L’externalisation des fonctions de soutien de l’armée : une tendance qui questionne sur notre indépendance stratégique à long terme

L’externalisation des fonctions de soutien de l’armée : une tendance qui questionne sur notre indépendance stratégique à long terme


Les entreprises de service de sécurité et de défense (ESSD), auparavant nommées sociétés militaires privées (SMP), connaissent une importance croissante dans la conduite des opérations militaires, notamment dans les fonctions de soutien et de logistique. Cette externalisation touche des fonctions de plus en plus nombreuses et stratégiques pour faire face à la pression budgétaire et aux crises qui s’enchaînent.

L’intensification de la coopération public-privé, dans le secteur de la défense, accélère la mutation dans les armées, et cela, depuis plusieurs décennies. La volonté d’une chaîne logistique souveraine, et potentiellement publique, se heurte à trois problèmes majeurs : la baisse des budgets de défense depuis la fin de la guerre froide, le déficit capacitaire de l’armée, dans le domaine logistique notamment, ainsi qu’une logique économique avec la concentration des moyens sur les fonctions jugées les plus stratégiques et la création de champions nationaux privés.

 

L’accélération de la baisse du budget de défense depuis la fin de la guerre froide

Avec l’effondrement du bloc communiste en 1991, les armées occidentales perdent leur adversaire idéologique et la principale menace d’une réelle confrontation de haute intensité à la fin du vingtième siècle. Ce choc exogène, couplé à la tendance néo-libérale anglo-saxonne de réduction du rôle de l’État et de ses dépenses au profit du secteur privé, accentue la diminution du budget de la défense en occident. En France, à partir de 1981, la chute de la part du budget de l’État consacrée à la défense est constante, particulièrement après l’échec du plan Mauroy (1981). Ce plan de relance, d’inspiration keynésienne, est initié par le gouvernement Mauroy à la suite de la victoire de François Mitterrand aux élections présidentielles avec pour effet de vider les caisses de l’État, par ailleurs déjà durement affectées par les chocs pétroliers (1973-1979). L’État français cherche alors à faire des économies et compte encaisser les dividendes de la paix en réduisant la part de la défense dans le budget de l’État tout en profitant de l’augmentation du commerce mondiale. Depuis 1980, cette diminution atteint près de cinq points de pourcentage du PIB, le budget de la défense n’est vu par les politiciens que comme une variable d’ajustement du budget général.

En outre, la politisation de l’allocation du budget de la défense par une opposition des dépenses militaires (warfare) avec les dépenses sociales (welfare) s’est amplifiée depuis la fin de la guerre froide. Ce dilemme, nommé « guns vs. butter » dans la littérature anglo-saxonne, n’est pas une simple question de clivage idéologique. En France, sur la période 1981-2010, les différents gouvernements ont des chiffres sensiblement identiques avec un taux de variation annuel moyen des dépenses militaires de +0,12 % pour les gouvernements de droite et de +0,17 % pour ceux de gauche. La réelle différence se situe sur les divergences stratégiques et la manière dont cela se traduit dans les arbitrages budgétaires, particulièrement en période d’austérité et d’assèchement des dépenses publiques.

Source : Dépenses militaires françaises, allemandes et britanniques de 1981 à 2021 en pourcentage du PIB – Banque mondiale avec les données du SIPRI. (Graphique 1)

 

Il convient de noter que cette baisse du budget s’est poursuivie malgré l’alternance républicaine avec une réduction régulière des dépenses militaires (voir Graphique 1). La théorie de Francis Fukuyama, d’une victoire absolue et définitive de la démocratie libérale sur les autres modes de gouvernance, influence fortement la pensée occidentale dès 1989 avec la publication de son célèbre article La Fin de l’Histoire ?. Dans son cahier de politique économique n°8 (1994), l’OCDE voit la fin de la guerre froide comme une opportunité pour désarmer le monde et propose de conditionner les aides économiques aux pays en développement à des mesures de réduction de leur budget de la défense, dans le prolongement théorique du dilemme « guns vs. butter ». Ce sentiment d’une victoire totale, couplé à la sécurité apportée par le parapluie américain et la dissuasion nucléaire, précipite une chute historique des budgets alloués aux armées en Europe. En France, la hausse du budget général est corrélée à une baisse des dépenses militaires, tant en volume qu’en valeur (voir Graphique 2). Pour des raisons d’arbitrage, la priorité française n’est donc plus le maintien et le développement d’une armée taillée pour les conflits de haute-intensité.

Source : Mise en perspective du budget général avec celui de la défense – « Défense : exposé d’ensemble et dépenses en capital » par le rapporteur spécial Maurice Blin pour le Sénat en novembre 2001. (Graphique 2)

 

Le déficit capacitaire de l’armée : une conséquence du manque de moyens et une mise en danger de son indépendance stratégique à long terme

La majorité des armées européennes a été préparée pour mener des opérations de faible ou moyenne intensité. Cela s’explique par une double tendance : un contexte de rareté budgétaire après la guerre froide, suivi de nouvelles coupes budgétaires après la crise des subprimes, ainsi que l’usage de l’armée comme force de projection plutôt que comme force allouée à la défense nationale. Cette double tendance pousse les États européens à des réductions majeures au sein des armées tant au niveau des stocks, des équipements que du personnel (Graphique 3).

Source : Effectifs des forces armées françaises sur la période 2006-2018 en équivalent temps complet – Assemblée nationale – Rapport N° 273 sur PLF 2018 – Annexe 14 Budget opérationnel de la défense 2017. (Graphique 3)

 

Dans le cadre d’une armée moderne, il apparaît comme obligatoire de recourir à une part croissante d’externalisation pour de multiples raisons telles que la réduction des budgets ou encore les efforts de modernisation. La réponse à la question de l’externalisation ne se résume plus à une opposition entre libéraux et étatistes, mais à un cas classique de la théorie des firmes : la théorie des coûts de transactions. Cette théorie d’Oliver Williamson que l’on peut vulgariser, dans notre cas, comme le dilemme entre internalisation et externalisation, lui a valu le prix Nobel d’économie en 2009. La priorité doit, alors, être la mise en place d’une stratégie à long terme avec comme effet final recherché l’indépendance stratégique.

Il existe un écart entre les ambitions affichées et les moyens mis à disposition des armées, ce qui se manifeste par des lacunes capacitaires persistantes. Cette impasse budgétaire se traduit par une perte à long terme de certaines capacités, jugées moins stratégiques. La privatisation de la restauration est un exemple éloquent, cette fonction jugée non stratégique est vue comme un moyen d’optimiser l’allocation des budgets alloués à la défense. En France, depuis au moins deux décennies, la restauration est progressivement sous-traitée. En 2015, la Cour des Comptes enjoint l’armée de faire passer le prix moyen d’un repas de 15,6 à 10 euros l’ambition étant une économie de 200 millions d’euros par an. La privatisation semble être la solution idoine, sachant que dans ce même rapport, la Cour des Comptes prête une productivité plus de deux fois supérieure aux agents externes pour des salaires moindres par rapport aux salariés du ministère des Armées. Par ailleurs, l’armée française n’est pas la seule dans cette situation, au contraire, les anglo-saxons sous-traitent en partie auprès des mêmes prestataires. Cependant, si des entreprises françaises, comme Sodexo, s’exportent bien avec des contrats estimés à plusieurs centaines de millions de dollars avec l’US Army, les marchés logistiques sur les théâtres extérieurs font, eux, l’objet d’un protectionnisme accru de la part de nos partenaires. Ainsi, dès juillet 2009, un rapport d’information remis à l’Assemblée Nationale s’alarme de cette situation, et appelle à une montée en puissance des acteurs nationaux sur ces théâtres d’intervention face aux acteurs privés anglo-saxons, dans une logique tant capacitaire qu’économique.

