Stress post-traumatique : la double peine des soldats de retour du combat

Stress post-traumatique : la double peine des soldats de retour du combat

PALMARÈS DES HÔPITAUX DU POINT. Des militaires victimes de troubles de stress post-traumatiques tentent de se reconstruire dans les maisons Athos, ces structures de réhabilitation sociale dispersées sur tout le territoire.

Par François Malye – Le Point –

https://www.lepoint.fr/sante/stress-post-traumatique-la-double-peine-des-soldats-de-retour-du-combat-05-12-2024-2577177_40.php


 

« Si je n’avais pas poussé la porte de cette maison, j’aurais repeint la salle de bains avec ma cervelle. » William, 34 ans, passionné de littérature, s’est engagé dans l’armée au lendemain de l’embuscade d’Uzbin, en Afghanistan, où 10 soldats français trouvèrent la mort et 21 autres furent blessés le 18 août 2008. Le plus lourd bilan pour l’armée française depuis l’attentat du Drakkar, à Beyrouth, en 1983, un électrochoc pour la médecine militaire et le point de départ d’une nouvelle prise en charge du trouble de stress post-traumatique (TSPT) au sein de l’institution.

« J’ai failli le faire, je me suis retrouvé dans ma baignoire, désespéré, le fusil de chasse que mon père m’avait offert pour mes 30 ans avec une cartouche engagée. » William est assis au bout de la longue de table de bois installée dans le chai de la maison Athos de Cambes, à une trentaine de kilomètres de Bordeaux (Gironde), solide bâtisse d’une ancienne exploitation viticole, louée par l’Institut de gestion sociale des armées (Igesa) pour y établir cette structure permettant aux militaires victimes de TSPT de se retrouver et de renouer avec la société civile.

William, fils d’un notaire et d’une ingénieure, raconte comment il fut rapidement repéré et orienté vers un régiment d’élite, puis versé dans les forces spéciales. Suivront onze années sur le terrain jusqu’à ce moment où tout s’est effondré. Ici, interdiction de parler du trauma, de ce qui, un jour, l’a fait basculer. On est un blessé, tout simplement, et pas la peine d’y ajouter le terme psychique. Aujourd’hui, après un long parcours de soins, William est responsable de la communication de la maison Athos de Cambes. « Quand je suis arrivé, on m’a simplement dit : “Entre, tu es chez toi, camarade.” Et cela m’a sauvé. »

Ambiance familiale

Ils sont huit réunis en ce jour d’octobre ensoleillé. On les surprend dans la cuisine au café du matin, entourés des cinq animateurs du centre. L’un d’eux, soldat né dans les îles du Pacifique, sort aussitôt, oppressé par l’arrivée d’étrangers. Petit malaise vite dissipé par Magalie, la directrice adjointe. Pas de soignants au sein de cette structure de réhabilitation sociale, où les activités – repas, ateliers… – sont partagées dans une ambiance familiale par des soldats qui réservent leur place à l’avance, pour une semaine ou quelques jours.

Magalie vient du monde du médico-social, comme la plupart des animateurs. Seul le directeur, François Etourmy, 42 ans, est un ex-militaire. Magalie fait visiter le centre, parfaitement équipé, avec sa piscine, ses chambres et studios, sa salle de réunion, aux murs de laquelle sont accrochées les photos de ses 151 membres à vie, tous ceux accueillis depuis son ouverture, en 2021.

Cinq autres maisons Athos existent sur le territoire, gérées par l’Igesa, bras armé du secteur social pour les militaires, et cinq autres, dont deux outre-mer, doivent ouvrir. On y accède au terme du parcours de soins. Il faut être sobre pour intégrer le programme, l’addiction et le suicide étant les deux risques de cette pathologie.

Mal invisible

Les chiffres du programme de médicalisation des systèmes d’information montrent la place prégnante occupée par les hôpitaux d’instruction des armées et leur expertise dans la prise en charge du stress post-traumatique. Sur 34 000 patients adultes hospitalisés dans le secteur public en 2022, 2 276 étaient des militaires.

L’Inserm estime que près d’un quart des soldats qui ont participé à une guerre sont concernés par ces troubles. Donner la mort, la voir faucher ses camarades, en y ajoutant la vision des atrocités subies par les populations civiles, tout est réuni pour déclencher chez certains cette réaction qui se traduit par des cauchemars récurrents, la vision répétitive des scènes, « quasi cinématographiques », selon un expert, l’impossibilité de sortir de chez soi, d’affronter la foule, jusque, parfois, au geste fatal.

Après Uzbin, la prise en charge de ce mal invisible relève du défi pour l’institution car, au même moment, le service de santé des armées est soumis à une purge budgétaire qui aboutira, entre autres, à la fermeture de l’hôpital du Val-de-Grâce, à Paris, son fleuron. Un temps tentés de collaborer avec les établissements civils, les militaires vont vite s’apercevoir que, en raison de possibles fuites de données sensibles, il vaut mieux qu’ils se replient sur leurs bases, les huit hôpitaux d’instruction des armées. Avec succès : sept d’entre eux sont présents dans ce classement.

« Envisager un projet de vie une fois la réforme venue »

« 85 % des soldats victimes de stress post-traumatique s’en sortiront par eux-mêmes, vivront avec. Mais restent les autres », résume un psychiatre militaire, jeune retraité, qui a accepté de parler sous anonymat car, pour cette enquête, le haut commandement a décidé de refuser tout entretien, hormis ce reportage. Et aucun établissement n’a répondu à notre questionnaire.

Cette position traduit bien l’ambiguïté de l’institution à l’égard de cette pathologie. À la base, les combattants subissent en fait une double peine : une fois atteint de ce syndrome, il est difficile pour un soldat de s’en ouvrir à ses camarades, qui jugeront que sa fiabilité au combat s’en trouvera altérée. Au sein du commandement des unités, règne aussi la peur de ne plus disposer de ces professionnels et de ne plus être opérationnel, hantise absolue de tout chef de corps.

 

<figcaption>La plongée est une des activités de cette structure de réhabilitation sociale.</figcaption> ©  Jérémy Lempin pour « Le Point »
La plongée est une des activités de cette structure de réhabilitation sociale.
©  Jérémy Lempin pour « Le Point »

« Mais tous sont très sensibilisés à ce problème, poursuit ce haut gradé. Comment faire autrement ? Depuis l’Afghanistan, tous les régiments partent en opération. » « Le vent du boulet » était le terme employé au XIXe siècle pour qualifier cet étrange mal qui frappait certains soldats après la bataille.

