Otan : Selon M. Pistorius, les forces allemandes devront recruter jusqu’à 60 000 soldats de plus

Otan : Selon M. Pistorius, les forces allemandes devront recruter jusqu’à 60 000 soldats de plus


Selon un rapport intitulé « Préparation opérationnelle et soutien aux forces armées » et évoqué par l’hebdomadaire Der Spiegel en juin 2024, le ministère allemand de la Défense s’attendait à devoir recruter au moins 75 000 soldats de plus afin de répondre aux sollicitations de l’Otan. Une autre estimation figurant dans ce document évoquait l’éventualité de porter l’effectif total de la Bundeswehr à plus de 272 000 militaires, l’Allemagne étant appelée à devenir une « zone de transit et un centre logistique majeur » en cas de conflit.

Finalement, les exigences de l’Otan seront moindres qu’annoncé. En effet, ce 5 juin, avant de prendre part à une réunion avec ses homologues de l’Alliance, à Bruxelles, le ministre allemand de la Défense, Boris Pistorius, a annoncé que la Bundeswehr aurait besoin de 50 000 à 60 000 soldats supplémentaires dans les années à venir.

« Nous supposons, mais ce n’est qu’une estimation approximative, que nous avons besoin d’environ 50 000 à 60 000 soldats de plus dans les forces armées » pour répondre aux nouvelles capacités exigées par l’Otan, a en effet déclaré M. Pistorius. « Nous assumons nos responsabilités en tant que première économie européenne », a-t-il également assuré.

Sur ces 50 000 à 60 000 militaires supplémentaires, 40 000 pourraient être affectés aux sept nouvelles brigades que la composante terrestre de la Bundeswehr devra créer pour répondre aux demandes de l’Otan.

En effet, selon une information de l’agence Reuters, l’Alliance voudrait que ses membres soient en mesure de fournir entre 120 et 130 brigades, contre 80 actuellement. D’où l’effort demandé à Berlin.

Quoi qu’il en soit, même si l’effort qu’elle aura à faire sera moindre que prévu, la Bundeswehr reste confrontée à un immense défi. En 2018, elle s’était donné l’objectif de porter son effectif de 180 000 à 203 000 militaires à l’horizon 2031. Or, six ans avant cette échéance, elle reste confrontée à des problèmes de recrutement et de fidélisation. Et son format n’a guère augmenté.

D’où le projet de M. Pistorius d’instaurer un service militaire sur la base du volontariat. Ce dernier aurait pu être adopté par le Bundestag au début de cette année… mais les circonstances politiques en ont décidé autrement.

Reste à voir si ce service militaire sera suffisamment attractif… En attendant, même s’il n’a pas été exclu par M. Pistorius, un éventuel retour de la conscription, suspendue en 2011, n’est pour le moment pas possible, les capacités d’accueil de la Bundeswehr étant désormais insuffisantes…

« En attendant d’avoir de telles capacités, nous aurons un service volontaire », a dit M. Pistorius. Et peut-être qu’il ne sera pas nécessaire d’aller plus loin si « nous sommes un employeur attractif et si nous attirons suffisamment de jeunes hommes et femmes pour l’armée qui acceptent de servir plus longtemps », a-t-il ajouté.

Photo : OTAN

Dépenses militaires : l’Otan “très proche” d’un accord sur l’objectif des 5 % du PIB fixé par Trump

Dépenses militaires : l’Otan “très proche” d’un accord sur l’objectif des 5 % du PIB fixé par Trump

L’Otan est “très proche” d’un accord pour augmenter ses dépenses de défense, a déclaré jeudi le patron du Pentagone, Pete Hegseth, en déplacement à Bruxelles. Le ministre a salué les progrès vers l’objectif fixé par Donald Trump : 5 % du PIB de chaque pays allié consacré à la défense.

Le ministre américain de la Défense, Pete Hegseth (à droite), lors d'une réunion des ministres de la Défense de l'Otan au siège de l'organisation, le 5 juin 2025 à Bruxelles.
Le ministre américain de la Défense, Pete Hegseth (à droite), lors d’une réunion des ministres de la Défense de l’Otan au siège de l’organisation, le 5 juin 2025 à Bruxelles. © Nicolas Tucat, AFP

Pete Hegseth a affiché son contentement. L’Alliance atlantique est “très proche” d’un accord pour dépenser beaucoup plus pour sa sécurité, s’est félicité jeudi 5 juin le ministre américain de la Défense, venu en mission au siège de l’organisation à Bruxelles pour convaincre ses alliés européens de la nécessité de ne plus dépendre des États-Unis.

La raison pour laquelle je suis ici est de m’assurer que tous les pays de l’Otan comprennent que (…) chaque pays doit contribuer à hauteur de 5 %“, a martelé l’ancien journaliste de Fox News, à trois semaines d’un sommet de l’Otan qui doit en décider.

Le président américain Donald Trump exige des alliés européens et du Canada qu’ils s’engagent à consacrer au moins 5 % de leur produit intérieur brut (PIB) à leur défense, sous peine de ne plus garantir leur sécurité. Et l’objectif semble en voie d’être atteint, a assuré Pete Hegseth devant quelques journalistes.

De la France à l’Allemagne, aux pays Baltes, aux pays nordiques, à la Pologne, à la Grèce, à la Hongrie, et tant d’autres, l’engagement est là : 5 % de dépenses de défense“, a-t-il encore affirmé. Un engagement qu’il juge indispensable au moment où Washington réclame des Européens qu’ils prennent leur sécurité en mains.

Il ne peut s’agir de dépendre de l’Amérique”

Notre message restera clair. Il s’agit de la dissuasion et de la paix par la force, mais pas de la dépendance. Il ne peut s’agir et ne s’agira pas de dépendre de l’Amérique dans un monde où les menaces sont nombreuses“, a ainsi averti le ministre américain.

Inquiet d’un éventuel désengagement américain de leur continent, et face à la menace russe, les Européens se disent prêts à augmenter leurs dépenses militaires. Mais tous n’affichent pas la même volonté.

Le secrétaire général de l'Otan, Mark Rutte, et le ministre américain de la Défense, Pete Hegseth, avant une réunion des ministres de la Défense au siège de l'Otan, à Bruxelles, le 5 juin 2025.
Le secrétaire général de l’Otan, Mark Rutte, et le ministre américain de la Défense, Pete Hegseth, avant une réunion des ministres de la Défense au siège de l’Otan, à Bruxelles, le 5 juin 2025. © Nicolas Tucat, AFP

Il y a quelques pays qui ne sont pas encore tout à fait là. Je ne citerai aucun nom, nous ne le faisons pas entre amis dans cette salle. Nous les y amènerons“, a assuré sur ce point Pete Hegseth.

