troupes françaises déployées au Niger vont amorcer leur retrait du pays «dans la semaine», dans un contexte de relations toujours tendues avec le régime militaire issu du coup d’État du 26 juillet, selon l’état-major des armées. «Nous allons lancer l’opération de désengagement dans la semaine, en bon ordre, en sécurité et en coordination avec les Nigériens», a indiqué l’état-major.
«Nous ferons ce qui est planifié, cela se déroulera conformément à la planification», assure l’état-major français, alors que le régime militaire a accusé la France de ne pas être «dans une logique de quitter le Niger» et semble peu encline à laisser manœuvrer librement les militaires en partance.
Quelque 1000 soldats et aviateurs français sont déployés sur la base aérienne française de Niamey et 400 à Ouallam et Ayorou (nord-ouest), aux côtés des Nigériens, dans la zone dite des «trois frontières» entre le Niger, le Burkina Faso et le Mali, sanctuaire du groupe État islamique.
Les militaires déployés sur les bases avancées devraient être les premiers à se désengager. Un schéma similaire à celui du Mali, où le retrait français avait commencé par les trois emprises les plus au nord du pays.
«Nous prenons les dispositions pour assurer la sécurité des gens engagés dans la manœuvre», a précisé l’état-major, en particulier sur la route qui relie les bases avancées à la capitale, ce qui pourrait nécessiter un appui aérien, sur fond de dégradation sécuritaire dans le pays après plusieurs attaques ayant fait des dizaines de morts.
Opération logistique complexe
L’opération s’annonce complexe : le Niger servait depuis 2013 de plateforme de transit pour les opérations antiterroristes menées au Mali, avant de devenir le cœur du dispositif français dans la région après le retrait forcé des troupes françaises du Mali et du Burkina Faso, depuis l’été 2022.
Pour les militaires, ce retrait exigé par la junte met fin à une situation incertaine depuis deux mois, avec des ravitaillements aléatoires et des manifestations antifrançaises régulièrement organisées devant leurs portes à Niamey.
À Niamey, l’enceinte française, située au sein d’une emprise nigérienne, accueille des centaines de bureaux en préfabriqués, des hangars et abris modulaires pour les aéronefs, des tentes sur la base de vie, des cabines de pilotage pour les drones, des bulldozers du génie…
Après la conclusion d’un partenariat de combat à la demande du Niger, la France avait étoffé sa présence dans la capitale avec des blindés et des hélicoptères, venus renforcer les cinq drones Reaper et au moins trois avions de chasse.
120 millions d’euros d’aide publique au Niger en 2022
Les militaires n’ont pas d’autre choix que d’utiliser la voie terrestre, soit par le Bénin – une option que refuse le régime militaire nigérien – soit vers le Tchad, ce qui impliquerait ensuite d’acheminer les containers rentrant en France vers le port de Douala, au Cameroun, selon une source proche du dossier.
L’option d’un pont aérien semble compromise pour l’heure car jusqu’à nouvel ordre, les Nigériens interdisent le survol de leur territoire par des avions français. Au Mali, le désengagement avait mobilisé 400 logisticiens envoyés en renfort. Pour le démantèlement de Gao, la plus grande emprise française du pays, 6000 containers avaient été nécessaires.
Paris, qui ne reconnaît pas les nouvelles autorités, a limité la délivrance de visa pour les Nigériens et mis fin à sa coopération dans le pays, un des plus pauvres au monde. Le Niger a bénéficié en 2022 de 120 millions d’euros d’aide publique au développement de la part de la France et fait actuellement l’objet de sanctions de la part de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) depuis fin juillet.
Le retrait du Niger et le désengagement français en Afrique, sonne comme le tocsin pour une Armée de Terre jusque-là entièrement tournée vers la projection de puissance et les opérations extérieures. Quelles sont les conséquences prévisibles ou nécessaires sur son organisation, ainsi que sur ses grands programmes d’équipement en cours, alors les perspectives opérationnelles ont radicalement changé en seulement quelques années ?
C’est donc par la petite porte que les forces françaises vont devoir quitter le Niger, et avec lui, réduire considérablement leur présence en Afrique, rompant avec plus d’un siècle de présence ininterrompue l’ayant en grande partie formatée.
Après la Centrafrique en 2015, le Mali en 2022, et le Burkina Faso en 2023, les forces armées françaises quitteront donc le Niger en 2024, comme vient de l’annoncer le Président Macron, a l’issue d’une décennie de lutte intensive contre la menace djihadiste dans la zone sahélo-saharienne.
Au-delà du contexte politique et opérationnel spécifique à ces retraits successifs, ceux-ci marquent également la fin d’une époque durant laquelle les armées françaises avaient développé de grandes compétences pour intervenir sur ce théâtre, tant du point de vue tactique que logistique, leur conférant une aura de forces professionnelle aguerrie et efficace dans le monde, et plus particulièrement en Europe.
L’influence des campagnes africaines sur l’Armée de terre d’aujourd’hui
Toutefois, ces succès militaires, fautes d’avoir été politiques, ne se sont pas faits sans certains renoncements. Ainsi, l’Armée de terre française aujourd’hui disposent d’une force de quatre brigades moyennes ou légères entrainées et spécialement équipées pour ce type de mission, et de seulement deux brigades lourdes, plus adaptées pour des engagements symétriques.
Cette surreprésentation des forces légères, comme l’infanterie de Marine, la Légion, les chasseurs alpins ou les parachutistes, se retrouvent d’ailleurs au sommet de sa hiérarchie.
80 % des chefs de l’Armée de terre depuis 2010 sont issus des forces légères
En effet, sur les neufs Chefs d’état-major et Majors généraux de l’Armée de terre nommés depuis 2010, seuls deux, le général Ract-Madoux (CEMAT 2011-2014) et lé général Margueron (MGAT 2010-2014) n’en étaient pas issus, appartenant respectivement à l’arme blindée cavalerie et à l’artillerie.
Cette spécialisation de fait de l’Armée de terre, très utile lorsqu’il fallut intervenir en Afghanistan, au Levant et en zone sub-saharienne, s’avère désormais un handicap face aux besoins en centre Europe de l’OTAN.
80 % des blindés français en 2030 feront moins de 24 tonnes
Ainsi, si l’Armée de Terre est, et demeurera au-delà de 2030, celle qui disposera du plus grand nombre de véhicules blindés de combat en Europe, avec 200 chars Leclerc, plus de 600 VBCI, et surtout presque 1900 VBMR Griffon, 300 EBRC Jaguar et plus de 2000 Serval, elle sera aussi l’une des plus légères, avec seulement 200 blindés chenillés de plus de 32 tonnes, le Leclerc, alors que l’essentiel de son parc évoluera entre 16 et 24 tonnes.
Or, comme l’ont montré sans surprise les AMX-10RC envoyés en Ukraine, les blindés légers, tout mobiles qu’ils puissent être, s’avèrent aussi sensiblement plus vulnérables que les véhicules plus lourds et mieux protégés dans un engagement de haute intensité.