Par ailleurs, certaines fonctions de soutien plus stratégiques sont également touchées par l’externalisation. Le maintien en condition opérationnelle (MCO) des hélicoptères de l’armée de terre française ainsi que de la formation des pilotes est en partie sous-traitée, notamment auprès d’Helidax, filiale du groupe DCI(détenu par l’État français à hauteur de 55,5 %). L’un des objectifs affichés est de faire remonter rapidement le taux de disponibilité des aéronefs qui stagne autour de 44 % entre 2012 et 2017, la MCO n’arrive plus à garantir aux armées une capacité de maintien de ses moyens sur la durée. Le contrat passé en 2019 avec Helidax est un succès de coopération public-privé en France avec le doublement du nombre d’heures de vol entre 2017 et 2020 pour arriver à 5 000, couplé à la chute drastique du coût d’une heure de vol de 3 500 à 1 800 euros.

Pour lutter contre ce terrible constat d’insuffisance de l’appareil public, l’externalisation s’intensifie suivant le modèle anglo-saxon de la performance-based logistics (PBL). Les contrats PBL sont des partenariats public-privé reposant sur des indices de performance mesurables, comme la hausse de la disponibilité pour la MCO. Par ailleurs, le second volet mis en avant est la maîtrise des coûts, financé notamment par le décroissement des effectifs militaires et de ses implications à long terme (formations, pensions, etc.). Ces contrats posent également des problématiques d’intelligence économique et de souveraineté de la chaîne logistique, comme la privatisation de certaines compétences et de la capacité à les mettre en œuvre, ou encore la possible dépendance à des acteurs non-nationaux.

Un rapport du Sénat de 2008, traitant de la structure intégrée de maintien en condition opérationnelle des matériels aéronautiques du ministère de la Défense (SIMMAD) souligne la nécessité de maintenir un certain niveau de compétence au sein du ministère des Armées. Ce même constat est remis à l’ordre du jour par le général Burkhard en 2020. Il alerte à propos de l’externalisation intensive de la MCO car les résultats de la disponibilité des véhicules de l’armée de Terre n’atteignent pas les objectifs fixés avec, entre autre, une perte de 20 points de pourcentage de disponibilité pour les véhicules blindés de combat d’infanterie (VBCI) entre 2016 et 2020, passant ainsi à 11 points sous la cible. À ce titre, le cas du Royaume-Uni est assez évocateur des répercussions d’une externalisation excessive de son armée. La privatisation du MCO des aéronefs y est tellement importante qu’à ce stade, elle est difficilement réversible. Cette perte d’indépendance stratégique est justifiée par un avantage coût à long terme qui reste cependant à prouver puisque les exemples américain, britannique et allemand sont peu concluants à cet égard. En France, si l’externalisation est moins importante, elle occupe tout de même une part croissante dans les budgets : 53 millions en 2017 ; 84 millions en 2018 ; et 110 millions en 2021 (hors transport). Inspirée par « nos mentors anglo-saxons » qui l’ont massivement mis en œuvre depuis les guerres d’Irak et d’Afghanistan, cette tendance produit, sous couvert de modernisation et de rationalisation des effectifs militaires, un certain nombre de retours en arrière dans l’efficacité des fonctions de soutien et une perte de souveraineté nationale avec une autonomie opérationnelle déclinante.

 

Le facteur coût et la rapidité opérationnelle favorisés au détriment de l’indépendance stratégique à long terme dans une période d’instabilité mondiale grandissante

Dans un contexte d’instabilité mondiale et de préparation à la haute intensité, les États membres de l’OTAN se doivent de multiplier leurs capacités militaires malgré les contraintes budgétaires inhérentes aux crises successives qui ont frappé le monde (Covid-19) et l’Europe plus spécifiquement (énergie). Le recours croissant à des opérateurs privés est une suite logique pour parvenir à la hausse de ces capacités à un coût moindre avec les doctrines otanniennes actuelles. Du fait de ces problématiques, les opérations extérieures (OPEX) sont restées dans un premier temps la chasse gardée du secteur public, mais il y a une externalisation croissante des fonctions de soutien en OPEX, avec le recours progressif à davantage de Contractors Support to Operations (CSO). La doctrine américaine quant à l’utilisation de CSO est claire : tous les théâtres d’opérations majeurs dépendent de leur présence. En parallèle, l’Europe met en place une plateforme européenne des CSO qui devrait se traduire par la fluidification des interactions entre les acteurs économiques privés et les États membres. Cela met en lumière la nécessité d’une montée en compétence, et de la recherche d’une taille critique, de la part des acteurs français pour gagner des contrats à échelle européenne, voire otannienne.

En effet, pour la France également, le recours à l’externalisation pour les fonctions de soutien est essentiel lors des OPEX. Dans le cadre de l’opération Barkhane, l’externalisation représente la moitié du budget, notamment parce que les capacités de l’armée ne suffisent pas en termes d’affrètements intercontinentaux. Sur les 861 millions d’euros dépensés en externalisation sur la période 2014-2017, près de la moitié des fonds (46 %) est utilisée pour les transports intercontinentaux. La doctrine française en la matière tient en cinq points :

  • Maintenir la capacité opérationnelle de l’armée ;

  • Préserver les intérêts du personnel ;

  • Maintenir un milieu concurrentiel sain, notamment avec des PME ;

  • Assurer des gains économiques et budgétaires mesurables à long terme ; et

  • Garantir la sûreté des informations.

Source : Part des différents vecteurs dans le transport stratégique (2016) – Assemblée nationale – Rapport d’information N°4595 relatif au transport stratégique. (Graphique 4)

 

Toutefois, l’armée française a un déficit capacitaire dans plusieurs domaines, particulièrement dans l’affrètement aérien et, par conséquent, une capacité de projection autonome limitée (Graphique 4). De fait, l’externalisation s’impose pour assurer le bon déroulement des opérations et entraîne une application parcellaire de la doctrine française : concurrence et sûreté de l’information remise en question ou encore gains économiques peu évidents. Cela place les armées de l’OTAN dans une situation de dépendance auprès d’acteurs extérieurs (principalement ukrainiens et russes avant l’invasion). Ainsi, lors de crises nécessitant une réaction rapide, l’utilisation de services privés est contrainte et résulte d’un abandon de souveraineté depuis au moins deux décennies. De plus, le recours à l’externalisation n’est pas réversible à court ou moyen terme. Par exemple, dans le cadre des opérations Serval et Barkhane, l’ukrainien Antonov logistics SALIS a été très largement utilisé pour combler les lacunes capacitaires de l’armée française, et non pas pour la recherche d’un avantage-coût comme le stipule la doctrine française. De plus, il est essentiel de souligner la problématique de confidentialité de l’information lorsqu’un acteur économique, de surcroît étranger, gère une partie importante des transports de troupes et de matériels intra-théâtre d’opérations. L’Europe et la France prennent conscience de leurs « dépendances stratégiques » d’après la ministre des Armées. Entre 2012 et 2015, selon les périodes, la France n’a couvert que 7 à 23 % de ses besoins en transport aérien pour ses forces armées par ses capacités propres.