Plusieurs pays de l’Otan, dont l’Espagne, la Belgique ou l’Italie, peinent déjà à atteindre l’objectif de 2 % fixé il y a plus de dix ans lors d’un précédent sommet de l’Alliance. Moins sensibles à la menace russe, ils rechignent à s’engager sur des pourcentages aussi élevés.

La ministre espagnole de la Défense, Margarita Robles, a toutefois assuré jeudi que Madrid n’opposerait pas de veto à cette hausse sans précédent, même si l’Espagne continue à s’opposer aux pourcentages réclamés par Donald Trump.

Le calcul de Mark Rutte

Pour assurer le succès du sommet de La Haye, le secrétaire général de l’Otan Mark Rutte a proposé un chiffre global de 5 %, mais sous la forme d’une addition de deux types de dépenses.

Il a confirmé jeudi vouloir porter le niveau des dépenses militaires stricto sensu à 3,5 % du PIB d’ici 2032, et dans le même temps de porter à 1,5 % du PIB toutes celles liées à la sécurité, au sens large, comme la protection aux frontières, la mobilité militaire ou encore la cybersécurité.

Cet objectif apparaît plus facilement atteignable dans la mesure où il concerne des dépenses duales, civiles et militaires, déjà engagées ou prévues par les États.

L‘objectif de 3,5 % correspond, lui, au financement des capacités indispensables pour assurer la défense de l’Otan au cours des prochaines années, au moment où la Russie ne cesse de renforcer son armée.

Et en dépensant 5 % de leur PIB pour leur sécurité, les Alliés augmenteront de 30 % leurs capacités à se défendre, a assuré un responsable militaire de l’Otan.

Nous vivons dans un monde plus dangereux“, a averti Mark Rutte devant la presse, à l’issue de cette réunion. Et si l’Otan ne fait rien, elle ne sera plus en sécurité, a-t-il mis en garde. Mais “je suis persuadé que nous y arriverons”, a-t-il insisté.

Pete Hegseth, absent mercredi lors d’une session de travail avec l’Ukraine, n’a pas attendu la fin de cette réunion, et a quitté l’Otan jeudi en fin de matinée. Il a également renoncé à participer au déjeuner de travail prévu avec ses collègues de l’Alliance et son homologue ukrainien Roustem Oumerov.

Avec AFP

Warfighter 25 : La 1re Division de l’armée de Terre s’entraîne aux côtés de ses alliés américains

Warfighter 25 : La 1re Division de l’armée de Terre s’entraîne aux côtés de ses alliés américains

Direction : Terre / Publié le : 05 juin 2025

Dans un contexte stratégique mondial marqué par l’instabilité et la compétition entre puissances, l’armée de Terre accélère sa transformation vers le combat de haute intensité. La 1re Division participe à une série d’exercices militaires avec les forces armées américains, britanniques, allemands et belges, dans le cadre du cycle de préparation Warfighter.

 

Warfighter 25 : La 1re Division de l’armée de Terre s’entraîne aux côtés de ses alliés américains © armée de Terre


Au cœur de ce partenariat stratégique, les exercices CPX IICPX III puis Warfighter 25-4 marquent un jalon essentiel dans la transformation de l’armée de Terre en une force capable de conduire des opérations de grande ampleur, en autonomie comme en coalition. 

Un exercice sous commandement américain

Engagée dans un exercice de poste de commandement (Command Post Exercise – CPX) piloté par le 3e corps d’armée américain, la 1re Division affirme ses savoir-faire tactiques et opérationnels dans un environnement interarmées et interalliés. Suivi de Warfighter 25-4, cet entraînement rassemble plus de 5 000 soldats issus de différentes nationalités, dont 1 050 français. 

Une division prête au combat interarmées et multinational

Dans l’armée de Terre, une division est une unité forte composée de plus de 25 000 soldats, constituée de brigades et d’un état-major. Sur le camp de Mailly-le-Camp et en s’appuyant sur un scénario de guerre de haute intensité, les CPX permettent à l’état-major divisionnaire de renforcer sa capacité de planification, de coordination et de conduite des opérations sur l’ensemble du spectre des conflits. Cette montée en puissance opérationnelle s’inscrit dans la logique de la « Warfighting Division ».

Division « Europe » de l’armée de Terre, la 1re Division incarne l’ambition française de disposer d’une force apte à être déployée en moins de 30 jours, prête à affronter un adversaire de niveau équivalent.  À travers Warfighter 25-4, elle développe ses savoir-faire multi-milieux et multi-champs (M2MC) et s’exerce à coordonner ses actions dans les domaines terrestre, aérien, cyber, spatial, informationnel et électromagnétique face à un adversaire à parité. 

Pour en savoir plus sur les Corps et Divisions de l’armée de Terre 

Lien vers la page

Transformation de l’armée de Terre

Le combat de haute intensité impose une transformation profonde de l’approche opérationnelle de l’armée de Terre. Le rapport de force l’a contraint à changer de perspective, en passant d’une culture centrée sur la manœuvre de contact à une logique d’effets dans la profondeur. L’échelle des engagements évolue également : volumes logistiques, structure des grandes unités, volume des pertes, tout atteint une ampleur inédite. Le rythme des opérations s’accélère sous l’effet de la densité des capteurs et de l’intelligence artificielle, réduisant drastiquement les délais entre détection et frappe. 

Dans ce contexte, l’armée de Terre se doit de relever des défis majeurs : 

  • Soutien logistique sous contrainte ;
  • La protection à 360° ;
  • La coordination interarmées et interalliés ;
  • La résilience du commandement. La conduite des opérations offensives doit désormais s’adapter à ces nouvelles réalités. 

L’engagement de l’armée de Terre au sein du cycle Warfighter illustre le partenariat stratégique avec les forces armées américaines, et plus largement la cohésion entre alliés de l’Otan. La France contribue ainsi à la posture de dissuasion et de défense collective sur le flanc Est et Sud de l’Europe, en renforçant son interopérabilité avec ses alliés.  