« On pensait que les neurones avaient été sectionnés », poursuit notre psychiatre militaire. Mais ce sont les premiers accidents de train de la révolution industrielle, terriblement meurtriers, qui sont à l’origine de la notion de traumatisme en psychiatrie, comme l’écrit dans une passionnante étude historique Pascal Pignol, psychologue, fondateur de la cellule de victimologie au centre hospitalier Guillaume-Régnier, à Rennes* (Ille-et-Vilaine). Puis, la Première Guerre mondiale emporta tout avec ses cohortes de soldats traumatisés et la prise en main de cette pathologie par les psychiatres.

Un siècle plus tard, au bout de la chaîne de soins, il y a ce dispositif Athos, du nom du plus vieux des mousquetaires, tourmenté par ses traumatismes de jeunesse. « L’objectif est de les remobiliser, de leur faire regagner confiance en eux. Isolés, ils sont privés de la camaraderie, Athos recrée ce lien essentiel, explique François Etourmy, barbe noire, grand sourire, carrure de sportif de haut niveau. Ils doivent reprendre des habitudes, faire leurs courses, emprunter les transports, et puis envisager un projet de vie une fois la réforme venue. Nous avons des partenariats avec des entreprises, des associations. Nous sommes une sorte d’incubateur. »

Avec des réussites parfois étonnantes. Comme Guillaume, gueule de star, mais ancien commando parachutiste devenu ouvrier chez Hermès, où il fabrique des sacs griffés, et qui raconte en plaisantant les dessous du métier. « L’armée ne veut pas qu’on les retrouve dans la rue, glisse une animatrice. Et puis il y a un risque de décompensation très élevé. On est d’abord là pour éviter que les choses tournent mal. »

*« Préhistoire de la psychotraumatologie, Les premiers modèles du traumatisme (1862-1884) », in L’Information psychiatrique, vol. 90, n° 6, juin-juillet 2014.

Le Chef d’État-major des Armées et le Délégué Général pour l’Armement à l’X

Le Chef d’État-major des Armées et le Délégué Général pour l’Armement à l’X

Institut Polytechnique de Paris – publié le 2 décembre 2024

https://www.polytechnique.edu/actualites/le-chef-detat-major-des-armees-et-le-delegue-general-pour-larmement-lx

Le général d’armée Thierry Burkhard, chef d’Etat-major des Armées, et Emmanuel Chiva, Délégué général pour l’Armement, ont participé conjointement à une table tonde et à un échange avec les élèves polytechniciens des promotions 2022 et 2023 sur la stratégie et les enjeux de la défense française. Laura Chaubard, Présidente et directrice générale de l’X, a souligné à cette occasion le renforcement des liens de l’X avec la communauté de défense et le ministère des Armées et des Anciens combattants, autorité de tutelle de l’École polytechnique.

 
Institutionnel

Le général d’armée Thierry Burkhard, chef d’État-major des Armées et Emmanuel Chiva, Délégué général pour l’Armement ont participé le 28 novembre 2024 à une table ronde et à un échange avec les promotions X2022 et X2023 sur les enjeux stratégiques et les priorités de la défense française. 

« Votre présence parmi nous, tout à fait exceptionnelle, illustre à quel point sont indissociables la capacité opérationnelle de nos Armées et la performance technologique, scientifique et industrielle portée par la Direction Générale de l’Armement », a déclaré Laura Chaubard, Présidente et directrice générale de l’École polytechnique en introduction de la table ronde. 

« L’École polytechnique, depuis sa création il y a 230 ans, a été à la croisée de ces enjeux scientifiques et stratégiques et aujourd’hui plus que jamais dans un moment où dans le domaine des sciences comme de la défense, le temps s’accélère », a dit Laura Chaubard. 

« La France n’est pas en guerre mais la communauté de défense est entrée en économie de guerre », a-t-elle poursuivi en référence à une expression utilisée par le président de la République, Emmanuel Macron, en juin 2022 dans le cadre du salon de la Défense et de la Sécurité Eurosatory, et qui recouvrait la capacité de la France et de son industrie à être en mesure d’intervenir dans une opération militaire de haute intensité sur la durée. 

« Les bouleversements actuels dans les rapports de puissance interviennent de façon concomitante avec bien sûr une accélération du changement climatique mais aussi avec un bouillonnement scientifique tout à fait extraordinaire qui va lui aussi porter une grande part de notre souveraineté future que ce soit dans le domaine de haute densité d’énergie, des technologies quantiques, spatiales et bien sûr de l’intelligence artificielle, le rythmes spectaculaire des avancées scientifiques ces dernières années laisse entrevoir des ruptures majeures que beaucoup de scientifiques eux-mêmes ne pensaient pas accessibles à l’horizon de leur existence « , a-t-elle souligné. 

« Dans cette École, où l’excellence scientifique se conjugue à une formation humaine et militaire unique au monde nous aspirons à former des esprits et des corps capables d’embrasser ces transformations rapides et de relever les défis complexes qu’elles posent à la France et à l’Europe », a dit Laura Chaubard. 

« Sous l’impulsion du ministre de la Défense et grâce à l’accompagnement de la DGA, l’École a considérablement renforcé ses liens avec la communauté de défense, et ce dans tous les pans de son activité », a-t-elle ajouté. 

QUATRE MARQUEURS, DEUX PRIORITÉS

Interrogé sur le contexte actuel de sécurité internationale, le Chef d’État-major des Armées et le Délégué Général pour l’Armement ont partagé avec les élèves leurs analyses et leurs priorités pour la défense française. 

Évoquant l’environnement stratégique qui contribue à façonner les priorités de son action, le chef d’Etat-major des Armées a fait état de quatre marqueurs. 

« Le premier marqueur est une forme de désinhibition de la force que l’on peut constater tous les jours », a dit le général Burkhard. 

« Des pays se sont armés et ils emploient la force avec une augmentation du niveau de violence auquel il ne faut pas s’habituer (…) et une recherche de létalité en faisant de plus en plus de victimes civiles, considérant que c’est une manière de manifester leur détermination ».

« Le deuxième marqueur c’est la récusation, la remise en cause du modèle occidental et la volonté de le remplacer pat un modèle alternatif, [le président de la Fédération de Russie, Vladimir, NDLR] Poutine est à la tête de ce mouvement avec pas mal de monde derrière lui-même si ce n’est pas un ensemble aussi homogène que la Russie voudrait le présenter. » 

« Le troisième marqueur est la valeur stratégique de l’information » a souligné le Chef d’État-major des Armées. 

« Nos adversaires, nos compétiteurs utilisent l’arme de l’information, agissent dans le champ des perceptions de manière extrêmement offensive et ils s’appuient pour cela sur des stratégies de long terme. Dans ce champ des perceptions, de la guerre du narratif, il n’a peut-être pas de victoire décisive mais il y a un ensemble d’effets de long terme qu’il faut prendre en compte », a dit le général Burkhard. 