Précurseurs dans les fonctions externalisées, les États-Unis sous-traitent également une partie de leur renseignement extérieur, notamment le renseignement aérien, nommé ISR (Intelligence, Surveillance, and Reconnaissance). En Afrique, l’AFRICOM (U.S. Africa Command) n’atteignant ni ses objectifs en termes de renseignement ni ceux en termes de temps de survol des cibles. Le choix de l’externalisation est entériné, notamment avec l’entreprise américaine MAG Aerospace spécialisée dans l’ISR à l’international, dans des conditions opérationnelles difficiles. Si les résultats de l’externalisation du renseignement sont plus difficiles à évaluer que la MCO, du fait de la nature confidentielle des données, un nouveau contrat signé en 2022 permet de spéculer sur la probable satisfaction de l’US Army. Selon des estimations, 70 % du budget américain en renseignement serait utilisé dans le cadre d’entreprises privées. La diversité des compétences au sein de ces 1900 entreprises est profitable aux États-Unis, mais se pose une fois de plus la question de la dépendance, de la sécurité de l’information et de la frontière acceptable entre servir la nation et servir des intérêts privés. En outre, l’internalisation semble maintenant impossible et les services auraient bien des difficultés à fonctionner sans leurs sous-traitants.

Enfin, pour en revenir à la France, l’externalisation de la défense apparaît comme une tendance lourde et difficilement évitable dans le cadre d’une armée moderne otannienne. 

Il est primordial que la France sorte de certaines dépendances néfastes en créant un cadre juridique et financier propice à l’émergence de champions nationaux. Cela permettra d’appliquer la doctrine française plus efficacement et ainsi de gagner en marge de manœuvre tant opérationnelle que stratégique.

Ivan Richoilley pour le club défense de l’AEGE

Le prochain arrêt technique du porte-avions Charles de Gaulle va durer environ huit mois

Le prochain arrêt technique du porte-avions Charles de Gaulle va durer environ huit mois

 

https://www.opex360.com/2023/03/06/le-prochain-arret-technique-du-porte-avions-charles-de-gaulle-va-durer-environ-huit-mois/


Cela étant, cette mission, qui vient de se terminer dans une relative discrétion, n’aura pas recelé d’énormes surprises, si ce n’est la projection inédite de trois Rafale Marine à Singapour, alors que le GAN naviguait dans le nord de l’océan Indien. Lors de cette mission, appelée « Rastaban », les chasseurs-bombardiers du groupe aérien embarqué ont parcouru 4000 km [avec le soutien d’un avion-ravitailleur A330 MRTT de l’armée de l’Air & de l’Espace] pour participer à des exercices avec la force aérienne singapourienne.

Au total, durant Antarès, le GAN a parcouru 28’000 nautiques et assuré plus de 2000 catapultages d’aéronefs, ce qui lui a permis, souligne la Marine nationale, d’affirmer « partout l’attachement de la France au respect du droit international et à la liberté de navigation en mer », de compléter « l’appréciation autonome de situation des armées dans l’ensemble des zones traversées » et de réaliser de « nombreuses coopérations opérationnelles avec les forces armées de 23 nations ».

La mission Antarès s’est donc terminée après 110 jours de mer… et une participation du GAN à l’exercice interarmées Orion. Dans les semaines à venir, le porte-avions Charles de Gaulle devrait de nouveau être sollicité pour une campagne de qualification à l’appontage de jeunes pilotes. Puis il sera ensuite immobilisé pour un arrêt technique qui s’annonce long… puisqu’il doit durer jusqu’en décembre prochain.

En effet, outre les travaux de routine et le contrôle des chaufferies nucléaires, cet arrêt technique se concentrera sur la coque du navire ainsi que sur ses lignes d’arbres. C’est en effet ce qu’a confié son commandant en second au quotidien Var Matin.

Ces travaux sur les lignes d’arbres seront d’autant plus importants que le porte-avions britanniques HMS Prince of Wales est immobilisé depuis maintenant plusieurs mois en raison justement d’une avarie à ce niveau [une rupture d’un accouplement SKF, ndlr]. Or, par le passé, le Charles de Gaulle a connu une mésaventure du même ordre. En 2009, il était en effet apparu que deux pièces d’accouplement reliant deux des quatre turbines à leurs lignes d’arbres s’étaient révélées anormalement usées.

Par ailleurs, toujours d’après la même source, l’hôpital du porte-avions va être rénové de « A à Z », de même que de nombreux locaux de vie. Enfin, le navire recevra de nouvelles capacités, avec l’installation d’une station navale Syracuse 4 qui, plus puissante et mieux sécurisée, permettra de profiter du débit offert par les satellites de la constellation Syracuse 4 [de l’ordre de 3 à 4 Gb/s, en bande X et en bande Ka, ndlr].

Cette immobilisation du Charles de Gaulle, qui s’annonce longue, malgré le contexte sécuritaire actuel, plaide pour un format à deux porte-avions. Rapporteur pour avis sur les crédits de la Marine nationale, le député Yannick Chenevard l’avait souligné dans son dernier rapport, alors que les études sur le PA NG [porte-avions de nouvelle génération] sont en cours.

« Disposer d’un seul porte-avions signifie, en pratique, ne pouvoir l’utiliser qu’entre 65 et 70 % du temps compte tenu de ses opérations régulières de maintenance [arrêt technique majeur de deux ans, arrêts intermédiaires de six mois…]. […] Un seul porte-avions n’est pas suffisant et notre pays, comme l’Italie ou le Royaume-Uni, se doit de retrouver la capacité qui était la sienne jusqu’au début des années 2000, c’est-à-dire deux porte-avions », fit valoir M. Chenevard.

Et d’ajouter : « La décision de se doter d’un deuxième porte-avions, […] n’est pas urgente, les études du PA-NG commençant à peine. Toutefois, elle ne doit pas non plus être repoussée au-delà de 2027 pour des raisons financières et industrielles. Plus la commande du deuxième PA-NG sera proche de celle du premier, plus il sera possible de faire des économies d’échelle et, par conséquent, de réduire son prix mais également le coût du MCO [maintien en condition opérationnelle] »

Photo : Marine nationale

Un nombre « record » d’A400M « Atlas » ont été mobilisés pour la seconde phase de l’exercice Orion

Un nombre « record » d’A400M « Atlas » ont été mobilisés pour la seconde phase de l’exercice Orion


En janvier, l’US Air Force a organisé une manoeuvre de type « Elephant Walk » sur la base aérienne de Charleston [Caroline du Sud] avec pas moins de 24 avions de transport C-17 Globemaster III. Très prisé outre-Atlantique [et sous d’autres cieux], ce genre d’exercice, qui consiste à faire rouler un grand nombre d’aéronefs en formation rapprochée sur une piste, puis de les faire décoller à intervalle minimum, présente deux intérêts : il permet de vérifier l’état de préparation d’une unité et… de faire une démonstration de force à moindre coût.

Si un tel exercice est donc courant pour l’US Air Force, il est beaucoup plus rare pour l’armée de l’Air & de l’Espace. Cependant, celle-ci s’y est essayé en mai 2021, avec une quinzaine de Mirage 2000D de la 3e Escadre de chasse au roulage sur l’un des pistes de la base aérienne 133 de Nancy-Ochey. Mais Elephant Walk sera-t-il bientôt possible avec les A400M « Atlas », dont 21 exemplaires sont désormais basés à Orléans?