 

 

CAMTAC & BME : du neuf dans le camouflage de l’armée de Terre

CAMTAC & BME : du neuf dans le camouflage de l’armée de Terre

– Forces opérations Blog – publié le

Certaines lignes bougent en coulisses dans le domaine moins visible du camouflage. D’un côté, l’armée de Terre s’apprête à franchir un cap dans l’adoption d’un nouveau système de camouflage tactique (CAMTAC) pour ses véhicules. De l’autre, le bariolage multi-environnement (BME) est progressivement étendu à d’autres effets d’habillement que le treillis F3 en cours de diffusion dans les armées françaises.

Après des années de recherches et d’expérimentations, le CAMTAC destiné aux véhicules de l’armée de Terre semble mûr pour un déploiement à grande échelle. Un appel d’offres vient en effet d’être lancé pour la production et la fourniture de ce système à base de formes géométriques adhésives. 

Des formes géométriques, ou plutôt un ensemble de triangles équilatéraux de différentes couleurs dont l’agencement sur le fond brun terre de France est optimisé selon le véhicule. Des formes adhésives, car CAMTAC a été conçu pour être retiré et remplacé rapidement selon l’environnement de la mission. Trois déclinaisons ont progressivement fait leur apparition : l’une pour les terrains enneigés, une autre pour l’environnement désertique et la troisième, de loin la plus répandue jusqu’à présent, pour les plaines européennes. 

Piloté par la Direction générale de l’armement, ce processus d’acquisition devrait aboutir sur un accord-cadre conclu pour une durée de sept ans. Rien ou presque ne filtre à propos du besoin, à l’exception du volume estimé et de l’agenda : 52 000 poches de 100 adhésifs livrées à compter de fin 2026. 

Ce CAMTAC, les observateurs affûtés en retrouveront un écho dans le BME, ce nouveau bariolage bientôt élargi à d’autres effets d’habillement que le treillis F3. Derrière la tenue NRBC du futur ensemble de protection individuel des armées (EPIA), une nouvelle combinaison est aujourd’hui en développement dans les ateliers du Centre interarmées du soutien équipements commissariat (CIEC) au profit des troupes aéroportées (TAP), mais pas seulement. 

Le CIEC recevait dès 2023 une fiche d’expression de besoin visant à la modernisation de l’actuelle combinaison de saut des TAP. Tant les technologies que la morphologie de cette population spécifique ont évolué au cours des dernières décennies. Derrière l’adoption d’un BME remplaçant les camouflages Centre-Europe et désert, cette combinaison se devait également d’être adaptée au personnel féminin via une variante jusqu’alors inexistante. 

Lancés début 2024, les travaux ont abouti à de premiers essais sur plusieurs prototypes à l’été 2024 pour la version masculine, puis à l’automne d’après pour la version féminine. Le CIEC y aura intégré quelques exigences spécifiques, dont un déshabillage rapide, des rangements adaptés, la conservation des renforts de genoux ou encore l’ajout d’une ouverture physiologique en plus pour satisfaire plus facilement et rapidement les besoins naturels. Le tissu sélectionné est majoritairement à base de coton et ne présentera donc pas la résistance au feu du treillis F3, rendu thermostable par le recours à un tissu en fibre aramide-viscose.

Les premiers résultats ont été présentés mi-mai à Pau à l’occasion de la 2ème édition de la Journée innovation des troupes aéroportées (JITAP). Les équipes du CIEC se penchent dorénavant sur la validation des derniers détails pour ensuite formaliser l’étude, figer le produit et rédiger la documentation technique qui servira de base à la sélection des futurs fournisseurs. Suivra une phase de contractualisation puis de production qui devrait conduire à sortir les premières tenues à l’hiver 2026. 

Cette combinaison ne se limitera pas aux parachutistes. Les largueurs en bénéficieront à leur tour, tandis qu’un élargissement aux démineurs est à l’étude. S’il a été mobilisé pour ce projet, le CIEC sait aussi être force de proposition. Ses spécialistes planchent ainsi sur une autre combinaison cette fois orientée vers les équipages de chars de combat et d’engins blindés des régiments de cavalerie de l’armée de Terre.

Crédits image : armée de Terre

Cybermenaces : La Gendarmerie en première ligne dans la riposte numérique

Cybermenaces : La Gendarmerie en première ligne dans la riposte numérique

Par Jean-François Stéphan, pour La Voix du Gendarme


Alors que les cyberattaques et les arnaques en ligne explosent (+40 % entre 2019 et 2023), le ministère de l’Intérieur vient de dévoiler sa stratégie nationale de lutte contre la cybercriminalité, une feuille de route ambitieuse qui mobilise l’ensemble des forces de sécurité. Et en première ligne de ce combat numérique : la Gendarmerie nationale, forte de son expertise technique, de ses unités innovantes et d’un maillage territorial sans équivalent.

Une menace protéiforme et en constante évolution

La cybercriminalité ne connaît ni frontières ni répit. Fraudes bancaires, escroqueries par SMS ou e-mail, usurpation d’identité, harcèlement en ligne, pédopornographie ou encore attaques contre des systèmes informatiques sensibles : les atteintes numériques se multiplient et ciblent autant les particuliers que les entreprises ou les services publics.

Face à cette déferlante, le ministère a structuré son action autour de quatre grands axes déclinés en 12 orientations stratégiques et 84 actions concrètes, portées par le Commandement du ministère de l’Intérieur pour le cyberespace (COMCYBER-MI). Objectif : mieux prévenir, détecter, investiguer et neutraliser les cybermenaces.

La Gendarmerie, pilier du dispositif national

Au cœur de cette stratégie, la Gendarmerie nationale affirme son rôle de force d’action et d’innovation dans le cyberespace, grâce à des entités spécialisées et reconnues :

Le ComCyberGend : un commandement dédié au cyber. Créé en 2021, le Commandement de la Gendarmerie dans le cyberespace (ComCyberGend) pilote l’ensemble des capacités cyber de l’institution. Il fédère notamment :

  • Le Centre de lutte contre les criminalités numériques (C3N), bras armé judiciaire du pôle cyber de la Gendarmerie, basé à Pontoise.
  • Le réseau CyberGEND, qui regroupe plus de 2 000 enquêteurs spécialisés en numérique sur l’ensemble du territoire.
  • La Brigade numérique, bien connue des usagers, qui assure l’accueil et la réponse en ligne aux sollicitations 24h/24.