Il a mentionné un quatrième marqueur de l’environnement stratégique actuel : le changement climatique. « Nous ne pouvons pas faire de partenariats stratégiques [avec certains pays] si nous ne prenons pas en compte ce qui les menace, ce qui les concerne le plus », a-t-il dit. 

Dans ce contexte, le chef d’État-major des Armées a défini deux grandes priorités : la richesse humaine et la cohésion nationale. 

« La première priorité, c’est la ressource, la richesse humaine en termes d’hommes et de femmes », a dit le général Burkhard. 

Alors que, « la différence entre le monde civil et le monde miliaire s’accentue, il faut que nous soyons capables de recruter parce que l’armée française est une armée d’emploi », a-t-il rappelé. 

« Il y a encore des jeunes Français et des jeunes Françaises qui s’engagent alors que ce n’est pas forcément la voie de la facilité (…), je pense que nous sommes capables de magnifier le collectif plus fort que l’individuel et les missions que nous avons ont du sens dans une société où les gens sont en quête de sens », a-t-il poursuivi. 

« C’est pour cela que nous sommes encore capables de recruter mais ce n’est jamais garanti et c’est pour cela que c’est une priorité ». 

La cohésion nationale est la deuxième priorité énoncée par le Chef d’État-major des Armées. « La cohésion nationale est le centre de gravité d’une nation », a-t-il rappelé, ajoutant : « pour une nation qui n’aurait pas de cohésion, le risque de perdre la guerre sans la livrer est extrêmement fort. Si personne ne veut la guerre, est-ce que nos autorités politiques donneraient l’ordre d’engagement, je n’en suis pas sûr. »

« Les Armées ne sont pas responsables de la cohésion nationale, elles y contribuent mais elles n’en sont pas seules responsables », dans un environnement où « la surface de contact des Armées avec le pays est très faible », a-t-il souligné, rappelant que cette contribution des Armées à la cohésion nationale passe notamment par ses actions en direction de la jeunesse en lien avec l’Éducation nationale et par l’augmentation de la réserve pour laquelle Sébastien Lecornu, le ministre des Armées, a lancé un plan ambitieux visant à en doubler les effectifs pour parvenir à un ratio d’un réserviste pour deux militaires d’active. 

« La cohésion d’une nation c’est aussi ne pas oublier ceux de ses fils et de ses filles militaires qui ont été en opération et qui sont morts ou ont été blessés et cela n’est pas seulement la mission des Armées », a déclaré Thierry Burkhard, « même si les Armées n’ont évidemment pas le droit d’oublier les leurs. »

Dans le cadre de l’initiative nationale Duoday, le chef d’État-major des Armées était venu accompagné de trois militaires, des Armées de Terre, de l’Air et de la Marine, blessés en opération et qui ont été longuement applaudis. 

TRIANGLE COÛTS-PERFORMANCES-DÉLAIS

Le Délégué général pour l’Armement a rappelé que la mission de sa direction était de « trouver des réponses capacitaires mais aussi technologiques aux défis opérationnels auxquels les Armées sont confrontées. 

« Les opérations ne sont plus les mêmes. Il faut se battre en même temps sur terre, dans l’air et sur la mer mais on se bat aussi dans l’espace, on se bat sous les mers et l’on se bat dans les champs immatériels, on se bat dans le cyber, on se bat dans le champ informationnel et tout cela induit un certain nombre de révolutions technologiques pour développer les bons outils capacitaires », a souligné Emmanuel Chiva. 

Le Délégué général pour l’Armement a poursuivi en explicitant le concept d’économie de guerre et sa portée. 

« Ce concept d’économie de guerre, ne veut pas dire que nous sommes en guerre, cela veut dire que nous sommes en mesure de ne pas subir et de préparer la nation à un effort nous permettant par exemple de rentrer dans opération de haute intensité », a-t-il dit. 

« Ce qui est assez novateur dans cette approche, c’est que cela faisait des années que nous n’étions pas confrontés à la problématique de la production. Ce qui était noble dans notre industrie d’armement, c’était de faire des systèmes très sophistiqués souvent à petite échelle, de prendre le temps de bien faire les choses mais pas de produire en masse, pas de produire vite, pas de produire [des armements] peut-être pas parfaits mais disponibles tout de suite », a-t-il poursuivi. 

« L’un de nos grands défis aujourd’hui, c’est de préparer notre industrie [d’armement], la base industrielle et technologique de défense, c’est-à-dire les grands donneurs d’ordre et les 4500 PME qui sont derrière dont 1200 sociétés critiques, à rentrer dans un rythme auquel ils n’étaient absolument pas habitués et avec une approche qui, dans le triangle coûts-performances-délais, tirait vers la performance. Aujourd’hui le levier numéro un, ce sont les coûts d’abord, les délais ensuite », a expliqué Emmanuel Chiva. 

« Cela veut dire repenser les chaînes de production, repenser les chaînes d’approvisionnement et aussi repenser une forme de souveraineté », a-t-il ajouté évoquant la nécessité de maintenir ou de relocaliser sur le territoire national certaines productions ou les approvisionnements de composants ou de matériaux critiques. 

« Ce n’est parce qu’on le dit que c’est facile à faire », a relevé Emmanuel Chiva rappelant que la DGA doit parallèlement conduire toutes ses missions habituelles, en particulier dans la lutte contre le terrorisme et bien sûr dans le maintien de la capacité de dissuasion de la France avec « le retour au premier rang de la rhétorique nucléaire». 

Les effectifs de l’armée russe après deux ans et demi de guerre en Ukraine

Les effectifs de l’armée russe après deux ans et demi de guerre en Ukraine


En plus d’une victoire militaire en Ukraine, les dirigeants russes souhaitent constituer d’importants effectifs militaires en vue d’un éventuel conflit avec l’OTAN dans l’espace Baltique et la péninsule de Kola. Les prévisions actuelles comptent sur une augmentation des effectifs militaires russes d’environ 350 000 hommes, pour atteindre un total de 1,5 million de soldats et d’officiers. Dans le contexte du conflit qui se déroule actuellement en Ukraine, cet objectif ne peut être atteint sans une nouvelle vague de mobilisation massive.