Jusqu’à présent, les problèmes de disponibilité avec cet avion de transport ont longtemps alimenté la chronique. Ainsi, en 2017, seulement trois appareils sur les 13 alors livrés étaient disponibles « en moyenne » [soit un taux de disponibilité de 23%]. Après la réforme du Maintien en condition opérationnelle aéronautique [MCO Aéro], ce taux était monté à 35% [soit 6 avions prêts à voler sur 17 livrés] en 2020. « Nous avons également constaté des pics journaliers de disponibilité à 11 avions prêts pour voler, ce qui était absolument inédit », s’était félicité Florence Parly, alors ministre des Armées.

Quoi qu’il en soit, et alors que les taux de disponibilité technique des équipements sont désormais confidentiels, l’exercice interarmées Orion, dont la seconde phase a été lancée le 26 février, peut être l’occasion de mesurer les progrès en matière de MCO aéro… En effet, nous apprend le quotidien « La République du Centre , «six A400M Atlas ont été simultanément sollicités pour une opération aéroportée [OAP] de grande ampleur, réalisée par la 11e Brigade Parachustiste au profit du pays [fictif] Arnland, déstabilisé par son puissant voisin Mercure.

« Pour simuler le scénario d’un déploiement d’urgence au-delà des frontières françaises, une phase de vol tactique de plus d’une heure à bord de plusieurs A400M et C130J de l’armée de l’Air et l’Espace a été réalisée. […] L’envergure de cette opération est de taille. En moins d’une dizaine de minutes, les aéronefs ont largué plusieurs centaines de parachutistes et du matériel », a résumé l’armée de Terre.

Or, selon La République du Centre, six A400M de la base d’Orléans et un C-130J Hercules de celle d’Évreux, ont pris part à cette OAP.

« La base aérienne 123 a mis en vol six A400M dans un exercice. C’est du jamais vu. On ne l’avait jamais fait », d’autant plus que « pendant ce temps-là, les opérations ne s’arrêtent pas », a en effet commenté le colonel Guillaume Vernet, le commandant de base.

Pour rappel, l’A400M peut larguer, en un seul passage, jusqu’à 116 parachutistes équipés. Soit presque deux fois plus qu’un Transall C-160. Mais d’après un co-pilote d’Atlas, cité par le journal, il y avait « entre 60 et 80 paras » dans chaque appareil. « Des opérations à plusieurs avions, on en a fait quelques-unes. Mais, pas avec autant d’envergure », a-t-il par ailleurs souligné.

Quoi qu’il en soit, le Projet annuel de performances [PAP] relatif au programme 178 « Préparation et emploi des forces » a donné quelques indications sur l’évolution de la disponibilité des A400M.

« Les conséquences du retrait de service des C160 Transall ne sont que partiellement compensées en 2023 par la montée en puissance des A400M », a-t-il prévenu, avant de prévoir « une hausse significative » de la disponibilité des avions de transport [80% en 2025] grâce à la « poursuite de la montée en puissance de la flotte A400M et la finalisation de son soutien ».

Photo : armée de Terre

Nombre, disponibilité et MCO des matériels terrestres: le ministère diffuse des chiffres déjà donnés

Nombre, disponibilité et MCO des matériels terrestres: le ministère diffuse des chiffres déjà donnés

 

Essais de soutien du GRIFFON, réalisés fin 2018 à Nouâtre.Crédits photo ADC Romain B. – SIMMT 2018


par Philippe Chapleau – Ligne de défense – publié le 22 février 2023

https://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/


Quand « Jean-Louis Thiériot interroge le ministre des Armées sur les équipements de l’armée de Terre et lui demande de préciser le nombre de matériels disponibles et le taux de disponibilité au 31 décembre 2020 et au 31 décembre 2021, le coût en crédits de paiement du MCO pour l’année 2021 et l’âge moyen de chacun des équipements suivants : char Leclerc, VHM, dépanneur char Leclerc, EBG, SDPMAC , AMX 10RCR, Jaguar, VBCI, VAB, PVP, VBL, VB2L, VBHP, Buffalo, Griffon, PPT, Maastech, VT4, canons CAESAR, canons AUF1, canons TRF1, VAB observateurs, mortier 120 mm, LRU, Milan, MMP, Eryx, Javelin », on peut s’attendre, comme souvent, à une fin de non recevoir.

On se souviendra que depuis 2020, le ministère des Armées ne publie plus les données relatives à la disponibilité technique [DT] de ses principaux équipements en raison « d’impératifs renforcés de confidentialité ».

Voici toutefois la réponse (bug compris) du ministère au député Thiériot. Cette réponse a été diffusée dans le JO du 21 février:

Deux remarques s’imposent toutefois:
– le ministère précise qu' »en lieu et place des données relatives au taux de disponibilité technique des équipements de l’armée de terre, sont transmis les chiffres relatifs à la disponibilité technique opérationnelle » (on peut aussi voir ce tableau ici sur le site de l’Assemblée (toujours avec le bug sur les colonnes).
– les quelques données sur la dispo figuraient déjà dans le rapport annuel de performances pour 2021, rapport publié en milieu d’année 2022.

 

Contretemps douanier en Slovaquie pour le centre de maintenance d’armes ukrainiennes

Contretemps douanier en Slovaquie pour le centre de maintenance d’armes ukrainiennes


 

Tracasseries navrantes…

par Philippe Chapleau – Linges de défense – publié le 21 février 2023

https://lignesdedefense.blogs.ouest-france.fr/


Le projet de Berlin d’installer en Slovaquie (dans la ville de Košice) un site de réparation et de maintenance des armements utilisés par les Ukrainiens se heurte à des soucis « douaniers » concernant leur réexpédition en Ukraine, a reconnu lundi le gouvernement allemand.

J’ai consacré un post en novembre dernier à ce hub de réparations mis en place par la co-entreprise KNDS (NEXTER et KMW). Il s’agit d’assurer le MCO des véhicules fournis aux Ukrainiens par les deux équipementiers et leurs pays. Les véhicules concernés sont les suivants:
– obusiers automoteur PzH 2000 (155 mm)
– obusiers automoteur CAESAR (155 mm)
– lance-roquettes multiple MARS II (version allemande du M270 MLRS)
– blindés antiaérien courte portée Gepard
– véhicules blindés de transport Dingos.

« Pour l’instant, nous avons encore des aspects douaniers qui doivent être réglés« , a expliqué un porte-parole du ministère allemand de la Défense. « Nous espérons pouvoir renvoyer plus rapidement en Ukraine les choses qui arrivent pour être réparées. Ce n’est pas le cas pour l’instant« .

Berlin travaille sur des « solutions alternatives« , a-t-il ajouté, refusant de donner plus de détails sur les autres options possibles. En Allemagne?

Berlin s’efforce maintenant de mettre en place des installations de maintenance aussi proches que possible de l’Ukraine où les équipements fournis pourront être entretenus et réparés. La position géographique de la Slovaquie, qui a une frontière avec l’Ukraine, en fait un partenaire de choix.

Jusqu’à quatre ans pour régénérer les matériels revenus de Barkhane

Jusqu’à quatre ans pour régénérer les matériels revenus de Barkhane


Après le défi logistique de la réarticulation de Barkhane, celui de la régénération des matériels désengagés du théâtre sahélien. Ceux du volet terrestre de l’opération nécessiteront parfois plus de quatre années de travail avant d’être à nouveau confiés aux régiments.  