▸La plateforme 17Cyber : un « numéro d’urgence » numérique

Lancée récemment, la plateforme 17Cyberpermet de répondre aux alertes cyber en temps réel. Elle est animée par 103 agents, dont 58 gendarmes, principalement issus de la Brigade numérique de Rennes, bientôt complétée par une antenne à Poitiers. Ces équipes forment ensemble une « compagnie numérique », une innovation organisationnelle destinée à mieux absorber le volume croissant des signalements.

Exemple concret : en mai dernier, grâce à une alerte transmise via 17Cyber, une entreprise artisanale de Corrèze victime d’un rançongiciel a pu être rapidement mise en relation avec un enquêteur CyberGEND. Une sauvegarde automatisée a permis d’éviter la paralysie complète de l’activité, et les auteurs ont été identifiés dans un forum clandestin grâce à l’intervention du C3N.

 Perceval, MaSpam, Themis : des outils au service des citoyens

La Gendarmerie pilote ou participe également à plusieurs plateformes de signalement, telles que :

  • Perceval, pour signaler une fraude à la carte bancaire ;
  • MaSpam, pour signaler les courriels ou SMS frauduleux ;
  • Thémis, destinée à recueillir les plaintes et preuves numériques dans des procédures sensibles (violences intrafamiliales, harcèlement…).

Ces dispositifs facilitent l’accès à la plainte, l’enrichissement du renseignement judiciaire et la montée en compétence des unités territoriales.

 Une reconnaissance dans l’écosystème cyber

Depuis 2023, la Gendarmerie est membre de l’association InterCERT France, qui fédère les centres de réponse aux incidents de sécurité informatique (CERTs) en France. Cette intégration renforce la veille proactive et le partage d’informations avec les grands acteurs publics et privés du secteur cyber.

Une stratégie ambitieuse, un engagement durable

Cette stratégie cyber du ministère de l’Intérieur consacre une conviction forte : le numérique ne doit pas être une zone de non-droit. Pour cela, l’adaptation permanente des forces de sécurité est indispensable. La Gendarmerie s’y engage pleinement, en s’appuyant sur ses atouts : proximité, innovation, réactivité.

La montée en puissance de ses unités spécialisées, conjuguée à la formation continue des enquêteurs numériques dans les unités territoriales, permettra de répondre aux défis de demain et de garantir la sécurité des citoyens dans l’espace numérique, tout comme elle le fait déjà sur le terrain.

L’UNPRG engagée aux côtés des forces dans le combat numérique

L’Union nationale des personnels et retraités de la Gendarmerie (UNPRG) suit avec une attention particulière la montée en puissance des dispositifs de lutte contre la cybercriminalité.

« La sécurité numérique ne concerne pas uniquement les jeunes générations ou les entreprises », rappelle Jean-François Stephan, président de la commission communication de l’UNPRG. « Les retraités de la Gendarmerie, comme tous les citoyens, sont exposés aux escroqueries en ligne, à l’usurpation d’identité ou au vol de données personnelles. Nos adhérents en sont parfois victimes. Il est donc essentiel de les informer, de les sensibiliser et de soutenir pleinement les efforts de nos camarades d’active engagés dans cette nouvelle frontière de la sécurité intérieure. »

L’UNPRG salue l’action déterminée de la Gendarmerie dans ce domaine, et encourage le développement de campagnes de prévention spécifiques à destination des retraités et de leurs familles. Une vigilance qui s’inscrit dans l’ADN de l’association : unir, soutenir, agir, même après le service actif.


Encadré pratique :

🔹 Vous êtes victime d’une fraude en ligne ?
→ Signalez sur : www.cybermalveillance.gouv.fr,
→ Déposez plainte à la brigade ou via www.pre-plainte-en-ligne.gouv.fr,
→ Signalez une fraude bancaire sur Perceval : perceval.gouv.fr.

Les deux porte-avions britanniques auront la capacité de tirer des missiles à longue portée depuis leur pont d’envol

Les deux porte-avions britanniques auront la capacité de tirer des missiles à longue portée depuis leur pont d’envol


Que la dernière revue stratégique de défense britannique [SDR] recommande à la Royal Navy de mettre en œuvre des groupes aériens « hybrides », c’est-à-dire comprenant des chasseurs-bombardiers F-35B et des drones, depuis ses deux porte-avions de type « Queen Elizabeth » n’est pas une surprise : des projets allant dans ce sens ont déjà été lancés, dans le cadre du projet « Vixen », lequel fait partie du plan stratégique « Future Maritime Aviation Force ».

Ainsi, en 2023, le porte-avions HMS Prince of Wales a, pour le première fois, lancé et récupéré un drone MALE [Moyenne Altitude Longue Endurance] de type Mojave, fourni par le constructeur américain General Atomics. Et la marine britannique envisage de se doter d’un aéronef de ce type afin de pouvoir disposer d’une nouvelle capacité de guet aérien pour remplacer ses hélicoptères Merlin qui, équipés d’un radar Crowsnest, assurent actuellement une telle fonction.

Cela étant, l’une des limites à l’intégration de drones au sein d’un groupe aérien embarqué [GAé] est l’absence de catapultes et de brins d’arrêt à bord des deux porte-avions britanniques. D’où l’intérêt exprimé par la Royal Navy pour de tels dispositifs.

Selon la SDR, associer les F-35B [à décollage court et à atterrissage vertical] à des « plateformes collaboratives autonomes et à des munitions téléopérées [ou « drones kamikazes] » permettrait à la marine britannique de se doter d’une capacité à la fois « plus puissante et plus économique ».

Mais ce document envisage d’aller encore plus loin. Alors que les deux porte-avions de la classe Queen Elizabeth ne sont que très faiblement armés pour assurer leur autodéfense – celle-ci repose essentiellement sur trois système Phalanx CIWS [Close-in weapon system] et non sur des missiles surface-air comme leurs homologues français et américains – il est question de les doter de « missiles de précision à longue portée », pouvant « être tirés depuis leur pont d’envol ».

Cette annonce a de quoi surprendre… dans la mesure où, normalement, la capacité à tirer des missiles conventionnels à longue portée revient aux sous-marins nucléaires d’attaque [SNA] et aux frégates. D’ailleurs, celles de Type 26 qu’attend la Royal Navy seront dotées de missiles de type Tomahawk et /ou FMAN/FMC [missiles antinavire / Future missile de croisière], développé dans le cadre d’une coopération avec la France.