Soldats de l'assaut russe au combat. 11 juin 2023
Soldats de l’assaut russe au combat. 11 juin 2023 © Dmitriy Kandinskiy/Shutterstock.com

En 2024, les pertes humaines irréversibles d’environ 30 000 soldats par mois sont à peu près équivalentes à l’afflux de soldats sous contrat et de volontaires, qui constituent l’essentiel de l’effectif militaire russe apte au combat au cours de la même période. Cette nouvelle vague de mobilisation a été reportée car le Kremlin se méfie des conséquences politiques potentiellement négatives qu’elle pourrait avoir dans le pays. En outre, l’armée russe souffre d’un déficit de personnel de commandement et d’armes pour les nouvelles unités qu’il est prévu de créer. D’une manière générale, plus la guerre en Ukraine se prolonge, plus la machine militaire russe se détériore. Par conséquent, en fournissant à l’Ukraine l’aide nécessaire pour poursuivre la guerre, l’Occident affaiblit le potentiel militaire de la Russie et augmente le temps qu’il faudra à Moscou pour reconstituer ses forces armées une fois que la guerre sera terminée. Cependant, la pression exercée par la guerre sur la société et le système politique ukrainiens pourrait provoquer une crise politique dont l’issue serait imprévisible, tant sur le plan national qu’international.

Yuri Fedorov est titulaire d’un doctorat et spécialiste des questions politiques et militaires russes. Il a travaillé à l’Institut d’études américaines et canadiennes et à l’Institut de l’économie mondiale et des affaires internationales, tous deux basés à Moscou. Il a enseigné pendant plusieurs années à l’Institut des relations internationales de Moscou. Après avoir quitté la Russie en 2006, Yuri Fedorov a vécu en Europe, où il a d’abord occupé le poste de chercheur à la Chatham House, au Royaume-Uni. Depuis 2008, il travaille comme journaliste en République tchèque. Il est membre du syndicat des journalistes de la République tchèque et auteur sur la branche Russie de Radio Svoboda. Son dernier ouvrage, publié en 2024, s’intitule The Ukrainian Front of the Third World War.


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Les effectifs de l’armée russe après deux ans et demi de guerre en Ukraine

Selon le Sénat, les non-renouvellements de contrats à l’initiative des militaires ont augmenté de 70 % depuis 2018

Selon le Sénat, les non-renouvellements de contrats à l’initiative des militaires ont augmenté de 70 % depuis 2018

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La loi de finances initiales pour 2023 avait fixé, pour le ministère des Armées, le niveau du plafond d’emplois militaire à 210 428 « équivalents temps plein travaillé » [ETPT], ce qui supposait la création nette de 1547 postes. Seulement, cet objectif n’a pas pu être tenu étant donné que les effectifs militaires s’élevaient, en fin d’exercice, à seulement 202 122 ETPT, soit un écart de 4 % par rapport aux prévisions.

Or, ce n’est pas la première fois que le ministère des Armées ne parvient pas à respecter son schéma d’emploi, malgré une dynamique des recrutements assez soutenue.

« En rupture avec la dynamique déflationniste qui prévalait depuis la fin de la guerre froide, la Loi de programmation militaire [LPM] 2019-2025 prévoyait une augmentation nette de 6 000 ETP sur la période couverte, ce qui a conduit à la mise en œuvre d’une ambitieuse politique de recrutement. Ses résultats n’ont hélas pas été atteints », ont en effet déploré les sénatrices Marie-Arlette Carlotti et Vivette Lopez, dans un rapport intitulé « Pour rendre l’armée plus attractive : retenir, attirer, réunir », récemment publié par la commission des Affaires étrangères et de la Défense.

Et d’ajouter : « La non-réalisation des schémas d’emplois annuels successifs a touché tant le personnel militaire que le personnel civil, notamment en 2022, où l’écart d’avec la cible ministérielle a été de 2 228 ETP, alors qu’il s’agissait de l’année du plus important volume de recrutement réalisé depuis 2017 avec 27 707 ETP ».

Aussi, les objectifs fixés par la LPM 2024-30, qui prévoit la création nette de 6 300 postes d’ici 2030, semblent d’ores et déjà compromis. À moins que, d’ici là, les plans de fidélisation mis en place par le ministère des Armées ne produisent des résultats.

En effet, la tendance observée par Mmes Carlotti et Lopez s’explique par un flux de départs beaucoup trop important. Ce qui n’est d’ailleurs pas propre à la France, d’autres pays, comme le Royaume-Uni et les États-Unis, étant confrontés au même problème.

Ainsi, selon le rapport, en 2023, les « volumes de départs » ont atteint le « niveau le plus haut depuis 2017, avec 25 496 ETP de sorties définitives, contre 24 952 ETP en 2022 ». Cette augmentation est due en grande partie aux départs volontaires [ou « spontanés »].

« Les départs spontanés représentant la plus grande part des départs définitifs, leur évolution épouse la même trajectoire. Depuis 2009, ceux des officiers sont globalement stables entre 2 % et 3 % des effectifs d’officiers des trois armées. Pour les sous-officiers, la tendance de hausse régulière observable depuis 2013, interrompue en 2020, a repris depuis 2022 avec 7 600 départs, soit 4,6 % des effectifs. Pour les militaires du rang, la hausse, ralentie entre 2014 et 2018, a repris depuis 2020 pour atteindre, en 2022, 6 546 militaires du rang, soit 8,5 % des effectifs », détaillent les deux sénatrices.

Aussi, « l’ancienneté moyenne des militaires au moment de leur départ de l’institution n’a cessé de baisser depuis dix ans pour atteindre, en 2023, 25,3 ans pour les officiers, 18,4 ans pour les sous-officiers, et 4,3 ans pour les militaires du rang », soulignent-elles.

L’attrition, c’est-à-dire la dénonciation du contrat par une recrue lors de sa période probatoire, constitue une part relativement importante des départs. Ainsi, en 2023, le taux d’attrition des militaires du rang, « orienté à la hausse depuis 2020 », s’est élevé à 35,5 % pour l’armée de Terre, à 20,3 % pour la Marine nationale et à 16 % pour l’armée de l’Air & de l’Espace.

Mais c’est surtout la « forte augmentation des non-renouvellements de contrat » qui interroge. Leur nombre est passé de 1 680 en 2019 à 2 920 en 2023. « Soit une hausse de 70 % depuis 2018 », notent les deux parlementaires. « Cela illustre une inversion du rapport contractuel entre l’autorité militaire et le militaire et donc une bascule du ‘rapport de force’ entre employeur et employé », ont-elles conclu.

L’Ukraine envoie de force des civils au front : la France pourrait-elle enrôler aussi en cas de guerre ?

L’Ukraine envoie de force des civils au front : la France pourrait-elle enrôler aussi en cas de guerre ?

En Ukraine, la mobilisation générale se dessine. Et en France, si l’armée professionnelle ne suffit plus, pourriez-vous aller sur le front ?

