Le Pentagone veut une nouvelle bombe nucléaire tactique à la fois précise et plus puissante

Le Pentagone veut une nouvelle bombe nucléaire tactique à la fois précise et plus puissante

https://www.opex360.com/2023/10/28/le-pentagone-veut-une-nouvelle-bombe-nucleaire-tactique-a-la-fois-precise-et-plus-puissante/


Pouvant être utilisée en mode « guidé », grâce à un kit monté à l’arrière ou en mode « non guidé » [c’est à dire larguée par gravité au-dessus de la cible], la B61-12 a une puissance pouvant aller de 0,3 à 50 kilotonnes… Ce qui est très en-deçà des capacités de la B61-7 [340 kt], de la B61-11 [400 kt] et de la B-61-4 [170 kt].

Pour autant, selon les plans du Pentagone, la B61-12 doit remplacer les B61-3, B61-4 [d’une puissance de 45 kt] et la B61-7. Étant donné sa capacité à détruire les cibles enterrées en profondeur [EPW – Earth-Penetrating Weapon], la B61-11 doit en principe être maintenue en service, d’autant plus que la B83, qui reste la plus puissante de l’arsenal américain [1,2 mégatonne, ndlr], fait l’objet d’une controverse outre-Atlantique, les démocrates voulant s’en débarrasser tandis que les républicains plaident pour la conserver.

Par ailleurs, le développement de la B61-12 avait aussi donné matière au débat. Ainsi, le Pentagone avait fait valoir que la réduction de sa puissance à 50 kt serait compensée par sa précision plus grande.

Mais cette position a été critiquée par certains, ceux-ci ayant estimé qu’une arme nucléaire plus précise et moins puissante était de nature à rendre les décideurs moins prudents quant à son usage éventuel… Cet argument fut contesté par le général Norton A. Schwartz, ex-chef d’état-major de l’US Air Force, pour qui une telle arme serait au contraire de nature à dissuader davantage de potentiels adversaires.

Quoi qu’il en soit, et alors que le sort de la B83 est toujours en suspens, le Pentagone a fait savoir, le 27 octobre, qu’il a l’intention de développer une nouvelle version plus puissante de la B61, à savoir la B-61-13. Celle-ci associerait la précision de la B61-12 à la puissance de la B61-7 [soit 340 kt].

Cette décision « reflète un environnement de sécurité changeant et des menaces croissantes émanant d’adversaires potentiels. Nous avons la responsabilité de continuer à évaluer et à déployer les capacités dont nous avons besoin pour dissuader de manière crédible et, si nécessaire, répondre aux attaques stratégiques, et rassurer nos alliés », a déclaré John Plumb, le secrétaire américain adjoint à la Défense pour la politique spatiale.

Et d’ajouter : « Bien qu’elle nous offre une flexibilité supplémentaire, la production de B61-13 n’augmentera pas le nombre total d’armes dans notre arsenal nucléaire ».

Ce qui signifie que, selon la fiche explicative accompagnant ce communiqué, les quelques unités de B61-12 qui ne seront pas produites vont être compensées par des B61-13.

En outre, soutient le Pentagone, la B61-13 donnera au président [des États-Unis] des « options supplémentaires » contre certaines « cibles militaires » alors que les bombes B83-1 et B61-7 doivent être retirées du service.

A priori, et si le communiqué assure que cette B61-13 pourra être emportée par les avions « les plus modernes », le chasseur-bombardier F-35A ne sera pas concerné, le Pentagone ayant précisé par la suite que cette nouvelle bombe serait mise en œuvre par le bombardier B-21 Raider, qui vient d’ailleurs d’entamer ses essais au sol.

Ce que signifie le « F35 » dans l’expression de la politique de puissance des Etats-Unis d’Amérique

Ce que signifie le « F35 » dans l’expression de la politique de puissance des Etats-Unis d’Amérique

par Loik Jamon (MSIE40 de l’EGE)– Ecole de Guerre Economique – publié le 1er février 2023

Le F35 Lightning II est un avion de chasse fabriqué par l’entreprise américaine Lockheed Martin. Monomoteur, furtif, polyvalent. Il est capable de décollage et atterrissage vertical et dispose d’une visée électronique et d’un système de communication sans équivalent. Reliées au casque des caméras disposées autour du fuselage projettent sur sa visière ce que verrait le pilote si l’avion était transparent. D’un certain point de vue, le F35 pourrait ressembler à ce que le manga futuriste Macross-Robotech de Noburi Ishiguro en 1987 mettait en scène : des Variable-Fighters, des avions capables de se transformer en robot.