Cela étant, un tel concept n’est pas nouveau : immobilisé depuis 2017, le porte-avions russe « Amiral Kouznetsov » a [ou avait] en effet la capacité de tirer des missiles P-700 « Granit » et 3K95 « Kinzhal » ainsi que des roquettes anti-sous-marines RBU-12000.

Weda Bay Nickel : une mine stratégique au cœur des enjeux de l’Indonésie

Weda Bay Nickel : une mine stratégique au cœur des enjeux de l’Indonésie


Weda Bay est la première mine de nickel au monde. Elle représente à elle seule 17% de la production mondiale. Un enjeu essentiel pour l’Indonésie mais aussi pour la France.

Située sur l’île d’Halmahera, dans la province indonésienne des Moluques du Nord, la concession minière de Weda Bay est devenue en quelques années l’un des projets les plus emblématiques de l’industrie mondiale du nickel.

Portée par un partenariat entre le groupe français Eramet et le géant chinois Tsingshan Holding Group, cette exploitation illustre les ambitions industrielles de l’Indonésie dans la chaîne de valeur des batteries pour véhicules électriques.

Une mine de classe mondiale

Le projet Weda Bay Nickel (WBN) repose sur un gisement latéritique découvert en 1996, estimé à environ 344 millions de tonnes de minerai, avec une teneur moyenne de 1,48 % en nickel et 0,07 % en cobalt.

L’exploitation à ciel ouvert a débuté en 2019, et la première coulée de ferronickel a eu lieu en avril 2020. Aujourd’hui, Weda Bay est considérée comme la plus grande mine de nickel au monde, avec une production record de 36,3 millions de tonnes humides en 2023, représentant environ 17 % de la production mondiale.

Le complexe industriel intégré, connu sous le nom d’Indonesia Weda Bay Industrial Park (IWIP), comprend des installations de traitement pyrométallurgique et des lignes de production de ferronickel. Ce parc industriel emploie plus de 16 000 travailleurs indonésiens, dont 68 % originaires des Moluques du Nord.

Attaques environnementales

Comme tous les projets industriels d’envergure, la mine subit les attaques informationnelles d’associations et de mouvements écologistes. Attaque sur la déforestation, sur la pollution, sur le déplacement des populations tribales qui habitent dans cette partie de l’île, de nombreux arguments sont avancés pour affaiblir la production industrielle. La mine est en effet située sur une partie du territoire du peuple Hongana, où 500 membres vivent de façon isolée.

Si les sujets environnementaux sont de vrais enjeux, ils sont pris en compte par les entreprises qui interviennent dans cette mine, dont Eramet. Ici, se met en place comme dans beaucoup d’autres lieux industriels, une guerre économique qui repose sur le combat cognitif et la lutte des images.

Retrait de partenaires occidentaux

En juin 2024, Eramet et le groupe allemand BASF ont annoncé l’abandon d’un projet commun de raffinerie de nickel et de cobalt, d’un montant de 2,6 milliards de dollars, initialement prévu à Weda Bay. Cette décision est la conséquence des pressions d’ONG et à la lutte informationnelle menée contre ses entreprises. Le marché devrait être récupéré par des entreprises chinoises.

L’Indonésie perçoit l’action des ONG occidentales comme des ingérences sur son territoire et des atteintes à sa souveraineté. Pour la France, les enjeux sont doubles. Weda Bay fragilise la Nouvelle-Calédonie, dont l’économie repose sur une industrie du nickel vieillissante et de moins en moins productive. Les attaques informationnelles contre Eramet pénalisent les entreprises françaises et menacent la conquête de marché dans l’espace mondial.

Otages : et si l’on parlait du Qatar

Otages : et si l’on parlait du Qatar

Jean Daspry* – CF2R – TRIBUNE LIBRE N°188 / juin 2025

*Pseudonyme d’un haut fonctionnaire français, docteur en sciences politiques

 

« Dieu se rit des hommes qui déplorent les effets dont ils chérissent les causes » (Bossuet). Et, c’est malheureusement le cas de la diplomatie du « en même temps » chère à Emmanuel Macron ! Un jour, il approuve ; le lendemain il condamne. Un jour, il met en avant un principe pour expliquer sa position à l’instant « T » ; le lendemain, il sort de son chapeau un principe opposé pour justifier son évolution à l’instant « T+1 ». Nous avons un exemple éclairant de cette diplomatie du zigzag avec sa politique au Proche et au Moyen-Orient. Le vocabulaire qu’il emploie pour caractériser certains protagonistes du conflit israélo-palestinien est aussi inapproprié que contre-productif. L’on souhaiterait comprendre pour y voir un peu plus clair. Sévère avec l’un, complaisant avec l’autre. Notre idylle avec l’émir du Qatar est aussi touchante que problématique. C’est pourquoi, nous serions bien inspirés d’enseigner sur les bancs des écoles diplomatiques et autres instituts formant les grands serviteurs de la République la faiblesse de la diplomatie française comparée à la force de la diplomatie à la qatarie. Elle pourrait se conceptualiser autour de trois grands axes : influence, compromission et « complicité », concept pris au plus mauvais sens du terme.

Le Qatar ou la diplomatie de l’influence

Certains États se targuent de pratiquer une « diplomatie d’influence » sans en avoir les moyens. D’autres États ne se targuent de rien, mais savent et peuvent y mettre les moyens pour parvenir à leurs fins avouables ou pas. Leur influence est diffuse mais efficace.

Dans cette catégorie, nous rangeons le Qatar, sorte de Janus bifrons. Grâce à ses énormes ressources financières, il peut tout acheter – au sens propre et figuré du terme – biens matériels de grand luxe et êtres humains cupides. En contrepartie, l’émir Tamim ben Hamad Al Thani peut s’acheter une bonne conduite à vil prix. Oubliées ses turpitudes intérieures (traitements dégradants et inhumains de certains et certaines) et extérieures (appui aux mouvements fréristes tels que le Hamas qui pratique avec brio la « diplomatie des otages »).