D’après le directeur central de la Structure intégrée du maintien en condition opérationnelle des matériels terrestres (SIMMT), le général Christian Jouslin de Noray, plus de 700 matériels ont été identifiés et étaient en cours de tri sur place. À la mi-octobre, 180 avaient été rapatriés en France en priorisant ceux dont les forces ont le plus besoin, expliquait-il au cours d’une audition parlementaire sur le projet de loi de finances pour 2023.

« La réarticulation de l’opération Barkhane devrait redonner des marges de manœuvre à l’armée de Terre en termes de disponibilité des hommes et des matériels. Toutefois, l’état-major de l’armée de Terre anticipe d’importants surcoûts et un cycle de retrait et de régénération des véhicules très long », relève le député Renaissance François Cormier-Bouligeon dans un rapport pour avis sur le PLF 2023.

De fait, ces opérations de régénération pourraient prendre « entre 4 ans et 4 ans et demi », complète le député, chargé d’émettre un avis sur la préparation et l’emploi des forces terrestres. Principale cause avancée, la conjonction entre un terrain sahélien très abrasif, l’intensité et la durée des opérations et l’âge avancé de certaines flottes. La vitesse d’évacuation du théâtre, de même que les capacités des industriels à traiter les demandes sont d’autres facteurs qui peuvent peser sur le rythme de réinjection.

D’un parc à l’autre, les délais vont fortement varier. Si le cas du VAB est souvent cité, la patience est de mise en ce qui concerne VBCI, « dont un volume important projeté lors de l’opération Barkhane est en attente de régénération ». A contrario, les 32 Griffon envoyés au Sahel devraient être plus rapidement disponibles car ceux-ci n’ont été engagés qu’à partir de l’été 2021. Selon le rapporteur, la réinjection des matériels au sein des forces devrait débuter courant 2024.

La refonte toujours en cours de l’engagement au Sahel redonnera un peu de souffle à l’armée de Terre. Elle a déjà facilité l’envoi de moyens en Roumanie, « notamment des VBCI qui vont pouvoir être réinjectés plus facilement dans l’opération Aigle », et d’aborder plus sereinement un exercice Orion appelé à mobiliser beaucoup de potentiel.

Derrière, l’armée de Terre poursuit son effort d’amélioration de la disponibilité technique opérationnelle de ses matériels (DTO). Malgré « une légère atténuation de la cible cette année », le niveau de DTO s’élève à plus de 90% en moyenne en OPEX et plus de 70% en métropole. Et si des fragilités subsistent, celles-ci seront progressivement atténuées par des commandes de pièce de rechange, les nouveaux contrats de soutien et la poursuite des livraisons de véhicules SCORPION. L’effort est aussi financier, avec 184 M€ de crédits supplémentaires fléchés vers l’EPM en 2023.

Crédits image : EMA

Pour le moment, le coût d’entretien des blindés Griffon est 2,4 fois plus élevé que celui des VAB

Pour le moment, le coût d’entretien des blindés Griffon est 2,4 fois plus élevé que celui des VAB

http://www.opex360.com/2022/10/25/pour-le-moment-le-cout-dentretien-des-blindes-griffon-est-24-fois-plus-eleve-que-celui-des-vab/


 

« S’agissant des seules dépenses d’investissement, l’écart de prix entre le VBMR Griffon et la régénération VAB visant à l’intégrer à la bulle SCORPION s’établit à 100’000 euros environ, soit 6,7 % seulement. Mais en tenant compte des coûts d’entretien et des durées d’amortissement de chacun de ces matériels, la possession d’un Griffon est plus économique que celle d’un VAB modernisé », avait ainsi souligné le député Thomas Gassiloud, dans un avis budgétaire publié en 2017. Et d’ajouter : « Aussi, en tenant compte de l’amortissement du véhicule, le coût d’un griffon s’établit-il à 156’600 euros par an, tandis que celui d’un VAB modernisé s’élève à 183’200 euros par an ».

D’autres arguments plaidèrent en faveur d’une accélération des livraisons de VBMR Griffon et Serval : d’abord, cela allait permettre d’améliorer la protection et l’efficacité des troupes. Ensuite, la régénération des VAB s’annonçait compliquée en raison du nombre de versions en service… Et il n’était pas certains qu’elle fût possible, compte tenu des modifications à leur apporter, tant en termes de masse que de mobilité et d’ergonomie.

Cependant, l’entretien de nouveaux équipements coûte cher au moment de leur mise en service. En général, l’évolution de ces coûts suit une courbe en forme de U : importante durant les premières années d’utilisation, elle se stabilise à la baisse pendant quelques temps, avant de repartir à la hausse à mesure que des obsolescences apparaissent au fil du temps. Qu’en sera-t-il pour les blindés de la gamme SCORPION?

Dans son avis sur les crédits alloués à l’armée de Terre pour 2023, le député François Cormier-Bouligeon a avoir constaté que « le soutien soutien des matériels Scorpion livrés est globalement satisfaisant, malgré une hausse importante des coûts de maintenance qui devrait se poursuivre en raison du niveau technologique et de la complexité technique des matériels de nouvelle génération comme le Griffon, ainsi que par la part plus importante de tâches confiées à l’industriel pour son soutien ».

Notant que la disponibilité des 35 Griffon déployés au Sahel dans le cadre de l’opération Barkhane a été « satisfaisante », le parlementaire note cependant qu’il « devra être tenu compte de ce ‘pic du MCO’ [Maintien en condition opérationnelle] à venir dans la programmation ». Ainsi, les chiffres qu’il a donnés dans son rapport, le Griffon « présente un coût d’entretien programmé des matériels [EPM] 2,4 fois plus élevé que le VAB » soit 1,2 million d’euros pour le premier contre 500’000 euros pour le second, en version infanterie.

Aussi, estime M. Cormier-Bouligeon, « l’enjeu principal des parcs Scorpion sera donc la fiabilisation de la programmation budgétaire pluriannuelle des besoins en EPM, ce qui exige au préalable une consolidation de leur coût de maintenance ». Cela étant, a-t-il continué, « si le coût du Griffon, premier parc livré, n’est pas encore stabilisé car une partie des pannes n’est pas couverte pas le forfait contractuel, le coût de maintenance du Serval sera, en principe, plus faible […], en cohérence avec sa dimension moindre ».

Quoi qu’il en soit, a-t-il souligné, il sera « nécessaire de veiller à la prise en compte du coût de soutien et des stocks de rechange, nécessaires à un engagement de haute intensité ».

Par ailleurs, la cohabitation d’équipements très modernes et vieillissants [VAB, AMX-10RC] donne lieu à des coûts de MCO importants. Cela « explique que les crédits investis dans l’entretien programmé du matériel ne produisent pas nécessairement une hausse homothétique de l’activité », fait observer le rapporteur.

Cela étant, par rapport au VAB, le Griffon apporte une plus-value opérationnelle significative, comme en témoigne le retour d’expérience [RETEX] de son engagement au Sahel.

Le Griffon se « distingue par son ergonomie permettant une utilisation simplifiée. Il intègre une première capacité de géolocalisation amie [GLA] et d’échange d’informations, apportant une véritable plus-value opérationnelle. Fonctionnant avec le poste radio de 4e génération [PR4G], les développements en cours portent sur l’intégration du SIC-S sur la nouvelle radio CONTACT », rapporte M. Cormier-Bouligeon. Aussi, il permet une « accélération des cycles de décision », tout en offrant une meilleure protection ainsi qu’une plus grande mobilité.