Toutes ses capacités font du F35 un appareil de 5ème génération, un des avions de combat les plus performants au monde. Pourtant il est de notoriété que le F35 rencontre encore de nombreuses difficultés. Son dernier crash remonte à moins d’un mois lors d’un atterrissage, certes vertical, raté sur une base militaire du Texas à Fort Worth. Dans le monde des matériels militaires, les avions de chasse occupent une place singulière de par l’avantage décisif qu’ils procurent dans un conflit. Les avions de chasse ne garantissent pas à eux seuls la victoire mais peuvent pratiquement éviter la défaite. De ce fait, pour les États-Unis d’Amérique, première puissance militaire mondiale, il est juste inconcevable de ne pas disposer du meilleur avion de combat présent, et même futur, pour conserver leur pleine influence et leur supériorité militaire.

Le laurier des autres est toujours une plante amère.

En 1999, je vivais à Doha capitale du Qatar, riche émirat pétrolier et déjà un important client de l’industrie aérienne militaire française avec des mirages 2000-9 dont même l’armée française ne disposait pas. J’y étais coopérant et avais eu l’occasion de rencontrer plusieurs pilotes de chasse français, tous désabusés, car pensant voler, ils avaient été mutés là-bas uniquement pour y faire de l’instruction. Je leur posais régulièrement la question des difficultés rencontrées à l’export par l’avion de combat français Rafale qui devait à lui seul remplacer tous les autres appareils en service par sa polyvalence.

Une conviction unanime se dégagea en guise de réponse : les États-Unis d’Amérique avaient décrété l’interdiction d’exportation du Rafale et ne pouvaient tolérer une concurrence aussi sérieuse. Aux moyens de pression infinis, les clients potentiels étaient tout simplement dissuadés…entre alliés ou adversaires de la guerre économique, l’arbitraire est une arme comme les autres même si elle contrevient à la libre concurrence. Ayant apporté la preuve de son efficacité au combat (combat proven), le Rafale n’a réussi à s’exporter que très tardivement. Son évolution du standard F1 au standard F3 l’ayant aidé, il est aussi curieux de noter la coïncidence du calendrier entre le renoncement de la vente des bateaux Mistral à la Russie et les soudains succès à l’export du Rafale en 2015.

Conséquence de l’annexion de la Crimée par la Russie en 2014, la France, sous pression, a décidé de l’annulation du contrat pour la livraison des deux porte-hélicoptères commandés par le Kremlin en 2010. Dans cette situation, il n’est pas impossible d’envisager le premier succès à l’export du Rafale comme une mesure de compensation avec la levée de l’interdiction implicite américaine. La dénonciation du contrat russe, a permis à la France d’exporter ses premiers Rafales à l’Égypte, qui de plus, lui a racheté les deux navires initialement destinés à la Russie. Connaissant l’importance de l’aide militaire américaine à l’Égypte représentant près de 1.3 milliards de dollars par an, il est difficile d’imaginer que Washington n’ait pas eu à donner son accord à une telle opération.

Diplomatie de la canonnière

Les avions de chasse sont des éléments de la diplomatie de la canonnière, mais contrairement à la force atomique, ils sont un Ultima Ratio dont se servent les États.  Le F35 symbolise aussi le pouvoir d’influence que le complexe militaro-industriel exerce sur la politique américaine.

Il n’apparaît pas uniquement comme un révélateur des mauvaises priorités de la politique américaine comme le dit l’historien Michael Brenes à l’université de Yale, mais comme un outil pour satisfaire nos angoisses présentes et futures. Avec la guerre en Ukraine, la menace d’un conflit avec la Chine se fait plus pressante. Le F35 serait la réponse à cette éventualité pour le Pentagone de toute évidence. John Fitzgerald Kennedy avait alerté sur les dangers que les lobbies faisaient peser sur la démocratie. Celui de l’industrie d’armement est probablement le plus puissant d’entre eux.

Le F35 est un pur produit du système de défense américain révélant les relations étroites entre les groupes industriels et l’armée, entre les chefs d’entreprise et le congrès. Au-delà du chantage à l’emploi, on parle de 30 000 personnes chez Lockheed Martin et du soutien à apporter aux entreprises, comme ce fut le cas pour la production de l’avion C-5 Galaxy destiné au transport, son implantation dans 45 états et à Porto Rico confère à Lockheed Martin un pouvoir de pression considérable.

Depuis les années 1907 les industries d’armements mise en place après la seconde guerre mondiale ont progressivement été privatisées, le marché a décidé de s’emparer des profits de cette industrie…conséquence là où l’armée US jouait son rôle de maitrise d’ouvrage auparavant, pour le F35 toutes les décisions sont prises par le constructeur, le département américain chargé du programme devant se contenter d’être spectateur et laissant le congrès impuissant face Lockheed Martin.