La victoire du PSG en Ligue des champions de football, le 31 mai 2025 à Munich par un score sans appel, représente un aboutissement pour les Qataris. Une question mérite dès lors d’être posée. Qui a gagné ? Le PSG, sans doute, c’est à dire le Qatar, mais la France, elle, a encore perdu. Le PSG, par ses propriétaires, est un élément de Soft Power (diplomatie de l’influence) islamique et identitaire. Des hordes de supporters drogués à l’élixir « Football » arpentent les rues de la capitale, soumise à la loi des casseurs en ayant revêtu le maillot de leur équipe fétiche. À quoi ressemble-t-il ? Un maillot bleu orné d’un modeste écusson du PSG au niveau du cœur et barré de Qatar Airways. Tout un symbole de la soumission d’un Paris humilié, outragé… mais libéré par une victoire sans appel contre l’équipe italienne ! Qui plus est, certains de ces tristes sires n’étaient pas venus pour célébrer le succès de l’équipe parisienne, mais pour dégrader, casser et, pour les mieux inspirés, crier « Free Palestine from the river to the sea ». D’autres préféraient s’en prendre au Mémorial de l’holocauste et autres lieux de culte juifs. On ne saurait être plus clair. La politique n’est jamais très éloignée du sport.

Mais, le président de la République, Emmanuel Macron salue à sa manière cette victoire par un superbe « Champion mon frère ! », idiome issu du rap et des banlieues. L’Émirat ne pouvait rêver mieux. Emmanuel Macron ne se transforme-t-il pas en meilleur ambassadeur du Qatar et de son idéologie mortifère qu’il distille déjà à travers une diplomatie de la compromission ?

Le Qatar ou la diplomatie de la compromission

Reconnaissons-le ! Le prince du Qatar est grand seigneur. Il n’est pas avare de ses deniers, de ses compliments à l’orientale. Rien n’est trop beau pour attirer dans ses rets la valetaille politique, économique, culturelle, médiatique hexagonale et européenne.

Nombreux sont, en effet, les hommes politiques, de droite comme de gauche, qui apprécient depuis belle lurette, ses largesses sans limite. Un ancien Premier ministre, au verbe haut et apprécié par ses discours enflammés à New York devant le machin, ne jure que par la magnificence et la munificence de l’Émirat des mille et une nuits. Il en est le meilleur VIP. Une distinguée ministre de Jupiter n’hésite pas à faire souvent le voyage au pays d’Aladin. Elle apprécie les belles robes, les beaux bijoux et autres gâteries. Peut-on le lui reprocher ? Toutes ces éminentes personnalités oublient à l’occasion la notion de conflits d’intérêts, de compromission, leur signification et les risques qu’ils encourent sur le plan pénal à pratiquer la diplomatie des petits arrangements entre amis. Ils préfèrent voyager aux frais de la princesse.

Lassé des critiques de certains mécréants « gwers » qu’il jugeait infondées, un ancien ambassadeur du Qatar à Paris se fait un devoir de mettre les choses au point. Il leur rappelle tout bonnement qu’il n’est pas poli de cracher dans la main de celui qui vous nourrit. Et pour étayer son propos, il dresse une liste des « collabos » qui viennent régulièrement dans les locaux de sa mission diplomatique pour y recevoir quelques espèces sonnantes et trébuchantes. Pour enfoncer le clou, s’il en était encore besoin, il s’autorise à jouer les persiffleurs. Qu’avons-nous appris de sa bouche suave ? Que certains lui font remarquer que le contenu de l’enveloppe n’est pas suffisamment garni ? Qu’ils attendent des invitations à des voyages tous frais payés. On reste coi aux pays des droits de l’homme, de l’État de droit, de la démocratie, des valeurs et autres fadaises de cet acabit. Dans une démocratie digne de ce nom, après vérification et enquête, tous ces personnages auraient dû être déchargés de leur mandat électif et, pourquoi pas, condamnés à des peines infâmantes (emprisonnement, qui sait ?). Mais, ne rêvons pas. Notre Douce France est loin d’être exempte de tout reproche.

La situation n’est pas meilleure au plan de la très honnête et très vertueuse Union européenne, si prompte à faire la leçon de morale aux républiques bananières et autres dictatures corrompues. Le Qatargate du Parlement européen n’est que la partie émergée de l’iceberg du système de clientélisme politique et de lobbying bâti par le Qatar depuis trente ans. On ne sait pour quelles raisons crédibles les poursuites judiciaires traînent. Des personnalités politiques françaises sont concernées, sans parler du monde des affaires si complaisant avec la finance islamique, les valises de billets et autres cadeaux qataris. Plus c’est gros, plus çà passe. Tout le monde il est beau, tout le monde il est gentil dans l’Orient compliqué.

À Paris, le prince est reçu comme un roi. Il est comme chez lui. On lui déroule le tapis rouge… de la couleur du sang qu’il a sur les mains. Oubliés les otages détenus à Gaza par le Hamas dans des conditions sordides qui n’émeuvent pratiquement personne. Ils l’ont bien cherché, murmure-t-on, dans les cénacles de la bien-pensance. Ne devenons-nous pas, sans le vouloir, les idiots utiles, les complices de cette diplomatie de la « complicité » ?

Le Qatar ou la diplomatie de la « complicité »

Ce n’est un secret pour personne, les principaux dirigeants du Hamas – organisation considérée comme terroriste au sens juridique du terme – sont hébergés et financés par le Qatar. Il s’agit d’une réalité objective, un fait incontestable. De deux choses l’une :

soit, nous considérons que la prise d’otages est un crime de guerre, un crime contre l’humanité et nous en tirons toutes les conséquences qui s’imposent. Dès lors, il nous revient, seuls ou collectivement avec les États membres de l’Union européenne, de sanctionner durement un État qui est complice des preneurs d’otages et financier d’une organisation terroriste. Nous pourrions également saisir la Cour internationale de justice (CIJ) et/ou la Cour pénale internationale (CPI) pour qu’elles délivrent des mandats d’arrêt contre la cohorte princière qatarie. Nous le faisons si bien avec le Premier ministre israélien et le président russe. Nous pourrions également geler les avoirs du Qatar en France. Cela permettrait à François Bayrou de combler son déficit budgétaire de 40 milliards d’euros. Nous apparaitrions en conformité avec notre statut de patrie auto-proclamée des droits de l’homme et avec toutes nos péroraisons martiales sur le sujet. Pareille démarche suppose courage, cohérence et constance dans l’action diplomatique de moyen et long terme d’Emmanuel Macron dont la statue au Musée Grévin vient d’être dérobée ;

soit, nous considérons, au terme d’un raisonnement de pure Realpolitik, que l’argent n’a pas d’odeur et que nous en manquons. Au passage, le PSG est propulsé au firmament de la galaxie footballistique européenne. La victoire est belle. Ne boudons pas notre plaisir ! Elle a un effet cathartique. De plus, le Qatar doit alors être considéré comme un allié fidèle, un partenaire stratégique, un amiable compositeur sur le dossier de Gaza et des otages et « tout va très bien madame la marquise ». Pourquoi changer une équipe qui gagne ? Peu nous chaut que cet agréable pays soit le sponsor des Frères musulmans et de leur entrisme sur notre sol. Au diable, les avertissements inquiétants lancés sur le sujet par la chercheuse Florence Bergeaud-Blackler et le récent rapport adressé au ministre de l’Intérieur. Peu importe que, sans la manne financière qatari et sa stratégie de conquête depuis trois décennies, les structures françaises de l’islam politique n’auraient pas la force acquise aujourd’hui, ni cette emprise sur nos compatriotes musulmans.