En Ukraine, des soldats volontaires sont amenés à un centre de soin, du retour du front.
En Ukraine, des soldats volontaires sont amenés à un centre de soin, du retour du front. (©DIEGO FEDELE / AFP)

1 000 et deux nuit dans la guerre. Le 24 février 2022, la Russie envahissait son voisin ukrainien avec des avions de chasse rutilants, des chars d’assauts pétaradants et une armée professionnelle préparée. En face, dans l’urgence, la nation de Volodymyr Zelensky organisait la riposte avec des moyens américains et européens flambants neufs.

Près de trois ans plus tard, c’est l’usure et l’horreur du conflit qui dominent les esprits. Des milliers de civils ukrainiens sont morts, plus de six millions se sont exilés. Le conflit a fait fondre la population du pays d’un quart. Et le bilan des pertes militaires demeure inconnu.

Qu’importe, les volontaires ne suffisent plus à abreuver le front en hommes. Depuis quelques mois, la nation jaune et bleue oblige les citoyens à embrasser l’uniforme de l’armée, au point d’enrôler de force des civils, comme l’ont montré plusieurs vidéos, comme ici sur BFM. En France, dans une situation de guerre, l’État pourrait-il, lui aussi, nous enrôler ?

Aux armes, (tous les) citoyens ? 

En cas de conflit armé dans lequel la France serait impliquée, l’État pourrait donner l’ordre à une partie de sa population de s’engager dans l’armée. « En pratique, le pouvoir en place pourrait abroger la loi de suspension du service national », détaille Annie Crépin, historienne, spécialiste d’histoire militaire et maîtresse de conférences honoraire de l’université d’Artois, à actu.fr. Cette loi du 28 octobre 1997, souhaitée par Jacques Chirac, annonçait la fin du service miliaire obligatoire.

La mobilisation générale, ça n’existe plus. Mais avec cette abrogation, la France (qui, comme l’Ukraine, ne pourrait se suffire de son armée professionnelle pour mener la guerre) envisagerait de compter sur les citoyens. « Après avoir épuisé tous les volontaires et les réservistes, l’État serait enjoint de puiser dans la population. »

Qui serait concerné ? L’âge, le genre et d’autres conditions seraient encore à définir. Les plus fragiles pourraient-ils se retrouver sur le front ? Les femmes ? Si l’on se fie aux conditions d’accès au service militaire volontaire (SMV), tous les jeunes Français, dès 18 ans, est-il écrit sur le site du gouvernement, pourraient être enrôlés dans l’armée. Et ce, jusqu’à 35 ans.

« Les personnes considérées comme pas assez en formes, les plus âgés et d’autres cas seraient sans doute réformés », tempère tout de même Annie Crépin. Autrement dit, si vous êtes majeur, que vous avez la trentaine ou moins, que vous ne présentez aucune comorbidité, vous pourriez vous retrouver avec une arme à la main.

Brève histoire du service militaire

La conscription, appelée aujourd’hui service milliaire obligatoire, a vu le jour sous le directoire en 1789 avec la loi Jourdan-Delbre. Tous les citoyens âgés de 20 à 25 ans pouvaient servir dans l’armée. Au fil des régimes, la conscription s’est allégée. D’abord en termes de durée, puis de devoir, avant d’être définitivement suspendue en 1997.

Ouf, une (petite) armée existe

Autre paramètre à prendre en compte, avant de vous envoyer au front, comme Candide face aux Bulgares : la France possède une armée régulière. Ce sont les forces opérationnelles qui seront mobilisées les premières, en cas de guerre sur le territoire.

C’est-à-dire, comme le rappelle un rapport parlementaire portant sur le budget 2022 de la Défense, 77 000 hommes de l’armée de terre, 34 000 de la marine et 40 000 de l’armée de l’air et de l’espace. Des troupes professionnelles, avec environ 5 000 réservistes en renfort.

Outre ces prêts, au total, l’armée française, toutes armes, tous métiers confondus, comprenait 269 055 équivalents temps pleins. Trois quarts de ces temps pleins (76,5 %) sont occupés par des militaires, les autres, des civils au service de l’armée.

Côté matériel, la France possède, selon les derniers chiffres disponibles, 222 chars Leclerc, 6 200 blindés à roues et approximativement 3 800 autres véhicules de combat. Avec ceci, 211 avions de combat, 45 avions de chasse et une cinquantaine d’avions de surveillance, sans oublier les neuf sous-marins et un porte-avions. Bref, la France a, en théorie, de quoi se défendre en cas de conflit.

Cependant, pour combien de temps ? Sur le long terme, cette armée professionnelle suffirait-elle pour tenir les fronts, attaquer l’ennemi, ou encore défendre la population ? « L’armée française est une armée américaine en version bonsaï », rappelait sur France Info, Jean-Dominique Merchet, journaliste, spécialiste des questions militaires et stratégiques.

Qui sait recharger un FAMAS ?

Depuis la suspension du service militaire, en 1997, plus personne n’est formé aux maniements des armes, ni à ce que c’est vraiment, une guerre. Avec tout ce qu’elle comporte d’horreur, de froideur et de cynisme. Envoyer un citoyen en première ligne, la fleur fusil, serait considéré comme une hérésie.

« C’est un vrai problème, si on en arrive là », reprend l’historienne, avant d’ajouter : « La Première Guerre mondiale s’est gagnée avec les réservistes. »

Avant de puiser parmi les civils, il existe en effet une réserve militaire constituée de deux composantes. Une réserve citoyenne défense et sécurité (des volontaires agréés par l’armée en raison de leurs compétences et de leur expérience) et une réserve opérationnelle.

En somme, des réservistes avec ou sans expérience militaire, âgés de 17 à 35 ans, qui se sont engagés sur la base du volontariat pour soulager les armées environ 25 jours par an en moyenne, indique le ministère des Armées.

Au total, près de 140 000 personnes sont théoriquement mobilisables, dont 40 000 volontaires de la réserve opérationnelle, peut-on lire sous la plume de Jean de Monicault dans la Revue de Défense Nationale, parue en 2021. Ça en fait du monde, avant de demander aux boulangers, plombiers et banquiers de France de prendre les armes. Mais les chiffres paraissent ridicules face aux 4,5 millions de Français appelés sous les drapeaux en 1939 lors de la Seconde Guerre mondiale.

Évidemment, ces scénarios paraissent improbables. La France, avec 31 autres pays, est membre de l’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN). L’article 5 de cette organisation dispose que si un pays est victime d’une attaque armée, chaque membre de l’Alliance considérera cet acte de violence comme une attaque dirigée contre l’ensemble des membres, peut-on lire sur son site.

Le scénario pourrait devenir envisageable, le jour où la France, pour des raisons politiques, se retrouverait sans l’OTAN, isolée du reste du monde.