Comment Nexter compte remporter la bataille du MCO

Comment Nexter compte remporter la bataille du MCO


 

Activités de maintenance réalisées sur un char Leclerc, au sein des ateliers de Nexter, dans le respect des mesures sanitaires en vigueur (Crédits: Nexter)

Activités de maintenance réalisées sur un char Leclerc, au sein des ateliers de Nexter, dans le respect des mesures sanitaires en vigueur (Crédits: Nexter)


Élevé au rang de priorité absolue dans les premiers jours de la crise sanitaire, le soutien des matériels des Armées aura pu se maintenir sans discontinuer avec l’aide des équipes de Nexter. Un effort inédit rendu possible par la conjonction de compétences acquises de longue date et d’une évolution dans la réalisation des opérations de maintenance. Retour en détails sur la gestion du présent et la préparation de l’avenir avec Lilian Brayle, le « Monsieur MCO » du groupe versaillais. Diplômé de l’INSA de Lyon, celui-ci a fait ses armes au sein de Safran Helicopters Engines (ex-Turbomeca) et d’Airbus avant de prendre les rênes de la Direction des Services Clients (DSC) en juillet 2019.

 

Que représente l’activité de soutien au sein du groupe Nexter et comment s’opère le transfert de charge progressif entre les Armées et l’industriel ?

 

Le maintien en condition opérationnelle (MCO) n’est pas un sujet nouveau, qui serait abordé ce parce que c’est la tendance du moment. C’est un pilier au cœur de l’activité de Nexter depuis très longtemps, puisque nous concevons, produisons et soutenons des matériels et des systèmes dont la durée de vie est longue et qui comportent un niveau de complexité technologique important. Il appartient depuis longtemps à Nexter d’assurer le soutien opérationnel de ses produits pendant des décennies. Même si les périodes de développement peuvent paraître assez longues, c’est finalement très court par rapport au temps durant lequel Nexter doit assurer le MCO. Un MCO qui est donc dès l’origine dans l’ADN de la société et représente aujourd’hui environ 475 salariés pour la seule DSC. Cette activité représente environ 30% du chiffre d’affaires annuel du groupe. Une part qui est quelque peu diluée ces dernières années grâce aux contrats export majeurs gagnés par Nexter permettant une forte croissance du chiffre d’affaires du groupe.

 

Quand on regarde l’historique, on voit bien, notamment avec les grandes innovations dans le domaine du soutien forfaitaire, que Nexter est un acteur innovant. Il suffit de jeter un coup d’œil aux contrats liant Nexter et la SIMMT depuis une dizaine d’années pour se rendre compte du niveau de confiance élevé accordé à nos services. Pourquoi ce sujet devient-il de plus en plus d’actualité ? Cela est en grande partie dû au plan MCO-Terre 2025 lancé par le ministère des Armées et qui implique des partenariats plus importants entre l’armée de Terre et l’industrie. Cette politique se traduit par un transfert d’une partie des activités de maintenance industrielle depuis les forces, les régiments, la SIMMT ou encore le SMITer vers l’industrie. Pour Nexter, il s’agit d’un mouvement déjà engagé depuis longtemps, mais qui devient ici plus visible, plus médiatique.

 

L’un des temps forts a été la signature, à la fin de l’année 2019, de la charte de partenariat pour le MCO terrestre, qui entérine ces différents points et formalise l’état d’esprit nécessaire pour assurer cette symbiose entre l’État et l’industrie. C’est d’autant plus important que la mission de l’industrie se renforce pour assurer la continuité de l’activité opérationnelle des forces armées, dont dépend leur capacité d’intervention en OPEX. La notion de délégation, de confiance de l’État envers l’industrie, n’implique donc pas seulement des privilèges mais surtout des devoirs sur la valeur ajoutée, la transparence et la résilience dont on parle beaucoup ces dernières semaines.

 

À l’avenir, Nexter s’inscrit bien au-delà de la continuité puisque nous privilégions un très haut degré d’innovation, y compris dans le domaine du MCO. Celui-ci couvre en réalité des domaines d’activité très larges, ne se limitant pas seulement à la maintenance d’un véhicule. Désormais, les enjeux sont de plus en plus liés à l’anticipation et à la proactivité, c’est à dire utiliser tout notre savoir-faire et l’expérience acquise mais aussi des technologies nouvelles pour arriver à modéliser et anticiper les opérations de maintenance et celles impliquant la supply chain.

 

Le MCO ne s’arrêtant pas aux frontières nationales, des réflexions se poursuivent aussi sur la conduite des activités de soutien industriel au plus près des forces engagées en opération extérieure. Le message est, dans ce cas, toujours très clair : à chacun son métier. Pour un industriel, déployer des services à proximité du théâtre d’emploi de ses matériels n’est pas problématique jusqu’à un certain stade. Lorsque ce dernier est franchi, le militaire prend la place de l’industriel. Accompagner le soutien dans des zones d’intervention relève d’un autre métier. Nous déployons aujourd’hui des alternatives, des outils déportés capables de suppléer à l’envoi de personnels Nexter sur les terrains les plus à risques. Il s’agit de leviers tels que la télétransmission des données ou le télédiagnostic, qui existent déjà et qui permettent d’amener un niveau d’expertise très supérieur, au plus près des opérations. Sur le terrain, cela se manifeste également par l’apport de l’impression 3D. Nexter a ainsi participé en 2019 à une expérimentation menée par l’armée de Terre en mettant à disposition les fichiers nécessaires qui permettent de réaliser des pièces de certains matériels dans le cadre d’une opération extérieure. C’est une expérience qui se poursuit actuellement.

 

Comment se traduit votre action courante sur le terrain dans ce contexte particulier de crise sanitaire ?

 

Très concrètement, il ne s’agit pas d’une rupture pour Nexter car nous sommes restés très engagés dans tous les domaines du MCO auprès du SMITer, de la SIMMT et des différents régiments. Nous avons des projets de collaboration qui continuent sur l’organisation des transferts, mais aussi sur les problématiques de supply chain et, plus globalement, sur la disponibilité technique des matériels. Grâce au partenariat établi, nous sommes en train d’aller bien plus loin que de la « simple » maintenance. Tout dépend aussi de la maturité de la relation entre chaque industriel et les services de l’État. Pour Nexter, une relation très mature est déjà en place, de même qu’une activité industrielle historique. Nous nous dirigeons maintenant vers des partenariats visant une valeur ajoutée beaucoup plus complexe à obtenir, qui passera par l’anticipation susceptible d’apporter de la flexibilité et de valoriser davantage la disponibilité. S’y ajoute un travail de transparence de plus en plus exigeant pour permettre, en partageant toutes nos informations, de déterminer quels sont les leviers susceptibles d’aider à réaliser des gains de performance technique et économique. Nous communiquons beaucoup de RETEX concernant des pannes et des difficultés d’approvisionnement, de manière à pouvoir anticiper des décisions au meilleur prix.

 

Vous revenez plusieurs fois sur la notion de maintenance prédictive, un terme qui revient régulièrement sur le devant de la scène. Quelles solutions techniques Nexter développe-t-il à ce sujet ?