Pour justifier la seconde branche de l’alternative, Barbara Lefebvre pose de nouveau le problème en termes clairs lorsqu’elle écrit : « En Occident et dans le monde musulman, le Qatar diffuse l’islam frériste via son business, ses médias, sa diplomatie. Un fonds souverain de 450 milliards de dollars, 2,7 millions d’habitants dont seulement 300 000 nationaux, la deuxième puissance gazière mondiale (…). Avant les massacres du 7 octobre, le Qatar était isolé par les chancelleries sunnites, en particulier l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis. Après le 7 octobre et les 250 otages retenus par les djihadistes du Hamas, les Qataris sont revenus au premier plan notamment en faisant habilement croire aux Occidentaux (l’administration Biden et l’Union Européenne) qu’ils pourraient être d’efficaces médiateurs ». Tout est dit et bien dit. Voulons-nous être dupes encore longtemps ou bien sommes-nous prêts à dessiller les yeux pour nous confronter au réel sur le plan international et intérieur ?

Le prix de nos mensonges

« On ne sort de l’ambiguïté qu’à son détriment » (Cardinal de Retz). Nous touchons ainsi aux limites de la diplomatie du en même temps. Mais les génies, qui entourent et conseillent Jupiter 1er, nous expliquent doctement que leur gourou excelle dans la diplomatie de l’ambigüité constructive.  Comme le relève si justement, Barbara Lefebvre précitée : « Quel dirigeant politique, quel ministre, quel candidat à une élection locale ou nationale, quel journaliste de sport, quel chef d’entreprise du CAC 40, aura le courage de dénoncer le double jeu du Qatar en France ? Le Qatar est un acteur central de l’islam politique français. Sans lui, jamais les Frères n’auraient pu infiltrer nos institutions, nos entreprises, nos médias, notre espace public. Le pragmatisme diplomatique et politique, les « bons deals », les victoires rafraichissantes du PSG, tout cela a ses limites quand l’ordre public et la sécurité nationale sont en jeu ». Quand accepterons-nous de livrer à un authentique et objectif exercice d’introspection de notre relation toxique avec cet Émirat ? En dernière analyse, la problématique est d’une simplicité biblique. Elle peut se résumer en quelques mots : otages : et si l’on parlait du Qatar ?

Sociétés militaires privées : Paris s’inquiète de l’action des mercenaires français en Afrique

Sociétés militaires privées : Paris s’inquiète de l’action des mercenaires français en Afrique

L’engagement croissant d’ex-militaires français par des sociétés militaires privées en Afrique inquiète Paris. Une présence discrète mais lourde de conséquences diplomatiques et sécuritaires.

par Jean-Baptiste Leroux – armees.com – Publié le
L'engagement croissant d'ex-militaires français par des sociétés militaires privées en Afrique inquiète Paris. Une présence discrète mais lourde de conséquences diplomatiques et sécuritaires. Pixabay
L’engagement croissant d’ex-militaires français par des sociétés militaires privées en Afrique inquiète Paris. Une présence discrète mais lourde de conséquences diplomatiques et sécuritaires. Pixabay | Armees.com

Alors que la France a réduit drastiquement sa présence militaire officielle en Afrique, nombre de ses anciens soldats sont désormais employés par des sociétés militaires privées anglo-saxonnes. Une situation embarrassante pour Paris, soucieuse de se faire oublier sur le continent, mais confrontée à une réalité qui brouille son message et ravive de vieilles accusations d’ingérence.

En Afrique, une influence persistante malgré le retrait officiel

La France s’est volontairement retirée du devant de la scène militaire en Afrique, après quelques émois diplomatiques. Fini le temps des grandes bases et des opérations comme Barkhane. Paris mise désormais sur la discrétion, afin d’échapper aux accusations de néocolonialisme et aux campagnes de désinformation, en particulier celles orchestrées par la Russie et ses alliés.

Mais ce retrait a laissé un vide sécuritaire que d’autres acteurs se sont empressés de combler. Des sociétés militaires privées (SMP), surtout anglo-saxonnes, ont pris la relève, offrant leurs services aux gouvernements africains et aux entreprises. Parmi leurs employés : un nombre croissant d’ex-soldats français, appréciés pour leur expérience en terrain africain et leur maîtrise du français, atout stratégique dans la région.

Un enjeu diplomatique et sécuritaire particulièrement sensible

La présence d’anciens militaires français armés, bien que désormais civils, soulève des questions délicates. Pour beaucoup d’observateurs, ces « contractors » peuvent être perçus comme des émissaires officieux de la France, alimentant des soupçons d’ingérence. Des rumeurs persistantes évoquent même des bases secrètes ou des opérations clandestines, que les autorités françaises s’efforcent de démentir.

À Paris, cette situation est source d’inquiétude. D’autant que la législation française interdit formellement l’activité de mercenariat. La France ne dispose pas de sociétés militaires privées autorisées à combattre ou à employer des armes, contrairement aux modèles russes ou anglo-saxons. Résultat : Paris n’a aucun contrôle sur ces anciens militaires opérant à l’étranger, alors même qu’ils continuent d’incarner l’image de la puissance française.

Vers un cadre légal pour les contractors français ?

Face à cette réalité, certains militaires français plaident pour la création d’un cadre légal permettant à des entreprises françaises de sécurité d’opérer officiellement à l’étranger. Ce serait un moyen de reprendre la main sur une situation aujourd’hui incontrôlable. Mais ce débat reste sensible, tant le mot « mercenaire » est tabou dans la culture militaire française.

En attendant, des sociétés comme Bancroft, Amentum ou G4S recrutent d’anciens légionnaires, commandos ou techniciens français. Ils sont présents au Bénin, au Mali, en Côte d’Ivoire ou encore en Centrafrique. Leur engagement, bien qu’individuel, a des répercussions collectives et politiques. In fine, la France se retrouve dans une posture ambivalente, tiraillée entre son retrait officiel et l’empreinte laissée par ses vétérans.