Légion étrangère : pourquoi ce célèbre chef étoilé s’est rendu dans la cuisine du régiment de Castelnaudary

Légion étrangère : pourquoi ce célèbre chef étoilé s’est rendu dans la cuisine du régiment de Castelnaudary

Le chef étoilé Thierry Marx s’est rendu à Castelnaudary pour coacher des légionnaires lors de l’épreuve façon « Top Chef » organisée à l’issue de leur formation en restauration.

Le chef Thierry Marx prodiguant ses conseils à des stagiaires attentifs.
Le chef Thierry Marx a prodigué ses conseils à des stagiaires attentifs, dans les cuisines du château des Cheminières. ©4e Régiment étranger

Lundi 11 novembre, le 4e Régiment étranger de Castelnaudary organisait dans l’enceinte de son château des Cheminières, sur le domaine du Quartier Danjou, un repas de gala concocté par de jeunes légionnaires à l’issue de leur formation dans la branche « Restauration, hébergement et loisir ». Une centaine de légionnaires sont ainsi formés chaque année dans ce secteur d’activité pendant huit semaines. Une période qui se clôture par l’organisation d’un repas dont le menu est cuisiné par les stagiaires.

Cette année, pour le grand jour de Mémoire du 11 novembre, c’est le célèbre chef étoilé Thierry Marx qui est venu leur apporter son savoir-faire et ses conseils dans les cuisines exiguës du château des Cheminières. Un moment d’autant plus inoubliable pour les jeunes légionnaires qu’une équipe de M6 est venu le filmer.

Un concours façon « Top chef »

Deux équipes étaient en concurrence, à l’image du concept de l’émission télévisée Top chef dont Thierry Marx a été l’un des membres du jury au moment de son lancement. Ils avaient pour défi de concevoir et réaliser un menu composé de deux entrées, deux plats de résistance et deux desserts, le tout accompagné du vin de Puyloubier produit par les anciens de la Légion.

Le jury était constitué par les 28 convives, civils et militaires. Même s’il n’est pas facile de comprendre l’art de la gastronomie française, pour ces étrangers qui viennent parfois du bout du monde pour servir la France, d’abord comme combattants et ensuite comme spécialistes, les deux équipes de cuisiniers stagiaires ont eu droit aux félicitations du jury.

Les liens forts de Thierry Marx avec l’Armée de terre

Chef cuisinier étoilé et président confédéral de l’Union des métiers et des industries de l’hôtellerie (UMIH), Thierry Marx est très attaché à l’armée de Terre puisqu’il a servi comme parachutiste dans l’infanterie de marine. Ce n’est pas la première fois qu’il intervient ou s’investit de la sorte auprès des militaires français. Il a notamment pris l’habitude d’élaborer le menu du dîner caritatif Vulnerati qui permet de récolter des fonds pour les blessés de l’armée de Terre.

Certains iront se perfectionner chez Thierry Marx

Le colonel Montull, chef de corps du 4e Régiment étranger, estimait les « résultats très encourageants, avec une certaine marge de progression », tandis que le chef Thierry Marx faisait part de son expertise et de quelques recommandations.

Chacun saluait le travail d’équipe et la volonté de donner le meilleur de soi-même. Notons que certains de ces jeunes légionnaires auront la chance d’effectuer un stage de perfectionnement dans les cuisines du célèbre chef.

Il manque un millier de sous-officiers à l’armée de l’Air et de l’Espace pour la « bonne conduite de ses missions »

Il manque un millier de sous-officiers à l’armée de l’Air et de l’Espace pour la « bonne conduite de ses missions »

https://www.opex360.com/2024/11/12/il-manque-un-millier-de-sous-officiers-a-larmee-de-lair-et-de-lespace-pour-la-bonne-conduite-de-ses-missions/


Plan « Fidélisation 360 », plans « Famille » et « Famille 2 », Nouvelle politique de rémunération des militaires [NPRM]… Ces dernières années, le ministère des Armées a pris plusieurs séries de mesures afin de renforcer son attractivité et de convaincre les militaires les plus expérimentés [ou, du moins, ceux qui ont des compétences critiques] à ne pas céder aux sirènes du secteur privé.

Seulement, ces mesures tardent à produire leurs effets, même si la situation diffère d’une armée à l’autre. En outre, quand elles ne sont pas insuffisantes, certaines d’entre-elles sont encore méconnues, comme celles du plan Famille 2. En tout cas, c’est qui est ressorti de l’audition des membres du Conseil supérieur de la fonction militaire [CSFM] par les députés de la commission de la Défense, en octobre.

Le plan Famille « souffre d’un manque de communication, tant sur la nature des mesures elles-mêmes que sur les avancées réalisées. Ce dispositif reste méconnu au sein de la communauté militaire, particulièrement aux échelons inférieurs. Au niveau du commandement, les préoccupations portent davantage sur le financement dans le contexte budgétaire actuel », a en effet témoigné le caporal-chef Myriam. Et d’ajouter : « Sur le terrain, aucune réalisation concrète du plan famille n’est perceptible. »

En attendant, ces mesures n’ont pas encore eu d’incidence sur le flux des départs des sous-officiers de l’armée de l’Air & de l’Espace [AAE], celui-ci étant encore élevé. Trop élevé même, à en croire le député Frank Giletti, rapporteur pour avis sur le programme 178 « Préparation et emploi des forces – Air ».

Ainsi, écrit-il, le « flux de départs élevé constaté ces dernières années fragilise l’AAE » étant donné que, actuellement, « un tiers de ses effectifs a moins de trois ans d’expérience au sein de l’institution ». En outre, poursuit-il, « le taux de ‘turn-over’ au sein de l’AAE avoisine les 10 % « .

S’agissant des sous-officiers [59 % des effectifs de l’AAE], 1 813 avaient quitté l’uniforme en 2022 alors que, selon M. Giletti, « seulement 1 385 avaient été recrutés, soit un différentiel de 428 ».

Résultat : d’après les informations qui lui ont été communiquées, il manquerait actuellement environ 1 000 sous-officiers à l’armée de l’Air & de l’Espace « pour la bonne conduite de ses missions ».

Si le député n’a pas précisé les spécialités les plus concernées, on peut avancer, sans risquer de se tromper, qu’il s’agit de celles qui intéressent le plus le secteur privé, lequel offre des rémunérations plus élevées [mécaniciens aéronautique, contrôleurs aériens, moniteurs « simulateur de vol », informaticiens, etc.].

Aussi, pour M. Giletti, la « population des sous-officiers » de l’AAE « doit notamment faire l’objet d’une politique de fidélisation ciblée », d’autant plus qu’elle « attend […] beaucoup de la revalorisation indiciaire de la grille des sous-officiers supérieurs dont la mise en œuvre était initialement prévue au 1er octobre 2024 ». Or, celle-ci a été reportée au 1er février 2025, avec toutefois une « application rétroactive au 1er décembre 2024 ».