 

C’est effectivement un sujet dont on parle beaucoup, et depuis déjà un moment. Derrière le discours, nous constatons assez peu de réalisations concrètes en général. Là-dessus, Nexter fait des choses qui, à mon sens, sont très pragmatiques. Pour être précis, nous avons engagé il y a deux ans avec la SIMMT un projet baptisé ERMES qui consiste à équiper les véhicules blindés VBCI de boîtiers permettant le recueil de données qui sont retraitées a posteriori pour être capable, en fonction du RETEX, de travailler sur un plan de maintenance préventive. Donc, de comprendre l’impact de l’utilisation du véhicule sur sa fiabilité, par exemple. Cette logique s’inscrit à la fois au niveau du véhicule et au niveau d’un parc de véhicules. C’est à dire qu’au-delà de l’optimisation de la maintenance d’un véhicule, nous sommes aussi capables de gérer les opérations du parc. En fonction de la mission, on peut alors déterminer quels sont les véhicules les plus aptes à y participer. On franchit dès lors une étape supplémentaire en participant à l’optimisation de la mission.

 

Derrière ce projet ERMES conduit par Nexter, l’État poursuit un projet d’innovation ARTEMIS (Architecture de traitement et d’exploitation massive de l’information multi-source) impliquant d’autres industriels. C’est un projet pour lequel nous avons mis à disposition des jeux de données collectées dans le cadre d’ERMES et qui sont aujourd’hui en cours d’exploitation. Étendre notre projet à d’autres flottes de véhicules conçus par Nexter nous tient à cœur, mais ce n’est pas une décision qui revient à l’industriel seul. Le matériel ne nous appartient pas, nous ne sommes donc pas libres de l’immobiliser en partie pour une expérimentation. Toujours est-il qu’ERMES est parfaitement extrapolable sur d’autres véhicules actuels et futurs. Notre souhait est que la prise de maturité de ce système se fasse en coordination avec la DGA et la SIMMT pour pouvoir démontrer tout l’avantage de disposer d’un tel atout.

 

Continuité du MCO des moteurs d'engins blindés en contexte de crise Covid-19 (Crédits: Nexter)

Continuité du MCO des moteurs d’engins blindés en contexte de crise Covid-19 (Crédits: Nexter)


Ces nouvelles solutions innovantes ont-elles été d’emblée envisagées pour la maintenance des véhicules Scorpion ?

 

Les véhicules Scorpion ne sont pas nativement dotés d’un système tel que celui conçu dans le cadre du projet ERMES. Ces véhicules de dernière génération, le Jaguar en particulier, sont néanmoins capables de collecter une grande quantité de données. Celles-ci forment une base solide sur laquelle il sera aisé de venir connecter un système de maintenance prédictive dédié. La difficulté, en réalité, n’est pas de collecter les données mais plutôt de déterminer quelles sont les données pertinentes.

 

La multiplication exponentielle des données nécessite donc des compétences nouvelles au sein des équipes Nexter, notamment en big data…

 

Absolument, c’est une évolution entamée il y a plusieurs années. Quand on parle de MCO, on pense directement à la Direction des Services Clients puisque nous sommes en première ligne. Ce qu’il faut savoir, c’est que pour réaliser nos missions, nous avons besoin que les autres directions  du groupe Nexter soient aussi présentes sur cet axe stratégique. Toute avancée dans le domaine du MCO impactera notre bureau d’études, les fonctions programmes, les achats, etc. afin d’agir en cohérence auprès du client.

 

Reste-t-il des marchés de MCO à décrocher en France, notamment en rapport avec les flottes Scorpion ?

 

Rien n’est jamais acquis et aujourd’hui, même si Nexter bénéficie de contrats solides assurés par un parc important, l’état d’esprit reste de continuer à prouver notre valeur ajoutée pour s’assurer de la pérennité de cette activité. Il faut constamment remettre en question la performance vis-à-vis du client, c’est un message que nous transmettons au quotidien à nos collaborateurs et à nos partenaires. Les contrats initiaux dans le cadre de Scorpion, qui ont été conçus avec la DGA, prévoient une part de MCO. Le principe du soutien forfaitaire est donc déjà d’actualité. Ce qui n’est pas encore défini dans ces contrats, c’est plutôt l’activité dite de maintenance industrielle, qui recouvre cette fameuse répartition des activités industrielles entre l’État et l’industriel. Le contrat actuel permet de fournir un soutien qui perdurera pendant quelques années, l’heure n’est donc pas à l’urgence.

 

Il faut néanmoins rester pragmatique et  avoir à l’esprit que, lorsque l’armée de Terre voudra, par exemple, déployer des matériels en opération extérieure, il faudra prévoir de possibles opérations de régénération au-delà de la maintenance calendaire régulière. Ce premier déploiement représente donc l’horizon autour duquel un concept industriel devra être mis en place par l’État en collaboration avec l’industrie. S’il détient tous les contrats, le GME Scorpion n’est pas pour autant une entité opérationnelle. Chaque partenaire hérite donc d’une tâche très claire. Dans la pratique, aucun des trois partenaires qui composent ce GME ne peut réaliser un MCO efficient sans l’assistance des deux autres. Le modèle dans lequel cette relation en matière de soutien se fera reste à définir. D’autres programmes identiques ont déjà été établis avec succès, tel que le VBCI issu d’un GME Arquus-Nexter et pour lequel Nexter assure la maîtrise d’œuvre de la totalité du soutien. Nous travaillons cependant tout naturellement avec Arquus, qui fournit l’assistance technique et les matériels nécessaires.

 

La question du soutien se posera d’ici peu en Belgique pour les matériels acquis au travers du partenariat CaMo, c’est un marché pour lequel Nexter doit se positionner auprès d’acteurs industriels belges ?

 

Contrairement au programme Scorpion, Nexter est le maître d’œuvre unique du partenariat CaMo. La légitimité du groupe est donc différente vis-à-vis du client belge mais le partenariat industriel établi dans le cadre du GME Scorpion reste la base sur laquelle ce MCO viendra s’établir.

 

Des contacts préliminaires ont été établis avec l’industrie belge, mais aucun modèle n’a été défini pour l’instant. Pour livrer une solution de MCO efficace et pertinente dans le cadre de CaMo, il faudra deux choses : d’une part de fortes synergies avec le programme France de manière à optimiser les coûts à chaque fois que cela est possible et d’autre part, il faut une structure de service de proximité pour avoir un service efficace et pertinent tant en France qu’en Belgique. Il faudra donc créer des synergies grâce, par exemple, au partage d’une partie infrastructures et de l’agilité au travers d’une composante locale. Dans ce cadre-là, nous sommes naturellement en quête d’un partenaire local en Belgique pour nous aider à gérer cette mission de proximité.

 

L’épidémie de Covid-19 n’est pas encore dernière nous, quelles sont les activités de soutien maintenues dès les premiers jours de la crise, selon quelles priorités et avec quel dispositif de protection ?

 

C’est effectivement une situation inédite. Nous travaillons beaucoup à l’anticipation des différents scénarii de crise. Celui-ci n’était pas explicitement prévu. Cependant, nos différents plans de continuité des activités ont très bien fonctionné dès le 16 mars.

 

Globalement, Nexter a réussi à offrir un service continu et cela grâce à la mobilisation de tous les services du groupe. Tout le monde s’est mis en ordre de bataille dès le premier jour afin d’aider la DSC à remplir sa mission. Différentes cellules de crise ont été mises en place au niveau des établissements, mais aussi au niveau de la société avec un comité de décision ad-hoc. Ces décisions initiales ont été déterminantes pour s’assurer de la continuité des opérations essentielles et ceci, dans le respect de toutes les mesures sanitaires imposées au fur et à mesure du développement de la crise.