Du dollar F16 au dollar F35

Le F35 ne peut être réduit à un avion de 1000 milliards de dollars, voire d’avantage avec un cout planifié sur 66 ans, mais constitue aussi un outil de politique économique destiné à perpétuer le dollar F16. On parle de dollar F16, renvoyant au chasseur de supériorité aérienne F16 Fighting Falcon construit par General Dynamics à 4608 exemplaires pour 28 clients dans le monde, comme d’un avertissement pour ceux qui seraient tentés de renoncer à l’usage du dollar comme monnaie de réserve. A une autre époque, la France de François Mitterrand menait au Tchad la politique du Jaguar issue du nom de l’avion de chasse franco-britannique spécialisé dans le bombardement au sol.

La nouvelle de la mort du F35 a été très exagérée

Décrié pour ses coûts de développement et d’exploitation 3 fois supérieurs à ce qui avait été prévu, on parle de plus de 1000 md$, le F35 est aussi sujet à controverse du fait de sa technologie complexe ayant conduit à la destruction de plusieurs exemplaires. Alors même qu’il ne répond pas au mieux aux besoins de ses armées clientes, il est intéressant de noter que cet avion est en passe de devenir le standard de toute la force aérienne occidentale.

Les exemples des nations étrangères ayant acheté le F35 malgré l’absence de conviction de leurs dirigeants sont nombreux. Justin Trudeau, le Premier ministre canadien, avait d’ailleurs promis de retirer son pays du programme lors de sa campagne électorale de 2015…finalement le Canada a acheté des F35, comme la Suisse et l’Allemagne après Israël, le Royaume-Uni, l’Australie, l’Italie , la Norvège, le Japon, la Corée du Sud, les Pays-Bas, le Danemark, la Belgique, la Finlande, la Pologne…la Grèce et la Roumanie se sont déclarées intéressées. Seule la Turquie, exclue du programme pour avoir acquis le système de défense aérien russe S-400, n’aura pas de F35.

Le F35 est essentiel à la conduite de la politique étrangère américaine et va devenir la norme aérienne du modèle OTAN induisant par la même un risque de mort programmée de l’industrie militaire aérienne européenne. Quid des successeurs du Rafale, Eurofighter, Grippen ? L’avenir déjà compliqué du programme SCAF s’annonce un peu plus incertain.

Cette convergence des intérêts de la puissance étatique américaine et ceux de l’entreprise a permis à Lockheed Martin d’influencer le budget du programme en s’imposant comme maitre d’œuvre à tous les niveaux de la production ; du matériel d’entrainement et de la formation des pilotes ; de la maintenance et de la formation des techniciens ; dans la logistique et l’équipement. En ayant pris le contrôle du projet F35, Lockheed Martin s’assure une rente sur l’argent des contribuables américains. L’avenir dira si le F35 ne menace pas uniquement ses ennemis ou l’industrie européenne mais peut-être aussi la démocratie elle-même.

Futur avion de combat de l’US Air Force, le NGAD est entré dans sa phase de développement

Futur avion de combat de l’US Air Force, le NGAD est entré dans sa phase de développement

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« Nous avons déjà construit et fait voler un démonstrateur du programme NGAD. Nous avons battu des records en le faisant. […] Nous sommes prêts à construire l’avion de nouvelle génération avec une approche inédite », avait expliqué, à l’époque, Will Roper, alors secrétaire adjoint à l’Air Force chargé des acquisitions, de la technologie et de la logistique. Et l’approche en question renvoyait à la « Digital Century Series initiative », laquelle repose sur les avancées de l’ingénierie numérique.

Depuis cette annonce, peu de détails concernant ce nouvel avion de combat ont été dévoilés… Même le nom de son constructeur n’a pas été formellement confirmé, même si, toutefois, il se murmure qu’il s’agirait de Lockheed-Martin. On sait seulement qu’il emportera plus de munitions et de carburant que ses prédécesseurs afin de pouvoir « opérer sur les grandes distances du théâtre indo-pacifique », selon le général Charles Brown, le chef d’état-major de l’US Air Force. Et qu’il évoluera aux côtés de drones de type « loyal wingman » [ailier fidèle] et d’effecteurs connectés.

Cela étant, lors d’une intervention devant l’Heritage Foundation, le 1er juin, Frank Kendall, l’actuel secrétaire à l’Air Force, a donné quelques nouvelles de ce programme… Ainsi, et après avoir révélé que les travaux relatifs à un « prototype expérimental » de cet appareil avaient débuté en 2015, afin de « réduire les risques et développer les technologies clés nécessaires », le NGAD est désormais entré dans la phase d’ingénierie et développement pour la production [EMD – Engineering & Manufacturing Development].