Quant aux officiers, la revalorisation de leur grille indiciaire ne sera pas effective avant décembre 2025. Or, pour le député, celle-ci est « plus que jamais nécessaire afin de fidéliser ces personnels dont les sujétions opérationnelles sont particulièrement fortes et dont les niveaux de rémunération apparaissent de plus en plus décorrélés avec ceux de la haute fonction publique ».

Photo : armée de l’Air & de l’Espace

La Gendarmerie mobile est en « surchauffe », prévient un rapport parlementaire

La Gendarmerie mobile est en « surchauffe », prévient un rapport parlementaire


À la fin des années 2000, il fut décidé de réduire à 109 le nombre d’escadrons de gendarmerie mobile [EGM], au titre de la Révision générale des politiques publiques [RGPP], dont l’objectif était de moderniser le fonctionnement de l’État tout en réalisant des économies.

Et cela sans changer le périmètre des missions de la Gendarmerie mobile, celles-ci allant du maintien de l’ordre public à la participation aux opérations extérieures [OPEX] en passant par la protection d’édifices sensibles et la participation à différents dispositifs de sécurité [Vigipirate, lutte contre l’immigration clandestine, etc.].

Seulement, l’activité opérationnelle des EGM s’est singulièrement accentuée au cours de ces dernières années. Au point que, en 2019, année marquée par le mouvement dit des « Gilets jaunes », l’Inspection générale de la Gendarmerie nationale [IGGN] avait tiré le signal d’alarme en faisant comprendre que les gendarmes mobiles étaient au bord de l’épuisement.

Il « ne faudrait pas dépasser 65 escadrons employés chaque jour. Or, depuis le 1er janvier [2019], le taux moyen d’emploi des escadrons est de 74 chaque jour », avait ainsi souligné le général Michel Labbé, le « patron » de l’IGGN, lors d’une audition parlementaire.

Par la suite, l’activité opérationnelle de la Gendarmerie mobile a retrouvé un niveau peu ou prou soutenable. Mais cette accalmie n’aura pas duré longtemps.

En effet, cette année, les violentes émeutes en Nouvelle-Calédonie, les vives tensions en Martinique, la sécurisation des Jeux olympiques et paralympiques de Paris [JOP] ainsi que les commémorations du 80e anniversaire du Débarquement en Normandie, les opérations « places nettes » contre les trafiquants de drogue, les manifestations du monde paysan et la mobilisation d’activistes contre le chantier de l’autoroute A69 ont de nouveau mis la Gendarmerie mobile dans le rouge.

« La crise en Nouvelle-Calédonie a exigé un envoi massif de renforts de la gendarmerie. Alors que l’effectif socle [y] est de 735 gendarmes, plus de 2 870 gendarmes étaient présents sur ce territoire en septembre 2024, dont plus de 2 000 gendarmes mobiles », rappelle la député Valérie Bazin-Malgras [Droite républicaine], dans un rapport sur le budget 2025 de la Gendarmerie nationale.

« Au plus fort de la crise, 35 escadrons de gendarmerie mobile étaient présents en Nouvelle-Calédonie, contre quatre à cinq escadrons habituellement. Chaque escadron est déployé sur place pour trois voire quatre mois », a-t-elle ajouté, avant de souligner que les gendarmes ont dû « faire face à une violence inédite, avec des engagements qui ‘relèvent plus du combat que du maintien de l’ordre’ ». Deux d’entre eux ont perdu la vie et 550 autres ont été blessés.

Dans le même temps, 55 EGM ont été mobilisés pour les JOP, parfois de manière simultanée.

Aussi, le constat établi par Mme Bazin-Malgras n’est pas surprenant. L’une des conséquences de cette forte mobilisation est que « la gendarmerie mobile est en surchauffe ». Un autre est que cette dernière n’a pas toujours les moyens de renforcer d’autres unités de la gendarmerie « pour des missions qui ne relèvent pas du maintien de l’ordre, telles que les missions de sécurisation des transports et de lutte contre l’immigration irrégulière ».

« Un taux d’emploi de 68 escadrons engagés par jour représente pour la gendarmerie le seuil de viabilité maximal pour gérer les jours de repos et de permissions des gendarmes mobiles. Or, de janvier à septembre 2024, le taux d’emploi effectif a été de 80 escadrons engagés chaque jour », a relevé la députée.

Et d’ajouter : « Cette situation génère une augmentation de la dette de repos et de permission : au 30 juin 2024, le reliquat du nombre de jours de repos et permission à attribuer en moyenne par gendarme mobile atteint près de 40 jours [contre 13 jours en 2022 et 2023] ».

Pour atténuer les effets de cette « surchauffe », la Gendarmerie a eu recours à quelques expédients, notamment en réorientant les flux sortants de ses écoles.

« Alors que traditionnellement, environ 25 % des effectifs en sortie d’école sont orientés vers la gendarmerie mobile, cette proportion est passée depuis fin 2024 à plus de 35 %, au détriment des recrutements au sein de la gendarmerie départementale », a constaté Mme Bazin-Malgras.

Enfin, les relèves des EGM en outre-mer sont désormais effectuées tous les quatre mois et non plus tous les trois mois comme c’était jusqu’alors le cas.

Le recours à des réservistes pour renforcer les EGM pourrait être une solution… Seulement, comme le rappelle la députée, « à l’exception de situations exceptionnelles [insurrection ou guerre], les réservistes n’ont pas vocation à mener des opérations programmées de maintien ou de rétablissement de l’ordre public ». Et c’est d’ailleurs la « raison pour laquelle les réservistes, y compris au niveau local, ne participent pas aux opérations actuelles en Nouvelle-Calédonie », a-t-elle souligné.

834 millions de dollars pour appuyer le recrutement du Corps des marines

834 millions de dollars pour appuyer le recrutement du Corps des marines

Photo U.S. Marine Corps by Lance Cpl. Janell B. Alvarez.

Le Corps des Marines (USMC) est bien décidé à attirer de plus nombreuses recrues dans ses rangs en 2025. Les efforts de communication et de marketing lancés depuis cinq ans commencent à payer, même si globalement le recrutement reste malaisé. D’où le recours à une entreprise spécialisée qui a fait ses preuves depuis 2019.

Pour l’année fiscale 2023 (FY 2023), l’USMC avait besoin de 33 000 nouvelles recrues; il a réussi à recruter 33 323 Marines. Parmi eux, 28 921 soldats d’active et 4402 réservistes.

Pour la FY 2024, l’objectif était de recruter 30 500 nouveaux Marines dont 27 500 soldats d’active et 3000 réservistes. Objectif atteint de très peu (voir mon post précédent sur le bilan 2024 du recrutement US).