 

Sur le terrain, la première priorité fut la mise en place des mesures de protection du personnel, y compris le télétravail lorsque cela était possible. Concrètement, le travail à domicile aura concerné 100% des activités tertiaires. Pour les autres, le maintien en poste n’était possible qu’au travers de la distribution de kits de protection individuelle et de la mise en place de règles de distanciation physique. Cela passe par ailleurs par la nécessaire réorganisation de tous les postes de travail et par de nouveaux roulements d’équipe pour des activités de type plateforme logistique, par exemple. C’est un dispositif qui s’est avéré nécessaire afin de disposer d’un personnel de réserve au cas où la contamination touche l’une des équipes.

 

Protéger nos employés fut et reste un défi permanent, notamment en ce qui concerne l’approvisionnement en équipements de protection qui, comme vous le savez, est très problématique. Dès le début de la crise, nous nous sommes, comme tous les industriels, lancés à la recherche de fournisseurs avant de passer des commandes massives de masques de manière à pouvoir subvenir durablement aux besoins. Le démarrage aura été compliqué, en raison de la difficulté de disposer d’un calendrier fiable, les quantités requises n’étant pas disponibles du jour au lendemain. Aujourd’hui, nous avons identifié un flux nécessaire et suffisant à la reprise de notre activité qui s’améliore chaque jour. Ce qui était considéré comme un risque majeur dans les premiers jours de la crise est devenu quelque chose que nous gérons avec attention. La pression baisse sur le sujet et, après avoir vécu une phase de distribution au compte-gouttes, nous commençons à voir arriver des quantités importantes de masques. Pour pallier ces difficultés, des échanges eu lieu au niveau de l’État et des différents groupements industriels comme le GICAT pour permettre à chacun de continuer à travailler.

 

Au-delà des mesures de protection des personnels, il a fallu déployer en même temps un éventail de moyens de sécurité informatique pour parer aux risques éventuels d’attaques cyber liés au déploiement massif du télétravail. Cet élément a finalement très peu ralenti les opérations puisque nous avons réussi à effectuer l’ensemble des missions. Au sein de notre centre opérationnel de Roanne par exemple, que l’on appelle le COSS et où arrive l’ensemble des demandes du client, nous avons mis en place un dispositif qui consiste à placer 75% des équipes en télétravail et à en conserver 25% sur site sur la base d’un roulement. Grâce à cette organisation, nous avons pu traiter 100% des demandes. Cette continuité concerne également la question de l’envoi des pièces dont l’activité n’a été suspendue que le temps de mettre en place les mesures de protection sanitaire et de réaménager les postes de travail. On peut également relever les difficultés que rencontrent nos collaborateurs pour se loger lorsqu’ils partent en déplacement dans les unités.

 

Tout cela concerne l’activité interne de l’entreprise, mais il a fallu aussi communiquer de manière proactive avec nos clients, à commencer par la SIMMT, et mettre en place un échange permanent pour s’assurer de répondre aux priorités.  Nous avons mis en place un dispositif miroir avec notre direction des achats pour être capables de partager la même information et conserver la maîtrise de notre chaîne d’approvisionnement. Enfin, des points de situation sont effectués régulièrement avec nos clients et nos fournisseurs pour les rassurer sur les mesures sanitaires appliquées par le groupe et pour leur donner un état des lieux de nos capacités logistiques.

 

Poursuite des activités de supply chain grâce à la mise en place des mesures barrières sur le site de Roanne (Crédits: Nexter)

Poursuite des activités de supply chain grâce à la mise en place des mesures barrières sur le site de Roanne (Crédits: Nexter)


Avec des difficultés vécues auprès de certains fournisseurs ?

 

Le flux de communication avec nos fournisseurs est une chose, l’apport continu en pièces en est une autre. L’avantage de notre dispositif est qu’il nous a permis de constater immédiatement et en temps réel quelle était la partie de la supply chain qui continuait à fonctionner, celle connaissant un ralentissement et quelles étaient les sociétés contraintes à l’arrêt temporaire ou prolongé, et, en conséquence, à quelle vitesse l’activité pouvait reprendre. En cas d’activité réduite, nous avons communiqué rapidement sur les priorités de nos clients de manière à leur permettre de concentrer leurs efforts sur les segments à forte valeur ajoutée. Nous avons eu des fournisseurs forcés de fermer temporairement et de chercher des solutions alternatives pour minimiser l’impact sur le client. Tout cela, bien entendu, en fonction des stocks disponibles. Les flux de la supply chain dans l’industrie de défense terrestre ne sont absolument pas tendus comme nous pourrions le voir dans l’industrie automobile par exemple. Il existe des stocks tampons qui permettent de se maintenir, mais pour une durée limitée. Il est inenvisageable d’espérer un niveau de service optimal sans disposer d’une supply chain en ordre de marche. Aujourd’hui, de gros efforts sont consentis et la chaîne d’approvisionnement se remet au travail. Nexter a pu assurer une bonne qualité de service malgré une baisse sensible de la capacité de production. C’est essentiel désormais d’accompagner la reprise du flux chez de nos sous-traitants. 

 

Hormis le cas particulier de la France, comment s’est organisé le soutien des clients exports ?

 

Effectivement, cette crise est à voir dans sa globalité. Les principes appliqués à la France ont donc été reproduits avec nos clients étrangers, c’est à dire un contact permanent avec les clients et fournisseurs étrangers et la continuité des opérations en suivant les règles locales. La complexité supplémentaire a été de prendre en compte des mesures différentes d’un pays à l’autre. L’appui de nos structures de soutien locales aura été primordial pour la prise en compte de mesures parfois extrêmement sévères par rapport à ce que nous avons connu en France.

 

Avec pour résultat un service assuré sans la moindre interruption depuis le début de la crise…

 

De fait, l’activité de soutien n’a souffert aucun jour de rupture. Je pense que cela représente une performance qui a été extrêmement visible et reconnue. En témoignent les messages d’encouragement de la ministre des Armées. Cela n’a été rendu possible que grâce à un engagement permanent de l’ensemble des personnels de Nexter. Dans le cadre de la charte de partenariat et du plan MCO-T 2025, Nexter a vraiment démontré sa capacité à être un partenaire fiable. Au tout début de cette crise,  la direction de la SIMMT a convoqué une conférence téléphonique de crise avec les principaux partenaires du MCO-T. Elle nous a rappelé que « jusqu’à présent, nous  étions dans la prévision et l’intention, mais qu’aujourd’hui c’était  l’heure de vérité.  Dans des moments comme celui-ci,  les armées voient les efforts accomplis et réalise si oui ou non la confiance est méritée ». Je pense que, en ce qui conerne Nexter, nous avons été au rendez-vous.

 

La France est officiellement entrée en déconfinement progressif le 11 mai, quelles sont les adaptations envisagées pour instaurer une nouvelle normalité au sein du groupe Nexter ?

 

Nous ne relâchons pas notre vigilance. Il n’est surtout pas envisagé de revenir à la normale dès maintenant. Pour nous, la protection de nos personnels est la priorité et le strict respect des règles nationales et internes restera de rigueur. La politique reste appliquée uniformément à l’échelle de l’entreprise, et c’est à cette échelle que nous évaluerons le moment venu un possible retour progressif à la normalité.

 

Dans la prochaine étape, il nous faudra gérer le retour au travail, lorsque c’est possible, de nos collaborateurs. Avec pour première priorité l’assurance de conditions sanitaires optimales pour tous nos employés. Il faudra ensuite revenir à un modus operandi capable de restaurer le niveau d’efficacité industrielle d’avant-crise, un niveau qui a forcément été affecté. Cette démarche  a déjà  commencé et se fera de manière progressive : elle prendra  des semaines, voire des mois.