Le Royaume-Uni a l’intention de se doter de douze nouveaux sous-marins nucléaires d’attaque

Le Royaume-Uni a l’intention de se doter de douze nouveaux sous-marins nucléaires d’attaque


En juillet, fraîchement nommé à la tête du gouvernement britannique, Keir Starmer confia à George Robertson, secrétaire général de l’Otan entre 1999 et 2003, le soin de diriger une commission chargée d’élaborer une nouvelle revue stratégique de défense [SDR].

Moins d’un an après, celle-ci vient de livrer soixante-deux recommandations, lesquelles visent à renforcer la préparation au combat des forces britanniques.

« Lorsque nous sommes directement menacés par des États dotés de forces militaires avancées, le moyen le plus efficace de les dissuader est d’être prêt. Et, franchement, il s’agit de leur montrer que nous sommes prêts à imposer la paix par la force », a ainsi résumé M. Starmer, ce 2 juin. Il s’agit également de « renforcer la sécurité de la zone euro-atlantique ».

Plus tôt, le secrétaire britannique à la Défense, John Healey, avait expliqué que cette SDR consisterait à « envoyer un message à la Russie », qui incarne un danger « immédiat et urgent ». Mais pas seulement car la Chine y est décrite comme représentant un « défi complexe et persistant » pour les intérêts du Royaume-Uni tandis que l’Iran et la Corée du Nord sont perçus comme des « perturbateurs régionaux potentiellement hostiles ».

Cela étant, quelques recommandations de la SDR ont fait l’objet d’une communication ces derniers jours. Ainsi, le ministère britannique de la Défense [MoD] a déjà annoncé un investissement de 1,5 milliard de livres sterling pour ouvrir six usines dédiées à la production de munitions ainsi que la création, pour 1 milliard de livres sterling, d’un « commandement cybernétique et électromagnétique » [CyberEM] censé mettre en œuvre des « capacités numériques pionnières ».

La SDR insiste sur la nécessité de renforcer les capacités de frappe dans la profondeur, avec l’acquisition de 7 000 armes de longue portée, dont des missiles. D’ailleurs, un partenariat a déjà été scellé à cette fin avec l’Allemagne, l’objectif étant de développer un missile d’une portée de 2 000 km.

Dans le même temps, la dissuasion nucléaire britannique sera renforcée. Selon le Sunday Times, il est question d’acquérir des chasseurs-bombardiers F-35A au profit de la Royal Air Force, cette dernière devant renouer avec la capacité de mener des raids nucléaires, mission qu’elle n’assure plus depuis 1998. Or, cet appareil est certifié pour emporter l’arme nucléaire tactique B61-12 de conception américaine. Reste à voir comment cette mesure sera mise en œuvre.

En outre, le MoD a évoqué un investissement de 15 milliards de livres sterling pour financer « le programme souverain d’ogives nucléaires du Royaume-Uni pour les générations à venir ». Évidemment, la construction de quatre sous-marins nucléaires lanceurs d’engins [SNLE] de type Dreadnought sera confortée.

Mais plus généralement, la Royal Navy devrait être la principale bénéficiaire de cette SDR, dans la mesure où cette dernière prévoit de la doter de vingt-cinq navires de premier rang, alors qu’elle n’en dispose que de quatorze actuellement, après le retrait prématuré de cinq frégates de Type 23 [classe Duke] entre 2021 et 2025. Le détail de ce renforcement n’a pas été précisé.

Cela étant, la mesure sans doute la plus forte est celle qui vise à faire passer de sept à douze le nombre de sous-marins nucléaires d’attaque [SNA] mis en œuvre par la Royal Navy. Et cela en misant sur le pacte AUKUS [Australie, Royaume-Uni et États-Unis] car il s’agira de remplacer les actuels Astute par ceux de la future classe SSN-AUKUS, qui, pour le moment, n’existe que sur le papier.

Dans les faits, il s’agit de doubler la flotte de SNA britannique étant donné que, actuellement, seulement cinq sous-marin de la classe Astute sont censés être opérationnels : le sixième, le HMS Agamemnon, a été lancé en octobre tandis que le septième, le HMS Achilles [ex-HMS Agincourt] est encore en construction. En outre, le HMS Triumph, dernier SNA de la classe Trafalgar, est en passe d’être désarmé.

En août dernier, il a été rapporté qu’aucun des SNA de type Astute n’était en mesure de prendre la mer, notamment à cause de difficultés récurrentes pour assurer leur maintien en condition opérationnelle, faute de disposer de suffisamment de cales sèches.

Les nouveaux sous-marins SSN-AUKUS ne seront admis au service actif qu’à partir de la prochaine décennie. Selon le MoD, il est question de construire une unité tous les dix-huit mois, ce qui semble très ambitieux quand on sait que le HMS Astute, premier de la série, a été déclaré opérationnel il y a près de seize ans… et que le dernier n’a pas encore quitté son chantier naval.

« Afin de répondre aux exigences de ce programme élargi, le gouvernement travaille en étroite collaboration avec ses partenaires industriels pour élargir rapidement les possibilités de formation et de développement, avec l’objectif de doubler le nombre d’apprentis et de diplômés dans les secteurs de la défense et du nucléaire civil. Cela se traduira par la création de 30 000 postes d’apprentis et de 14 000 emplois au cours des dix prochaines années », fait valoir le MoD.

Mais construire des SNA est une chose : encore faut-il qu’ils aient un équipage. Or, la Royal Navy peine à recruter des sous-mariniers et, plus encore, à les fidéliser.

Sur ce point, la SDR n’a pas oublié la nécessité d’améliorer la condition militaire : celle-ci devrait bénéficier d’un bonus de 1,5 milliard de livres sterling dans les prochaines années. Ce qui peut sembler relativement modeste au regard des enjeux en matière de recrutement et de fidélisation.

Reste à voir si l’ambition affichée par le gouvernement britannique pourra être financée. A priori, il n’est pas question de porter les dépenses militaires à 5 % du PIB, comme l’envisage l’Otan, M. Healey s’étant contenté d’affirmer qu’il n’avait « aucun doute » sur le fait que l’objectif des 3 % du PIB serait atteint… d’ici 2034.

Photo : SSN-AUKUS