« L’horloge n’a pas vraiment démarré en 2015 : [le programme] commence à peu près maintenant », a dit M. Kendall. « Nous pensons que nous aurons cette capacité d’ici la fin de la décennie », a-t-il ajouté.

En général, après le début de cette phase dite EMD, il faut compter environ sept ans pour disposer d’une capacité opérationnelle initiale. Ce qui signifie que le NGAD pourrait être disponible en 2029. Voire peut-être avant. « L’Air Force doit accélérer ses processus », a estimé M. Kendall, affirmant qu’il n’était « pas intéressé par les démonstrations et les expériences à moins qu’elles ne soient une étape nécessaire pour mettre au point une nouvelle capacité ». Et d’ajouter :  » Si nous n’en avons pas besoin pour réduire les risques, nous devons passer directement au développement pour la production et y arriver aussi vite que possible ».

En attendant, dans son projet de budget qu’elle a adressé au Congrès, l’US Air Force a demandé une enveloppe de 1,7 milliard de dollars au titre de son programme NGAD. Une goutte d’eau si l’on en croit Frank Kendall, qui a récemment avancé que le coût unitaire de ce nouvel avion de combat serait de « plusieurs centaines de millions de dollars ».

Comment l’espace pourrait révolutionner le transport aérien militaire?

Comment l’espace pourrait révolutionner le transport aérien militaire?

Par Laurent Lagneau – Zone militaire – Le 08-08-2018

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L’auteur des aventures de Tintin, Hergé, avait plus de 50 ans d’avance quand il imagine une fusée réutilisable pour faire le voyage jusqu’à la lune. En effet, la société américaine SpaceX développe actuellement le lanceur BFR [Big Falcon Rocket], qui sera totalement réutilisable, contrairement à ses deux prédécesseurs, les Falcon 9 et Falcon Heavy, dont seuls le premier étager les boosters sont susceptibles de servir pour un autre lancement.

Le fait que ce lanceur sera réutilisable permettra de réduire nettement les coûts d’exploitation. Ce qui, évidemment, n’est pas négligeable. En outre, la BFR pourra emporter une charge de 150 tonnes. Et cette capacité a de quoi donner quelques idées à l’Air Mobility Command, chargé d’assurer les missions logistiques au sein de l’US Air Force.

Son chef, le général Carlton Everhart, a ainsi estimé que l’espace pouvait révolutionner le transport aérien militaire. Les dirigeants de SpaceX « me disent qu’ils peuvent le tour du monde en 30 minutes avec un lanceur BFR. Pensez-y. Trente minutes, 150 tonnes métriques et moins que le coût d’un C-5 [Galaxy] », a-t-il confié à des journalistes, le 2 août dernier.

Une heure de vol sur C-5 Galaxy coûte 49.000 dollars. Sachant qu’il en fait souvent une dizaine pour acheminer des fret à l’autre bout du monde, la facture grimpe vite… Peut-elle être plus élevée que le coût d’utilisation d’un lanceur BFR? Cela reste à voir…

Une autre idée développée par le général Everhart serait de prépositionner en orbite des cargaisons qui pourraient être chargées de façon autonome à bord d’une capsule de réapprovisionnement avant d’être livrées sur terre à la demande. Autre idée : transporter le fret via des véhicules suborbitaux habités.

D’après l’officier, l’AFC pourrait commencer à tester des « concepts de transport spatial d’ici 5 ans » et viser une capacité opérationnelle « d’ici 10 ans ». À la condition que des budgets y soient dédiés et que les industriels, comme SpaceX, Virgin Orbit ou encore Blue Origin soient en mesure de proposer des solutions viables. D’autant que cela suppose de relever des défis en apparence très compliqués.

Une « liaison point à point utilisant le vol suborbital a été évoquée pendant des années. Il n’y a pas d’obstacle à cela », a confié Dan Hart, le Pdg de Virgin Orbit, à SpaceNews. « Si les militaires voulaient transporter des marchandises à travers le monde, la technologie est disponible pour le faire, mais beaucoup de planification et d’ingénierie seraient nécessaires », a-t-il ajouté.

« Nous avons des technologies de lancement, des systèmes de rentrée et des atterrisseurs qui montrent que nous pouvons transporter des marchandises de grande valeur et les débarquer en toute sécurité », a continué M. Hart. Mais « certains de ces détails devront être réglés », a-t-il insisté.

La création d’une nouvelle branche des forces armées n’est pas du goût de M. Mattis. D’où l’idée de créer, à l’image d’autres commandements interarmées, un commandement uniquement dédié aux opérations spatiales, lesquelles relèvent actuellement de l’US Air Force. C’est, en tout cas, ce que compte proposer le Pentagone au Congrès, d’ici quelques jours.