Pour l’année fiscale 2025 (FY 2025), le Corps des Marine Corps s’est fixé comme objectif le recrutement de 29 300 nouveaux soldats d’active soit une hausse de 1 800 hommes et femmes, comme confirmé par le général Bowers, patron du recrutement de l’USMC.

Externaliser la com’

Pour atteindre ses objectifs, l’USMC a de nouveau passé un marché avec une société privée. Il s’agit de Wunderman Thompson LLC, une agence de marketing de New York qui a déjà travaillé avec l’USMC dans le cadre d’un marché d’une valeur de 639 millions de dollars octroyé en 2019. Le nouveau marché a une valeur estimée à 834 millions de dollars.

Voir ici une des vidéos élaborée alors pour le recrutement en 2020.

Et celle de 2021 vraiment orientée « recrutement ».

Enfin, voir ici une autre vidéo (plus dynamique encore, intitulée: « U.S. Marine Corps: Shifting Threats ») conçue en 2022.

Voici l’avis d’attribution du nouveau marché de 5 ans, reconductible pour la même durée:
Wunderman Thompson LLC, Atlanta, Georgia, has been awarded an $834,090,640 contract. This hybrid (firm-fixed-price and cost, indefinite-delivery/indefinite-quantity, single-award) contract is to provide full-service advertising agency support to furnish supplies and services to enhance the Marine Corps’ recruiting efforts. Work will be performed at Atlanta, Georgia, with an expected completion date of December 2029. This contract includes one five-year option period which, if exercised, could bring the cumulative value of this contract to $1,914,649,380. Fiscal 2025 operation and maintenance (Marine Corps) will be obligated at the time of contract award, $10,000 in. This serves as the contract minimum guarantee. All other funding will be made available at the task order level as task orders are awarded. This contract was competitively procured via SAM.gov and seven proposals were received. The Marine Corps Installations Command Contracting Office, Arlington, Virginia, is the contracting activity (M9549425D0001). (Awarded Oct. 31, 2024).

Recrutement : comment l’armée de Terre se prépare aux défis de demain

Recrutement : comment l’armée de Terre se prépare aux défis de demain

L’armée de Terre se lance dans un vaste défi de recrutement, avec un objectif ambitieux de 16 000 nouvelles recrues par an. Dans un contexte géopolitique tendu, ce renouvellement des effectifs est crucial pour maintenir la performance opérationnelle de l’armée, qui doit aussi répondre aux nouvelles exigences technologiques et humaines.


Par Jean-Baptiste Giraud – armees.com –  Publié le 24 octobre 2024

recrutement
Recrutement : comment l’armée de Terre se prépare aux défis de demain – © Armees.com

Le défi du recrutement militaire : un enjeu stratégique

Pour l’armée de Terre, recruter 16 000 personnes chaque année représente un défi majeur. Comme l’a souligné le général Arnaud Goujon, il ne s’agit pas seulement d’atteindre ce nombre, mais aussi de s’assurer que ces nouvelles recrues possèdent les compétences et les qualités requises pour faire face aux défis modernes. Les campagnes de recrutement se multiplient et visent des profils variés, en mettant en avant les opportunités de formation, de spécialisation, et les valeurs fortes que porte l’institution.

L’armée cherche à attirer des candidats motivés, prêts à s’engager dans des carrières qui demandent non seulement des compétences techniques et physiques, mais aussi une capacité d’adaptation face aux nouvelles technologies militaires et aux exigences croissantes du terrain. Cette recherche de talents est indispensable pour garantir la modernisation des forces et leur efficacité face à des situations de plus en plus complexes.

Les difficultés croissantes du recrutement militaire

Le recrutement de l’armée de Terre n’échappe pas aux problématiques rencontrées dans d’autres secteurs. En effet, attirer de nouvelles recrues devient de plus en plus difficile dans un marché de l’emploi concurrentiel et en pleine mutation. « Le recrutement est un défi permanent », reconnaît un officier supérieur, soulignant que le contexte actuel – tensions internationales et complexité des missions – nécessite non seulement des candidats en nombre, mais surtout des profils particulièrement qualifiés.

Le ministère des Armées fait face à des enjeux multiples : d’une part, un certain manque d’attractivité du métier militaire auprès de la jeunesse. « Nous devons faire comprendre aux jeunes générations que l’armée offre des perspectives de carrière uniques, mais il y a une forte concurrence avec d’autres secteurs », explique un porte-parole du ministère. D’autre part, il y a aussi les exigences physiques et psychologiques que le métier impose. En effet, l’entraînement militaire, la préparation aux missions sur le terrain et les conditions parfois difficiles peuvent dissuader certains candidats.

Enfin, le ministère des Armées souligne que la digitalisation croissante des métiers militaires, avec l’introduction des nouvelles technologies et de la robotique, crée un besoin de compétences spécifiques : « Le soldat de demain doit maîtriser la technologie tout en conservant une capacité à s’adapter rapidement aux évolutions des théâtres d’opération », précise un responsable des ressources humaines militaires. Malgré ces défis, l’armée de Terre reste confiante dans sa capacité à attirer des talents, grâce notamment à des campagnes de recrutement modernisées et à des partenariats avec des institutions éducatives et des entreprises technologiques​.

Comment rejoindre les rangs de l’armée de Terre

L’accès à l’armée de Terre s’effectue via plusieurs canaux. Les jeunes intéressés peuvent postuler directement en ligne ou se rendre dans les centres d’information pour participer à des sessions de présentation des métiers militaires. Le processus de recrutement est structuré en plusieurs étapes, comprenant des tests physiques, psychologiques et techniques, afin de s’assurer que chaque recrue possède les capacités nécessaires pour répondre aux missions de défense du territoire.

L’armée met également en avant les valeurs qui caractérisent ses forces : l’engagement, l’esprit de camaraderie, et la résilience. Ces qualités sont essentielles pour progresser au sein des rangs et pour mener à bien les différentes missions de défense et d’opérations extérieures. En proposant un large panel de métiers et de spécialisations, l’armée de Terre offre des opportunités variées pour ceux qui souhaitent s’engager dans une carrière au service de la nation.

Alors que de nombreux métiers évoluent et, parfois, disparaissent avec l’avènement de certaines innovations comme l’Intelligence artificielle, l’armée reste un employeur d’avenir. La diversité de ses missions permet des évolutions de carrière multiples et adaptées à chaque situation. Enfin, de nombreux jeunes se retrouvent chaque année dans les idéaux militaires de service de la nation, de camaraderie et d’exigence.


Jean-Baptiste Giraud

Journaliste éco, écrivain, entrepreneur. Dir de la Rédac et fondateur d’EconomieMatin.fr. Fondateur de Cvox.fr. Officier (R) de gendarmerie.